Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 13

Date de la décision : 2016-01-26

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION

 

 

Benisti Import-Export Inc.

Opposante

et

 

Pirelli & C. S.p.A.

Requérante

 

 

 



 

1,518,895 pour la marque de commerce P ZEROTEMPO

 

Demande

I           Introduction

[1]               La Requérante a produit une demande en vue de faire enregistrer la marque de commerce P ZEROTEMPO (la Marque). La demande est fondée sur l'emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec des montres, des horloges et des bijoux de fantaisie.

[2]               L'Opposante est la propriétaire des enregistrements des marques de commerce suivantes : P ZERO (LMC786,620); POINT ZERO (LMC309,311); POINT ZERO (LMC800,971); POINT ZERO LUXURY (LMC693,470); et Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINTZERO [Stylized letter P and an oval dot in a rectangle with the words POINTZERO] (LMC695,670). L'Opposante est également la Propriétaire d'une demande pour la marque de commerce Écusson de forme ovale avec extrémité supérieure rectangulaire [Patch with oval shape and rectangular shaped top] (no 1,472,367), qui comprend, elle aussi, les mots POINT ZERO.

[3]               La demande et les enregistrements de l'Opposante visent une gamme de produits et de services qui comprend des vêtements, des montres et des bijoux. Les détails de la demande et des enregistrements de l'Opposante sont présentés à l'annexe « A » qui est jointe aux présentes.

[4]               La question litigieuse en l'espèce est celle de savoir s'il y a une probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties. Pour les raisons exposées ci-dessous, j'ai conclu qu'il n'y en a pas.

[5]               L'opposition est par conséquent rejetée.

II         Historique du dossier

[6]               La demande pour la Marque a été produite le 14 mars 2011.

[7]               Elle a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 19 octobre 2011 et, le 19 mars 2012, l'Opposante s'y est opposée en vertu de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Les motifs d'opposition sont fondés sur les articles 30e), 30h) 30i), 12(1)d), 16(3)a), 16(3)b), 16(3)c) et 2 (caractère distinctif) de la Loi.

[8]               Le 17 mai 2012, la Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations formulées dans la déclaration d'opposition.

[9]               Comme preuve au soutien de son opposition, l'Opposante a produit l'affidavit de Mario Morellato, souscrit le 17 décembre 2012 (l'affidavit Morellato). M. Morellato a été contre-interrogé et la transcription de son contre-interrogatoire a été versée au dossier.

[10]           Comme preuve au soutien de sa demande, la Requérante a produit l'affidavit de Patrick Balzamo, souscrit le 18 décembre 2013 (l'affidavit Balzamo). M. Balzamo n'a pas été contre-interrogé.

[11]           Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient toutes deux présentes à l'audience qui a été tenue le 1er septembre 2015.

III        Fardeau de preuve

[12]           C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298].

IV        Preuve

[13]           D'entrée de jeu, je tiens à souligner que, dans son plaidoyer écrit, la Requérante conteste certaines parties des paragraphes 7 à 11 de l'affidavit de M. Morellato au motif qu'elles relèvent du ouï-dire. La Requérante a fait observer qu'en contre-interrogatoire, M. Morellato a reconnu avoir obtenu l'information contenue dans son affidavit auprès d'employés de l'Opposante et des licenciées de l'Opposante [questions 42 et 43]. Les paragraphes 7 à 11 de l'affidavit de M. Morellato sont essentiellement constitués de déclarations générales concernant la promotion et l'emploi des marques de commerce de l'Opposante au Canada et ailleurs. Abstraction faite des problèmes de ouï-dire potentiels, compte tenu de mes constatations générales en ce qui concerne les autres lacunes que comporte la preuve de M. Morellato (qui sont expliquées en détail ci-dessous), je ne considère pas que les déclarations faites dans ces paragraphes sont très utiles à la cause de l'Opposante.

