Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 286

Date de la décision : 2014-12-22

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Santa Barbara Restaurant Group, Inc. et Carl's Jr. Restaurants LLC. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,262,781 pour la marque de commerce The Green Burrito au nom de Jay Veto

[1]               Jay Veto (le Requérant) a produit une demande d'enregistrement de la marque de commerce The Green Burrito pour un emploi en liaison avec des services de fourniture d'aliments et de boissons, services de restaurant; services de traiteur; et un certain nombre de produits, dont des aliments, des boissons et des vêtements. La preuve de M. Veto tient au fait que c'était le rêve de toute sa vie d'ouvrir son propre restaurant.

[2]               Pour arriver à une marque potentielle, M. Veto a fouillé les États-Unis afin de trouver un concept qui, selon lui, fonctionnerait au Canada. Au cours de ses recherches, M. Veto a trouvé plusieurs chaînes de restaurant américaines, incluant les restaurants GREEN BURRITO du Santa Barbara Restaurant Group, Inc. (Santa Barbara Restaurant) situés sur la côte ouest des États-Unis. Santa Barbara Restaurant et Carl’s Jr. Restaurants LLC se sont opposées à la demande d'enregistrement sur la base que M. Veto n'avait pas l'intention d'employer la marque de commerce The Green Burrito, pas plus qu’il n’était convaincu d'avoir le droit d'employer cette marque de commerce au Canada, et parce que cela crée de la confusion avec l'emploi antérieur et/ou la révélation de la marque de commerce et du nom commercial GREEN BURRITO de Santa Barbara Restaurant.

[3]               Pour les raisons exposées ci-après, j'estime que cette demande d'enregistrement devrait être rejetée, puisque M. Veto n'a pas démontré son intention de bonne foi d'employer la marque de commerce The Green Burrito. En l'absence de toute preuve documentaire ou de déclaration quant aux spécificités de son intention commerciale, les assertions de M. Veto indiquant qu'il prévoyait exploiter un restaurant puis une franchise servant des aliments mexicains en liaison avec la marque de commerce The Green Burrito ne sont pas suffisantes pour démontrer qu'il avait l'intention de bonne foi d'employer sa marque de commerce.

Contexte

[4]               Le 27 juin 2005, le Requérant a produit une demande d'enregistrement de la marque de commerce The Green Burrito (la Marque) sur la base d'un emploi projeté en liaison avec les produits et services suivants (les Produits et Services) :

Produits :

(1) Produits alimentaires préparés pour la consommation humaine, nommément burritos, boulettes pour hamburgers, extraits de viande, hamburgers, sandwichs, saucisses cuites, bacon cuit, sandwichs au bifteck, sandwichs au rosbif, sandwichs au poulet, sandwichs au poisson, sandwichs de type hot-dog, sandwichs à déjeuner spécialement préparés constitués de saucisse, de bacon et d'œufs, burritos à la viande spécialement préparés; fruits et légumes en conserve, séchés et cuits; boulettes de légumes; produits de pommes de terre et d'oignons, nommément croustilles, rondelles d'oignon frites, pommes de terre frites, pommes de terre au four, pommes de terre cuites et pommes de terre rissolées spécialement préparées; œufs; omelettes et œufs cuits spécialement préparés; lait, crème, fromage, crème sure, fromage à la crème, yogourt; huiles et graisses alimentaires; conserves et marinades; confitures, gelées et compotes de fruits; soupes; salades; ingrédients à salade transformés; sauces à salade pour consommation sur place ou à l'extérieur; croûtons; café; thé; cacao, café décaféiné; sucre; farine; céréales; biscuits secs; pain et pâtisseries; glaces; sel, poivre; moutarde; sauces à la viande; sauces tomate; sauces au fromage; épices; poivre; vinaigre; relishs; friandises; crêpes; maïs éclaté; crèmes-desserts; chili; pain doré; burritos de déjeuner; quesadillas de déjeuner; croissants; muffins; danoises; biscuits; gâteau et gâteau au fromage. (2) Boissons préparées pour la consommation humaine, nommément eaux minérales et gazeuses, boissons gazeuses, boissons gazeuses aromatisées aux fruits, jus de fruits, boissons distribuées en fontaine composées de sirops aromatisés et d'eau gazeuse; bière. (3) Serviettes de table en papier, sacs en papier et napperons en papier. (4) Tee-shirts, tasses, grandes tasses, papier d'emballage, boîtes, jeux de plateau, jeux de balle de poche, figurines d'action, casse-tête, livres à colorier, marqueurs, automobiles et camions miniatures, ballons, chaînes porte-clés, cadres, pantalons, chemises, chandails, chaussures, bavoirs, gourdes, vélos, chapeaux, lunettes, bonneterie, bas-culottes, sous-vêtements, lingerie, pyjamas.

Services :

(1) Services de fourniture d'aliments et de boissons, services de restaurant; services de traiteur; services d'aliments et de boissons à emporter et au volant; cafés, cafétérias, cantines et casse-croûte.

[5]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 15 septembre 2010.

