Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE PRÉVUE À L’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : CUBANA

ENREGISTREMENT N° LCD50,813

 

 

[1]   Le 17 novembre 2006, à la demande de MacRae & Co. (la « Partie requérante »), le registraire a envoyé l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la « Loi ») à House of Horvath Inc. (l’« Inscrivante »), propriétaire inscrite de la marque de commerce susmentionnée (la « Marque »). La Marque est inscrite en liaison avec des « cigares » (les « Marchandises »).

 

[2]   L’article 45 de la Loi prévoit que le propriétaire inscrit est tenu d’établir que la marque de commerce a été employée au Canada à l’égard de chacune des marchandises et de chacun des services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. La période pertinente en l’espèce pour établir l’emploi va du 17 novembre 2003 au 17 novembre 2006.

 

[3]   L’« emploi » en liaison avec des marchandises est défini aux paragraphes 4(1) et 4(3) de la Loi sur les marques de commerce :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[]

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

En l’espèce, le paragraphe 4(1) s’applique.

 

[4]   En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a fourni l’affidavit de M. Joseph Horvath, président de l’Inscrivante, accompagné d’un échantillon de l’emballage du produit formant l’Annexe « A ». Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit; il n’a pas été demandé d’audience.

 

[5]   S’agissant de la pièce jointe (« Annexe “A” »), la Partie requérante a noté dans son plaidoyer écrit que cette pièce n’avait pas été souscrite sous serment, affirmant que cette erreur était plus qu’une formalité défectueuse. Toutefois, dans la contexte de la procédure prévue à l’article 45, en particulier dans le cas où la pièce jointe a été clairement décrite et identifiée dans l’affidavit, le fait que la pièce ne soit pas certifiée conforme est une irrégularité technique qui ne devrait pas rendre la preuve inadmissible [voir les décisions Baume & Mercier S.A. c. Brown (1985), 4 C.P.R. (3d) 96 (C.F. 1re inst.); Maximilian Fur Co. c. Maximillian for Men’s Apparel Ltd. (1983), 82 C.P.R. (2d) 146 (C.O.M.C.); Smith, Lyons, Torrance, Stevenson & Mayer c. Pharmaglobe Laboratories Ltd. (1996), 75 C.P.R. (3d) 85 (agent d’audience principal en marques de commerce)].

 

[6]   Les autres arguments de la Partie requérante sont les suivants : i) l’Inscrivante n’a pas établi l’emploi de la Marque, du fait qu’elle n’a pas fourni d’éléments de preuve attestant des ventes, comme des factures, et ii) la preuve de l’Inscrivante d’établit pas l’emploi de la Marque dans la pratique normale du commerce.

 

[7]   S’agissant des observations de la Partie requérante, les paragraphes pertinents de l’affidavit de M. Horvath sont reproduits ci-dessous :

            [traduction]

5.                  Le 6 octobre 2004, la Société a vendu (au prix de 79,20 $) et expédié à une cliente se trouvant à Toronto, en Ontario (soit Cigars for You, alors établie au 330, avenue Steeles Ouest, North York (Ontario) L4J 6W9) une commande de cent vingt (120) cigares portant la marque de commerce Cubana imprimée sur l’enveloppe de cellophane de chaque cigare.

6.                  Le 22 août 2006, la Société a vendu (au prix de 37,86 $) et expédié à une cliente se trouvant à Halifax, Nouvelle-Écosse (soit Sievert’s Ltd., établie au 1573, rue Barrington, Halifax (Nouvelle-Écosse) B3J 1Z7 (Tél. : 902-422-4544, contact : M. Craig Sievert)) une commande de soixante (60) cigares portant la marque de commerce Cubana imprimée sur l’enveloppe de cellophane de chaque cigare.

7.                  L’Annexe « A » ci-jointe est constituée d’une copie de l’enveloppe de cellophane mentionnée qui sert à envelopper les cigares que vend la Société, qui concerne et porte la marque de commerce Cubana, y compris les ventes mentionnées précédemment du 6 octobre 2004 et du 22 août 2006.

 

[8]   S’agissant des observations de la Partie requérante au sujet de l’absence de preuve de factures, il n’y a aucun type de preuve en particulier qui doit être fourni et un affidavit sans factures en pièce jointe n’est pas présumé inutile (voir la décision Lewis Thomson & Sons Ltd. c. Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.)).

 

[9]   En l’espèce, l’auteur de l’affidavit a fourni des déclarations de fait relatives à deux cas de ventes de Marchandises à des parties non reliées. Ces renseignements comportent des faits tels que les dates des ventes, les noms et adresses des acheteurs, les quantités des marchandises achetées et les sommes totales en dollars des opérations de vente. Ces affirmations vont nettement au‑delà de simples affirmations légales d’emploi [voir l’arrêt Central Transport, Inc. c. Mantha & Associés/Associates (1995), 64 C.P.R. (3d) 354 (C.A.F.)]. Je conclus donc que les faits notés ci-dessus relatifs aux opérations de vente, malgré l’absence de factures, suffisent à établir que l’Inscrivante a effectué des ventes de Marchandises au cours de la période pertinente.

