Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2011 COMC 258

Date de la décision : 2011‑12‑16

DANS L'AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par 24 Hour Glass Ltd. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1 320 485 pour la marque de commerce ON SET GLASS & Dessin au nom de On Set Glass Inc.

 

[1]               Le 17 octobre 2006, On Set Glass Inc. (la Requérante) a produit une demande d'enregistrement pour la marque de commerce ON SET GLASS & Dessin (la Marque), reproduite ci-dessous.

[2]               La demande d'enregistrement concernant la Marque est fondée sur l'emploi au Canada depuis au moins juillet 1998 en liaison avec les services suivants :

Vente en gros et au détail de produits en verre plat, trempé, d’automobiles, réfléchissant et de vitrine, produits pour teinter le verre et produits en verre dans le domaine du cinéma utilisés dans la production de films et d’émissions de télévision; services de fourniture, de réparation et de pose de verre (les Services).

[3]               La demande a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 19 mars 2008.  

[4]               Le 19 août 2008, 24 Hour Glass Ltd. (l'Opposante) a produit une déclaration d'opposition. Les motifs d’opposition peuvent être résumés comme suit :

         Comme le prévoit l'alinéa 38(2)a) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch.  T-13 (la Loi), la demande n'est pas conforme aux exigences de l'alinéa 30b) de la Loi, parce que la Requérante n'employait pas la Marque au Canada en liaison avec les Services à la date de premier emploi alléguée.

         Comme le prévoient les alinéas 38(2)a) et 30i)de la Loi, la Requérante ne pouvait pas être convaincue qu'elle avait le droit d'employer la Marque au Canada en liaison avec les Services, étant donné, notamment, que la Marque donne une description claire des Services et n'est donc pas enregistrable, ainsi qu'il est exposé de façon plus détaillée ci-dessous dans les autres motifs d’opposition.

         Comme le prévoient les alinéas 38(2)b) et 12(1)b) de la Loi, la Marque n'est pas enregistrable parce que, qu'elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des Services.

         Comme le prévoient l'alinéa 38(2)d) et l'article 2 de la Loi, la Marque n'est pas distinctive parce qu'elle ne distingue pas, ni n'est adaptée à distinguer, les Services de la Requérante de ceux d'autres propriétaires, étant donné, notamment, que la Marque donne une description claire de la nature et de la qualité des Services.

[5]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante et exige que celle-ci prouve strictement ses allégations.

[6]               À l'appui de son opposition, l'Opposante a produit l'affidavit souscrit le 23 janvier 2009 par Aaron Dunne, copropriétaire de l'Opposante, auquel étaient jointes les pièces A à F, ainsi que l'affidavit souscrit le 29 janvier 2009 par Nova Alberts. M. Dunne a été contre-interrogé sur son affidavit, et la transcription ainsi que les réponses aux engagements ont été versées en preuve. Cependant, Mme Alberts ne s'est pas présentée à son contre-interrogatoire. Par conséquent, son affidavit a été retiré du dossier.

[7]               Au soutien de sa demande, la Requérante a produit les affidavits des personnes suivantes :

         Dale Brooks, dont l’affidavit a été souscrit le 21 mai 2009 et comporte les pièces A à V. M. Brooks est copropriétaire et vice-président de la Requérante.

         Glenn Woodruff, dont l’affidavit a été souscrit le 21 mai 2009. M. Woodruff est propriétaire de Woodruff Developments Ltd. et travaille comme coordonnateur en construction dans l'industrie cinématographique. M. Woodruff est un client de la Requérante.

         Tom Blacklock, dont l’affidavit a été souscrit le 21 mai 2009. M. Blacklock travaille dans l'industrie cinématographique depuis 1989 et connaît M. Brooks, chez la Requérante, depuis presque aussi longtemps. M. Blacklock est un client de la Requérante.

         Ronald James Harvie, dont l’affidavit a été souscrit le 21 mai 2009; à cet affidavit était jointe la pièce A. M. Harvie est directeur général de Vancouver Management Ltd., une société de gestion immobilière. M. Harvie était voisin de la Requérante en juillet 1998.

         Larry McGregor, dont l’affidavit a été souscrit le 21 mai 2009; à cet affidavit étaient jointes les pièces A à C. M. McGregor est le graphiste qui a modifié la conception du logo de la Requérante pour créer la Marque.

         Kevin D. Ludlow, dont l’affidavit; auquel était jointe la pièce A, a été souscrit le 21 mai 2009. M. Ludlow est un ancien employé de 24 Hour Emergency Glass Ltd. Il affirme qu'il connaît la Requérante depuis 1998.

         Lisa Saltzman, dont l’affidavit a été souscrit le 2 avril  2009; à cet affidavit était jointe la pièce LS-1. Mme Saltzman est directrice du service de recherche en marques de commerce d'Onscope, une division de Marque d'Or Inc. Mme Saltzman fournit les résultats de recherches effectuées dans la common law et dans les dictionnaires à l'égard du terme ON SET.

[8]               Tous les déposants de la Requérante ont été contre-interrogés, sauf Mme Saltzman. Les transcriptions et les réponses aux engagements ont été produites pour chacun des contre‑interrogatoires.