[6]               Le 15 novembre 2010, Santa Barbara Restaurant s'est opposée à la demande sur la base des motifs résumés ci-dessous :

(a)     La demande n'est pas conforme à l'article 30e) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Le Requérant n'a pas l'intention d'employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits et Services.

(b)     La demande n'est pas conforme à l’article 30i) de la Loi. Le Requérant ne peut se déclarer convaincu d'avoir le droit d'employer la Marque, compte tenu de la révélation antérieure des marques de commerce et noms commerciaux GREEN BURRITO et THE GREEN BURRITO au Canada par Santa Barbara Restaurant. De plus, le requérant a pris l’habitude d’usurper les droits de marques de commerce de tiers en produisant continuellement des demandes d'enregistrement de marques de commerce qui sont en conflit direct avec des marques de commerce et/ou des noms commerciaux bien connus de tiers.

(c)     Le Requérant n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce en vertu des articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi, parce que, à la date de la production, elle créait de la confusion avec les marques de commerce et noms commerciaux GREEN BURRITO et THE GREEN BURRITO de Santa Barbara Restaurant.

(d)    La Marque n'est pas distinctive des produits et services du Requérant, puisque les marques de commerce et noms commerciaux de Santa Barbara Restaurant ont antérieurement été révélés ou ont acquis une réputation au Canada.

D'entrée de jeu, je remarque que je considère que l'emploi de la marque de commerce et du nom commercial THE GREEN BURRITO constitue un emploi de la marque de commerce et du nom commercial GREEN BURRITO.

[7]               Les droits de marque de commerce appartenant à Santa Barbara Restaurant ont subséquemment été transférés à Carl’s Jr. Restaurants LLC (collectivement appelés l'Opposante) et la déclaration d'opposition a été modifiée en conséquence.

[8]               Le Requérant a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle il nie les allégations de l'Opposante.

[9]               L'Opposante a produit en preuve ce qui suit :

         L'affidavit de Chantal St. Denis, une agente de marques de commerce employée par son agent.

         Les affidavits d'Albert L. Abaunza (affidavits 1 et 2), un étudiant en droit employé par son agent.

         Les affidavits d'Anthony Kunkel, Michael Stephan, Richard Marier et Bernard Schober, tous des enquêteurs privés retenus pour enquêter sur les antécédents de Jay Veto.

         L'affidavit de Theodore Abajian, le vice-président exécutif et directeur financier de CKE Restaurants Inc., une affiliée de l'Opposante.

[10]           Le Requérant a produit en preuve l'affidavit de Jay Veto. M. Veto a été contre-interrogé et les transcriptions, les pièces et les réponses aux engagements ont été versées au dossier.

[11]           L'Opposante a produit un plaidoyer écrit et les deux parties ont assisté à une audience tenue le 27 août 2014.

Dates pertinentes et fardeau de preuve

[12]           Les dates pertinentes qui s'appliquent aux motifs d'opposition sont les suivantes :

         articles 38(2)a)/30 – la date de production de la demande d'enregistrement [voir Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC) à 475];

         articles 38(2)c)/16(3) – la date de production de la demande d’enregistrement [voir l'article 16(3) de la Loi];

         articles 38(2)d)/2 – la date de production de l'opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 à 324 (CF)].

[13]           Avant de se pencher sur la question de la confusion entre la Marque et la marque de commerce et le nom commercial de l'Opposante, il est nécessaire d'examiner certaines exigences techniques relatives i) au fardeau de preuve initial imposé à un opposant au soutien des allégations figurant dans la déclaration d'opposition et ii) au fardeau ultime imposé à un requérant pour établir sa preuve.

[14]           En ce qui concerne le point i) susmentionné, il incombe à un opposant de démontrer les faits sur lesquels il appuie ses allégations formulées dans la déclaration d'opposition : John Labatt Limited c The Molson Companies Limited, (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst) à 298. La présence d'un fardeau de preuve imposé à un opposant à l'égard d'une question donnée signifie que, pour que la question soit considérée, la preuve doit être suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de ladite question. En ce qui concerne le point ii) susmentionné, c'est au requérant qu'incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande d'enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi invoquées par un opposant (pour les allégations pour lesquelles l'opposant s'est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombait). Le fait que le fardeau ultime incombe au requérant signifie que, s'il est impossible d'arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l'encontre du requérant.

Motif d'opposition fondé sur l'article 30e)

[15]                 L'article 30e) de la Loi exige qu'un requérant d'une marque de commerce projetée déclare qu'il a, lui-même ou par l’entremise d’un licencié, ou lui-même et par l’entremise d’un licencié, l'intention d'employer la marque de commerce au Canada. Dans Hunter Douglas Canada Ltd c Flexillume Inc (1983), 78 CPR (2d) 212 à 222 et 223 (COMC), le commissaire Martin explique l'objet de l'article 30e) :

[traduction]
…Le libellé de l’article 29e) [l’ancienne version de l’article 30e)] de la Loi est clair et visait manifestement à empêcher les requérants de faire le trafic de marques de commerce. ... Les dispositions de la Loi sur les marques de commerce relatives aux demandes fondées sur l’emploi projeté prévoient une exception à la common law selon laquelle les droits relatifs aux marques de commerce ne s’acquièrent qu’avec l’usage. Ainsi, comme c’est le cas pour toutes autres exceptions à la common law prévues par la Loi, les dispositions relatives aux demandes fondées sur un emploi projeté devraient être interprétées de façon stricte.

