Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

                                                                                          Référence : 2010 COMC 179

                                                                                          Date de la décision : 2010-10-27

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Hortilux Schreder B.V. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1,064,360 pour la marque de commerce HORTILUX au nom d’Iwasaki Electric Co., Ltd.

[1]               Le 23 juin 2000, Iwasaki Electric Co., Ltd. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement visant la marque de commerce HORTILUX (la Marque). Cette demande était fondée sur l’emploi de la marque au Canada depuis le 31 décembre 1997 en liaison avec des lampes électriques (les Marchandises).

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 9 janvier 2002. Le 31 mai 2002, Hortilux Schreder B.V. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’enregistrement. La Requérante a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante.

[3]               La preuve de l’Opposante est constituée de l’affidavit de Johan de Leeuw, souscrit le 28 février 2003, de l’affidavit d’Aaron Edgar, souscrit le 18 décembre 2005, de l’affidavit de Molly Bragg, souscrit le 28 novembre 2006 et d’un second affidavit souscrit par Aaron Edgar le 17 mai 2007.

[4]               L’Opposante a également soumis deux affidavits souscrits par Teunis Cornelis van den Dool. Étant donné, toutefois, que M. van den Dool ne s’est pas présenté à son contre‑interrogatoire, ses affidavits ont été renvoyés à l’Opposante (voir la décision rendue par le registraire le 4 juillet 2008).

[5]               Je relève pareillement que, bien que Mme Bragg ne se soit pas présentée elle non plus au contre‑interrogatoire ordonné le 22 février 2007, son affidavit figure encore au dossier. Aux termes du paragraphe 44(5) du Règlement sur les marques de commerce, DORS/96-195, cet affidavit ne fait pas partie du dossier et il sera renvoyé à l’Opposante.

[6]               La preuve de la Requérante se compose de l’affidavit de Keith T.S. Ward, souscrit le 30 octobre 2003, de l’affidavit de Len Thomas, souscrit le 19 avril  2007 et de l’affidavit de Peter Berkhout, souscrit le 20 avril 2007.

[7]               M. Ward a été contre‑interrogé sur affidavit. La transcription du contre‑interrogatoire de même que les pièces produites et les réponses aux engagements ont été versées au dossier.

[8]               Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit, et elles ont été représentées avec compétence à l’audience.

Déclaration d’opposition

[9]               Les motifs d’opposition modifiés reposent sur les alinéas 30b) et i) et 16(1)a) et c) et sur l’art. 2 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi).

[10]           Les dates pertinentes applicables aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         alinéas 30b) et i) – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.)];

         alinéas 6(1)a) et c) – la date de premier emploi revendiquée dans la demande [voir le paragraphe 16(1)];

          article 2 – la date de production de l’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)].

[11]           Je commencerai mon analyse par un résumé des éléments de preuve les plus pertinents selon moi.

La preuve de l’Opposante

Affidavit de Johan de Leeuw

[12]           Johan de Leeuw se présente comme le directeur général de P.L. Light Systems Canada Inc. (P.L. Light), filiale en propriété exclusive de Hortilux Schreder B.V. (auparavant Hortilux B.V.). Son affidavit indique que l’Opposante, dont le siège est aux Pays‑Bas, exploite une entreprise de systèmes d’éclairage et d’éclairage d’appoint pour serres.

[13]           Au Canada, l’Opposante vend les appareils d’éclairage HORTILUX et HORTILUX SCHREDER par l’intermédiaire de sa filiale canadienne P.L. Light. M. de Leeuw déclare que P.L. Light est autorisée par licence à employer la marque de commerce HORTILUX au Canada en liaison avec des appareils d’éclairage et des réflecteurs, et il explique qu’aux termes de l’accord de licence, Hortilux Schreder B.V. contrôle les caractéristiques et la qualité de ces marchandises. Je reviendrai plus loin sur ce point.

