Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 15

Date de la décision : 2012‑01‑25

 

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Dean Palmer IP Law IProperty Inc. visant les enregistrements no LMC170477, no LMC256026 et no LMC256027 des marques de commerce BIG STEEL, BIG STEEL MAN et BIG STEEL HOMME au nom de Fairweather Ltd.

[1]               À la demande de Dean Palmer IP Law IProperty Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi) à Fairweather Ltd., propriétaire inscrite des enregistrements no LMC170477 pour la marque de commerce BIG STEEL, no LMC256026 pour la marque de commerce BIG STEEL MAN et no LMC256027 pour la marque de commerce BIG STEEL HOMME (les Marques).

[2]               L’avis prévu à l’article 45 a été donné à l’encontre de l’enregistrement de BIG STEEL le 15 octobre 2009; la Marque est enregistrée en vue de son emploi en liaison avec les marchandises suivantes :

[traduction]

(1)    Pantalons sport, complets et manteaux pour hommes.

(2)   Pantalons sport, jupes, chemisiers, chemises, bas-culottes, chandails, tailleurs, robes, manteaux, chaussures, ceintures, chapeaux, gants et foulards pour femmes

(3)   Chandails, vestes, gilets, imperméables, chapeaux, casquettes, ceintures, cravates, chaussures, shorts, manteaux et vestes de cuir ainsi que bijoux pour hommes.

(4)   Imperméables, blouses, lingerie, tailleurs-pantalons, manteaux et vestes de cuir, shorts, bonnets, vêtements de bain et bijoux pour femmes.

 

BIG STEEL est aussi enregistrée en vue de son emploi en liaison avec les services suivants :

 

            [traduction]

 

(1)   Exploitation d’un système de paiement par carte de crédit grâce auquel les clients de certains magasins de vente au détail peuvent acheter des produits à crédit; offre de services de comptes d’achat aux clients de certains magasins de vente au détail.

[3]               L’avis prévu à l’article 45 a été donné à l’encontre des enregistrements de BIG STEEL MAN et de BIG STEEL HOMME les 22 octobre 2009 et 20 octobre 2009, respectivement. Les deux marques sont enregistrées en vue de leur emploi en liaison avec les marchandises suivantes : [traduction] pantalons sport, complets et manteaux pour hommes; pantalons sport, jupes, chemisiers, chemises, bas-culottes, chandails, tailleurs, robes, manteaux, chaussures, ceintures, chapeaux, gants et foulards pour femmes.

[4]               L’article 45 de la Loi exige que le propriétaire inscrit de la marque de commerce indique, à l’égard de chacune des marchandises et de chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi de la marque de commerce BIG STEEL s’étend du 15 octobre 2006 au 15 octobre 2009, celle afférente à la marque de commerce BIG STEEL MAN s’étend du 22 octobre 2006 au 22 octobre 2009 et celle afférente à la marque de commerce BIG STEEL HOMME s’étend du 20 octobre 2006 au 20 octobre 2009.

[5]               La définition d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

[6]               En vertu du paragraphe 45(3) de la Loi, à défaut d’emploi tel qu’il est défini ci-haut, une marque de commerce est susceptible d’être radiée, à moins que le défaut d’emploi ne soit attribuable à des circonstances spéciales.

[7]               En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a produit les affidavits de Paul Brener, secrétaire-trésorier de l’Inscrivante et vice-président des finances et de l’administration chez International Clothiers Inc., une licenciée de l’Inscrivante. Les deux parties ont produit des représentations écrites, mais ni l’une ni l’autre n’a demandé la tenue d’une audience.  

[8]               Je remarque que les affidavits produits en réponse à chacun des avis sont identiques et que l’Inscrivante n’allègue pas avoir employé les Marques pendant les périodes pertinentes. Conséquemment, la seule question à trancher en l’espèce est de savoir si des circonstances spéciales justifient ce défaut d’emploi.

[9]               De manière générale, une décision concernant l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi se fonde sur l’examen de trois critères, énoncés dans l’arrêt Canada (Registraire des marques de commerce) c. Harris Knitting Mills Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 488 (C.A.F.) : le premier est la durée de la période de non-emploi, le deuxième consiste à savoir si les raisons du non-emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit et le troisième, si ce dernier a l’intention sérieuse de recommencer à employer la marque dans un bref délai.

[10]           Pour déterminer si les raisons du non-emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit, il faut pouvoir conclure à l’existence de « circonstances de nature inhabituelle, peu courantes et exceptionnelles » [John Labatt Ltd. c. Cotton Club Bottling Co. (1976), 25 CPR (2d) 115 (C.F. 1re inst.), à la page 123]. L’arrêt Smart & Biggar c. Scott Paper Ltd. (2008), 65 CPR (4th) 303 (C.A.F.), clarifie l’interprétation du deuxième critère en spécifiant qu’il est essentiel de satisfaire à cet aspect pour que l’on puisse conclure à l’existence de circonstances spéciales justifiant un défaut d’emploi. En d’autres termes, les deux autres facteurs sont pertinents, mais ils ne peuvent constituer des circonstances spéciales lorsqu’ils sont considérés seuls. De plus, l’intention de reprendre l’emploi doit être étayée par la preuve [Arrowhead Spring Water Ltd. c. Arrowhead Water Corp. (1993), 47 CPR (3d) 217 (C.F. 1re inst.); NTD Apparel Inc. c. Ryan (2003), 27 CPR (4th) 73 (C.F. 1re inst.)].