[9]               Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et étaient représentées à l’audience tenue en l'espèce.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[10]           C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime d’établir, suivant la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, l’Opposante doit s'acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée, (1990), 30 C. P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

[11]           Les dates pertinentes pour l'examen des motifs d’opposition sont les suivantes :

         alinéas 38(2)a) ainsi que 30b) et 30i) — la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C. P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475]; Tower Conference Management Co. c. Canadian Exhibition Management Inc. (1990), 28 C. P.R. (3d) 428, à la page 432 (C.O.M.C.)];

         alinéas 38(2)b) et 12(1)b) - la date de production de la demande [voir Fiesta Barbeques Ltd. c. General Housewares Corp. (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F.)].

         alinéa 38(2)d) et article 2 — la date de production de l’opposition [voir Metro‑Goldwyn‑Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C. P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Inobservation de l'article 30 de la Loi

alinéa 30b) de la Loi

[12]           Dans la demande d'enregistrement, la Requérante revendique juillet 1998 comme date de premier emploi de la Marque, ce qui doit être interprété comme étant le 31 juillet 1998. L'alinéa 30b) de la Loi exige qu'il y ait eu un emploi continu, dans la pratique normale du commerce, de la marque de commerce visée par la demande d'enregistrement, depuis la date revendiquée jusqu’à la date de production de la demande (voir Brasserie Labatt Limitée c. Benson & Hedges (Canada) Ltée (1996), 67 C.P.R. (3d) 258 (C.F. 1re inst.), à la page 262]. 

[13]           En ce qui touche la question de la non-conformité à l'alinéa 30b) de la Loi, le fardeau de preuve initial de l’Opposante est peu exigeant, car les faits se rapportant au premier emploi de la Marque par la Requérante sont avant tout connus de cette dernière [voir Tune Masters c. Mr. P.'s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C. P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.), à la page 89]. L'Opposante peut s'acquitter de ce fardeau en s’appuyant non seulement sur sa propre preuve, mais aussi sur celle de la Requérante [voir Brasserie Labatt Ltée c. Brasseries Molson, société en nom collectif (1996), 68 C. P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.), à la page 230]. Bien qu’elle puisse se fonder sur la preuve de la Requérante pour satisfaire au fardeau qui lui incombe relativement à ce motif, l'Opposante doit démontrer que la preuve de la Requérante est « manifestement » incompatible avec les prétentions formulées par celle-ci dans sa demande d'enregistrement [voir Ivy Lea Shirt Co. c. 1227624 Ontario Ltd. (1999), 2 C. P.R. (4th) 562, aux pages 565 et 566 (C.O.M.C.), conf. par 11 C. P.R. (4th) 489 (C.F. 1re inst.)].   

[14]           L'Opposante présente trois arguments principaux pour s'acquitter de son fardeau à l'égard de l'alinéa 30b) de la Loi.

[15]           Son premier argument porte sur des documents obtenus sur le site Web de WorkSafe B.C., qui donnent à penser que la Requérante n'a obtenu une couverture d'assurance contre les accidents du travail que le 1er janvier 2002 et que par conséquent, elle n'était pas assurée à la date de premier emploi revendiquée (affidavit de M Dunne, pièces D et E). L'Opposante soutient que selon ce qu'indique cette preuve, la Requérante ne peut avoir employé la Marque régulièrement depuis la date de premier emploi revendiquée puisqu'elle n'avait pas la couverture d'assurance requise à cette époque.

[16]           Or, cette preuve comporte certaines lacunes. D'abord, en contre-interrogatoire, il s'est avéré que ces documents avaient été obtenus par l'épouse de M. Dunne (question 103), et non par M. Dunne lui-même. Aucun renseignement n'a été fourni quant à la nécessité de faire prêter serment à M. Dunne relativement aux documents trouvés par son épouse, ni quant aux raisons pour lesquelles cette dernière ne pouvait souscrire elle-même un affidavit auquel auraient été joints ces documents [voir Brasserie Labatt Ltée c. Brasseries Molson, société en nom collectif (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.)]. Deuxièmement, la Requérante soutient que les documents datent de 2009 et qu'aucun renseignement n'a été fourni relativement aux exigences applicables en matière d'assurance en Colombie-Britannique, en 1998. Enfin, et surtout, la Requérante fait valoir, et je suis également de cet avis, que les documents témoignent tout au plus du fait qu’elle n'a pas obtenu de couverture d'assurance contre les accidents du travail avant le 1er janvier 2002, fait qui a été admis par la Requérante de toute façon. Plus particulièrement, M. Brooks affirme dans son affidavit qu'il ne connaissait pas les exigences en matière d'assurance lorsqu'il a démarré son entreprise et qu'il a effectivement tardé à souscrire à l'assurance du Workers' Compensation Board de la Colombie-Britannique, ce pour quoi il a été pénalisé. M. Brooks a joint à son affidavit la pièce F, qui consiste en des documents attestant l'enregistrement de la Requérante en tant qu'employeur auprès du Workers’ Compensation Board de la Colombie‑Britannique en janvier 2002; dans cet enregistrement, la Requérante a inscrit le 23 juin 1998 comme date d’entrée en fonction de ses employés, soit la date à laquelle la Requérante a été constituée en société.