IV.1     La preuve de l'Opposante

Morellato Affidavit

[14]           La preuve de l'Opposante est constituée de l'affidavit Morellato. M. Morellato exerce les fonctions de vice-président du Crédit commercial chez l'Opposante [para 1]. Aux paragraphes 2 à 6, M. Morellato fournit des renseignements (y compris les dates de premier emploi) au sujet des marques de commerce de l'Opposante qui font l'objet des enregistrements nos LMC786,620, LMC309,311, LMC800,971, LMC693,470 et LMC695,670, et de la demande no 1, 472,367 de l'Opposante. Des copies des détails de la demande et des enregistrements de l'Opposante sont jointes à son affidavit comme pièces A à D.

[15]           Selon M. Morellato, l'Opposante fabrique, importe et distribue des vêtements et, en particulier, des manteaux, des vestons, des chemises, des chandails et des pantalons sous les marques de commerce P ZERO et POINT ZERO, ainsi que sous les autres marques de commerce mentionnées dans son affidavit, partout au Canada, et exporte dans de nombreux pays, notamment aux États-Unis [para 7].

[16]           Au paragraphe 8, M. Morellato affirme que l'Opposante emploie également les marques de commerce P ZERO et POINT ZERO [Traduction] « à l'égard de montres vendues partout au Canada ». Or, je souligne qu'en contre-interrogatoire, M. Morellato a spécifié que le logo qui est montré en pièce « F » (et qui est identique ou semblable à celui compris dans la marque de commerce qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670) est celui qui, dans les faits, figure sur les montres de l'Opposante, et n'a pas été en mesure de confirmer si, dans les faits, les mots P ZERO ont déjà figuré sur des montres [transcription du contre-interrogatoire Morellato, questions 128 à 141].

[17]           Au paragraphe 9, M. Morellato affirme que les vêtements arborant les marques de commerce P ZERO et POINT ZERO sont vendus et annoncés dans de nombreux pays, y compris en Australie, au Canada, aux États-Unis, en Europe, en Amérique du Sud et au Moyen-Orient. Au paragraphe 10, il affirme que l'Opposante vend ses produits arborant les marques de commerce P ZERO et POINT ZERO, ainsi que les autres marques de commerce mentionnées dans son affidavit, partout au Canada. Au paragraphe 11, M. Morelatto affirme que l'Opposante a annoncé et commercialisé ses produits arborant les marques de commerce P ZERO et POINT ZERO, ainsi que les autres marques de commerce mentionnées dans son affidavit, à grande échelle et de façon continue partout au Canada. Il convient de souligner que M. Morellato n'a pas fourni le moindre chiffre de ventes en ce qui concerne les produits vendus en liaison avec les marques de commerce de l'Opposante au Canada ou ailleurs. De même, aucune dépense publicitaire n'a été fournie.

[18]           Selon M. Morellato, l'Opposante annonce ses marques de commerce dans des magazines et sur des panneaux-réclames partout au Canada. Comme pièce E sont jointes à son affidavit des photographies de ces publicités sur lesquelles des annotations, c'est-à-dire une description et l'emplacement de la publicité, ont été ajoutées [para 12].

[19]           On ne sait pas très bien dans tous les cas si les photographies jointes comme pièce E montrent des publicités qui ont été publiées dans des magazines ou qui étaient affichées sur des panneaux-réclames, car certaines ne sont pas annotées et M. Morellato ne fournit aucun éclaircissement à cet égard dans son affidavit. Les publicités non annotées montrent les marques de commerce POINT ZERO et P ZERO de l'Opposante et/ou un logo semblable à celui compris dans la marque de commerce qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670. La plupart des photographies non annotées semblent montrer des publicités publiées dans des magazines, mais d'autres donnent l'impression qu'il pourrait en réalité s'agir d'étiquettes volantes. En tout état de cause, aucune date de diffusion, aucune information et aucun chiffre concernant la distribution n'ont été fournis relativement à la plupart des publicités non annotées qui font partie de la pièce E.