[14]           M. de Leeuw indique que P.L. Light importait des réflecteurs HORTILUX de Hortilux Schreder B.V. bien avant le 31 décembre 1997. À leur arrivés au Canada, les réflecteurs sont assemblés aux appareils d’éclairage et distribués dans toute l’Amérique du Nord. Sont joints comme pièces C et D à son affidavit des échantillons de facture et des spécimens censés indiquer de quelle façon les marques sont employées.

Affidavits d’Aaron Edgar, souscrits le 18 décembre 2005 et le 17 mai 2007

[15]           L’affidavit du 17 mai 2007 de ce déposant incorpore essentiellement les renseignements contenus dans son premier affidavit, souscrit le 18 décembre 2005, et semble également remplacer l’affidavit de Molly Bragg. Le déposant déclare être stagiaire dans le cabinet des agents de l’Opposante. Son affidavit sert à mettre en preuve les résultats d’une recherche effectuée au moyen de Wayback Machine, où sont archivées des copies exactes de pages Web telles qu’elles existaient à une date déterminée. Il a trouvé une page donnant accès à toutes les versions archivées du site Web www.eyelighting.com (pièce I). La pièce K jointe à l’affidavit est une copie papier d’une page Web concernant Eye Lighting International of North America, Inc. portant la date du 12 octobre 1999. Selon M. Edgar, le terme HORTILUX ne figure dans aucune des copies archivées du site Web www.eyelighting.com antérieures au 12 octobre 1999.

La preuve de la Requérante

Affidavit de Keith T.S. Ward

[16]           Keith T.S.Ward déclare être le président et directeur de l’exploitation de Eye Lighting International of North America, Inc. (Eye Lighting), une société américaine filiale de la Requérante, entreprise de haute technologie établie à Tokyo. Il explique que la Requérante exporte les Marchandises à ses distributeurs/filiales, notamment Eye Lighting.

[17]           Il affirme que la Requérante a accordé à Eye Lighting une licence exclusive d’utilisation de la Marque au Canada, mais qu’elle conserve le contrôle direct sur la nature et la qualité des Marchandises vendues au Canada par cette dernière. Bien que l’accord de licence n’ait pas été produit en preuve, les réponses données en contre‑interrogatoire me convainquent qu’il s’agit bien d’une utilisation en vertu d’une licence accordée par la Requérante, conformément aux dispositions du paragraphe 50(1) de la Loi.

[18]           M. Ward explique que la Requérante œuvre principalement dans le domaine de l’éclairage et que son entreprise porte sur plus de 3 000 produits différents, dont des lampes, des appareils d’éclairage, des dispositifs électroniques, du matériel de communication et des systèmes de faisceaux ultraviolets ou de faisceaux d’électrons. Un segment de l’entreprise de la Requérante se rapporte à des lampes de serre spécialisées portant la Marque. Une brochure décrivant les lampes de serre HORTILUX est jointe à l’affidavit comme pièce A.

[19]           M. Ward déclare que depuis les quatre dernières années (en partant de 2003), la valeur en gros brute totale des Marchandises en Amérique du Nord excède 9 millions de dollars U.S. Le coût unitaire moyen se situe entre 25 et 40 dollars US. Pendant les exercices financiers 1997 à 2002, le chiffre de vente des Marchandises au Canada a connu une augmentation spectaculaire, passant de 926 $ en 1997 à 3 428 854 $ en 2001. Le principal client/représentant/distributeur de Eye Lighting au Canada est Standard Products Inc. La pièce B jointe à l’affidavit est une copie de la facture originale établie par Eye Lighting pour Standard Products Inc. en date du 31 décembre 1997, et la pièce C renferme d’autres échantillons de factures.

Affidavit de Len Thomas

[20]           Len Thomas est directeur du marketing de Eye Lighting depuis janvier 2006, il était auparavant chef de produit dans le département du marketing. De 1994 à 2000, il a travaillé dans l’ingénierie et dans la publicité, et a notamment travaillé à la promotion des Marchandises.

