Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 255

Date de la décision : 2014-11-24

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE LARTICLE 45, engagée à la demande de Riches, McKenzie & Herbert LLP, visant l’enregistrement no LMC719,081 de la marque de commerce SEVEN SISTERS au nom de Sena Marketing Inc.

[1]               Le 20 septembre 2012, à la demande de Riches, McKenzie & Herbert LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Sena Marketing Inc. (la Propriétaire), propriétaire inscrite de l'enregistrement no LMC719,081 pour la marque de commerce SEVEN SISTERS (la Marque).

[2]               L’avis prévu à l’article 45 exigeait de la Propriétaire qu'elle présente une preuve indiquant qu’elle avait employé la Marque au Canada en liaison avec chacune des marchandises décrites dans l’enregistrement entre le 20 septembre 2009 et le 20 septembre 2012.

[3]               La marque est enregistrée en liaison avec les marchandises suivantes : « [Traduction] articles chaussants, nommément chaussures, bottes, sandales, pantoufles. »

[4]               La définition pertinente d'« emploi » est énoncée au paragraphe 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’un avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               Il est bien établi que les simples affirmations d'emploi ne suffisent pas à démontrer l'emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien qu’il ne soit pas nécessaire de présenter une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il faut néanmoins produire des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure à un emploi de la marque de commerce en liaison avec chacune des marchandises visées par l’enregistrement au cours de la période pertinente.

[6]               Cependant, en l'espèce, la principale question est celle de savoir si le matériel fourni par la Propriétaire constitue une preuve admissible dans le cadre des présentes procédures.

Réponse de la Propriétaire à l'avis

[7]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit une lettre, accompagnée de pièces jointes, datée du 14 avril 2013. La lettre a été rédigée sur du papier à correspondance officielle de la Propriétaire, et indique simplement ceci :

[Traduction]
Madame, Monsieur,
Vous trouverez en pièce jointe des documents concernant l'emploi de la
marque de commerce SEVEN SISTERS.

[8]               La lettre est signée par Chris Bannester et contient des coordonnées. La documentation jointe comprend ce qui suit :

         Une facture de deux pages, datée du 20 juillet 2011, provenant de Bruel International Limited à Dublin en Irlande, adressée à SENA. Le montant de la facture s'élève à 20 064 $ US et la liste d'articles décrits comprend divers modèles de chaussures, lesquels arborent tous la marque « Seven Sisters ».

         Neuf photos non datées de divers types de chaussures, arborant toutes la Marque sur la semelle intérieure.

[9]               On peut voir sur tous les documents joints le sceau et les initiales d'Ann Desrosiers, « Commissaire à l'Assermentation – Districts Judiciaires de Longueuil et Montréal ». Le sceau et les initiales apparaissent au recto des pages de la facture et au verso de chaque page de photos. La lettre ne contient aucun élément qui explique l'importance des pièces jointes, mais il semblerait que la facture concerne l'achat de diverses chaussures effectué par la Propriétaire en 2011 auprès d'un fabricant. Les photos sont probablement représentatives des chaussures.

[10]            Le 3 mars 2013, la réponse de la Propriétaire a été portée au dossier et la Partie requérante a été invitée à produire ses observations écrites.

Observations de la Partie requérante

[11]           Dans une lettre datée du 3 juillet 2013, la Partie requérante a déclaré qu'« aucune observation écrite ne sera soumise ». Toutefois, elle affirme également ceci :

[Traduction] ... il est respectueusement soumis que la « preuve » alléguée produite à ce jour n'est pas admissible, parce que (i) la « preuve » n'est pas un affidavit ni une déclaration solennelle, et (ii) la « preuve » n'établit pas l'emploi de la marque de commerce déposée au Canada par la propriétaire inscrite Sena Marketing Inc. à quelque moment que ce soit pendant la période de trois ans qui précède immédiatement la date de l'avis du 20 septembre 2012 relativement à chaque marchandise visée par la demande.

[12]           Conformément à l'énoncé de pratique du registraire intitulé Pratique régissant la procédure de radiation prévue à larticle 45, la réponse de la Partie requérante indique qu'une copie de cette lettre avait été envoyée à la Propriétaire.

