Contenu de la décision
TRADUCTION/TRANSLATION
AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION
de Professional Pharmaceutical Corp. / Corp.
Pharmaceutique Professionnelle à la demande
no 883,103 produite par Procter & Gamble Inc.
en vue de l’enregistrement de la marque de
commerce ACTIVE HYDRATING
Le 2 juillet 1998, la requérante, Procter & Gamble Inc., a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce ACTIVE HYDRATING à l’égard de « lotions et crèmes pour la peau », basée sur l’emploi projeté de la marque au Canada. La demande a été modifiée afin d’y ajouter un désistement concernant le mot HYDRATING. Elle a ensuite été publiée à des fins d’opposition le 15 septembre 1999.
L’opposante, Professional Pharmaceutical Corp. / Corp. Pharmaceutique Professionnelle, a déposé une déclaration d’opposition le 13 octobre 1999, dont copie a été transmise à la requérante le 2 novembre suivant. L’opposante allègue comme premier motif d’opposition que la demande de la requérante n’est pas conforme à l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce. L’opposante soutient que la requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait droit d’employer la marque de commerce lorsqu’elle a produit sa demande puisque la marque créait de la confusion avec la marque de commerce HYDRACTIVE que l’opposante avait antérieurement employée et enregistrée.
Le deuxième motif d’opposition est fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi. L’opposante fait valoir que la marque de commerce faisant l’objet de la demande n’est pas enregistrable puisqu’elle crée de la confusion avec la marque HYDRACTIVE enregistrée sous le numéro 405,790 en liaison avec les marchandises suivantes :
Produits hypoallergéniques, à savoir eaux de Cologne, savons, excipients d’onguent, huiles de beauté, vernis à ongles, eye‑liners, notamment liquides, mascaras, masques exfoliants hydratants, et fards à joues avec crème hydratante, poudres pour le visage, fonds de teint, crayons à sourcils, tampons démaquillants pour les yeux, produits de maquillage mat, à savoir crèmes pour le visage, trousses pour les paupières, fards à paupières compacts avec crème hydratante, crèmes pour les yeux, crèmes démaquillantes, crèmes pour les mains, fonds de teint en crème, crèmes lubrifiantes, crèmes hydratantes, fonds de teint translucides, lotions pour la peau, nettoyants pour la peau, shampooings, revitalisants capillaires, notamment en crème, lotions de mise en plis revitalisantes, lotions hydratantes après soleil, lotions solaires hydratantes, crèmes solaires hydratantes, fards en crème hydratants, fonds de teint, crèmes pour les ongles, vernis à ongles, crayons à sourcils et crayons pour le contour des lèvres, désodorisants et antisudorifiques.
Elle crée également de la confusion avec la marque HYDRACTIVE et dessin (illustrée ci‑dessous), enregistrée sous le numéro 429,428 en liaison avec les marchandises suivantes :
Articles de toilettes et produits de beauté hypoallergéniques, à savoir eaux de Cologne, savons, excipients d’onguent, huiles de beauté, vernis à ongles, eye‑liners, notamment liquides, mascaras, masques exfoliants hydratants, et fards à joues avec crème hydratante, poudres pour le visage, fonds de teint, crayons à sourcils, tampons démaquillants pour les yeux, produits de maquillage mat, à savoir crèmes pour le visage, trousses pour les paupières, fards à paupières compacts avec crème hydratante, crèmes pour les yeux, crèmes démaquillantes, crèmes pour les mains, fonds de teint en crème, crèmes lubrifiantes, crèmes hydratantes, fonds de teint translucides, lotions pour la peau, nettoyants pour la peau, shampooings, revitalisants capillaires, notamment en crème, lotions de mise en plis revitalisantes, lotions hydratantes après soleil, lotions solaires hydratantes, crèmes solaires hydratantes, fards en crème hydratants, fonds de teint, crèmes pour les ongles, vernis à ongles, crayons à sourcils et crayons pour le contour des lèvres, désodorisants et antisudorifiques.
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Comme troisième motif d’opposition, l’opposante fait valoir que la requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement selon l’alinéa 16(3)a) de la Loi parce que, à la date de production de sa demande, la marque de commerce faisant l’objet de celle‑ci créait de la confusion avec la marque HYDRACTIVE antérieurement employée au Canada par l’opposante et ses prédécesseurs en titre. Comme quatrième motif, l’opposante soutient que la marque de commerce faisant l’objet de la demande n’est pas distinctive parce qu’elle crée de la confusion avec la marque HYDRACTIVE qu’elle emploie en liaison avec les marchandises spécifiées dans l’enregistrement et énumérées plus haut.