[21]           Son affidavit sert à mettre en preuve les étapes franchies au cours de l’été et de l’automne 1997 en vue de l’utilisation de la Marque, c’est‑à‑dire la sélection de la Marque, le graphisme du monogramme illustrant la Marque, la commande du tampon de caoutchouc à l’effigie de la Marque à employer sur les Marchandises, lequel a été reçu à l’automne 1997. Le déposant a également travaillé au graphisme du manchon devant servir à l’emballage, lequel portait lui aussi la Marque. Deux cent quatre-vingts de ces manchons ont été employés en novembre 1997 [voir les pièces A, B-1 à B-3, C, D et E].

[22]           L’affidavit de M. Thomas sert également à expliquer que des modèles HORTILUX plus récents ont été mis en marché depuis cette date.

[23]           En outre, le déposant atteste que Eye Lighting a vendu des Marchandises à Standard Products Inc. le 15 octobre et le 31 décembre 1997 (pièces F et G).

Les motifs d’opposition

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b)

[24]           L’Opposante fait valoir que la Requérante n’emploie pas la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises depuis 1997, en sorte que sa demande ne remplit pas les exigences de l’alinéa 30b) de la Loi.

[25]           Pour que ce motif soit pris en considération, l’Opposante doit s’acquitter de son fardeau de preuve initial. En matière de non‑conformité à l’alinéa 30b), ce fardeau est moins exigeant parce que les faits se rapportant au premier emploi de sa marque par un requérant relèvent davantage de la connaissance de ce dernier [voir Tune Masters c. Mr. P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 C.P.R (3d) 84 (C.O.M.C.)].

[26]           Pour faire la preuve qui lui incombe, l’Opposante a déposé l’affidavit Edgar du 17 septembre 1997 relatif aux résultats de la recherche effectuée au moyen de WayBack Machine, et elle soutient que ce n’est que le 12 octobre 1999, soit deux ans après la date de premier emploi déclarée par la Requérante, que la Marque a été utilisée en liaison avec les Marchandises dans le site Web de Eye Lighting. Qui plus est, cette utilisation figure sous la rubrique « What’s New ». L’Opposante estime que cette preuve lui permet de satisfaire à son fardeau de preuve initial.

[27]           Je suis consciente que l’exactitude de Wayback Machine n’est pas absolue et que le recours à cet outil peut notamment soulever des questions de ouï‑dire. M. Edgar explique cependant qu’aucun des employés d’Internet Archive (le site Web prenant en charge WayBack Machine) ne pouvait souscrire un affidavit et se présenter à un contre‑interrogatoire. Il a en outre été jugé que la preuve présentée en recourant à cet outil pouvait généralement être considérée comme fiable [ITV Technologies Inc. c. WIC Television Ltd., 29 C.P.R. (4th) 182; Candrug Health Solutions Inc. c. Thorkelson (2007), 60 C.P.R. (4th) 35, infirmé pour d’autres motifs, 38 C.P.R. (4th) 481].

[28]           Compte tenu de ce qui précède et de la légèreté du fardeau initial reposant sur l’Opposante relativement à l’alinéa 30b) de la Loi, j’ai accordé un certain poids à cette preuve, et j’estime qu’elle est suffisante pour mettre en cause la date de premier emploi déclarée par la Requérante.

[29]           Par conséquent, il incombe à la Requérante de démontrer suivant la prépondérance des probabilités que sa demande satisfait aux exigences de l’alinéa 30b) de la Loi.

[30]           Je suis d’avis que la Requérante l’a fait en produisant, premièrement, des éléments de preuve réfutant les résultats générés par Wayback Machine et, deuxièmement, des éléments de preuve démontrant qu’elle employait sa Marque le 31 décembre 1997.

