Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de LatigiDigital Inc. à la demande no 1256028 produite par Marc R. Branson en vue de l’enregistrement de la marque de commerce LATIGI________________

 

 

I Les actes de procédure

 

[1]   Le 29 avril 2005, M. Marc R. Branson (le Requérant) a produit une demande d’enregistrement fondée sur l’emploi projeté au Canada pour la marque de commerce LATIGI (la Marque). Cette demande a ensuite été modifiée et elle vise à présent les marchandises suivantes :

 

Produits électroniques de consommation, nommément téléphones, répondeurs téléphoniques et dispositifs d’identification du demandeur, télécopieurs, téléviseurs et lecteurs portatifs, lecteurs de DVD, lecteurs de CD, magnétoscopes, récepteurs stéréophoniques, syntonisateurs stéréophoniques, amplificateurs stéréophoniques, lecteurs de disques compacts, agendas électroniques personnels, appareils photographiques numériques et caméscopes; petits appareils de cuisine électriques, nommément malaxeurs, robots culinaires, presse‑fruits, grille-pain, grille-pain fours, ouvre-boîtes, bouilloires, cafetières, moulins à café, mélangeurs, hachoirs, broyeurs d’aliments, robots-boulangers, gaufriers, plaques à frire, mijoteuses, étuveuses à riz et à légumes, sorbetières, fours à micro-ondes, friteuses (les Marchandises) 

 

            et les services suivants :

 

Vente et distribution au détail et en gros de produits électroniques de consommation, de petits appareils de cuisine (les Services).

 

[2]   La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 15 février 2006. LatigiDigital Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition le 9 mars 2006, que le registraire a transmise au Requérant le 6 avril 2006.

 

[3]   Le 24 avril 2006, le Requérant a produit une contre‑déclaration niant en substance tous les motifs d’opposition invoqués.

 

[4]   L’Opposante a produit un affidavit souscrit par Jason Melnick et, le Requérant, un affidavit souscrit par Marc R. Branson. M. Melnick a été contre‑interrogé et la transcription du contre‑interrogatoire a été versée au dossier.

 

[5]   Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit. Aucune audience n’a été demandée.

 

II Les motifs d’opposition

 

[6]   L’Opposante a soulevé les motifs d’opposition suivants :

 

[traduction] 1. La demande n’est pas conforme aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), en ce que le Requérant ne pouvait être convaincu qu’il avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises et les Services, parce qu’il savait que l’Opposante et ses prédécesseurs en titre, Jason et Linda Melnick, employaient déjà la marque de commerce identique LATIGI, le nom commercial identique Latigi et les noms commerciaux similaires au point de créer de la confusion LatigiDigital et LatigiDigital Inc.;

 

2. Aux termes du paragraphe 16(3) de la Loi, le requérant n’a pas droit à l’enregistrement parce qu’à la date de la production de la demande, la Marque créait de la confusion avec :

i)                    la marque de commerce identique LATIGI de l’Opposante, antérieurement employée par l’Opposante et/ou ses prédécesseurs en titre, Jason et Linda Melnick, depuis le 17 février 1998 au moins, en liaison avec des marchandises et services analogues aux Marchandises et aux Services;

ii)                  les noms commerciaux Latigi et LatigiDigital de l’Opposante, qui sont employés par celle‑ci et/ou par ses prédécesseurs en titre depuis le 17 février 1998 au moins;

iii)                le nom commercial LatigiDigital Inc. de l’Opposante que celle‑ci emploie depuis sa constitution en société, c’est‑à‑dire depuis le 14 novembre 2001;

 

3. La marque du Requérant n’est pas distinctive; elle ne distingue pas véritablement les marchandises et services du Requérant de ceux de l’Opposante et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi.

 

III Les principes généraux applicables à tous les motifs d’opposition

 

[7]   Le Requérant assume un fardeau de persuasion; il doit démontrer que la demande d’enregistrement est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter une preuve admissible qui permette raisonnablement de conclure à l’existence des faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition. Lorsque l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau, le Requérant doit encore prouver suivant la prépondérance des probabilités que les motifs d’opposition invoqués ne devraient pas empêcher l’enregistrement de la marque [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, aux pages 329‑330, John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd., 30 C.P.R. (3d) 293 et Wrangler Apparel Corp. c. The Timberland Company, [2005] C.F. 722].

