Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE EN VERTU DE L’ARTICLE 45

VISANT LA MARQUE DE COMMERCE WORLD’S FARE

PORTANT LENREGISTREMENT Nº LMC 452,067

 

 

 

Le 5 septembre 2000, à la demande d’Aramark Canada Ltd., le registraire a envoyé un avis en vertu de l’article 45 à Worldwide Specialty Foods Ltd., propriétaire inscrite de l’enregistrement de la marque de commerce citée en rubrique.

 

La marque de commerce WORLD’S FARE est enregistrée pour un emploi en liaison avec les marchandises suivantes : « champignons séchés gastronomiques; mélanges à pain; mélanges à biscuits; produits de grignotage, nommément mélanges de noix, mélanges de bonbons, produits à base de fruits secs et mélanges de fruits secs, croustilles de maïs, biscuits, gâteaux, bonbons, noix, croustilles, chips tortilla, chocolat; huiles aromatisées; vinaigres aromatisés; confitures; conserves; légumes en conserve; fruits en conserve; piments séchés spéciaux; tartinades à base de mayonnaise; viandes de salaison; moutardes; noix; tomates séchées; fromages ».

 


Selon l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, le propriétaire inscrit de la marque de commerce est tenu d’indiquer si la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi de la marque de commerce se situe entre le 5 septembre 1997 et le 5 septembre 2000.

 

En réponse à l’avis , un affidavit d’Anthony James a été fourni. Chaque partie a déposé un plaidoyer écrit. Il n’a pas été demandé d’audience en l’espèce.

 

Les principaux arguments de la partie à la demande de qui l’avis est donné sont les suivants :

Les documents identifiés comme pièces afférentes à l’affidavit de M. James sont décrits et identifiés de manière incorrecte. Par conséquent, ces documents devraient être radiés ou avoir peu de poids. De plus, les factures semblent être plutôt des bordereaux d’emballage que de vraies factures, car il leur manque à la fois un prix courant et la signature de l’acquéreur.

 

À titre subsidiaire, la partie à la demande de qui l’avis a été donné fait valoir que si l’emploi a été établi à l’égard d’une marchandise donnée, cet emploi ne remplit pas les conditions prévues au paragraphe 4(1) de la Loi et, de plus, est simplement « symbolique et ne s’inscrit pas dans la pratique normale du commerce ».

 

S’agissant des documents fournis, je conviens avec la partie à la demande de qui l’avis a été donné qu’ils sont décrits et identifiés de manière incorrecte : ce qu’on désigne comme la pièce A dans l’affidavit de M. James est en réalité la pièce B, et vice-versa, et les factures décrites par M. James comme formant la pièce C sont marquées pièce A. Toutefois, comme le note la titulaire de l’enregistrement, cette erreur n’a causé aucun préjudice. À la lecture de l’affidavit, les termes employés indiquent clairement à quelle pièce exactement renvoie M. James et toutes les pièces sont dûment notariées. Je conclus donc qu’il s’agit de simples erreurs matérielles qui ne devraient pas influer sur la décision ou être déterminantes : Wallace c. Geoservices (1988) 19 C.P.R. (3d) 561 aux pages 562 et 563.


S’agissant de la qualité des pièces, il est vrai que les photographies des marchandises emballées jointes à titre de pièce A (mais désignées pièce B dans l’affidavit) sont des photocopies et non des originaux, ce qui les rend très foncées et de piètre qualité en général. Mais en dépit de cela, je suis disposée à accepter la déclaration sous serment du paragraphe 4 de l’affidavit de M. James au pied de la lettre. Autrement dit, bien qu’il soit difficile de déterminer le contenu de certains emballages à partir des photocopies, j’accepte qu’elles sont « des représentations véridiques et exactes de l’emballage des produits alimentaires » et contiennent ce qu’indiquent les étiquettes (dans les cas où elles sont lisibles). S’agissant des étiquettes reproduites à la pièce B (désignée pièce A dans l’affidavit), la partie à la demande de qui l’avis a été donné les juge comme n’étant pas de « qualité professionnelle », mais ce point n’est pas pertinent à l’égard de la question de savoir si l’emploi de la marque de commerce en liaison avec les marchandises enregistrées a été établi. De plus, le respect d’autres lois que la Loi sur les marques de commerce est dénué de pertinence dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45 : voir la décision Lewis Thomson & Sons Ltd. c. Rogers, Bereskin & Parr, 21 C.P.R. (3d) 483 aux pages 486 et 487). Par conséquent, j’accepte la déclaration sous serment de M. James au paragraphe 4 de son affidavit portant qu’il s’agit là des étiquettes effectivement utilisées par la titulaire de l’enregistrement. Comme le note la propriétaire inscrite dans son propre plaidoyer écrit, le fait que la titulaire de l’enregistrement exerce son activité dans le marché de gros (et non au détail) peut expliquer la qualité des étiquettes. Par ailleurs, selon une interprétation correcte de l’affidavit, j’accepte que les étiquettes représentent la manière selon laquelle la marque de commerce figure sur les produits alimentaires sous emballage au cours de la période pertinente.