 

[16]                 L'article 30e) a pour effet pratique de permettre à un requérant de déterminer si sa marque de commerce est enregistrable, avant de se lancer dans des campagnes publicitaires coûteuses ou d'investir d'importantes sommes d'argent dans l'étiquetage et l'emballage de matériel [Manuel d'examen des marques de commerce, II.7.4.1].

L'Opposante s'est-elle acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait?

[17]                 L'Opposante allègue que : (i) M. Veto a produit des demandes d'enregistrement de marques de commerce visant des produits et services au-delà ses capacités apparentes de production des produits ou de prestation des services à l'égard desquels les demandes sont produites; (ii) il n'a démontré aucune tentative quelconque d'emploi de telles marques de commerce; et (iii) ses actions suggèrent qu'il participe au trafic de marques de commerce plutôt que d'avoir l'intention véritable d'employer la Marque.

[18]                 Pour s'acquitter de son fardeau de preuve en ce qui concerne ce motif d'opposition, l'Opposante doit présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement que le Requérant n'a pas l'intention de bonne foi d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services. Le fardeau de preuve en ce qui concerne l'article 30e) est relativement peu exigeant étant donné la possibilité que le Requérant soit le seul à avoir en sa possession les éléments permettant de prouver les faits en cause [Canadian National Railway Co c Schwauss (1991), 35 CPR (3d) 90 à 94 et 95 (COMC)]. De plus, le fait que la date pertinente soit la date de production de la demande d'enregistrement n'empêche pas l'appréciation de preuve ultérieure à cette date dans la mesure où elle indique une situation qui existait à la date pertinente [voir Bacardi & Co c Jack Spratt Manufacturing (1984), 1 CPR (3d) 122 à 125 et 126 (COMC)].

[19]                 L'Opposante affirme que ce qui suit est suffisant pour s'acquitter de son fardeau de preuve :

(a)      Le Requérant a produit une série de demandes d'enregistrement de marques de commerce pour une vaste gamme de produits et services comme la demande no 1,273,247, produite le 23 septembre 2005, dans laquelle des avions, des hélicoptères, des cartes de crédit et des téléphones cellulaires étaient visés, et la demande no 1,270,885, produite le 2 septembre 2005, dans laquelle des appareils photo, des housses à ski, bottes, des téléviseurs, l'exploitation d'aéronefs, de salons de beauté, de boutiques hors taxes, de casinos étaient visés par la demande (affidavit de Mme St-Denis, pièce A).

(b)     Le Requérant a produit des demandes d'enregistrement des marques de commerce LA SALSA FRESH MEXICAN GRILL (demande no 1,265,420); The Green Burrito et The Six Dollar Burger (demande no 1,263,923) (affidavit de Mme St-Denis, pièce B) qui avaient antérieurement fait l’objet d’une demande d’enregistrement aux États-Unis (affidavit de Mme St-Denis, para 11, pièce G) et étaient employées par l'Opposante ou par une affiliée aux États-Unis (voir l'affidavit de M. Abajian, para 3, 10, 19 et 35).

(c)     Le Requérant a très peu d'expérience dans le domaine de la restauration. Son expérience pratique inclut d'avoir aidé son père dans la préparation des aliments pour les clients du dépanneur de son père alors qu'il était âgé de 11 à 17 ans (contre-interrogatoire de M. Veto, Q85 à 113) et sa formation dans le domaine consiste en ce qu'il a appris d'autres restaurateurs et de recherches en ligne (contre-interrogatoire de M. Veto, Q119 à 122, 130 et 334).

(d)    Le Requérant n'a pas commencé l'emploi de la Marque et a retardé la poursuite de la demande d'enregistrement en demandant de nombreuses prolongations de délai (Q245 à 249; 262 à 284).

245

[traduction]
Qu'avez-vous fait au cours de la période entre la production, en 2005, et le premier avis que vous avez reçu que l'Opposante avait produit une demande d'enregistrement de la même marque au Canada plus d'une année plus tard? Qu'avez-vous fait pour vous préparer au domaine de la restauration?

 

Mon intention était que la Marque de commerce soit accueillie avant de poursuivre avec la Marque de commerce.

248

Je comprends, mais vous auriez pu commencer des préparatifs. Je n'ai pas dit que vous devriez l'employer, mais quels préparatifs, s'il y en a, avez-vous commencés à faire?

 

J'ai consulté des restaurateurs, j'ai mené des recherches. Je n'étais pas pressé. J'avais droit à cette... Je crois que j'avais droit à cette Marque de commerce et je n'étais pas pressé de poursuivre tant qu'elle n'était pas accueillie.