 

IV Les dates pertinentes

 

[8]   Voici quelles sont les dates pertinentes applicables à chacun des motifs d’opposition :

 

  le droit à l’enregistrement de la Marque sur le fondement de l’emploi projeté : la date de production de la demande d’enregistrement (29 avril 2005) [voir le par. 16(3) de la Loi];

  la conformité à l’alinéa 30i) de la Loi : la date de production de la demande d’enregistrement (29 avril 2005) [voir John Labatt Ltée c. Les Compagnies Molson Ltée, 30 C.P.R. (3d) 293 et Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R. (3d) 469];

  le caractère distinctif de la Marque : la date de production de la déclaration d’opposition (9 mars 2006) est généralement considérée comme la date pertinente [voir Andres Wines Ltd. et E & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A.F.) et Metro‑Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)].

 

V Le droit à l’enregistrement

 

[9]   Le motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement pose la question du risque de confusion entre la marque du Requérant et la marque de commerce et les noms commerciaux de l’Opposante mentionnés au paragraphe 6.

 

[10]           L’Opposante assume le fardeau de preuve initial d’établir qu’elle a antérieurement employé ou révélé la marque de commerce et les noms commerciaux susmentionnés au Canada et qu’elle n’avait pas abandonné leur emploi à la date de l’annonce de la demande [voir le par. 16(5) de la Loi]. L’examen de la preuve versée au dossier sera effectué compte tenu de ces principes généraux.

 

[11]           M. Melnick est le président de l’Opposante, qu’il a constituée en société avec Linda Melnick le 14 novembre 2001, et ils sont tous deux les prédécesseurs en titre de celle‑ci. Avant la constitution de la société, ils avaient créé un site Web pour leur entreprise commerciale (qui sera décrite plus loin). Le site Web a été enregistré le 17 février 1998 à l’égard de l’adresse www.latigi.com.

 

[12]           Le déposant affirme qu’avec sa femme, Linda Melnick, il a d’abord employé les noms commerciaux et marques de commerce LATIGIDIGITAL et LATIGI principalement en liaison avec des services d’hébergement Web et des services de programmation et de consultation. Toutefois, leur entreprise s’est vite ramifiée et a englobé la vente d’ordinateurs et d’accessoires informatiques. Il déclare que, depuis 2001, il agit principalement à titre de consultant informatique pour l’Opposante. Il me faut présumer qu’avant le 14 novembre 2001, il ne pouvait rendre ces services pour le compte de l’Opposante puisque celle‑ci n’avait pas encore été constituée en société.

 

[13]           Suivant sa description des fonctions qu’il exerce pour l’Opposante, il fournit et installe du matériel, des logiciels et des accessoires informatiques, de l’équipement téléphonique, à savoir de l’équipement de transmission de voix par IP (VoIP), du matériel d’utilisateur final et des passerelles médias, des caméras vidéos et des enregistreurs vidéos numériques, du matériel audiovisuel domestique intégrant ordinateurs, télévisions, radios et téléphones et de l’équipement de sécurisation d’accès, et assure l’appui à leur égard et il fournit de nombreux autres services liés à l’Internet. La preuve soumise doit toutefois me convaincre du bien‑fondé de l’allégation qu’une marque de commerce est employée en liaison avec des marchandises ou services au sens de l’article 4 de la Loi.

 

[14]           Le déposant explique comment Linda Melnick et lui ont inventé les mots LATIGI et LATIDIGITAL. LATIGI est le mot « digital » écrit à l’envers sans la lettre « d », et joint au mot « digital », il forme le mot inventé « LATIGIDIGITAL ». Il déclare que Linda Melnick et lui ont employé ce nom commercial/marque de commerce avec un D majuscule, de la façon suivante : latigiDigital ou LatigiDigital et que c’est ainsi que l’Opposante l’emploie généralement. Je ne ferai pas de différence entre ces deux noms commerciaux et j’emploierai « LatigiDigital ». Le déposant a produit un exemplaire de sa carte d’affaires. Je constate que l’Opposante y est mentionnée. Il s’ensuit que cette carte n’a pu être utilisée avant la constitution de l’Opposante en société. Je ne dispose d’aucun renseignement concernant le moment où ces cartes d’affaires ont commencé à servir ou le nombre de cartes qui ont été distribuées.