 


En ce qui a trait aux documents produits comme pièce C (mais marqués par erreur pièce A), j’accepte qu’ils sont des factures. À cet égard, je note que tous les documents portent le mot « FACTURE » et une date d’expédition.

 

J’aborde maintenant la question de savoir si la titulaire de l’enregistrement a établi l’emploi de sa marque de commerce au Canada à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et selon les dispositions prévues au paragraphe 4(1). Après examen de la preuve, je conclus que la titulaire de l’enregistrement a établi l’emploi de sa marque de commerce à l’égard d’une partie mais non de la totalité des marchandises que spécifie l’enregistrement.

 

Monsieur James n’a pas affirmé clairement et sans équivoque l’emploi de sa marque de commerce à l’égard de chacune des marchandises visées par l’enregistrement, ce qui force à déduire l’emploi des déclarations de l’affidavit et de la valeur globale des pièces afférentes.

 

Il est fait référence dans l’affidavit à des articles particuliers qui, selon M. James, sont remis ou mis sous emballage pour la titulaire de l’enregistrement et vendus sous l’étiquette privée de la titulaire de l’enregistrement portant la marque de commerce « WORLD’S FARE ». Les articles mentionnés dans l’affidavit sont des « champignons séchés gastronomiques, noix, farines, fromages, huiles et vinaigres aromatisés, huiles d’olive spéciales et fruits et légumes en conserve ».

 


La pièce A montre des étiquettes où est apposée la marque de commerce sur des produits alimentaires remis sous emballage et les produits représentés sont des « champignons séchés, piments séchés, mélanges de canneberges et de noix, figues, morceaux d’ananas sec, parmesan râpé, mélanges de noix et d’arachides, tomates séchées au soleil, pistaches, abricots secs ».

 

La pièce B comporte des étiquettes des produits suivants : « mélange de champignons séchés, mélange de bonbons, chips tortilla, mélange de noix et d’arachides, farine de blé entier, croustilles de maïs, gingembre confit, mélange de noix, canneberges séchées, amandes entières blanchies, huile de grignons d’olive, figues, abricots, noix macadamia entières, piments ancho séchés, demi-tomates séchées au soleil, riz Tamaki, couscous, amandes enrobées de chocolat, fromage cheddar râpé, riz sauvage, fromage Monterey Jack, bleuets sauvages, huile d’olive vierge, huile d’olive pure ».

 


Les factures indiquent des ventes de divers produits alimentaires au cours de la période pertinente. Toutefois, les produits alimentaires indiqués sur ces factures ne sont pas tous associés à la marque de commerce WORLD’S FARE et M. James n’a pas précisé quel produit donné non décrit par une marque de commerce ou un nom commercial était vendu en liaison avec la marque de commerce WORLD’S FARE. En dépit de ce fait, sur le fondement d’une interprétation correcte de l’affidavit et de l’ensemble de la preuve, je suis disposée à déduire de l’ensemble de la preuve, notamment des étiquettes employées, des photocopies de photographies indiquant comment les étiquettes sont attachées aux marchandises et des affirmations des paragraphes 3, 4, 7 et 8 de l’affidavit de M. James, que la marque de commerce était employée au Canada en liaison avec les marchandises que spécifie l’affidavit, que les marchandises indiquées sur les étiquettes et les articles mentionnés sur les factures sont clairement associés à la marque de commerce WORLD’S FARE. Par conséquent, j’accepte que l’emploi a été établi en liaison avec les marchandises enregistrées suivantes : « champignons séchés gastronomiques, produits de grignotage, nommément mélanges de noix, produits à base de fruits secs et mélanges de fruits secs, croustilles de maïs, bonbons, noix, chips tortilla, chocolat; huiles et vinaigres aromatisés; légumes en conserve, fruits en conserve, piments séchés spéciaux; noix; tomates séchées; fromages.

 

Malgré le fait que des étiquettes ont été produites seulement pour certaines des marchandises et que d’autres marchandises étaient simplement spécifiées dans l’affidavit, je conclus que l’ensemble de la preuve permet de déduire que des ventes de ces marchandises ont probablement eu lieu au cours de la période pertinente. M. James a en effet déclaré à cet égard que les factures établissaient seulement « un petit échantillon » (témoignage figurant au paragraphe 5 de l’affidavit de M. James) et non l’ensemble des ventes réalisées par la titulaire de l’enregistrement au cours de la période pertinente. On doit se souvenir que la procédure en vertu de l’article 45 ne prescrit pas une « preuve surabondante » : Union Electric Supply Co. Ltd. c. Registraire des marques de commerce, précitée, à la page 57.