La requérante a produit et signifié une contre‑déclaration. L’opposante a produit en preuve l’affidavit de son président‑directeur général, Michael Cape, et la requérante, les affidavits de Paul E. Thomas et de Susan Lo Re. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit, mais aucune audition n’a eu lieu.
Le premier motif ne constitue pas un motif d’opposition valable. Le simple fait que la marque de commerce de la requérante créait de la confusion avec la marque de commerce de l’opposante à la date de production de la demande de la requérante ne signifie pas que l’alinéa 30i) de la Loi n’a pas été respecté. L’opposante n’a pas allégué que la requérante savait que sa marque de commerce créait de la confusion avec les marques de l’opposante à cette date. Le premier motif d’opposition est donc rejeté.
En ce qui concerne le deuxième motif d’opposition, la date dont il faut tenir compte pour déterminer s’il y a confusion aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi est la date de ma décision : voir Conde Nast Publications Inc. v. Canadian Federation of Independent Grocers (1991), 37 C.P.R. (3d) 538, aux p. 541 et 542 (C.O.M.C.). En outre, il incombe à la requérante de démontrer qu’il n’existe aucun risque raisonnable de confusion entre les marques en cause. Finalement, il faut, lorsqu’on applique le critère relatif à la confusion prévu au paragraphe 6(2) de la Loi, tenir compte de toutes les circonstances, y compris celles énoncées expressément au paragraphe 6(5) de la Loi.
Pour ce qui est de l’alinéa 6(5)a) de la Loi, les deux marques de commerce déposées de l’opposante possèdent un caractère distinctif inhérent puisqu’elles comprennent le mot inventé HYDRACTIVE. Mais comme ce mot évoque dans une certaine mesure des produits de beauté qui hydratent activement la peau de la personne qui les utilisent, ces marques n’ont pas un caractère inhérent important.
Dans son affidavit, M. Cape déclare que les deux marques de commerce ont été employées sans interruption au Canada par l’opposante et ses prédécesseurs en titre en liaison avec des produits de beauté depuis 1992. Plus de 650 000 de ces produits ont été vendus entre 1994 et 1999, ce qui représente une valeur en gros de plus de 4 millions de dollars. Les emballages représentatifs des marchandises joints à l’affidavit de M. Cape montrent que les marques de commerce déposées sont toujours employées en liaison avec ce qui semble être une marque maison de l’opposante, à savoir la marque de commerce MARCELLE.
Selon M. Cape, les produits de sa société sont vendus dans différents magasins de détail et notamment dans les grandes chaînes de pharmacies. M. Cape déclare que les dépenses de publicité de la marque HYDRACTIVE ont dépassé 75 000 $ pour les années 1995 à 1997. En conséquence, je suis en mesure de conclure que les deux marques de commerce déposées de l’opposante sont devenues connues dans une certaine mesure au Canada dans le domaine des produits de beauté vendus au détail.
La requérante a produit un désistement relativement au mot HYDRATING, reconnaissant ainsi que ce mot n’est pas distinctif lorsqu’il est employé en liaison avec des produits de beauté. En fait, l’expression complète ACTIVE HYDRATING pourrait être descriptive des marchandises puisqu’elle indique que l’utilisation de celles‑ci a pour effet d’hydrater activement la peau. Le caractère inhérent de la marque de commerce de la requérante n’est donc pas important. Comme je ne dispose d’aucune preuve de l’emploi ou de la publicité de cette marque, je dois conclure qu’elle n’est pas du tout devenue connue au Canada.
La période pendant laquelle les marques ont été en usage au Canada favorise l’opposante. Quant aux alinéas 6(5)c) et 6(5)d) de la Loi, les parties reconnaissent que leurs marchandises et leur commerce sont semblables, si ce n’est identiques.
Pour ce qui est de l’alinéa 6(5)e) de la Loi, le degré de ressemblance des marques en cause en l’espèce dans la présentation ou le son est faible puisqu’elles contiennent toutes le mot ACTIVE. Par contre, le degré de ressemblance dans les idées qu’elles suggèrent est plus grand : toutes les marques évoquent l’idée d’hydratation active. Cependant, les mots ACTIVE et HYDRATING sont descriptifs lorsqu’ils sont employés avec des produits de beauté, de sorte que des différences mineures entre des marques contenant ces mots peuvent être suffisantes pour distinguer celles‑ci dans l’esprit des consommateurs.