[17]           Je souscris aux observations de la Requérante, et, par conséquent, je n'attacherai aucun poids aux documents de WorkSafe B.C. ni aux observations de l'Opposante qui sont fondées sur ces documents.

[18]           Le deuxième argument de l'Opposante porte sur de prétendues incohérences dans la preuve de la Requérante en ce qui touche l'emploi de la Marque, incohérences qui seraient, d'après l'Opposante, suffisantes pour lui permettre de satisfaire à son fardeau de preuve. L'Opposante soutient que la preuve de la Requérante ne permet pas de conclure à l'emploi continu de la Marque depuis la date revendiquée. Elle s'appuie à cet égard sur les éléments de preuve suivants :

         En contre-interrogatoire, M. McGregor, le graphiste qui a conçu le logo de la Marque, a déclaré qu'il n'a pas personnellement fourni la photo de la Marque qui est jointe comme pièce A à son affidavit, et il n'a pas été en mesure de se rappeler le mois exact durant lequel il a conçu la Marque pour la Requérante. (questions 16, 25 à 29 et 36).

         En contre-interrogatoire, M. Ludlow a contredit la déclaration de son affidavit selon laquelle il connaissait l'existence de la Requérante depuis que celle-ci a entrepris ses activités en 1998. Plus précisément, M. Ludlow n'a pas été en mesure de fournir la date à laquelle, selon lui, la Requérante a créé son entreprise, ni la date approximative à laquelle il a vu la Marque pour la première fois sur un des véhicules ou des articles promotionnels de la Requérante. (questions 41 à 44).

         En contre-interrogatoire, M. Blacklock a contredit la déclaration de son affidavit attestant qu'il connaissait la Requérante depuis sa constitution en société. En particulier, il a été incapable de se rappeler à quel moment il a vu pour la première fois les véhicules de service de la Requérante (question 46). Il s'est engagé à fournir des documents étayant les déclarations faites dans son affidavit, mais ne les a finalement pas produits.

         M. Brooks n'a pas fourni les chiffres des ventes pour l'année 1998.

[19]           À l' audience, la Requérante a fait valoir qu'il n'était pas étonnant que ses déposants aient de la difficulté à se rappeler la date exacte à laquelle ils ont vu la Marque pour la première fois, ou à se remémorer à quel moment des événements précis ont eu lieu. Plus précisément, la Requérante a souligné que ses déposants étaient interrogés au sujet d'événements qui avaient eu lieu au moins onze ans avant leur contre-interrogatoire. La Requérante soutient, et je partage son avis, que le fait que les déposants, qui étaient tous peu habitués et mal à l'aise en situation de contre-interrogatoire, ont pu avoir une certaine difficulté à se rappeler sur-le-champ de dates précises, n'est pas suffisant pour mettre en doute la preuve contenue dans leurs affidavits. J'estime qu'aucune des déclarations faites par les déposants en contre-interrogatoire n'est suffisante pour mettre en doute les déclarations sous serment formulées dans leurs affidavits quant à la connaissance qu'ils avaient de l'emploi de la Marque. La Requérante soutient que lorsqu’on les lit dans leur ensemble, les affidavits, qui ont été faits sous serment, corroborent tous la date revendiquée de juillet 1998. Je suis d'accord.

[20]           La Requérante, qui est en désaccord avec l'argument de l'Opposante portant que la preuve de la Requérante ne permet pas de conclure à l'emploi continu de la Marque depuis la date revendiquée, résume sa preuve comme suit :

         Dans son affidavit, M. Brooks déclare que la Requérante a été constituée en société en juin 1998 et que la Marque a été créée en juillet 1998. La Marque a ensuite été apposée sur divers articles employés pour assurer les Services, et notamment sur des véhicules de service, en juillet 1998. M. Brooks fournit des chiffres d'affaires, des dépenses de publicité et des éléments de preuve documentaire montrant la Marque apposée sur divers articles promotionnels employés par la Requérante ainsi que sur des caisses en bois utilisées par la Requérante pour livrer ses produits en verre. Je traiterai de ces éléments de preuve plus en détail ci-dessous, dans l'analyse du motif d’opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif.

         Dans son affidavit, M. McGregor déclare que M. Brooks l'a engagé en juillet 1998 pour concevoir la Marque. Il déclare également qu'il a lui-même posé la Marque sur les camionnettes de service de la Requérante en juillet 1998.

         Dans son affidavit, M. Harvie, l'ancien voisin de la Requérante, déclare que cette dernière a emménagé dans les locaux adjacents aux siens en juillet 1998 et qu'il a eu connaissance de la Marque apposée sur le véhicule de service de la Requérante quelque temps après.

         MM. Blacklock et Ludlow déclarent tous deux qu'ils sont des clients de la Requérante et qu'ils ont recours aux services de celle-ci depuis 1998.

[21]           J'accepte les arguments de la Requérante. Cependant, je conviens que l'affidavit de M. Brooks ne fournit pas les chiffres d'affaires pour l'année 1998, que certains déposants de la Requérante ont eu de la difficulté à se rappeler des détails en contre-interrogatoire et que l'affidavit de M. Brooks fournit des documents qui ne remontent pas plus loin que 2001 en raison du programme de mise à jour des documents de la Requérante. Néanmoins, lorsqu'on examine la preuve comme un tout, je suis convaincue qu'elle n'est pas clairement incompatible avec la revendication de juillet 1998 comme date de premier emploi. Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincue que l'Opposante a réussi à établir que la preuve de la Requérante est clairement incompatible avec la date de premier emploi qu’elle revendique.