 

[15]           Afin de démontrer l’emploi de la marque de commerce LATIGI et des noms commerciaux LatigiDigital et Latigidigital Inc., le déposant a produit en preuve des permis d’exploitation d’entreprise délivrés par la ville de Vancouver en 2002 et 2003 et par le canton de Langley en 2005 ainsi que le certificat de constitution délivré par le directeur du registre des sociétés de la Colombie‑Britannique le 14 novembre 2001. Les permis d’exploitation et certificats de constitution ne font pas dûment preuve de l’emploi d’une marque de commerce ou d’un nom commercial au sens de l’article 4 de la Loi [voir Geotech Ltd. c. TTI Geotechnical Resources Ltd. (1985), 7 C.P.R. (3d) 200 et Pharmx Rexall Drug Stores Inc. c. Vitabrin Investments Inc. (1995), 62 C.P.R. (3d) 108].

 

[16]           Il convient de signaler, à ce stade, qu’il n’a été ni allégué ni prouvé que les droits afférents à la marque de commerce LATIGI et aux noms commerciaux Latigi et LatigiDigital sont passés de Linda Melnick et Jason Melnick à l’Opposante, de sorte que cette dernière ne peut s’appuyer sur la preuve de leur emploi par ses prédécesseurs en titre [voir Evergreen Canada-Israel Investments Ltd. c. Toronto-Dominion Bank, 1998 CarswellNat 3387 et C.I. Viewer's Choice Programming Service Inc. c. Astral Bellevue Communications Inc. (1997), 75 C.P.R. (3d) 98].

 

[17]           Le déposant a soumis des factures établies par l’Opposante entre le 1er novembre 2003 et le 15 novembre 2004 à l’égard de services de consultation informatique et d’hébergement Web. Ces factures portent la marque de commerce LATIGI et le nom commercial LatigiDigital Inc.

 

[18]           La pièce W  est une brochure publicitaire. Elle porte elle aussi la marque de commerce LATIGI et le nom commercial LatigiDigital Inc., et on peut y lire [traduction] « en mars 2005, nous avons décidé de prendre de l’expansion ... », ce qui indique que la brochure a été imprimée et diffusée postérieurement à mars 2005. Le déposant affirme toutefois dans son affidavit que la brochure a été distribuée dans des foyers et des entreprises et à des personnes à proximité de l’établissement de l’Opposante vers les mois de janvier ou février 2005. Manifestement, il ne pouvait en être ainsi. M. Melnick a eu la possibilité de corriger cette déclaration, lors de son contre‑interrogatoire, lorsqu’on lui a demandé si les affirmations faites dans la brochure étaient vraies; il a répondu par l’affirmative, indiquant que la brochure a été préparée par sa femme au cours de 2004 et imprimée au moyen d’une imprimante laser. Il n’existe donc aucune facture pouvant établir la date exacte d’impression. Compte tenu de la contradiction existant entre le contenu de la brochure, d’une part, et l’affidavit de M. Melnick et les déclarations faites lors du contre‑interrogatoire de celui‑ci, d’autre part, je ne puis attribuer de poids à cette partie de la preuve.

 

[19]           Le déposant a produit des chèques faits à l’ordre de Latigi ou LatigiDigital. J’estime que de telles pièces ne font pas preuve de l’emploi d’une marque de commerce au sens de l’article 4 de la Loi. Le mot « emploi » n’est pas défini dans la Loi, mais il est établi qu’il faut se reporter à la présomption énoncée à l’article 4 de la Loi en y apportant les modifications dictées par les circonstances [voir Professional Publishing Associates Ltd. c. Toronto Parent Magazine Inc. (1986), 9 C.P.R. (3d) 207].

 

[20]           Le déposant a également produit des feuillets publicitaires (pièces X et Z) qui ont été distribués dans des foyers et des entreprises et à des personnes à proximité de l’établissement de l’Opposante aux mois de janvier et d’août 2005. Je ne dispose d’aucun renseignement concernant le nombre de copies distribuées. Ce feuillet ne porte pas la marque de commerce LATIGI, mais il décrit les différentes composantes d’un système appelé « Latigi HTPC Media Center 2005 ». Aucun élément de preuve n’établit que l’Opposante ait effectivement vendu ce système au Canada.