[20]           Les publicités sur panneau-réclame annotées contenues dans la pièce E ont, semble-t-il, été affichées pendant de courtes périodes à divers endroits, dont certains au Canada (p. ex. Montréal, la ville de Québec, Toronto, [Traduction] « les 200 principaux centres commerciaux du Canada, à l'exception de la province du Québec, et dans l'Ouest », etc.). Dans certains cas, on ne sait pas très bien à quels endroits les publicités ont été affichées. À titre d'exemple, un des communiqués joints comme pièce E indique simplement que [Traduction] « cette représentation créative sera affichée sur les autobus en Ontario » et M. Morellato ne fournit aucun renseignement supplémentaire dans son affidavit. La plupart des publicités montrent les marques de commerce POINT ZERO et/ou le logo qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670 de l'Opposante ou un logo semblable. La pièce E ne contient aucune publicité montrant une ou plusieurs des marques de commerce de l'Opposante au-delà de 2006.

[21]           Comme pièce F sont joints des extraits de publicités de montres publiées dans les catalogues printemps/été 2010, automne/hiver 2010 et automne/hiver 2011 de l'Opposante [para 13]. Ces publicités comprennent des photographies de montres arborant les marques de commerce POINT ZERO et le logo qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670 de l'Opposante. Aucun renseignement n'a été fourni en ce qui concerne la diffusion ou la distribution de ces catalogues.

[22]           Des photographies d'une partie de la collection de montres de l'Opposante sont jointes comme pièce G, et un exemplaire d'un ancien catalogue de la collection de montres de l'Opposante est joint comme pièce H. La marque de commerce POINT ZERO figure sur l'emballage des montres présentées en pièce G, ainsi que sur les montres elles-mêmes. Aucun renseignement n'a été fourni en ce qui concerne la diffusion du catalogue joint comme pièce H.

[23]           Selon M. Morellato, les montres de l'Opposante sont vendues et distribuées partout au Canada aux termes d'une licence octroyée à la société Kwartz XXI Int’l Imports Inc. Un extrait de ce contrat de licence qui autorise la licenciée de l'Opposante à employer la marque de commerce POINT ZERO est joint comme pièce I [para 16]. Comme pièce J sont joints un bon de commande et une facture qui, selon M. Morellato, se rapportent à la vente de montres arborant la marque de commerce Point Zero. Le bon de commande et la facture datent de 2001 [para 17]. La facture fait mention de montres POINT ZERO et le bon de commande indique que les montres vendues étaient au nombre de trois.

[24]           Comme pièce K est jointe une photographie d'un veston vendu par l'Opposante qui, affirme M. Morellato, arbore la marque de commerce P Zero; cette photographie est accompagnée des étiquettes volantes correspondantes et d'une facture faisant état de cette vente. La facture est datée du 31 janvier 2012. La marque de commerce qui figure sur le veston est P-ZERO, tandis que les étiquettes volantes arborent la marque de commerce POINT ZERO, ainsi que la marque figurative qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670.

[25]           Au paragraphe 19, M. Morellato affirme que l'Opposante fait la promotion de ses marques de commerce et de ses produits par l'intermédiaire de son site Web. Cependant, il n'indique pas depuis combien de temps, et ne fournit aucun renseignement quant à la mesure dans laquelle le site Web a été consulté par des Canadiens.

[26]           Au paragraphe 20, M. Morellato affirme que les ventes et la publicité continues et à grande échelle réalisées par l'Opposante, ainsi que sa vaste gamme de vêtements et d'accessoires mode, ont contribué à la notoriété et au caractère distinctif bien établis des marques P ZERO et POINT ZERO et des autres marques de commerce mentionnées dans son affidavit. Je suis d'avis que cette affirmation n'est pas corroborée par la preuve.

[27]           Bien que M. Morellato affirme au paragraphe 2 de son affidavit que la marque de commerce P ZERO est employée depuis au moins le 1er janvier 2002 en liaison avec des montres et de nombreux autres produits, il n'a fourni aucun chiffre de vente et aucune des photos qu'il a fournies n'illustre l'emploi de la marque de commerce en liaison avec des montres. En outre, bien que M. Morellato ait fourni quelques exemples de publicités pour cette marque [pièce E], il n'y a aucune indication à savoir dans quels magazines ces publicités ont été publiées (s'il s'agissait effectivement de publicités de magazines – comme je l'ai mentionné précédemment, certaines donnent l'impression d'être des étiquettes volantes), si elles ont fait l'objet d'une importante diffusion et, pour certaines d'entre elles, à quel moment elles ont été présentées. Qui plus est, comme je l'ai souligné précédemment, en contre-interrogatoire, M. Morellato a admis qu'il ne savait pas avec certitude si la marque nominale P ZERO avait déjà figuré sur les montres [transcription du contre-interrogatoire Morellato, questions 128 à 141].