249

Ainsi, M. Veto, vous avez dit lorsque je vous ai demandé si votre intention était sérieuse d'entrer dans le domaine de la restauration, que vous avez passé 30 ans à faire autre chose avant de finalement vous tourner vers cela, alors pourquoi voudriez-vous procéder si lentement? Je ne comprends pas.

 

J'ai consulté de façon générale des personnes du domaine de la restauration, des fournisseurs, entre autres. J'avançais, mais j'attendais que la Marque de commerce soit accueillie.

Puisque, de toute façon, le Requérant n’est pas tenu de démontrer l’emploi d'une marque de commerce avant qu’elle n’ait été approuvée [Molson Canada c Anheuser-Busch, Inc (2003), 29 CPR (4th) 315 à 334 et 335 (CF)], le fait que M. Veto n'ait pas commencé à employer la Marque n'est pas pertinent.

[20]                 J'estime que, dans ce cas, l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve peu exigeant qui lui incombait. La preuve qui suit met en doute l'intention de bonne foi de M. Veto d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services :

(a)     Sur une période de six mois, M. Veto a produit des demandes d'enregistrement de marques de commerce couvrant des produits et services incluant des aliments, des bicyclettes, des avions, des hélicoptères, des téléphones cellulaires, des contenants pour animaux, des cartes à jouer, des distributeurs automatiques, des cartes de crédit, des cigarettes, l'exploitation d'aéronefs, des casinos en ligne et l'exploitation d'un immeuble de bureaux. Cela mène à la conclusion qu'il n'a peut-être pas eu l'intention de bonne foi d'employer la Marque, puisque ses demandes d'enregistrement de marques de commerce produites autour du 27 juin 2005 couvrent [traduction] « tous les produits imaginables disponibles » [Canadian National Railway Co c Schwauss, précité à 96]. De plus, cette preuve permet de conclure que le Requérant est peut-être impliqué dans le trafic de marques de commerce.

(b)     M. Veto a produit des demandes d'enregistrement de plusieurs marques appartenant à l'Opposante (ou à une entreprise liée) aux États-Unis, ce qui permet de déduire qu'il est peut-être impliqué, ou qu'il en a l'intention, dans le trafic des marques de commerce de l'Opposante.

(c)      Le fait que l'expérience professionnelle pertinente du Requérant est dans les domaines de la vente au détail et de l'immobilier renforce cette conclusion que le Requérant n'avait pas l'intention de bonne foi d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services à défaut d'expérience pertinente pour le faire [voir Cerverceria Modelo SA de CV c Marcon (2008), 70 CPR (4th) 355 à 370 (COMC) et Beiersdorf AG c Mitsbushi Gas Chemical Company, Inc 2012 COMC 210 aux para 11 à 13, où il a été statué que la preuve du requérant qu'un ingrédient chimique de base était utilisé dans la fabrication de divers produits plutôt qu’en liaison avec les produits eux-mêmes était suffisante pour que l'opposant s'acquitte de son fardeau de preuve peu exigeant].

Le Requérant sest-il acquitté du fardeau ultime qui lui incombait?

[21]                 La question est maintenant de savoir si le Requérant s’est acquitté du fardeau ultime de démontrer qu'il avait l'intention d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services à la date de production de la demande d'enregistrement. Pour s'acquitter de ce fardeau ultime, le propriétaire d'une demande d'enregistrement de marque de commerce sur la base d'un emploi projeté doit être en mesure de justifier son intention commerciale [Intel Corporation c Steven Emeny 2005 CanLII 78275 à 15]. En l'espèce, le Requérant ne s'est pas acquitté de son fardeau. Le Requérant a plutôt produit des déclarations vagues qui ne m'aident pas à conclure selon la prépondérance des probabilités que M. Veto avait l'intention de bonne foi d'employer la Marque.

[22]                 La preuve de M. Veto est qu'en 2005, il a décidé de poursuivre son rêve de s’impliquer dans l'industrie de la restauration rapide (affidavit de M. Veto, para 11et 12).

11

[traduction]
… En ce sens, j'ai mené plusieurs recherches sur Internet pour trouver différentes chaînes de restauration rapide en exploitation à travers le monde, mais qui n’étaient pas présentes au Canada afin de déterminer, entre autres, le genre d'aliments offerts, la gamme de prix et leur fonctionnement.

12

Mon objectif était de trouver quelques chaînes qui pourraient réussir au Canada et ensuite de chercher des investisseurs pour m'aider à exploiter une ou plusieurs concessions de restauration rapide dans la ville de Montréal et possiblement, par la suite, d'octroyer des franchises d'exploitation pour d'autres points de vente au Canada à des tiers.

[23]                 Cependant, lorsque questionné au sujet de son intention en ce qui concerne la Marque lors du contre-interrogatoire, M. Veto n'était en mesure que de fournir des réponses générales quant à son [traduction] « intention sérieuse » d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services incluant les franchises (Q213,219 à 232, 260 et 261). Par exemple, il explique qu'il [traduction] « aime les mots en liaison avec l'aliment en particulier » (contre-interrogatoire de M. Veto, Q212) et que la demande d'enregistrement [traduction] « énumère les produits et services, et que cela indique mes intentions quant à la façon d'employer la Marque » (contre-interrogatoire de M. Veto, Q225). De plus, M. Veto fournit les réponses suivantes dans son examen :

226

[traduction]
Je comprends, mais je vous demande ce qui vous a attiré vers la marque. Vous avez pris une décision, et vous avez dit que c'était le menu, que vous aimiez le menu. Était-ce simplement parce qu'il s'agissait d'aliments mexicains, ou était le choix d'aliments en particulier?