[31]           L’affidavit Thomas explique clairement que des Marchandises portant la Marque étaient en vente au Canada depuis le 31décembre 1997 au moins et ont effectivement été vendues, mais que des modèles HORTILUX nouvellement conçus ont été mis en marché plus tard, notamment en 1999. La pièce K jointe à l’affidavit est une page tirée d’une brochure de Eye Lighting datée de juin 1999. M. Thomas signale l’explication qui s’y trouve, à savoir que [traduction] « la lampe 400 watt HORTILUX Super HPS/EN de EYE comporte un tube à arc HORTILUX nouvellement conçu … ». Autrement dit, cette pièce fait état de l’introduction d’un nouveau modèle de lampe, ce qui concorde avec la rubrique « What’s New » figurant sur la page Web du 12 octobre 1999 et ne veut pas nécessairement dire que les Marchandises n’ont été mises en marché qu’à cette date. La Requérante a donc expliqué cet écart entre les dates de façon satisfaisante.

[32]           J’estime en outre que la Requérente a présenté des éléments de preuve positive établissant qu’elle utilisait sa Marque le 31 décembre 1997, date déclarée de premier emploi.

[33]           Le mot « emploi » est ainsi défini à l’article 2 de la Loi :

« emploi » À l’égard d’une marque de commerce, tout emploi qui, selon l’article 4, est réputé un emploi en liaison avec des marchandises ou services.

[34]           L’article 4 de la Loi énonce ce qui suit :

4.(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[35]           L’Opposante soutient que la Requérante n’employait pas sa Marque le 31 décembre 1997 parce que  :

         cette dernière n’a pas établi que l’une quelconque des marchandises vendues à la date déclarée de premier emploi ou vers cette date l’a été en liaison avec la Marque et dans la pratique normale du commerce;

         elle n’a pas établi que l’une quelconque des Marchandises avaient été reçues par Standard Products Inc. à la date déclarée de premier emploi.

[36]           MM. Ward et Thomas ont tous deux attesté que Eye Lighting a vendu des Marchandises à Standard Products Inc. le 31 décembre 1997. Une copie de facture portant cette date et constatant une telle vente est jointe à leur affidavit respectif. Bien que la Marque ne figure pas clairement sur cette facture, M. Thomas a témoigné au sujet des démarches visant l’emploi de la Marque entreprises pendant l’été et l’automne 1997. Il a également indiqué que, pour autant qu’il le sache, la Marque figurait sur les Marchandises vendues à Standard Products Inc. le 31 décembre 1997 ou sur leur emballage.

[37]           Pour ce qui est de M. Ward, il déclare, au paragraphe 10 de son affidavit, que Eye Lighting emploie régulièrement la Marque depuis 1997 au moins et qu’elle continuera à le faire en 2003 et dans les années subséquentes, ajoutant que la Marque occupe une place bien en vue sur les étiquettes et les emballages des Marchandises ainsi que sur le matériel promotionnel ou de vente.

[38]           La preuve, prise dans son ensemble, me convainc que la Marque figurait sur les Marchandises et sur leur emballage à la date déclarée de premier emploi. Je suis pareillement convaincue que les ventes ont été réalisées dans la pratique normale du commerce, comme on le verra plus loin.

[39]           Je passe à présent à l’examen de l’argument de l’Opposante selon lequel, même si la Marque figurait bien sur les Marchandises au moment de leur transfert, la date de premier emploi la plus ancienne possible est la date à laquelle les marchandises sont parvenues à Standard Products Inc. au Canada. L’Opposante soutient à ce égard qu’il est peu probable qu’une commande passée auprès d’une entreprise de Cleveland (Ohio) [Eye Lighting] le 31 décembre 1997 soit livrée à une entreprise de VMR (Québec) [Standard Products Inc.] le même jour. Il appert que VMR est l’acronyme de Ville de Mont‑Royal, municipalité de l’île de Montréal (Québec).