[28]           La seule preuve d'emploi de la marque de commerce P ZERO que l'Opposante a été en mesure de citer à l'audience est celle présentée en pièce K (c.-à-d. la photographie d'un veston vendu en janvier 2012 accompagnée de l'étiquette volante correspondante et d'une facture faisant état de cette vente). Il convient de souligner que cette preuve est postérieure à la date pertinente qui s'applique aux motifs d'opposition fondés sur l'absence de droit à l’enregistrement soulevés par l'Opposante.

[29]           Compte tenu de ce qui précède, contrairement aux allégations que fait M. Morellato au paragraphe 20 de son affidavit, je suis d'avis que l'Opposante n'a pas établi que des ventes ou une publicité continues ou à grande échelle ont été réalisées en liaison avec la marque de commerce P ZERO de l'Opposante. Dans l'ensemble, j'estime que l'Opposante n'a pas établi que sa marque de commerce P ZERO a acquis une notoriété significative en liaison avec des montres ou d'autres produits.

[30]           En ce qui concerne les marques de commerce POINT ZERO de l'Opposante, je souligne que M. Morellato a fourni quelques photographies montrant l'emploi de cette marque de commerce en liaison avec des montres (pièce G). De plus, la pièce E contient des exemples de publicités pour cette marque de commerce précise en liaison avec des vêtements et divers autres produits. Bien qu'aucun renseignement n'ait été fourni en ce qui concerne le nombre de Canadiens qui auraient été exposés aux publicités sur panneau-réclame, compte tenu du fait que ces publicités semblent avoir été affichées dans les principales villes et les principaux centres commerciaux du Canada, je suis disposée à inférer que les Canadiens y auraient été exposés au moins dans une certaine mesure.

[31]           Il convient de souligner que les publicités jointes comme pièce E semblent avoir été affichées uniquement pendant de courtes périodes bien précises avant 2006. Bien que les catalogues de l'Opposante joints comme pièce F semblent plus récents (2010/2011) et qu'ils présentent également des montres arborant la marque de commerce POINT ZERO, M. Morellato n'a fourni aucun renseignement en ce qui concerne la façon dont les catalogues de l'Opposante ont été distribués ou à quels endroits, et n'a pas indiqué la mesure dans laquelle ils ont été diffusés au Canada. Ces renseignements sont également manquants en ce qui a trait au catalogue joint comme pièce H, lequel est, de surcroît, non daté. De façon similaire, les renseignements concernant la publicité faite sur le site Web de l'Opposante ne sont pas suffisamment détaillés.

[32]           Comme je l'ai mentionné précédemment, M. Morellato n'a également fourni aucun chiffre de ventes annuelles en ce qui concerne les produits vendus en liaison avec une ou plusieurs des marques de commerce de l'Opposante, et a fourni uniquement deux factures (la pièce J, en date de 2001, et la pièce K, en date de 2012), créant ainsi un écart important dans la preuve relative aux ventes.

[33]           Au vu de la preuve dont je dispose, j'estime raisonnable de conclure que les marques de commerce POINT ZERO de l'Opposante auraient acquis au moins une certaine notoriété au fil des ans. Cependant, étant donné le peu de renseignements fournis relativement à la publicité de l'Opposante (c.-à-d. aucune dépense publicitaire, écarts chronologiques et, dans certains cas, renseignements insuffisants en ce qui concerne la diffusion), et en l'absence de tout chiffre de ventes ou d'exemples plus représentatifs de factures et/ou de bons de commande pour les produits de l'Opposante qui m'auraient permis de tirer certaines inférences plus significatives quant à la mesure dans laquelle les marques de commerce POINT ZERO ont été employées, je ne suis pas disposée à conclure que l'Opposante a établi l'emploi continu de ses marques de commerce POINT ZERO ni qu'elle a acquis une notoriété significative ou substantielle en liaison avec ces marques.