 

Je cherchais des aliments, des restaurants et c'est ce qui m'a attiré en fonction de ce qui me semblait idéal.

227

Je suis désolé, mais je ne comprends pas, qu'est-ce que ça veut dire?

 

J'ai choisi un genre d'aliments et une marque qui, selon moi, me plaisaient.

 

[24]                 Compte tenu du manque d'expérience et de formation de M. Veto dans le domaine de la restauration, il est impératif pour M. Veto de démontrer qu'il avait la connaissance ou l'expérience nécessaire pour être en mesure d'avoir l'intention de bonne foi d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services. Bien que M. Veto ait dit qu'il avait fait des recherches en ligne de matériels divers sur les franchises, les restaurants, les aménagements d'un magasin et qu'il avait pris des notes (contre-interrogatoire de M. Veto, Q322 à 337), M. Veto a été incapable de produire ses notes en réponse à la demande de l'avocat de l'Opposante sur quoi que ce soit en lien avec l'exploitation, la mise en marché d'un restaurant ou d'une franchise (réponses aux engagements, contre-interrogatoire de M. Veto, Q338). Il en résulte que je tire une conclusion défavorable que de telles notes ont été prises, ce qui est conforme aux observations de l'Opposante que M. Veto n'est pas en mesure d'offrir des services de restauration et met en doute la véracité de son intention d'employer la Marque en liaison avec les Services. De plus, il n'y a aucune preuve que l'intention commerciale de M. Veto était de travailler avec une licenciée d'expérience pour lancer sa marque.

[25]                 Considérant que la demande d'enregistrement couvre une gamme de services incluant des services de restaurant, des services de traiteur, des cafés, des cafétérias, des cantines et des casse-croûte, les déclarations vagues de M. Veto dans son affidavit et dans son contre-interrogatoire quant à son intention commerciale ne fait pas en sorte que le Requérant s'est acquitté de son fardeau de démontrer qu'il avait l'intention de bonne foi d'employer la Marque en liaison avec les Services.

[26]                 Les réponses de M. Veto au cours de son contre-interrogatoire indiquant que son intention d'offrir les Produits pour faire la promotion de la marque (Q349 à 368) ne sont pas suffisantes pour qu'il s'acquitte de son fardeau ultime en ce qui concerne les Produits. Les déclarations de M. Veto indiquant qu'il a rencontré des tiers qui ont fait la promotion de leurs restaurants avec plusieurs produits différents (Q361), qu'il a envisagé la possibilité de faire fabriquer d'autres éléments par des tiers (Q352) et qu'il est en mesure de déterminer par lui-même comment il aimerait faire la promotion d'un restaurant (Q364) ne sont pas suffisantes pour justifier son intention commerciale en ce qui concerne les Produits. Le Requérant s'appuie sur les affaires Jacobs Suchard Ltd c Trebor Bassett Ltd (1996), 69 CPR (3d) 569 à 573 (COMC) et Cerverceria Modelo SA de CV c Marcon, précitée, pour la proposition qu'un requérant peut s'appuyer sur autrui pour la fabrication de produits. Bien que cela soit vrai, dans ces deux affaires, les requérants étaient en mesure de démontrer leur intention commerciale, et il y avait des preuves qui semblaient identifier un fabricant particulier (Jacobs Suchard, précitée, à 573; Cerverceria Modelo, précitée, à 371) ou qu'ils avaient entrepris des négociations pour la production [Cerverceria Modelo, précitée, à 371].

[27]                 Bien que M. Veto puisse avoir eu l'impression qu'il avait l'intention commerciale sérieuse d'employer la Marque en liaison avec les Produits et Services, en l'absence de preuve établissant son intention commerciale, je suis incapable de conclure qu'il s'est acquitté de son fardeau ultime en ce qui concerne ce motif d'opposition.

Motif d'opposition fondé sur l'article 30i)

[28]                 Le motif d'opposition fondé sur l'article 30i) allègue en partie que le Requérant ne pouvait pas avoir été convaincu qu'il avait le droit d'employer la Marque, parce que le Requérant devait connaître les marques de commerce et noms commerciaux GREEN BURRITO et THE GREEN BURRITO de l'Opposante. L'Opposante allègue également que le Requérant a pris l'habitude d'usurper les droits de marques de commerce de tiers en produisant continuellement des demandes d'enregistrement de marques de commerce qui sont en conflit direct avec des marques de commerce et/ou des noms commerciaux bien connus de tiers.