[22]           Le troisième argument de l'Opposante concerne les variations dans la manière dont la Marque est affichée dans la preuve des deux parties. L'Opposante soutient que ces variations indiquent que la Requérante ne peut avoir employé la Marque telle qu'elle est visée par la demande de façon continue depuis la date de premier emploi revendiquée. Pour étayer son argument, l'Opposante invoque les éléments de preuve suivants, qui sont tous compris dans la pièce F de l'affidavit de M. Dunne :

         Une carte professionnelle de l'entreprise de la Requérante qui présente une variation de la Marque, reproduite ci-dessous.

         Des versions archivées du site Web de la Requérante de 2003 à 2008, obtenues grâce à la Wayback Machine et qui montrent la variation suivante de la Marque.

         Une copie d'une annonce publiée en 2004 dans l'annuaire d'un tiers, Reel West Digest, et qui montre une variation de la Marque illustrée ci-dessous.

         Une copie papier du site Web de la Requérante datant de 2009, qui montre la même variation de la Marque que celle affichée dans la publicité du Reel West Digest.

[23]           En ce qui concerne la carte professionnelle, je relève qu'en contre-interrogatoire, M. Dunne a admis qu'il n'a pas obtenu la carte professionnelle de la Requérante elle-même, mais plutôt d'une entreprise tierce au moment où celle-ci a été achetée par l'Opposante. La preuve n'établit pas clairement l'époque correspondant à la carte professionnelle. Durant son contre‑interrogatoire, M. Brooks a déclaré que la variation de la Marque illustrée sur la carte professionnelle est la marque de commerce initiale de la Requérante, dont la conception a été repensée entre juin et juillet 1998 par M. McGregor. Pourtant, l'Opposante soutient qu'elle a obtenu cette carte professionnelle en 2006. Rien n'indique la date à laquelle le tiers a obtenu de la Requérante la carte professionnelle qu'il a remise à l'Opposante. Par conséquent, je ne suis pas en mesure de déterminer l'époque à laquelle correspond cette carte professionnelle.

[24]           Je signale que la Requérante ne s’est pas opposée à l'admissibilité des extraits du site Web de la Requérante joints à l'affidavit de M. Dunne au motif qu'ils constituent du ouï‑dire. Bien que je sois consciente que la preuve émanant du site Web d'un tiers ne peut servir à établir la véracité de son contenu, il me semble qu'une conclusion différente s'impose lorsque le propriétaire du site Web est une partie et a la possibilité de réfuter la preuve soumise. Par conséquent, j'estime que les sites Web présentés dans la pièce F de l'affidavit de M. Dunne sont pertinents et admissibles. En outre, je souligne que les pages Web archivées produites par la WayBack Machine et montrant l'état de sites Web dans le passé ont été considérées comme généralement fiables [voir ITV Technologies, Inc. c. WIC Television Ltd. (2003), 29 C.P.R. (4th) 182, à la page 192 (C.F. 1re inst.), confirmée par (2005), 38 C.P.R. (4th) 481 (C.A.F.); Candrug Health Solutions Inc. c. Thorkelson (2007), 60 C.P.R. (4th) 35 (C.F.), infirmée pour d’autres motifs par 2008 C.A.F. 100].

[25]           En réponse à l'argument de l'Opposante au sujet des variations de la Marque révélées par la preuve, la Requérante  affirme que rien ne lui interdit d'employer d'autres marques dans la poursuite de ses activités commerciales. Plus précisément, la Requérante fait valoir qu'elle possède une autre marque, OSG ON SET GLASS & Dessin (enregistrement no LCM767453), reproduite ci-dessous, et qu'elle est autorisée à l'employer, parmi d'autres.

OSG ON SET GLASS & Design

[26]           La Requérante avance que le fait qu'elle ait pu employer d'autres marques à divers moments, qu'il s'agisse de son autre marques déposée ou d'autres marques de commerce non enregistrées, ne permet pas de conclure qu’elle n'a pas employé la Marque visée par la demande de façon continue depuis la date revendiquée de premier emploi de celle-ci.

[27]           Étant donné la preuve montrant l'emploi de la Marque visée par la demande depuis la date d'emploi revendiquée (dont j'ai traité ci-dessus et dont je traiterai aussi plus loin dans l'analyse du motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif), je ne suis pas convaincue que la preuve relative aux variations de la Marque exposées ci-dessus, est suffisante pour permettre à l'Opposante de satisfaire au fardeau de preuve qui lui incombe au regard de l'alinéa 30b) de la Loi.

[28]           Vu ce qui précède, je rejette le motif d'opposition fondé sur l'alinéa 30b) de la Loi, parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Alinéa 30i) de la Loi

[29]           Lorsqu'un requérant a fourni la déclaration exigée par l’alinéa 30i), le motif fondé sur cette disposition ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque la preuve dénote la mauvaise foi du requérant [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C. P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155]. La Requérante a fourni la déclaration prescrite, et il ne s’agit pas ici d’un cas exceptionnel; le motif d'opposition fondé sur l’alinéa 30i) est en conséquence rejeté.

Motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité – alinéa 12(1)b) de la Loi

[30]           La question de savoir si la Marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des Services doit être examinée du point de vue de l'acheteur moyen des Services. En outre, le mot « nature » s'entend d'une particularité, d'un trait ou d'une caractéristique des services, et le mot « clair » signifie [traduction] « facile à comprendre, évident ou simple » [voir Drackett Co. of Canada Ltd. c. American Home Products Corp (1968), 55 C.P.R. 29 (C. de l'É.), à la page 34]. Il ne faut pas scruter séparément chacun des éléments constitutifs de la Marque; celle-ci doit plutôt être considérée dans son ensemble et sous l'angle de la première impression [voir Wool Bureau of Canada Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1978), 40 C.P.R. (2d) 25 (C.F. 1re inst.), aux pages 27 et 28; Atlantic Promotions Inc. c. Registraire des marques de commerce (1984), 2 C.P.R. (3d) 183 (C.F. 1re inst.), à la page 186]. Enfin, l'interdiction prévue à l'alinéa 12(1)b) vise à empêcher un commerçant de monopoliser un terme clairement descriptif ou communément employé dans le commerce et de placer ainsi des concurrents légitimes dans une position désavantageuse [voir Canadian Parking Equipment Ltd. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1990), 34 C.P.R. (3d) 154 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 15].

[31]           Je ferai observer que la Requérante a reconnu la nature clairement descriptive du mot GLASS en se désistant du droit à l’emploi exclusif de ce mot en dehors de la Marque, dans sa demande.

[32]           L'Opposante doit s'acquitter du fardeau initial de présenter une preuve suffisante au soutien de son allégation portant que la Marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des Services. L'Opposante affirme que les mots ON SET GLASS désignent clairement du verre ou des services liés au verre offerts « on set » [sur des plateaux], c'est-à-dire sur des plateaux de tournage de films ou de productions pour la télévision. L'Opposante invoque la preuve suivante pour étayer ses observations :

         Dans son affidavit, M. Dunne déclare que le terme ON SET est employé dans l'industrie cinématographique pour désigner des produits ou des services qui ont trait à la production d'un film ou d'une émission de télévision.

         M. Dunne joint à son affidavit des factures qui constituent, selon l'Opposante, une preuve de l'emploi du terme ON SET à l’égard de services liés au verre (pièce B).

         M. Dunne joint à son affidavit des imprimés qui témoignent de l'utilisation du terme ON SET par différents tiers pour désigner des productions cinématographiques ou télévisuelles (pièce C).

         En contre-interrogatoire, M. Blacklock (question 48), M. Woodruff (questions 34 à 39) et M. Brooks (question 85) on tous déclaré que le terme ON SET est couramment employé dans l'industrie cinématographique pour décrire le fait d'être sur un plateau de cinéma.

         Une extrait du site Web de la Requérante où l'on peut voir le terme « set dec », qui, présume l'Opposante, signifie [traduction] « décoration de plateau » (pièce U de l'affidavit de M. Brooks).

         Un article provenant du site Web de la Requérante et joint à l'affidavit de M. Brooks comme pièce V, dans lequel on peut lire :

« It's 9:30 on a week day morning and Dale Brooks of On Set Glass has been up since 5 a.m. attending to three film sets […]. It's his job to install glass that stunt men can safely jump through, to replace tinted glass windows with clear glass so the camera can shoot clear images of the actors inside and to make sure that on-set glass is gimballed or tilted so it doesn't create a glare. »

[traduction] « Il est 9 h 30, un matin de semaine, et Dale Brooks de On Set Glass travaille depuis 5 h, s'occupant de trois plateaux de cinéma […] Son travail consiste à installer du verre à travers lequel les cascadeurs peuvent sauter de façon sécuritaire, à remplacer le verre teinté dans les fenêtres par du verre transparent pour permettre de filmer des images nettes des acteurs se trouvant à l'intérieur, et à s'assurer que le verre qui se trouve sur le plateau [on-set glass] est monté sur cardan ou incliné de façon à ne pas éblouir. » (Souligné par l'agent de l'Opposante).

[33]           Je remarque que les seules occurrences du terme ON SET dans les factures jointes comme pièce B à l'affidavit de M. Dunne ont trait au lieu où le travail est exécuté (par ex., p. 009 « Labour 1 man on set 5.5 hours » [traduction] « Travail, 1 employé sur le plateau, 5,5 heures ») ou à l'endroit où le verre a été installé (par ex., p. 0013 « 5mm clear tempered and aluminum all installed on set for New York set at Byrne Road » [traduction] « verre transparent trempé 5 mm et aluminium, le tout installé sur le plateau pour la production de New York, sur Byrne Road ») (c'est l’auteur qui souligne). De plus, en contre-interrogatoire, M. Dunne a admis que ces factures ne contiennent pas le terme ON SET GLASS et qu'une facture pour un pare-brise, même si celui-ci était installé « sur un plateau » [« on set »] ferait référence à un « pare-brise » (question 37).