[34]           La preuve concernant la promotion et l'emploi de la marque de commerce Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINTZERO qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670 est encore plus insuffisante. Dans la plupart des cas, les exemples de publicité fournis par l'Opposante montrent une version différente de cette marque constituée uniquement de la lettre P, de la forme ovale et du point (sans les mots POINT ZERO ou l'arrière-plan rectangulaire). L'unique preuve d'emploi de cette marque est l'étiquette volante du veston qui est montrée en pièce « K ».

[35]           En ce qui a trait à la marque de commerce POINT ZERO LUXURY, je souligne que, mis à part le fait qu'il affirme au paragraphe 5 de son affidavit que l'Opposante est la propriétaire de cette marque, M. Morellato ne fait pas spécifiquement mention de cette marque dans son affidavit et cette dernière ne figure dans aucune des pièces qui sont jointes à son affidavit.

[36]           Enfin, je souligne que l'affidavit de M. Morellato est muet en ce qui concerne l'emploi d'un nom commercial.

IV.2     La preuve de la Requérante

Affidavit Balzamo

[37]           M. Balzamo travaille à titre d'analyste de recherche pour Thomson CompuMark [para 1]. Son affidavit contient les résultats de deux recherches [Traduction] « en common law et dilution » qu'il a effectuées dans le but de repérer les entreprises tierces qui emploient un nom commercial, une dénomination sociale ou une marque de commerce comprenant les termes ZERO ou P, ainsi que les sites Web de tierces parties dans lesquels une marque de commerce comprenant les termes ZERO ou P est employée en liaison avec des montres, des horloges et des bijoux [paras 2 à 4, 6 à 8, pièces PB-1 à PB-3].

[38]           Les résultats de la recherche que M. Balzamo a effectuée pour le terme ZERO sont joints à son affidavit comme pièce PB-1. Un certain nombre d'entreprises tierces et de sites Web de tierces parties qui emploient une marque de commerce et un nom commercial comprenant le terme ZERO en liaison avec des montres, des horloges et/ou des bijoux ont été repérés. Il convient de souligner que les sites Web ne semblent pas tous être canadiens.

[39]           Les résultats de la recherche pour la lettre P sont joints à l'affidavit de M. Balzamo comme pièce PB-3. Cette recherche a également révélé l'existence d'un certain nombre d'entreprises tierces et de sites Web de tierces parties qui emploient un nom commercial ou une marque de commerce comprenant la lettre P en liaison avec des montres, des horloges et/ou des bijoux. Là encore, les sites Web ne semblent pas tous être canadiens.

[40]           Comme pièce B-2 est jointe une liste des sources de common law canadiennes et des registres de noms d'entreprise que M. Balzamo a consultés en ligne aux fins de ses recherches.

[41]           Dans son plaidoyer écrit, la Requérante mentionne sept tierces parties différentes, repérées lors des recherches de M. Balzamo, qui semblent vendre des montres, des horloges et/ou des bijoux en liaison avec des marques de commerce ou des noms commerciaux qui comprennent le terme ZERO et cinq différentes parties qui semblent le faire en liaison avec des marques de commerce ou des noms commerciaux qui comprennent la lettre P. Il convient de souligner qu'aucun des noms commerciaux et aucune des marques de commerce repérés par la Requérante ne semblent comprendre à la fois le terme ZERO et la lettre P. En outre, bon nombre d'entre eux sont très différents des marques de commerce des parties et peu sont canadiens.

V         Analyse des motifs d'opposition

V.1      Motifs d’opposition rejetés sommairement

Non-conformité – articles 30e), 30h) et 30i)

[42]           Dans sa déclaration d'opposition, l'Opposante a soulevé des motifs d'opposition fondés sur les articles 30e), 30h) et 30i) de la Loi. Dans son plaidoyer écrit, l'Opposante a traité uniquement d'un aspect de l'un de ces motifs d'opposition (article 30i)), et elle ne l'a pas fait de façon détaillée. À l'audience, l'agent de l'Opposante m'a informé qu'il n'entendait pas faire de représentations relativement à ces motifs, qui ne sont pas, par ailleurs, corroborés par la preuve. Par conséquent, ces motifs sont tous rejetés.