[13]           Par voie d'une lettre datée du 8 août 2013, le registraire a informé la Propriétaire que « [Traduction] aucune observation écrite de la Partie requérante n'avait été reçue » et a invité la Propriétaire à soumettre ses propres observations écrites. Le 14 août 2013, dans une lettre envoyée aux parties, le registraire a précisé que sa lettre du 8 août « [Traduction] aurait dû indiquer que le registraire avait reçu les observations écrites de la Partie requérante », étant donné les déclarations de la Partie requérante formulées à titre de réponse, y compris que « [Traduction] ... la "preuve alléguée" soumise à ce jour n'est pas admissible ... ».

[14]           Suivant l'observation soumise par la Partie requérante concernant l'admissibilité de la réponse de la Propriétaire, et l'invitation du registraire à soumettre ses propres observations, la Propriétaire n'a fourni aucune autre réponse. Donc, la Propriétaire a eu l'occasion de soumettre une preuve admissible au titre du paragraphe 47(2) de la Loi ou de présenter des observations sur l'admissibilité de sa réponse d'avril 2013.

Analyse de l'admissibilité

[15]           Je noterais d'abord que la Loi et le Règlement sur les marques de commerce sont muets en ce qui concerne la forme que doivent prendre les affidavits et les déclarations solennelles qui sont présentés devant le registraire dans le cadre d’une procédure de radiation en vertu de l’article 45. Comme l’a déjà mentionné le registraire, bien qu’il soit souhaitable que la preuve soit conforme aux Règles de la Cour fédérale, la conformité n’est pas une obligation [voir Tension 10 Inc c Tension Clothing Inc (2004), 45 CPR (4th) 136 (COMC)]. En outre, surtout dans le contexte des procédures de radiation en vertu de l’article 45 – qui se veulent sommaires et expéditives –, il est fréquent que le registraire considère comme de simples détails techniques certaines des irrégularités que peuvent présenter les affidavits et les déclarations solennelles [voir, à titre d’exemple, 88766 Canada Inc c Tootsie Roll Industries Inc (2006), 56 CPR (4th) 76 (COMC)].

[16]           Toutefois, en l'espèce, je suis d'accord avec la Partie requérante et j'estime que les irrégularités relevées dans la « preuve » de la Propriétaire vont bien au-delà des simples détails techniques. Nonobstant l'apposition du sceau sur les documents joints de Mme Desrosiers, la lettre et les pièces jointes ne semblent pas constituer un affidavit souscrit ni une déclaration solennelle. Il n'existe aucun constat d'assermentation ni aucune déclaration de Mme Desrosiers confirmant que les déclarations que contient la lettre de présentation de M. Bannester, telles qu'elles sont, ont été souscrites en sa présence. Le fait est que les documents portant le sceau et les initiales de Mme Desrosiers joints à la lettre ne démontrent pas en soi que toute déclaration dans la lettre aurait été assermentée ou déclarée solennellement devant elle [voir 88766 Canada Inc c 167407 Canada Inc (2010), 89 CPR (4th) 293 (COMC) en ce qui concerne le traitement de telles irrégularités].

[17]           En l'absence d'observations de la part de la Propriétaire, il est évident que la réponse à l'avis prévu à l'article 45 en l'espèce ne constitue pas en réalité un affidavit ni une déclaration solennelle.

[18]           À la lumière de ce qui précède, j'estime que la lettre et ses pièces jointes produites par la Propriétaire ne sont pas admissibles en preuve dans les présentes procédures et, par conséquent, j'estime que la Propriétaire n'a pas démontré que la Marque a été employée en liaison avec les marchandises visées par l'enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Analyse de l'emploi

[19]           Même si je devais accepter la lettre de la Propriétaire et les pièces qui y sont jointes en tant que preuve admissible dans les présentes procédures, je ne les considérerais pas comme preuve suffisante pour démontrer l'emploi de la marque au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[20]           Encore une fois, je note que M. Bannester ne formule aucune déclaration de fond dans sa lettre ni n'explique l'importance des documents joints. Les pièces jointes doivent donc parler d'elles-mêmes. Au mieux, la facture montre un achat par la Propriétaire de diverses chaussures de marque SEVEN SISTERS auprès d'un fabricant irlandais. Cependant, comme il n'y a aucune preuve de ventes ou de transferts subséquents au Canada, le simple fait que la Propriétaire a commandé et acheté de telles chaussures ne constitue pas un emploi de la Marque par la Propriétaire au sens des articles 4 et 45 de la Loi pour les besoins des présentes procédures.

Décision

[21]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués du paragraphe 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi.

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Andrew Bene

Agent d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme
Sophie Ouellet, trad.a.

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