 

[21]           Le feuillet énumère les composantes du système « Latigi Media Center 2005 ». Deux modèles différents sont décrits, portant chacun leur numéro. En contre‑interrogatoire, M. Melnick a expliqué que les numéros de modèles étaient une combinaison des diverses composantes du système, lesquelles peuvent provenir de différents fournisseurs et sont assemblées par l’Opposante. Par exemple, M. Melnick a admis que la télécommande porte la marque de commerce Microsoft.

 

[22]           Aucun élément de preuve n’établit qu’au moment du transfert de la propriété de ces systèmes, si tant est que des ventes en ont été réalisées, la marque LATIGI était apposée sur la marchandise elle‑même ou sur son emballage. La présence d’une marque de commerce sur un feuillet ne peut être considérée comme un emploi de la marque en liaison avec des marchandises au sens du paragraphe 4(1) de la Loi [voir Davis & Co. c. Oasis Corp. (2002), 25 C.P.R. (4th) 540].

 

[23]           Qui plus est, M. Melnick a expliqué en contre‑interrogatoire que les fonctions énumérées dans la publicité, notamment le contrôle d’enregistrement DVD et l’enregistrement en HD, l’enregistrement en direct d’émissions avec possibilité d’utiliser les touches de contrôle usuelles, et le partage de fichiers vidéos, TV et MP3 et de fichiers musicaux, sont des caractéristiques du système d’exploitation du matériel. Non seulement n’existe‑t‑il aucun élément de preuve que les systèmes ont été vendus en liaison avec la marque de commerce LATIGI, mais il n’a pas été démontré non plus que l’Opposante vend ou a vendu des appareils DVD, des téléviseurs ou du matériel électronique portant la marque de commerce LATIGI.

 

[24]           Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante soutient que la preuve résumée plus haut établit l’emploi antérieur de la marque LATIGI en liaison avec des marchandises et services, mais elle n’indique pas clairement desquels il s’agit. L’Opposante se reporte à juste titre à la définition d’« emploi » figurant aux paragraphes 4(1) et (2) de la Loi. Elle fait valoir que la présence de la marque de commerce LATIGI sur les factures constitue un « emploi » de la marque. Il faut distinguer l’emploi d’une marque de commerce en liaison avec des marchandises et son emploi en liaison avec des services. Une facture portant une marque de commerce peut démontrer que la marque est employée en liaison avec des marchandises si elle décrit les marchandises et si elle est remise à l’acheteur avec celles‑ci, de telle sorte que l’acheteur est informé du lien entre les marchandises et la marque au moment du transfert des marchandises [voir Riches, McKenzie & Herbert c. Pepper King Ltd. (2000), 8 C.P.R. (4th) 471]. Cette preuve n’a pas été faite. Je conclus donc que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de l’emploi antérieur de la marque de commerce LATIGI ou des noms commerciaux Latigi, LatigiDigital ou LatigiDigital Inc. en liaison avec des marchandises au sens du paragraphe 4(1) de la Loi.

 

[25]           Il reste à examiner si l’Opposante a fait la preuve de l’emploi antérieur de la marque de commerce LATIGI et des noms commerciaux LatigiDigital et LatigiDigital Inc. en liaison avec des services. J’estime qu’elle n’a établi un tel emploi qu’en liaison avec des services de consultation informatique et d’hébergement Web. Les factures déposées en preuve confirment que l’Opposante rendait ce type de services en liaison avec la marque de commerce et les noms commerciaux susmentionnés avant la date de la production de la demande d’enregistrement.

 

[26]           Je suis également convaincu que l’Opposante a fait la promotion de services de vente au Canada de systèmes informatiques en liaison avec la marque de commerce LATIGI (pièces X et Z) et que ces services étaient offerts au Canada. Les exigences du paragraphe 4(2) de la Loi sont donc satisfaites pour ce qui est de ces services [voir Wenward (Canada) Ltd. c. Dynaturf Co., 28 C.P.R. (2d) 20].