[43]            Ainsi, les seuls motifs d'opposition que je dois examiner ci-après sont ceux fondés sur les articles 12(1)d), 16(3)a), 16(3)b), 16(3)c) et 2 (caractère distinctif) de la Loi.

V.2      Analyse des motifs d'opposition restants

Non-enregistrabilité – article 12(1)d)

[44]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable parce qu'elle crée de la confusion avec ses marques de commerce : P ZERO (LMC786,620); POINT ZERO (LMC309,311); POINT ZERO (LMC800,971); POINT ZERO LUXURY (LMC693,470); et Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO (LMC695,670).

[45]           La date pertinente pour l'appréciation d'un motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[46]           L'Opposante a produit des copies des détails de ses enregistrements à titre de preuve. J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre afin de déterminer si ces enregistrements existent toujours et je souligne que l'enregistrement (no LMC786,620) de la marque de commerce P ZERO de l'Opposante a été radié. [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)].

[47]           L'Opposante s'est donc acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait à l'égard de ce motif d'opposition uniquement en ce qui concerne ces quatre enregistrements restants (nos LMC309,311 pour POINT ZERO, LMC800,971 pour POINT ZERO, LMC693,470 pour POINT ZERO LUXURY et LMC695,670 pour Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO) et la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et ces marques de commerce.

Le test en matière de confusion

[48]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi porte que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce si l'emploi des deux marques de commerce dans la même région est susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[49]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[50]           Les marques de commerce des parties possèdent un certain caractère distinctif inhérent, car elles comprennent toutes des éléments qui, par rapport aux produits ou services auxquels ils sont liés, ne revêtent aucune signification évidente d'emblée.

[51]           Le caractère distinctif d'une marque de commerce peut être accru par la promotion ou l'emploi.

[52]           En l'espèce, la Requérante n'a produit aucun élément de preuve pour établir que la Marque est devenue connue dans une quelconque mesure. Bien que l'Opposante ait produit une preuve de la promotion et/ou de l'emploi de certaines de ses marques de commerce déposées, sa preuve est insuffisante à de nombreux égards.

[53]           Comme je l'ai mentionné précédemment, il m'est possible, au vu de la preuve dont je dispose, de conclure que les marques de commerce POINT ZERO sont devenues connues dans une certaine mesure. Cependant, étant donné le peu de renseignements fournis dans l'affidavit de M. Morellato, je ne peux conclure qu'elles sont devenues connues dans une mesure significative en liaison avec des montres ou d'autres produits ou services. La preuve concernant la promotion et l'emploi de la marque de commerce qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC695,670 (Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO) est encore plus mince et la preuve relative à POINT ZERO LUXURY est pratiquement inexistante.

[54]           Dans l'ensemble, j'estime que ce facteur, qui concerne à la fois le caractère distinctif inhérent des marques de commerce des parties et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, favorise l'Opposante, mais pas dans une mesure importante et principalement en ce qui a trait à POINT ZERO.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été en usage

[55]           Étant donné que la demande pour la Marque est fondée sur l'emploi projeté et que la Requérante n'a produit aucun élément de preuve établissant que l'emploi de la Marque a commencé au Canada, j'estime que ce facteur favorise également l'Opposante, mais là encore, seulement dans une faible mesure et principalement en ce qui a trait à POINT ZERO.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[56]           S'agissant des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d) de la Loi, l'appréciation de la probabilité de confusion aux termes de l'article 12(1)d) de la Loi repose sur la comparaison de l'état déclaratif des produits qui figure dans la demande pour la Marque avec l'état déclaratif des produits qui figure dans les enregistrements de l'Opposante [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF) et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Cet examen des états déclaratifs doit cependant être effectué dans l'optique de déterminer le genre probable d'entreprise ou de commerce envisagé par les parties, et non l'ensemble des commerces que le libellé est susceptible d'englober. Une preuve de la nature véritable des commerces des parties est utile à cet égard [McDonald's Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[57]           La demande pour la Marque vise des [Traduction] « montres, horloges et bijoux de fantaisie ».