La requérante a prétendu que l’importance de toute ressemblance entre les marques est atténuée par la preuve relative à l’état du registre contenue dans l’affidavit de Mme Lo Re. Cet élément est pertinent seulement si on peut en tirer des conclusions concernant l’état du marché : voir la décision rendue en matière d’opposition dans Ports International Ltd. v. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432, et la décision Del Monte Corporation v. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.). Il convient aussi de rappeler la décision rendue dans l’affaire Kellogg Salada Canada Inc. v. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.), qui appuie la proposition selon laquelle des conclusions au sujet de l’état du marché ne peuvent être tirées de la preuve relative à l’état du registre que si un grand nombre d’enregistrements pertinents sont retracés.
Mme Lo Re a retracé près de 30 marques de commerce contenant le mot ACTIVE ou ACTIV, déposées en liaison avec des produits de beauté ou d’hygiène. Sa recherche a aussi fait ressortir plus de 80 marques de commerce contenant des mots ayant le préfixe HYDR-, déposées en liaison avec le même genre de marchandises. Ainsi, sa recherche a démontré que ces mots se retrouvent souvent dans les marques de commerce employées dans le secteur des produits de beauté. Les consommateurs auraient donc moins tendance à se concentrer sur ces mots et distingueraient plus facilement les marques les contenant en s’attachant à leurs aspects différents.
L’affidavit de M. Thomas renforce ces conclusions. M. Thomas s’est rendu dans six magasins du Centre Eaton, à Toronto, afin de trouver des produits de beauté portant des marques de commerce ou des descriptions comprenant les mots ACTIVE ou HYDRA. Il a retracé plusieurs douzaines de produits de ce genre, ce qui confirme que ces mots sont fréquemment utilisés dans le secteur des produits de beauté. Par conséquent, des différences mineures entre les marques seront suffisantes pour éviter la confusion.
Lorsque j’ai appliqué le critère relatif à la confusion, j’ai tenu compte du fait que celui‑ci a trait à la première impression et au souvenir imparfait. Compte tenu des conclusions qui précèdent, et en particulier de la faiblesse inhérente des marques en cause, du faible degré de ressemblance entre elles et de l’utilisation fréquente de marques semblables sur le marché par d’autres commerçants, j’estime que la requérante a démontré, comme elle devait le faire, qu’il n’existe aucun risque raisonnable de confusion. Le deuxième motif d’opposition est donc également rejeté.
Pour ce qui est du troisième motif d’opposition, l’opposante a prouvé qu’elle employait sa marque de commerce HYDRACTIVE avant que la requérante produise sa demande et qu’elle n’avait pas abandonné cette marque à la date à laquelle la demande de la requérante a été publiée. Selon l’alinéa 16(3)a) de la Loi, c’est à la requérante qu’il incombe de démontrer que sa marque de commerce ne créait pas de la confusion avec la marque HYDRACTIVE de l’opposante à la date de production de sa demande. Les conclusions que j’ai tirées relativement au deuxième motif s’appliquent en grande partie au troisième motif. Aussi, j’estime que les deux marques ne créaient pas de la confusion le 2 juillet 1998. Le troisième motif est donc également rejeté.
Pour ce qui est du quatrième motif d’opposition, il appartient à la requérante de démontrer que sa marque distingue véritablement ses marchandises de celles d’autres propriétaires au Canada ou qu’elle est adaptée à les distinguer ainsi : voir Muffin Houses Incorporated v. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.). La date pertinente à cet égard est celle de la production de l’opposition (soit le 13 octobre 1999) : voir Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la p. 130 (C.A.F.), et Park Avenue Furniture Corporation v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, à la p. 424 (C.A.F.).
Tel qu’il a été exposé, le quatrième motif porte essentiellement sur la question de la confusion entre les marques des parties à la date de production de l’opposition. Les conclusions concernant le deuxième motif s’appliquent en grande partie ici aussi. Ainsi, j’estime que la marque ACTIVE HYDRATING de la requérante ne créait pas de la confusion avec la marque HYDRACTIVE de l’opposante le 13 octobre 1999. Le quatrième motif est donc également rejeté.
Compte tenu de ce qui précède, et en vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition.
FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 30 AVRIL 2003.
David J. Martin
Membre
Commission des oppositions des marques de commerce