 

[27]           Il s’ensuit que le Requérant doit prouver suivant la prépondérance des probabilités que la Marque ne crée pas de confusion avec la marque de commerce LATIGI et les noms commerciaux LatigiDgital et LatigiDigital Inc. de l’Opposante. À mon avis, c’est la marque de commerce LATIGI qui fournit le scénario le plus favorable à l’Opposante. Si cette dernière n’obtient pas gain de cause par suite de la comparaison de sa marque de commerce LATIGI avec la Marque, il est évident qu’elle n’y parviendra pas au moyen de la comparaison entre ses noms commerciaux et la Marque.

 

[28]           Le test applicable pour déterminer le risque de confusion est énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi, et il m’impose de tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment celles qui sont énumérées au paragraphe 6(5) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;      la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive, et il n’est pas nécessaire d’accorder le même poids à chaque facteur [voir Clorox Co. c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.) et Gainers Inc. c. Marchildon (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)]. Je me reporte également aux arrêts Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401, de la Cour suprême du Canada, dans lesquels le juge Binnie a formulé des observations au sujet de l’évaluation des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi dans l’appréciation du risque de confusion entre deux marques.

 

[29]           La marque de commerce LATIGI de l’Opposante possède un caractère distinctif inhérent. Comme on l’a déjà indiqué, elle est formée d’un mot inventé. L’emploi d’une marque peut renforcer son caractère distinctif, mais la demande d’enregistrement étant fondée sur l’emploi projeté, la Marque n’avait pas été employée à la date pertinente. La preuve de l’Opposante décrite plus haut établit par contre qu’il y a eu emploi antérieur limité de la marque de commerce LATIGI dans la région de Vancouver, en liaison avec des services d’hébergement Web et de consultation informatique et des services de vente de systèmes informatiques. Ce facteur favorise l’Opposante.

 

[30]           Le facteur relatif à la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage favorise lui aussi l’Opposante.

 

[31]           Puisque les marques de commerce des parties sont identiques, le facteur relatif au genre de marchandises et services en cause et à leurs voies de commercialisation revêt une grande importance. Sur ce point, l’Opposante se borne à faire valoir, dans son plaidoyer écrit, que la publicité susmentionnée porte sur [traduction] « une foule de marchandises électroniques identiques à celles qui sont visées par la demande d’enregistrement ». Comme je l’ai déjà indiqué, le Requérant a modifié sa demande pour en éliminer toute mention de matériel informatique et de vente d’ordinateurs.

 

[32]           Puisque j’ai conclu plus haut que l’emploi antérieur de la marque de commerce LATIGI de l’Opposante en liaison avec des ordinateurs ou des systèmes informatiques n’avait pas été établi, la comparaison ne doit s’établir qu’entre les services de consultation et hébergement informatiques et de vente de systèmes informatiques de l’Opposante et les produits de consommation électroniques et appareils de cuisine du Requérant. Comme on l’a vu, les systèmes informatiques de l’Opposante comprennent des fonctions de contrôle d’enregistrement DVD et d’enregistrement en HD, d’enregistrement en direct d’émissions avec possibilité d’utiliser les touches de contrôle usuelles, et de partage de fichiers vidéos, TV et MP3 et de fichiers musicaux. Ces caractéristiques des systèmes informatiques de l’Opposante font partie de la même catégorie générale que les marchandises décrites comme des produits électroniques de consommation dans la demande. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante dans la mesure où les produits électroniques de consommation ainsi que la vente et distribution au détail et en gros de tels produits sont concernés.

 

[33]           Les marques étant identiques, les facteurs énoncés à l’alinéa 6(5)e) favorisent l’Opposante.

 

[34]           L’Opposante a fait état d’une circonstance additionnelle, à savoir de possibles cas de confusion. Les allégations faites aux paragraphes 19 et 38 de l’affidavit de M. Melnick constituent du ouï‑dire inadmissible pour ce qui est de la teneur de propos que des tiers ont tenus à M. Melnick.

