Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 165

Date de la décision : 2012-09-12

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE EN VERTU DE L’ARTICLE 45 demandée par Atlantica Law Group visant l’enregistrement nLCM442984 de la marque de commerce NATURALLY NUTS au nom de Brent Clutterbuck.

[1]               À la demande d’Atlantica Law Group (la Partie requérante), le Registraire des marques de commerce a émis un avis en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi) le 3 février 2010 à Brent Clutterbuck (le Déposant), le propriétaire inscrit de l’enregistrement no LCM442984 de la marque de commerce NATURALLY NUTS (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée pour un emploi en liaison avec « les noix comestibles, les noix emballées comme grignotines, les noix emballées ou en quantité comme ingrédients pour la cuisine et la boulangerie » (les Marchandises) et « la plantation d’arbres, et des services de conseil en matière d’agriculture d'arbres porteurs de noix » (les Services).

[3]               L’article 45 de la Loi requiert que le propriétaire inscrit de la marque de commerce démontre, à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi commence le 3 février 2007 et se termine le 3 février 2010.

[4]               La définition d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

[5]               Il est bien établi que de simples affirmations d’emploi ne sont pas suffisantes pour démontrer l’emploi conformément aux procédures prévues à l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le seuil fixé pour établir l’emploi dans ces procédures soit plutôt bas [Woods Canada Ltd c. Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst.)], et même s'il n'est pas nécessaire de produire une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co Ltd c. Registrar of Trade Marks (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst.)], des faits suffisants doivent tout de même être démontrés pour permettre au Registraire de tirer une conclusion en ce qui concerne l’emploi de la marque de commerce en liaison avec les marchandises et services indiqués dans l’enregistrement pour la Période pertinente.

[6]               En réponse à l'avis du Registraire, le Déposant a fourni un affidavit, fait sous serment le 29 avril 20110. Seul le Déposant a fourni des représentations écrites; il n’y a pas eu d’audience.

[7]               Dans son affidavit, le Déposant se présente lui-même comme président de Naturally Nuts Ltd. et atteste que la Marque était employée au Canada durant la Période pertinente. À l’appui, le Déposant soumet les pièces suivantes :

         La pièce A est composée de quatre photographies, qu’il définit comme des « photographies de châtaignier, anacardier et noisetier en début de production ». Il affirme que « la récolte de noix de ces arbres et la commercialisation sous le nom de Naturally Nuts suivent la plantation de ces arbres en 1990 par Naturally Nuts Ltd. »  Cependant, il n’y a rien dans la pièce qui démontre que la Marque a été employée ou présentée en liaison avec ces activités.

         La pièce B est composée d’une facture datée du 22 novembre 2009 pour des services de consultation et de déplacement d’arbres pour un particulier de St. Thomas en Ontario. Je remarque que la Marque n’apparaît pas sur la facture, quoique le nom commercial, Naturally Nuts Ltd, et le nom du Déposant, son adresse et son numéro de TPS sont inscrits à la main en haut de la facture.

         La pièce C est composée d’une photocopie d’un certificat de statut d’entreprise de l’Ontario pour Naturally Nuts Ltd., émis le 29 avril 2010 par le ministère des Services gouvernementaux. Le Déposant affirme que Naturally Nuts Ltd. emploie son nom avec son autorisation. 

         Finalement, il affirme que « la production de noix se poursuit en liaison avec la marque de commerce dont il est fait référence à la pièce B et l’entreprise décrite en pièce C emploie la marque de commerce enregistrée. »

[8]               J’aimerais faire remarquer que le simple enregistrement d’une dénomination sociale ne constitue pas un emploi d’une marque de commerce au sens de l’article 4 de la Loi [voir Schwalb c. Godbout (1987), 15 CPR (3d) 532 (COMC)]. En outre, en ce qui concerne les Marchandises, je remarque que le Déposant ne donne aucune preuve de l’emploi de la Marque conformément à l’article 4 de la Loi et ne donne aucune preuve de vente de Marchandises durant la Période pertinente. 

[9]               En ce qui concerne les Services, nonobstant l’enregistrement du nom commercial comme le démontre la pièce C, la question est de savoir si la Marque a été employée ou affichée dans la prestation de Services ou l’annonce du Déposant. À cet égard, je remarque que le Déposant ne donne aucune preuve d’affichage de la Marque, par exemple par des affiches, des cartes professionnelles, du papier à en-tête, des publicités ou des factures. Il ne donne pas non plus de sommaire du chiffre d’affaires global de ses Services en liaison avec la Marque durant la Période pertinente.  