[29]                 L'article 30i) de la Loi exige qu’un requérant déclare dans sa demande qu'il est convaincu qu'il a droit d'employer la marque de commerce au Canada en liaison avec les marchandises ou services visés par la demande. La déclaration fondée sur l'article 30i) est censée être la preuve que le requérant a produit sa demande de bonne foi [Cerverceria Modelo, précitée, à 366]. Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration exigée par l’article 30i), ce motif d’opposition ne devrait être accueilli que dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à 155].

L'Opposante s'est-elle acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait?

[30]                 La preuve de l'Opposante qui permet de conclure que le Requérant semble être impliqué dans le trafic de marques de commerce discuté en ce qui concerne le motif d'opposition fondé sur l'article 30e) est suffisante pour que l'Opposante s'acquitte de son fardeau de preuve en mettant en doute la bonne foi de M. Veto.

Le Requérant s'est-il acquitté du fardeau ultime qui lui incombait?

[31]                 L’Opposante s’étant acquittée de son fardeau initial, je dois maintenant examiner si le Requérant s'est acquitté de son fardeau ultime de démontrer qu'il était convaincu qu'il avait le droit d'employer la Marque au Canada. Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus que M. Veto était convaincu qu'il avait le droit d'employer la Marque au Canada et n'a pas produit sa demande d'enregistrement de la Marque de mauvaise foi.

[32]            L'article 30i) de la Loi n'interdit pas à un requérant de faire une telle déclaration en ce qui concerne son droit d'employer une marque de commerce qu'il sait être employée dans un autre pays. Dans Taverniti SARL c DGGM Bitton Holdings Inc (1986), 8 CPR (3d) 400 (COMC) à 404 et 405, le commissaire Troicuk explique que :

[Traduction] Le troisième motif d'opposition de l'Opposante indique que la demande de la Requérante n'est pas conforme à l'article 30i), en ce sens que la Requérante ne peut pas avoir été convaincue qu'elle avait le droit d'employer la marque de commerce au Canada ... L'Opposante a fait valoir qu'elle pouvait déduire de la preuve que ... la Requérante était au courant des marques de commerce de l'Opposante et ... ne pouvait pas avoir été convaincue qu'elle était la personne ayant droit à l'enregistrement. Pour soutenir cette observation, l'Opposante s'est appuyée sur la décision de la Cour de l'échiquier dans l'affaire Williamson Candy Co. C. W. J. Crothers Co., [1924] Cour de l'échiquier 183 (Cour de l'échiquier du Canada) et plus particulièrement, la déclaration suivante de Maclean J au paragraphe 191 :

[Traduction] Je crois que la connaissance d'un enregistrement et d'un utilisateur à l'étranger d'une marque s'inscrivant dans une même catégorie de produits, comme en l'espèce, et particulièrement lorsque l'utilisateur étranger se trouve un pays contigu où l'on parle la même langue, vers lequel les déplacements sont faciles et où la publicité circule si librement, devrait, dans la plupart des cas, constituer un obstacle à l'enregistrement fait sciemment de cette marque ici.

L'affaire Williamson a toutefois été tranchée en vertu de la Loi des marques de commerce et dessins de fabrique, LRC 1906, c. 71, dont l'article 13 exige qu'un requérant déclare que la marque de commerce pour laquelle il demande l'enregistrement n'était pas, à sa connaissance, employée par toute autre personne qu'elle-même au moment de son adoption de ladite marque. Aucune disposition du genre n'existe dans l'actuelle Loi sur les marques de commerce. En l'espèce, l'Opposante n'a pas établi d'emploi antérieur, de révélation antérieure ou de production antérieure d'une demande ni établi que ses marques de commerce étaient suffisamment connues au Canada pour faire perdre à la marque de commerce du Requérant son caractère distinctif. Il n'existe donc aucun fondement à partir duquel on peut conclure que le Requérant ne pouvait pas avoir été convaincu qu'il avait le droit d'employer sa marque de commerce au Canada en liaison avec les produits visés dans sa demande. Par conséquent, je rejette également le troisième motif d'opposition de l'Opposante.

[33]                 En l'espèce, la preuve du Requérant est suffisante pour qu'il s'acquitte de son fardeau de démontrer qu'il est convaincu qu'il a le droit d'employer la Marque au Canada. M. Veto était d'avis qu'il avait le droit d'employer une marque de commerce qui n'avait pas été révélée ou employée antérieurement au Canada (contre-interrogatoire de M. Veto, Q84). M. Veto n'avait pas vu de publicité de GREEN BURRITO au Canada (affidavit de M. Veto, para 17), pas plus que ses recherches n'ont démontré de publicité au Canada (contre-interrogatoire de M. Veto, Q157 à 186). De manière importante, les résultats des recherches de M. Veto sont conformes à la preuve de l'Opposante, qui n'inclut aucune preuve de publicité arborant la marque de commerce GREEN BURRITO au Canada en date du 27 juin 2005. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté.

Motifs d'opposition fondé sur les articles 16(3)a) et 16(3)c)

[34]                 L'Opposante a plaidé que le Requérant n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce en vertu des articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi, parce que, à la date de la production, elle créait de la confusion avec les marques de commerce et noms commerciaux GREEN BURRITO et THE GREEN BURRITO antérieurement révélés au Canada par l'Opposante et ses prédécesseurs en titre.