[11]           En ce qui a trait au deuxième critère, M. Brener déclare dans ses affidavits que l’Inscrivante a acquis les Marques en 2002 d’un séquestre judiciaire agissant pour l’ancien propriétaire, Dylex Diversified Limited. Dans le cadre de cette transaction, l’Inscrivante a acquis plusieurs autres marques de commerce et plus de 70 magasins qui emploient au-delà de 500 personnes. M. Brener atteste que depuis l’acquisition de ces actifs, [traduction] « l’Inscrivante a dû travailler d’arrache-pied (...) pour gérer et revitaliser les marques de commerce, les magasins et les autres actifs ». Conséquemment, l’Inscrivante [traduction] « a été retardée dans le lancement » des marques de vêtements BIG STEEL, BIG STEEL MAN et BIG STEEL [sic]. M. Brener déclare cependant que peu avant l’envoi des avis donnés en vertu de l’article 45 à l’encontre des enregistrements en cause, l’Inscrivante a décidé de relancer les marques à l’automne 2009.

[12]           Je remarque que l’Inscrivante ne fournit aucun détail expliquant ce sur quoi elle a [traduction] « travaillé d’arrache-pied » pendant la période de non-emploi. M. Brener met plutôt l’accent sur le fait que les Marques [traduction] « ont toujours été d’une grande importance et d’un grand intérêt » pour l’Inscrivante et qu’elles [traduction] « sont des marques notables sur le plan commercial, qui ont acquis une cote d’estime appréciable auprès des consommateurs canadiens ».

[13]           Dans ses représentations écrites, la Partie requérante soutient que la seule raison que donne l’Inscrivante pour expliquer le défaut d’emploi est que le propriétaire avait besoin de temps pour relancer les marques. En d’autres mots, l’Inscrivante a délibérément décidé de ne pas employer les Marques pendant cette période. Je suis d’accord avec cette proposition et, comme l’a dit la Cour dans l’arrêt Harris Knitting Mills précité, à la page 493, il est difficile de voir pourquoi on excuserait un défaut d’emploi attribuable à la seule volonté du propriétaire de la marque. À cet égard, je citerai les observations suivantes du juge Thurlow dans l’arrêt Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1980), 53 CPR (2d) 62 (C.A.F.), au paragraphe 10 :

Il n’est pas permis à un propriétaire inscrit de garder sa marque s’il ne l’emploie pas, c’est-à-dire s’il ne l’emploie pas du tout ou s’il ne l’emploie pas à l’égard de certaines des marchandises pour lesquelles cette marque a été enregistrée.

[14]           Puisque l’Inscrivante n’a pas démontré que les raisons expliquant le défaut d’emploi de ses Marques étaient indépendantes de sa volonté, je ne commenterai les premier et troisième critères énoncés dans l’arrêt Harris Knitting Mills que brièvement.

[15]           En ce qui a trait au premier critère, la période de non-emploi des Marques est d’environ huit ans, période que la Partie requérante estime, à juste titre, être [traduction] « considérable ». Quoi qu’il en soit, considérant que l’Inscrivante n’a pas détaillé ses activités pendant cette période, il est difficile de voir comment une période aussi longue pourrait être excusée, peu importent les circonstances.

[16]           Quant à son intention de recommencer à employer les Marques au Canada, l’Inscrivante a fourni quelques preuves attestant la vente de chemises pour hommes et l’affichage de deux enseignes extérieures de magasins de vente au détail peu après la réception des avis donnés en vertu de l’article 45. Comme le fait remarquer la Partie requérante, cependant, ces activités ne correspondent pas aux marchandises et aux services tels qu’ils sont enregistrés. La seule déclaration claire faite par M. Brener à cet égard est que [traduction] « tous les types de vêtements visés par les enregistrements de ces marques de commerce seront vendus au Canada en liaison avec ces marques en 2010 ». Je considère que cette déclaration est vague et insuffisante; l’Inscrivante ne présente aucun autre échéancier et elle ne fournit aucune preuve de mesures concrètes entreprises pour reprendre l’emploi des Marques en liaison avec les marchandises visées par l’enregistrement. Je ne peux conclure que l’Inscrivante a fourni une preuve suffisante pour prouver une intention sérieuse de reprendre l’emploi des Marques au Canada, puisqu’elle n’a présenté aucun détail sur la manière dont elle comptait s’y prendre.

[17]           Compte tenu de ce qui précède, je dois conclure que l’Inscrivante n’a pas démontré l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi des Marques pendant les périodes pertinentes, aux termes du paragraphe 45(3) de la Loi.

[18]           Pour les motifs exposés ci-dessus, je ne suis pas convaincu qu’il y a eu emploi des Marques, au sens des articles 45 et 4 de la Loi, en liaison avec l’une quelconque des marchandises ou l’un quelconque des services visés par l’enregistrement, et aucune circonstance spéciale ne justifie ce défaut d’emploi.

[19]           Par conséquent, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, les enregistrements seront radiés, conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Dominique Lamarche, LL.L., trad. a.

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