[34]           En ce qui concerne l'emploi du terme « on set » par des tiers, présenté dans la pièce C de l'affidavit de M. Dunne, je ferai observer en premier lieu que ces documents constituent du ouï‑dire et que je ne suis pas disposée à les considérer comme faisant preuve de la véracité de leur contenu [voir la décision Candrug, précitée]. Deuxièmement, je remarque qu'en contre‑interrogatoire, M. Dunne a admis qu'aucun de ces documents ne mentionne un produit ou un service appelé ON SET GLASS, de toute façon (question 92). De plus, aucun des documents compris dans la pièce C ne se rapporte à des produits de verre ou à des services liés à du verre. Tout au plus suis-je disposée à conclure, en me fondant sur cette preuve, que le terme ON SET est employé à l’égard de l'industrie de la production cinématographique en général.

[35]           Quant aux observations de l'Opposante au sujet de la présence du terme « set dec » sur le site Web de la Requérante, aucun élément de preuve ne permet de conclure que « set dec » signifie « set decoration » [décoration de plateau]. 

[36]           La Requérante a répliqué aux observations de l'Opposante et s'est fondée sur les éléments de preuve suivants pour étayer que la Marque ne donne pas une description claire ni une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des Services :

         Dans son affidavit, M. Brooks déclare que jamais, depuis qu'il œuvre dans l'industrie du verre, soit depuis 23 ans, il n'a entendu le terme ON SET GLASS, si ce n'est pour faire référence à la Requérante.

         Dans leurs affidavits, MM. Woodruff, Ludlow et Blacklock déclarent tous que depuis qu'ils œuvrent dans l'industrie cinématographique, soit depuis 15, 10 et 19 ans respectivement, ils n'ont entendu personne employer le terme ON SET GLASS, sauf pour faire référence à la Requérante.

         Plusieurs déposants, reconnaît la Requérante, ont admis que l'emploi du terme ON SET est répandu dans l'industrie cinématographique; toutefois, soutient‑elle, cela ne prouve pas que le terme ON SET GLASS est clairement descriptif de services liés au verre, étant donné notamment que les Services sont aussi offerts à des clients commerciaux et résidentiels n'ayant aucun lien avec l'industrie cinématographique.

         La Requérante estime, et je suis aussi de cet avis, que je ne peux attribuer quelque poids que ce soit aux hypothèses de M. Dunne quant à ce que M. Brooks connaîtrait.

         Dans son affidavit, M. Dunne déclare que l'Opposante a vendu des produits ON SET GLASS ou fourni des services ON SET GLASS et soutient que le terme ON SET GLASS s'entend de services liés au verre dans l'industrie cinématographique (affidavit de M. Dunne, aux paragraphes 1 à 7). Pourtant, dans son affidavit, M. Dunne décrit ses propres services comme suit  [traduction] « personnalisation, installation et réparation de verre et de produits de verre, teinture et sablage du verre, application de Mylar et gravure sur du verre ou sur des produits de verre ». Il ne fait pas mention de « on set glass products » [produits de verre offerts sur les plateaux] ni de « on set glass services » [services liés au verre offerts sur les plateaux]. C'est également le cas des publicités de l'Opposante jointes comme pièce B à l'affidavit de M. Dunne (question 43).

[37]           Citant l'arrêt Provenzano c. Registraire des marques de commerce, (1978) 40 C.P.R. (2d) 288 (C.A.F.), la Requérante soutient que pour que la marque tombe sous le coup de l'alinéa 12(1)b) de la Loi, elle doit donner une description claire de la nature ou de la qualité intrinsèque du produit ou du service en liaison avec lequel elle est employée. Dans Provenzano, la requérante avait présenté une demande d'enregistrement pour la marque de commerce KOLD ONE en liaison avec de la bière. La Cour a tranché que le mot KOLD [froid] n'évoquait que la température à laquelle la bière peut, selon le cas, être consommée. La Cour d'appel fédérale a déclaré que « [traduction] la température à laquelle la bière peut être consommée n'a aucun lien avec la nature ni avec la qualité de la bière elle-même », et elle a refusé de conclure que la marque donnait une description claire. La Requérante soutient qu'il en va de même pour la Marque. Elle fait valoir que les Services ne sont pas limités à un endroit précis. À son avis, même si l'on présumait que le terme ON SET fait référence à un plateau de cinéma, il s'agirait, tout au plus, d'un endroit parmi d'autres où les Services pourraient être offerts. Par conséquent, soutient la Requérante, les mots ON SET ne décrivent pas la qualité ou la nature intrinsèque des Services.

[38]           En réponse toutefois, l'Opposante a souligné que les Services eux-mêmes font état de « [...] produits en verre dans le domaine du cinéma utilisés dans la production de films et d'émissions de télévision », laissant entendre que, du moins dans le cas de ces services, les endroits où ils sont offerts sont intrinsèques aux services eux-mêmes. Je suis d'accord.

[39]           Je conclus que, sous forme sonore, les mots « on », « set » et « glass », employés ensemble, donnent une description claire ou donnent une description fausse et trompeuse de « vente en gros et au détail de [...] produits en verre dans le domaine du cinéma utilisés dans la production de films et d'émissions de télévision » (les Services liés au cinéma). Premièrement, la preuve permet à mon avis de conclure que le terme ON SET est employé couramment en liaison avec la production de films et d'émissions de télévision. Deuxièmement, en ce qui concerne les Services liés au cinéma, l'endroit est intrinsèque aux services eux-mêmes.