[35]                 Pour s'acquitter de son fardeau de preuve en ce qui concerne le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a), l'Opposante doit démontrer qu'elle avait révélé sa marque de commerce invoquée à la date de production de la demande d'enregistrement. Un opposant doit également démontrer qu'il n'avait pas abandonné sa marque de commerce à la date d'annonce de la demande visée par l'opposition [voir l'article 17(5) de la Loi]. D'entrée de jeu, je remarque qu'il n'est pas possible de s'appuyer sur une révélation antérieure d'un nom commercial [Habib Bank Limited c Habib Bank AG Zurich, 2011 COMC 208 au para 21]. Par conséquent, le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)c) est rejeté.

L'Opposante s'est-elle acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait en ce qui concerne le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a)?

[36]                 Pour obtenir gain de cause en ce qui concerne le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a), l'Opposante doit démontrer qu'elle a révélé sa marque de commerce GREEN BURRITO au Canada avant le 27 juin 2005 et qu'elle ne l'avait pas abandonnée le 15 septembre 2010.

[37]                 L'article 5 de la Loi explique ce qui est requis pour confirmer la révélation d'une marque :

5. [traduction]
Une personne est réputée faire connaître une marque de commerce au Canada seulement si elle l’emploie dans un pays de l’Union, autre que le Canada, en liaison avec des produits ou services, si, selon le cas :
a) ces produits sont distribués en liaison avec cette marque au Canada;

b) ces produits ou services sont annoncés en liaison avec cette marque :

(i) soit dans toute publication imprimée et mise en circulation au Canada dans la pratique ordinaire du commerce parmi les marchands ou usagers éventuels de ces produits ou services,

(ii) soit dans des émissions de radio ordinairement captées au Canada par des marchands ou usagers éventuels de ces produits ou services, et si la marque est bien connue au Canada par suite de cette distribution ou annonce.

[38]                 On considérera que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve si elle a démontré que, avant le 27 juin 2005 :

1. sa marque de commerce a été employée dans un autre pays de l'Union;

2. ses services de restauration ont été annoncés en liaison avec sa marque GREEN BURRITO de l’une ou l'autre des deux manières énoncées à l'article 5;

   3. cette marque est devenue bien connue au Canada en raison de cette publicité (qui nécessite que les consommateurs de plusieurs régions au Canada connaissent assurément la marque) [Marineland Inc c Marine Wonderland & Animal Park Ltd (1974), 16 CPR (2d) 97 (CF 1re inst) à 111 et 112].

[39]                 La preuve de l'Opposante est insuffisante pour qu'elle s'acquitte de son fardeau de preuve puisqu'il n'y a aucune preuve que sa marque de commerce GREEN BURRITO a été annoncée dans des publications imprimées et mises en circulation au Canada ou dans des émissions de radio ordinairement captées au Canada avant la date pertinente. Pour les raisons susmentionnées, le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur le caractère distinctif

[40]                 L'Opposante allègue que la Marque n'est pas distinctive au regard de sa marque de commerce et son nom commercial qui ont antérieurement été révélés ou ont acquis une réputation au Canada. C'est à l'Opposante qu'incombe le fardeau de prouver qu'en date du 15 novembre 2010, sa marque de commerce ou son nom commercial GREEN BURRITO était connu dans une mesure suffisante pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif. Une opposition fondée sur l’absence de caractère distinctif ne se limite pas à la prestation de services ou à la vente de produits au Canada. Elle peut être aussi fondée sur la preuve d'une connaissance ou d'une réputation de la marque de commerce de l'Opposante, incluant celles acquises par le bouche-à-oreille ou obtenues par voie d'articles de journaux ou de magazines [Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd, (1981) 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst) à 58 et 59].

[41]                 Les propositions suivantes résument la jurisprudence pertinente portant sur le caractère distinctif [Bojangles' International, LLC c Bojangles Café Ltd (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF) aux para 33 et 34].

• Le fardeau de preuve incombe à la partie qui allègue que la réputation de sa marque empêche la marque de l'autre partie d'être distinctive;

• Toutefois, il incombe encore à l’auteur de la demande d’enregistrement de prouver que sa marque est distinctive;

• Une marque doit être connue au Canada dans une certaine mesure, du moins pour annuler le caractère distinctif établi d’une autre marque, et sa réputation au Canada devrait être importante, significative ou suffisante;

• Subsidiairement, une marque pourrait annuler le caractère distinctif d’une autre marque si elle est bien connue dans une région précise du Canada;

• Le propriétaire d'une marque de commerce étrangère ne peut pas simplement affirmer que sa marque de commerce est connue au Canada; il doit plutôt présenter une preuve claire à ce sujet.

L'Opposante s'est-elle acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait?

[42]           Bien que la preuve de M. Abajian présentée ci-dessous appuie une conclusion qu'un certain nombre de Canadiens peut avoir été mis en contact avec la marque GREEN BURRITO, dans son ensemble, ce n'est pas suffisant pour démontrer que sa réputation au Canada est importante, significative ou suffisante pour annuler le caractère distinctif de la Marque. Par conséquent, l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait.