 

[35]           L’analyse des facteurs pertinents m’amène à conclure que le Requérant n’a pas prouvé suivant la prépondérance des probabilités que l’emploi de la Marque en liaison avec des produits électroniques de consommation, nommément téléphones, répondeurs téléphoniques et dispositifs d’identification du demandeur, télécopieurs, téléviseurs et lecteurs portatifs, lecteurs de DVD, lecteurs de CD, magnétoscopes, récepteurs stéréophoniques, syntonisateurs stéréophoniques, amplificateurs stéréophoniques, lecteurs de disques compacts, agendas électroniques personnels, appareils photographiques numériques et caméscopes, et avec des services de vente et distribution au détail et en gros de produits électroniques de consommation ne risque pas de créer de confusion avec la marque de commerce LATIGI et les noms commerciaux Latigi, LatigiDigital et LatigiDigital Inc. de l’Opposante.

 

 

VI Le caractère distinctif

 

[36]           Le dernier motif d’opposition ne fait que citer la Loi sans alléguer de faits. Il n’est donc pas valablement invoqué, et il est rejeté [voir Faber-Castell Canada Inc. c. Binney & Smith Inc. (1991), 36 C.P.R. (3d) 388].

 

 

VI Conformité à l’alinéa 30i) de la Loi

 

[37]           Lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée à l’alinéa 30i), ce motif ne peut être reçu que dans des cas exceptionnels, notamment lorsque la mauvaise foi du requérant est établie [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.) à la page 155].

 

[38]           M. Melnick a allégué dans son affidavit que le Requérant connaissait la marque de commerce LATIGI de l’Opposante et il a soumis des éléments de preuve à l’appui de cette affirmation. Il a déclaré que le Requérant exploitait un centre d’appel sous le nom commercial Symphonic Performances et qu’au début de 2004 il lui a demandé de fournir des solutions de terminaison pour le centre. Les parties ont communiqué plusieurs fois par courriel, et le nom commercial LatigiDigital Inc. figurait sur les messages de l’Opposante. M. Melnick a déposé une facture établie au nom de Symphonic Performances à l’égard de services de consultation concernant un système de voix par IP, sur laquelle le nom commercial figurait bien en vue. L’Opposante a aussi fait état de la déclaration écrite d’un tiers déposée sous la cote J. Le contenu de cette pièce constituant du ouï‑dire, il n’est pas admissible en preuve.

 

[39]           La connaissance par le Requérant de l’existence de la marque de commerce ou d’un nom commercial de l’Opposante ne saurait à elle seule faire conclure que sa déclaration selon laquelle il est convaincu de son droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises et les Services est entachée de mauvaise foi. Les différences existant entre certains des marchandises et services des parties sont suffisantes pour que le Requérant ait pu croire qu’il pouvait employer la Marque en liaison avec les Marchandises et les Services.

 

 

VII Conclusion

 

[40]           Dans l'exercice du pouvoir qui m'a été délégué par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, et conformément aux principes énoncés dans la décision Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet Werke Heinrich Schlerf GmbH (1986), 10 C.P.R. (3d) 482, et au paragraphe 38(8) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement du Requérant à l’égard des marchandises et services suivants :

 

produits électroniques de consommation, nommément téléphones, répondeurs téléphoniques et dispositifs d’identification du demandeur, télécopieurs, téléviseurs et lecteurs portatifs, lecteurs de DVD, lecteurs de CD, magnétoscopes, récepteurs stéréophoniques, syntonisateurs stéréophoniques, amplificateurs stéréophoniques, lecteurs de disques compacts, agendas électroniques personnels, appareils photographiques numériques et caméscopes et vente et distribution au détail et en gros de produits électroniques de consommation;

 

et je rejette l’opposition à l’égard des marchandises et services suivants :

 

petits appareils de cuisine électriques, nommément malaxeurs, robots culinaires, presse‑fruits, grille-pain, grille-pain fours, ouvre-boîtes, bouilloires, cafetières, moulins à café, mélangeurs, hachoirs, broyeurs d’aliments, robots-boulangers, gaufriers, plaques à frire, mijoteuses, étuveuses à riz et à légumes, sorbetières, fours à micro-ondes, friteuses et la vente et distribution au détail et en gros de petits appareils de cuisine.

 

 

FAIT À BOUCHERVILLE (QUÉBEC), LE 10 NOVEMBRE 2009.

 

 

 

Jean Carrière,

Membre, Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

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