[40]           Cependant, pour ce qui est des autres Services, je conviens avec la Requérante que l'endroit où les services liés au verre sont fournis n'est pas intrinsèque à la nature des services eux-mêmes. L'affaire Provenzano  a été examinée dans la décision Société des Produits Nestle S.A. c. Pacanowski (1997), 77 C.P.R. (3d) 386 (C.O.M.C.), dans laquelle il a été décidé que le mot « frappé » donnait une description claire ou donnait une description fausse et trompeuse de « iced coffee » [café glacé], mais que ce ne serait pas le cas pour le « coffee » [café] ordinaire. Après avoir exposé le principe de Provenzano  mentionné ci-dessus, M. Martin, membre de la Commission, a déclaré ce qui suit :

[traduction] Je suis d'accord avec la conclusion du juge Heald, et si la présente demande avait visé du « café », on aurait pu tirer une conclusion semblable en l'espèce. Or, la présente demande ne vise pas du café, mais plutôt du « iced coffee » [café glacé] et un « iced coffee mix » [mélange pour café glacé], de sorte que le mot « frappé » désigne bel et bien une caractéristique intrinsèque du produit lui-même dans le cas du « iced coffee » [café glacé], et le seul produit devant être fabriqué dans le cas du « iced coffee mix » [mélange pour café glacé]. » […] En l'espèce, l'une des caractéristiques essentielles du café glacé est qu'il est glacé. Par conséquent, le mot « frappé » donne une description claire d’un caractère de la nature des marchandises de la requérante dans la langue française.

[41]           Je suis d'avis que ce raisonnement peut s'appliquer en l'espèce relativement aux autres Services. Pour ce qui est des Services liés au cinéma, l'endroit où les services liés au verre sont fournis est intrinsèque à la nature des services. Ce n'est pas le cas des autres Services, qui n'incluent pas de précisions sur l'endroit où ils sont fournis. Par conséquent, je suis d'avis que l'endroit où ces services sont fournis ne tient pas de la nature ni de la qualité intrinsèque des services liés au verre eux-mêmes. Vu ce qui précède, je ne suis pas convaincue que la preuve permet de conclure que la Marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité intrinsèque des services, et je rejette le motif d'opposition concernant les autres Services [voir l'arrêt Provenzano, précité].

[42]           Comme j'ai conclu que l'expression ON SET GLASS, sous forme sonore, donne une description claire des Services liés au cinéma, la question consiste à savoir si la Marque est toujours enregistrable compte tenu des éléments graphiques qu'elle comporte. La Marque est une marque composée qui contient les mots ON SET GLASS ainsi que des éléments graphiques représentant une caméra cinématographique et une bobine de film, des lettres stylisées et deux lignes horizontales.

[43]           L'enregistrabilité des marques composées, au regard de l'alinéa 12(1)b), a été examinée dans Best Canadian Motor Inns Ltd. c. Best Western International Inc. (2004), 30 C.P.R. (4th) 481(C.F.)]. Selon Best Canadian Motor Inns, lorsqu'on a affaire à une marque composée, il faut évaluer l'impression visuelle produite par le mot et par les éléments graphiques de la marque. Lorsque l'élément graphique de la marque ne suscite pas un intérêt visuel, les mots seront considérés comme dominants. En cas de marque composée qui, sous forme sonore, contient des mots qui donnent une description claire ou une description fausse et trompeuse et qui constituent également l'élément dominant de la marque, celle-ci ne sera pas enregistrable, en application de l'alinéa 12(1)b) de la Loi.

[44]           L'Opposante soutient que les mots représentent la partie dominante de la Marque. Pour étayer cette proposition, elle s'appuie sur une série de décisions dans lesquelles il a été jugé que des marques composées donnaient une description claire ou donnaient une description fausse et trompeuse malgré les éléments graphiques importants de ces marques.

[45]           La Requérante, en revanche, soutient qu'on ne peut affirmer qu'un élément de la Marque domine sur les autres. Elle soutient plutôt que tous les éléments de la Marque revêtent un poids égal. À son avis, la déclaration faite par M. Harvie en contre-interrogatoire appuie cette affirmation. M. Harvie a déclaré : [traduction] « (...) je me souviens seulement avoir vu le véhicule, avoir été impressionné par le logo qu'on y avait apposé et avoir pensé, tiens, c'est intéressant » (question 36).

[46]           Je conviens avec la Requérante que le dessin et les mots constituant la Marque sont d'un intérêt visuel équivalent. Cependant, je souscris aussi aux observations de l'Opposante selon lesquelles le dessin d'une caméra cinématographique ou d'une bobine de film ne peut pas être considéré comme distinctif d'une seule personne, puisqu'un tel dessin décrit lui aussi l'industrie cinématographique. Par conséquent, j'estime que les éléments graphiques ne sont pas suffisants pour empêcher la Marque de tomber sous le coup de l'alinéa 12(1)b) de la Loi en ce qui touche les Services liés au cinéma. Je conclus en conséquence que la Marque, dans son ensemble et sous l'angle de la première impression, donne une description claire, sous forme sonore, des Services liés au cinéma au Canada et tombe de ce fait sous le coup de l'alinéa 12(1)b) de la Loi.