Présence des Canadiens dans les restaurants Green Burrito

         En date de mars 2011, il y avait 487 restaurants GREEN BURRITO/CARL’S JR. et 10 kiosques GREEN BURRITO aux États-Unis, principalement en Californie (affidavit de M. Abajian, para 8, pièce A). La marque de commerce GREEN BURRITO est affichée sur les cartes à menus, les emballages de produits, les coupons et les enseignes (affidavit de M. Abajian, para 14 à 16; pièces C et D). Pour chacune des années 2007 à 2010, les ventes de GREEN BURRITO aux États-Unis ont dépassé les 24 M$ pour les sites appartenant à l'entreprise et 21 M$ pour les sites des franchisés. Plus d'un million de Canadiens ont visité l'État de la Californie États-Unis chaque année de 1999 à 2008 (affidavit de M. Abajian, para 12; pièce B).

         Bien que cette preuve suggère que certains Canadiens étaient familiers avec la marque GREEN BURRITO et peuvent avoir fréquenté un restaurant Green Burrito, cela n'implique pas que les consommateurs canadiens se souviendraient de la marque de telle sorte qu'elle ait une réputation importante, significative ou suffisante au Canada [voir, par exemple, Bojangles, précitée, au para 52 qui explique comment l'impact d'une marque sur les voyageurs peut varier].

Références sur des sites Web et dans des publications de tiers

         M. Abajian joint divers imprimés de sites Web qui font référence aux restaurants GREEN BURRITO (affidavit de M. Abajian, pièce F). Aucun des imprimés n'aide l'Opposante à démontrer la réputation de sa marque GREEN BURRITO au Canada. Bien qu'il me soit permis de prendre d’office connaissance de la diffusion du New York Times au Canada [Milliken & Co c Keystone Industries (1970) Ltd, (1986), 12 CPR (3d) 166 (COMC) à 168 et 169], les quelques références à GREEN BURRITO dans des articles de ce journal ne permettent pas de conclure qu'un nombre suffisant de Canadiens a été exposé de façon significative à la marque GREEN BURRITO.

         Le reste des imprimés n'aide pas l'Opposante à démontrer la réputation au Canada, puisqu'ils sont tirés de publications qui auraient un lectorat très limité (par exemple Nations Restaurant News ou Orange County Business Journal), ou de sites Web de commentaires qui servent à évaluer les restaurants dans des régions précises aux États-Unis (par exemple azcentral.com; losangeles.menupages.com) ou des sites Web fournissant de l’information nutritionnelle des restaurants pour les touristes (par exemple www.calorielab.com; www.godairyfree.org).

         De plus, dans tout le matériel fourni, il ne semble y avoir qu'une seule référence à un consommateur canadien. L'évaluation du 1er mai 2010 affichée sur www.urbanspoon.com du restaurant Carl’s Jr./Green Burrito semble faire référence au fait d'être canadien : [traduction] « Bon, voici qui est différent (pour nous Canadiens en voyage) pour un petit-déjeuner rapide ».

Étapes pour pénétrer le marché canadien

         L'Opposante a participé à des salons professionnels au Canada, incluant à Toronto, Vancouver et Montréal entre 2008 et 2010 (affidavit de M. Abajian, para 24); mis des annonces dans le Franchise Canada Magazine (affidavit de M. Abajian, pièce K-3), rencontré des propriétaires d'entreprises commerciales au Canada dans un objectif de comarquage ou d'investissement dans l'entrée au Canada des maques CARL’S JR/GREEN BURRITO (affidavit de M. Abajian, para 27); et participé à des activités de jumelage commercial (affidavit de M. Abajian, para 29). Compte tenu de la portée limitée du public cible de ces initiatives et de l'accent mis sur la marque Carl Jr.’s, je ne crois pas qu'aucune de ces activités n’aurait eu un impact notable sur la réputation de la marque GREEN BURRITO de l'Opposante pour les consommateurs canadiens.

[43]           Comme j'ai conclu que la marque de commerce/nom commercial GREEN BURRITO n'avait pas acquis une réputation suffisante au Canada en date du 15 novembre 2010 pour annuler le caractère distinctif de la Marque, il ne m'est pas nécessaire de conclure dans quelle mesure l'emploi de la marque GREEN BURRITO s'applique en faveur de l'Opposante. Il suffit de dire que les références de M. Abajian au fait que des franchises GREEN BURRITO [traduction] « exploitées sous licence de mon entreprise » (affidavit de M. Abajian, para 8), où [traduction] « mon entreprise » fait référence à quatre entreprises différentes (affidavit de M. Abajian, para 2), sont, au mieux, ambiguës [voir, par exemple, BCF SENCRL c Spirits International BV (2012), 101 CPR (4th) 413 (CAF) para 18 et 19].

[44]           Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté, considérant que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait.

Décision

[45]           Dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d'enregistrement, conformément à l'article 38(8) de la Loi.

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Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay, trad.

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