[40]           Il est ressorti du contre‑interrogatoire de M. Ward que :

         il n’a pas de connaissance directe de la facture en date du 31 décembre 1997 produite comme pièce B (q. 44 et 46);

         il n’a pas de connaissance directe de l’envoi mentionné dans la facture en date du 31 décembre 1997 (q. 47‑48);

         il ne peut affirmer avec certitude ce que les mots [traduction] « date de la commande » inscrits sur la facture veulent dire, mais il croit qu’il s’agit du lendemain du jour où les marchandises partent de l’usine de Eye Lighting (q. 53, 55, 57, 59 et 60);

         il ne sait pas quand les marchandises expédiées à Standard Products Inc. le 31 décembre 1997 sont arrivées à destination (q. 62);

         la Requérante a pris sous réserve la demande de production de tout document prouvant la réception par Standard Products Inc. de l’envoi du 31 décembre 1997 (q. 63, 64 et 65); la réponse qu’elle a finalement donnée était [traduction] « non disponible ».

[41]           Suivant le paragraphe 4(1) de la Loi, il faut un transfert effectif de possession pour que l’on considère qu’il y a emploi au moment du transfert. Ni une entente ni une commande n’équivalent à un emploi [Bilsom International Ltd. c. Cabot Corp. (1991), 36 C.P.R. (3d) 92 (C.O.M.C.)]. Dans l’affaire Manhattan Industries Inc. c. Princeton Manufacturing Ltd, (1971) 4 C.P.R. (2d) 6 (C.F. 1re inst.), la Cour a jugé que le transfert de possession ne s’effectuait que lorsque le destinataire canadien prenait effectivement possession des marchandises. En l’espèce donc, il fallait, pour établir l’emploi de la Marque au Canada le 31 décembre 1997, démontrer que les marchandises étaient arrivées à destination à cette date, ce qui n’a pas été fait.

[42]           Je ne perds pas de vue, cependant, la pièce F jointe à l’affidavit Thomas, consistant en une copie des registres de Eye Lighting indiquant que deux appareils avaient été vendus à Standard Products Inc. le 15 octobre 1997 pour une somme nulle. Bien qu’il s’agisse d’une vente sans contrepartie, il est établi que de telles opérations peuvent constituer un emploi dans la pratique normale du commerce à la condition d’êtres suivies d’autres ventes, ce qui est le cas en l’espèce [voir Canadian Olympic Association c. Pioneer Kabushiki Kaisha (1992), 42 C.P.R. (3d) 470 (C.O.M.C.)]. M. Thomas déclare en outre que, pour autant qu’il se rappelle, la Marque était apposée sur les Marchandises vendues à Standard Products Inc. le 15 octobre 1997 ou sur leur emballage. Par conséquent, bien que la vente du 31 décembre 1997 ne puisse être établie au moyen de pièces démontrant l’arrivée des marchandises au Canada à cette date, j’estime que la Requérante a effectivement employé la Marque au Canada deux mois avant la date déclarée de premier emploi, ce qui a mené à la vente subséquente de Marchandises le 31 décembre 1997.

[43]           Je conclus donc que la Requérante a établi comme il le lui incombait qu’elle s’est conformée aux exigences de l’al. 30b) de la Loi. Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[44]           En se fondant sur l’al. 30i), l’Opposante a affirmé que la Requérante ne pouvait être convaincue d’avoir le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises décrites dans sa demande.

[45]           Tel qu’il est formulé, ce motif d’opposition n’est pas fondé et, eût‑il même été correctement invoqué, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i) n’est retenu que dans des circonstances exceptionnelles, telle la mauvaise foi démontrée du requérant, lorsque ce dernier a fourni la déclaration prévue par cette disposition [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.)]. Comme cette preuve n’a pas été faite, le motif est rejeté.

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a)

[46]           L’Opposante soutient que la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement car, à la date de production de sa demande, la Marque créait de la confusion avec les marques HORTILUX et HORTILUX SCHREDER de l’Opposante antérieurement employées au Canada par cette dernière. Je constate que l’Opposante ne précise pas en liaison avec quelles marchandises elle aurait employé ses marques, mais la preuve au dossier permet de déduire qu’il s’agit de réflecteurs (voir paragraphe 5 de l’affidavit de Leeuw).