 



S’agissant de l’observation faite à titre subsidiaire par la partie à la demande de qui l’avis a été donné, à savoir que si un emploi a été établi, il s’agit simplement d’un emploi symbolique, qui ne s’inscrit pas dans la pratique normale du commerce, je conclus que ce n’est pas le cas en l’espèce. La partie à la demande de qui l’avis a été donné a cherché à établir la pratique normale du commerce d’un grossiste à la page 10 de son plaidoyer écrit : [traduction] « La pratique normale du commerce d’un grossiste comporterait un large volume de ventes fréquentes »[non souligné dans l’original]. Cette observation est néanmoins contraire au principe selon lequel dans l’établissement d’un emploi dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45, « La preuve d’une seule vente, en gros ou au détail, effectuée dans la pratique normale du commerce peut suffire, dans la mesure où il s’agit d’une véritable transaction commerciale et qu’elle n’est pas perçue comme ayant été fabriquée ou conçue délibérément pour protéger l’enregistrement de la marque de commerce. » [non souligné dans l’original] : Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. (1987), 13 C.P.R. (3d) 289 à la page 293. Dans la décision Philip Morris, le juge McNair a ensuite conclu que « la preuve d’une seule vente suffit à établir l’emploi d’une marque de commerce dans la pratique normale du commerce, selon les circonstances qui entourent la transaction... » : Philip Morris, précitée, à la page 297. Par conséquent, la fréquence des ventes de marchandises portant la marque de commerce par la titulaire de l’enregistrement n’est pas une considération pertinente. Comme la partie à la demande de qui l’avis a été donné le note elle‑même, les factures présentées par la titulaire de l’enregistrement comme pièces afférentes établissent des ventes à divers établissements et restaurants et il n’y a aucune raison de mettre en doute la légitimité de cette preuve. La titulaire de l’enregistrement a établi beaucoup plus qu’une seule vente. Comme la titulaire de l’enregistrement en a témoigné au paragraphe 2 de son affidavit, elle est engagée dans le commerce de gros des aliments avec des magasins d’alimentation, restaurants, traiteurs et autres grossistes en alimentation. Des ventes à ce type de commerces ont été établies par des factures; par conséquent, ces opérations semblent concorder avec la pratique habituelle ou « normale » du commerce de la titulaire de l’enregistrement. En outre, il n’y a aucune raison de mettre en doute la légitimité des ventes elles-mêmes. Les factures établissent des ventes avant et pendant la période pertinente, et longtemps avant l’envoi de l’avis. Je conclus donc que l’emploi établi au cours de la période pertinente s’inscrivait dans la pratique normale du commerce de la titulaire de l’enregistrement.

 

Je conviens cependant que l’emploi de la marque de commerce au cours de la période pertinente n’a pas été établi à l’égard de toutes les marchandises enregistrées. À mon avis, le preuve n’est pas suffisante pour me permettre de conclure à l’emploi de la marque de commerce au Canada au cours de la période pertinente en liaison avec les marchandise enregistrées suivantes : « mélanges à pain; mélanges à biscuits; biscuits, gâteaux, croustilles, confitures; conserves; tartinades à base de mayonnaise; viandes de salaison; moutardes ». À cet égard, aucune des étiquettes n’identifie ces marchandises et l’affidavit ne comporte aucune déclaration claire au sujet de ces marchandises. S’agissant des désignations génériques de certaines de ces marchandises sur les factures, comme aucun des articles des factures n’est associé à la marque de commerce et compte tenu du fait que la titulaire de l’enregistrement vend également des produits portant les marques de commerce d’autres personnes, je conclus que les factures en elles-mêmes ne suffisent pas à me permettre de conclure à l’emploi de la marque de commerce en liaison avec ces marchandises. Si l’affidavit avait présenté une déclaration claire à ce sujet ou si la titulaire de l’enregistrement avait produit une étiquette visant ces marchandises, j’aurais dans ce cas été disposée à déduire l’emploi de ces marchandises en liaison avec la marque de commerce. Mais ce n’est pas le cas.


Pour les motifs qui précèdent, je conclus que la titulaire de l’enregistrement n’a pas établi l’emploi de sa marque de commerce de la manière prescrite au paragraphe 4(1) de la Loi sur les marques de commerce à l’égard des marchandises suivantes : « mélanges à pain, mélanges à biscuits, biscuits, gâteaux, croustilles, confitures, conserves, tartinades à base de mayonnaise, viandes de salaison et moutardes ».  La titulaire de l’enregistrement n’a non plus fourni aucune circonstance spéciale justifiant le défaut d’emploi à l’égard de ces marchandises. J’accepte l’observation de la partie à la demande de qui l’avis a été donné sur ce point, à la page 11 de son plaidoyer écrit, selon laquelle ces marchandises sont des articles courants qui ne feraient pas l’objet d’une demande cyclique. Par conséquent, ces marchandises seront radiées de l’enregistrement de la marque de commerce.

 

Compte tenu de ce qui précède, l’enregistrement nº 452,067 sera modifié en conformité avec les dispositions du paragraphe 45(5) de la Loi de sorte que l’état déclaratif des marchandises spécifie « champignons séchés gastronomiques; produits de grignotage, nommément mélanges de noix, mélanges de bonbons, produits à base de fruits secs et mélanges de fruits secs, croustilles de maïs, bonbons, noix, chips tortilla, chocolat; huiles et vinaigres aromatisés; légumes en conserve et fruits en conserve; piments séchés spéciaux; noix; tomates séchées; fromages ».

 

DATÉ À GATINEAU (QUÉBEC), LE       27e        FÉVRIER 2003.

 

D. Savard

Agent d’audience principal

Division de l’article 45


 

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