 

[10]           Sur le point de savoir si ces ventes ont eu lieu dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante, la Partie requérante fait valoir plus spécifiquement que M. Horvath ne décrit pas la pratique normale du commerce de l’Inscrivante et que la preuve n’établit pas clairement que les ventes des cigares CUBANA ont été réalisées de bonne foi dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante. Elle soutient que le prix peu élevé des cigares, vraisemblablement inférieur au coût, est inexpliqué et suspect, à tel point que ces ventes ne constituent pas une preuve fiable d’opérations commerciales véritables. En outre, elle fait valoir que ces ventes sont insuffisantes pour des produits peu dispendieux et qu’il n’a pas été fourni d’autres faits justifiant de conclure qu’elles ont eu lieu dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante. À l’appui de cette argumentation, la Partie requérante a cité de la jurisprudence [notamment les décisions S.C. Johnson & Son, Inc. c. Registraire des marques de commerce (1981), 55 C.P.R. (2d) 34 (C.F. 1re inst.); Cast Iron Soil Pipe Institute c. Concourse International Trading Inc. (1988), 19 C.P.R. (3d) 393 (C.O.M.C.); Ogilvy Renault c. Metro Meat Ltd. (1988), 23 C.P.R. (3d) 126 (C.O.M.C.); Rideout & Maybee c. Frances Denney Inc. (1992), 46 C.P.R. (3d) 574 (C.O.M.C.); Wallace c. Geoservices (1988), 19 C.P.R. (3d) 561 (C.O.M.C.)].

 

[11]           Cependant, contrairement à la Partie requérante et malgré le volume minime des ventes produites en preuve, je ne vois rien dans cette preuve qui me porte à conclure que ces ventes n’étaient pas faites de bonne foi dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante (voir la décision Rogers & Milne c. Sherwood-Drolet Ltée (2001), 16 C.P.R. (4th) 109 (C.O.M.C.)). Les décisions sur lesquelles s’appuie la Partie requérante se distinguent de l’espèce : en l’occurrence, des détails spécifiques de deux opérations de vente distinctes ont été fournis et on ne s’est pas contenté d’affirmer simplement que des ventes ont eu lieu. En outre, un certain nombre des décisions sur lesquelles se fonde la Partie requérante ont été rendues avant les modifications de 1994 de l’article 45 de la Loi; ces modifications ont eu pour effet de supprimer l’obligation d’établir l’emploi au moment de l’avis donné par le registraire.

 

[12]           Aucun minimum d’activité commerciale n’est exigé pour maintenir l’enregistrement [voir la décision Vogue Brassière Inc. c. Sim & McBurney (2000), 5 C.P.R. (4th) 537 à la page 549 (C.F. 1re inst.)]. De plus, une seule vente suffit, dans la mesure où il s’agit d’une véritable opération commerciale et où elle n’est pas perçue comme ayant été montée ou conçue délibérément pour protéger l’enregistrement de la marque de commerce [voir la décision Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. et al (1987), 13 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.) et l’arrêt Quarry Corp. c. Bacardi & Co. (1999), 86 C.P.R. (3d) 127 (C.A.F.)]. Le seuil pour établir l’emploi dans la procédure prévue à l’article 45 est très bas; l’Inscrivante doit seulement établir l’emploi à première vue [voir l’arrêt Austin Nichols & Co. c. Cinnabon, Inc. (1998), 82 C.P.R. (3d) 513 (C.A.F.) à la page 525].

 

[13]           Même si l’on peut soutenir que le prix des Marchandises est faible, comme je ne vois pas d’ambiguïté dans la preuve, il n’y a aucune raison de conclure que les ventes dont il est fait état dans la preuve n’ont pas été réalisées dans la pratique normale du commerce dans le cadre d’une opération de commerce visant ces marchandises en vue d’acquérir un achalandage et de réaliser des bénéfices grâce aux produits de marque (voir l’arrêt Imperial Group Ltd. c. Philip Morris & Co. Ltd. [1982] F.S.R. 72 et la décision Lin Trading Co. c. CBM Kabushiki Kaisha (1985), 5 C.P.R. (3d) 27 (C.O.M.C.), conf. par (1987), 14 C.P.R. (3d) 32 et (1988), 21 C.P.R. (3d) 417, eu égard à la définition de l’expression « pratique normale du commerce »).

 

[14]           Compte tenu de ce qui précède et considérant le principe bien établi selon lequel l’article 45 de la Loi vise à fournir une procédure sommaire simple et expéditive destinée à débarrasser le registre du « bois mort », je suis convaincue de l’emploi de la marque de commerce visée au sens de l’article 45 et du paragraphe 4(1) de la Loi. Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués conformément au paragraphe 63(3) de la Loi, je conclus que l’enregistrement de la marque de commerce doit être maintenu au registre. L’enregistrement n° LCD50,813 sera maintenu conformément aux dispositions du paragraphe 45(5) de la Loi.

 

 

 

 

 

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 16 JUIN 2009.

 

K. Barnett

Agente d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Mélanie Lefebvre, LL.B., trad. a.

 

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