[10]            En ce qui concerne la seule facture présentée par le Déposant, le Déposant affirme que la facture porte sur des « services de consultation et de déplacement d’arbres » et, bien qu’assez illisible, la description écrite à la main sur la facture elle-même semble indiquer « consultation et déplacement d’arbres ». Nonobstant le fait que de tels services constitueraient les Services enregistrés, je considère la présence de « Naturally Nuts Ltd » en haut de la facture comme uniquement l’emploi de la dénomination sociale, et non l’emploi de la Marque. Contrairement à d’autres cas impliquant la présence de la marque de commerce sur des factures [voir, par exemple, Road Runner Trailer Mfg Ltd c. Road Runner Trailer Co Ltd (1984), 1 CPR (3d) 443 (CF 1re inst.); Bereskin & Parr c. Red Carpet Food Systems Inc (2007), 64 CPR (4th) 234 (COMC)], les mots « Naturally Nuts » semblent être de la même taille et de la même écriture à la main que le mot « Ltd » ainsi que le nom, l’adresse et le numéro de TPS du Déposant au haut de la facture. Par conséquent, les mots « Naturally Nuts » employés ainsi ne se démarquent pas et ne représentent pas un emploi de la Marque.

[11]           Par conséquent, en l’absence d’autres preuves, je ne peux conclure que le Déposant a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises et Services au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Circonstances spéciales

[12]           Ainsi, je prendrais maintenant en considération s’il y avait des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi. De manière générale, la question de savoir s’il y a présence ou non de circonstances spéciales qui excuseraient le non-emploi implique la prise en considération de trois critères, comme indiqué dans Registraire des marques de commerce c. Harris Knitting Mills Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF); le premier est la période de temps pendant laquelle la marque de commerce n'a pas été employée, le deuxième est de savoir si les raisons expliquant le défaut d'emploi relevaient de circonstances indépendantes de la volonté du propriétaire et le troisième est de savoir s'il existe une intention sérieuse de reprendre à brève échéance l'emploi de la marque de commerce. La décision de Scott Paper Ltd c. Smart & Biggar (2008), 65 CPR (4th) 303 (CAF) présente d’autres clarifications en ce qui concerne l’interprétation du deuxième critère, avec la détermination que cet aspect de l’évaluation doit être conforme afin de pouvoir conclure à des circonstances spéciales excusant le défaut d’emploi de la Marque. Autrement dit, les deux autres facteurs sont pertinents, mais, considérés seuls, isolément, ils ne peuvent constituer des circonstances spéciales. En outre, l’intention de reprendre l’emploi doit être appuyée par des preuves [Arrowhead Spring Water Ltd c. Arrowhead Water Corp (1993), 47 CPR (3d) 217 (CF 1re inst.); NTD Apparel Inc c. Ryan (2003), 27 CPR (4th) 73 (CF 1re inst.)].

[13]           Dans le cas présent, le Déposant ne fait aucune demande explicite dans son affidavit à l’égard de circonstances spéciales. Malgré le fait que la Marque ait été enregistrée en 1995, il n’y a aucune preuve d’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises et Services, pas plus qu’il y a de preuve de ventes de marchandises par le Déposant du tout. En outre, bien qu’il affirme dans son affidavit que les arbres décrits dans la pièce A « commencent à produire », le Déposant ne donne aucune explication quant à la nature de son commerce pour m’aider à conclure que cela constitue une raison de non-emploi. Dès lors, je ne peux considérer sa déclaration suffisante pour conclure que le Déposant a l’intention sérieuse de reprendre l'emploi de la marque de commerce.   

[14]           À cet égard, je remarque l’observation suivante de Thurlow J de la Cour d’appel fédérale (CAF) dans Plough, supra, au paragr. 66 :

Il n’est pas permis à un propriétaire inscrit de garder sa marque s’il ne l’emploie pas, c’est-à-dire s’il ne l’emploie pas du tout ou s’il ne l’emploie pas à l’égard de certaines des marchandises pour lesquelles cette marque a été enregistrée.

[15]           Par conséquent, je ne peux conclure que le Déposant a établi des circonstances spéciales pour excuser le non-emploi de la Marque durant la Période pertinente au sens de l’alinéa 45(3) de la Loi.

Disposition

[16]           En raison de ce qui précède, en vertu de l'autorité que me confère l’alinéa 63(3) de la Loi et conformément avec les dispositions de l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera radié.

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Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay

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