[47]           Je ferai observer que, même si la Requérante a soumis une preuve d'emploi de la Marque depuis 1998, elle n'a pas tenté de surmonter le motif d'opposition fondé sur l'alinéa 12(1)b) en s'appuyant sur le paragraphe 12(2) de la Loi.

[48]           Compte tenu de ce qui précède, je fais droit au motif fondé sur l'alinéa 12(1)b) à l'égard des Services liés au cinéma.

Motif fondé sur l’absence de caractère distinctif – alinéa 38(2)d) de la Loi

[49]           Bien que la Requérante soit ultimement responsable de démontrer que la Marque est adaptée à distinguer ses Services, ou qu’elle les distingue véritablement, de ceux d’autres propriétaires partout au Canada [voir Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.)], l’Opposante doit en premier lieu établir les faits sur lesquels elle se fonde pour prétendre à l'absence de caractère distinctif de la Marque.

[50]           À l'audience, l'Opposante a réitéré ses observations quant au motif d’opposition fondé sur l'alinéa 12(1)b) afin d’étayer son motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif. Puisque j'estime que la Marque ne donne pas une description claire ou une description fausse et trompeuse des services : « vente en gros et au détail de produits en verre plat, trempé, d’automobiles, réfléchissant et de vitrine, produits pour teinter le verre [...]; services de fourniture, de réparation et de pose de verre », je rejette ce motif d'opposition, du fait également qu'à mon avis, la différence entre les dates pertinentes est insuffisante pour changer quoi que ce soit.

[51]           En ce qui concerne les Services liés au cinéma, j'ai conclu que la Marque donne une description claire. Une marque qui donne une description claire est nécessairement dépourvue de caractère distinctif inhérent. Néanmoins, une marque peut acquérir un caractère distinctif par l'emploi qui en est fait. J'évaluerai maintenant la preuve de la Requérante pour déterminer si, à la date de la production de la déclaration d'opposition, la Marque était devenue distinctive de la Requérante grâce à son emploi ou à sa promotion en ce qui touche les Services liés au cinéma.

[52]           Dans son affidavit, M. Brooks déclare que de 1998 à 2008, le chiffre d'affaires brut de la Requérante a augmenté de façon constante. Je remarque que M. Brooks ne fournit pas de chiffres d'affaires, mais qu’il divulgue les ventes annuelles proportionnellement à celles de1998 comme année de base. À l'appui de ses déclarations relatives aux ventes, M. Brooks joint un échantillon de factures établies entre 2001 et 2008 pour la prestation des Services à divers clients commerciaux et résidentiels de même qu'à des entreprises de production cinématographique (pièces K, L et M). M. Brooks explique que les factures pour les années 1998 à 2000 ne sont pas disponibles parce que la Requérante ne conserve que les factures des sept dernières années. Après avoir examiné la preuve dans son ensemble, je suis convaincue que la Requérante a vendu les Services au Canada de 1998 jusqu’à la date de production de la déclaration d'opposition.

[53]           M. Brooks fournit des photos montrant la Marque affichée sur des camionnettes et des camions de service employés par la Requérante pour la prestation de ses services et sur des caisses en bois utilisées par des techniciens (qui portent eux-mêmes des tee-shirts affichant la Marque) pour le transport du verre lors de la prestation des Services (pièces N, O et P). M. Brooks fournit également divers documents utilisés pour la fourniture des Services (par ex. papier à en-tête, enveloppes, cartes professionnelles, etc.) qui arborent tous la Marque (pièce Q).

[54]           M. Brooks déclare que pour promouvoir davantage ses services, la Requérante donne à ses clients des vêtements et de la marchandise, notamment des chapeaux, des vestes, des pantalons, des chemises et des sacs de golf, qui arborent tous la Marque (pièce S). M. Brooks déclare que de 2001 à 2009, la Requérante a commandé à Western Athletic pour plus de 27 000 $ de vêtements et de marchandises arborant la Marque (pièce R).

[55]           M. Brooks fournit les données sur les dépenses en publicité engagées pour la promotion des Services, qui varient de 998 $ en 1998 à une valeur maximale de 14 782 $ en 2006, en passant par des montants de 8 798 $ en 2007 et de 5 275 $ en 2008.

[56]           Après avoir examiné la preuve dans son ensemble, j'estime que la Requérante s'est acquittée du fardeau qui lui incombait d'établir qu'à la date de production de la déclaration d'opposition, la Marque était distinctive de la Requérante en ce qui touche les Services liés au cinéma. En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif est rejeté.

Décision

[57]           Exerçant les pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande d'enregistrement de la Marque en liaison avec les Services de « vente en gros et au détail de [...] produits en verre dans le domaine du cinéma utilisés dans la production de films et d’émissions de télévision », et je rejette l'opposition relativement aux autres Services, conformément aux dispositions du paragraphe 38(8) de la Loi [voir Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 C.P.R. (3d) 492 (C.F. 1re inst.) à titre de précédent autorisant une décision partagée].

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Andrea Flewelling

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Dominique Lamarche, trad. a.

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