[47]           Pour s’acquitter de son fardeau initial, l’Opposante doit prouver qu’elle employait ses marques au Canada avant le 31 décembre 1997. M. de Leeuw affirme que sa société importait ces accessoires d’éclairage au Canada bien avant cette date. La pièce B jointe à son affidavit est constituée d’échantillons représentatifs de factures établies entre P.L. Light et Hortilux B.V., factures qui, selon le témoin, étaient envoyées en même temps que les marchandises importées au Canada. La facture la plus ancienne porte la date du 26 août 1997. En dépit de l’affirmation de M. de Leeuw selon laquelle les factures accompagnaient les réflecteurs, je constate que les marques de commerce n’y figurent pas. Je remarque également que M. de Leeuw n’indique pas si les marques de commerce étaient apposées sur les marchandises ou sur leur emballage.

[48]           De plus, les spécimens produits dans la pièce D, à savoir une carte d'affaires, une feuille de papier à en‑tête et du matériel promotionnel, ne montrent pas de quelle manière les marques de commerce HORTILUX et HORTILUX SCHREDER ont été employées en liaison avec les réflecteurs et ne remplissent pas les conditions pour être considérés comme des spécimens établissant un emploi au sens du paragraphe 4(1) de la Loi.

[49]           Qui plus est, en dépit de la déclaration de fait de M. de Leeuw selon laquelle l’accord de licence faisait en sorte que Hortilux Schreder B.V. contrôlait les caractéristiques et la qualité des appareils d’éclairage et réflecteurs, je constate que ledit accord n’a pas été produit en preuve. Sans compter que M. de Leeuw n’explique d’aucune façon comment ce contrôle est exercé pas plus qu’il ne détaille les mesures prises pour maintenir les caractéristiques et assurer la qualité des marchandises [voir Pernod Ricard c. Molson Canada 2005 (2007), 60 C.P.R. (4th) 338 (C.O.M.C.)]. Je suis donc d’avis que l’emploi des marques de l’Opposante, même s’il avait été démontré, n’aurait pas profité à celle‑ci en application du paragraphe 50(1) de la Loi.

[50]           Pour toutes ces raisons, j’estime que l’Opposante n’a pas démontré l’emploi de ses marques de commerce au Canada. Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)c)

[51]           L’Opposante a avancé que la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement parce qu’à la date de premier emploi déclarée dans la demande la Marque créait de la confusion avec le nom commercial HORTILUX SCHREDER de l’Opposante, antérieurement employé au Canada.

[52]           Pour satisfaire à son fardeau initial, l’Opposante devait démontrer qu’elle employait le nom commercial HORTILUX SCHREDER avant le 31 décembre 1997, ce qu’elle n’a pas fait à mon avis. La facture la plus ancienne dont on peut dire qu’elle établit l’emploi du nom commercial au Canada, jointe comme pièce C à l’affidavit de M. de Leeuw, est datée du 6 avril 1999, soit bien après la date de premier emploi déclarée de la Requérante.

[53]           En conséquence, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial, et ce motif est lui aussi rejeté.

Le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

[54]           L’Opposante a soutenu que la Marque n’est pas distinctive en ce qu’elle ne distingue pas véritablement les Marchandises de la Requérante des marchandises et du commerce de l’Opposante et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi.

[55]           Pour faire la preuve qui lui incombe à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer qu’à la date de production de l’opposition ses marques étaient devenues suffisamment connues pour priver la Marque de caractère distinctif [Motel 6, Inc. c. No 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.); Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.); et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412 (C.A.F.)]. Pour les raisons déjà exposées, le témoignage de M. de Leeuw est insuffisant et trop imprécis, et il ne permet pas à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve relativement à ce motif.

[56]           Par conséquent, le motif est rejeté.

Décision

[57]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

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Lynne Pelletier

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

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