[58]           Les [Traduction] « montres » et « bijoux de fantaisie » visés par la demande recoupent directement les produits spécifiés dans deux des enregistrements de l'Opposante (LMC309,311 pour POINT ZERO et LMC695,670 pour Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO), qui visent des [Traduction] « montres » et des « bijoux ». De plus, les [Traduction] « horloges » pourraient être considérées par les consommateurs comme un produit apparenté. Compte tenu du fait que les produits des parties sont d'un genre similaire, et en l'absence d'une preuve contraire, j'estime raisonnable de conclure qu’il y aurait également un certain recoupement entre leurs voies de commercialisation respectives.

[59]           En conséquence, j'estime que ce facteur favorise clairement l'Opposante en ce qui a trait à ses enregistrements nos LMC309,311 pour POINT ZERO et LMC695,670 pour Lettre P et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO, mais pas en ce qui a trait à ces deux autres marques de commerce, c'est-à-dire POINT ZERO (enregistrement no LMC800,971) et POINT ZERO LUXURY (LMC693,470), car ces dernières visent principalement des vêtements et d'autres produits et services qui, à mon sens, ne sont pas apparentés aux produits visés par la demande pour la Marque.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce

[60]           Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc et al [supra], la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que le facteur le plus important parmi ceux énoncés à l'article 6(5) de la Loi est souvent le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties [voir également Beverley Bedding & Upholstery Co c Regal Bedding & Upholstering Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145 (CF), à la p 149, confirmée par (1982), 60 CPR (2d) 70 (CAF)]. Si les marques de commerce des parties ne se ressemblent pas, il est peu probable que l'analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire.

[61]           Il est bien établi que, lorsqu'il s'agit de déterminer le degré de ressemblance entre des marques, il faut considérer les marques dans leur ensemble et éviter de placer les marques côte à côte pour les comparer et relever les similitudes ou les différences entre leurs éléments constitutifs. Il faut également s'abstenir d'analyser les marques en détail.

[62]           Dans Masterpiece, la Cour suprême a également fait observer que, même si le premier mot d'une marque de commerce est souvent l'élément le plus important pour établir le caractère distinctif d'une marque de commerce [Conde Nast Publications Inc c Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst)], il est préférable, lorsqu'il s'agit de comparer des marques entre elles, de se demander d'abord si l'un des aspects de la marque de commerce est particulièrement frappant ou unique.

[63]           La Marque, P ZEROTEMPO, serait, à mon avis, probablement perçue comme une expression formant un tout et n'ayant pas de signification apparente. À mon sens, aucune de ses parties n'est plus frappante ou unique, et ne ressort plus que les autres. Si elle a une particularité, ce serait plutôt l'impression étrangère qui s'en dégage.

[64]           Chacune des marques de commerce de l'Opposante est formée des mots POINT ZERO, qui sont employés soit seuls soit en conjugaison avec d'autres mots descriptifs (p. ex. LUXURY [luxe]) ou éléments graphiques (lettre P stylisée et ovale contenant un point dans une forme rectangulaire).

[65]           À mon sens, les mots POINT ZERO, considérés comme un tout, sont ce qui ressort le plus de chacune des marques nominales de l'Opposante (c.-à-d. LMC309,311 pour POINT ZERO, LMC800,971 pour POINT ZERO et LMC693,470 pour POINT ZERO LUXURY). Contrairement à ce que l'Opposante a fait valoir à l'audience, je ne considère pas que la lettre P ressort à titre d'élément indépendant dans ces marques de commerce, malgré le fait qu'elle figure en première position dans ces marques. Toutefois, dans le cas de la marque figurative de l'Opposante (enregistrement no LMC695,670 pour Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO), j'estime que l'ovale contenant la lettre P stylisée et le point (considéré comme un tout) constitue une partie également dominante de cette marque précise, si ce n'est légèrement plus dominante.

[66]           Dans l'ensemble, je ne considère pas qu'il existe une ressemblance très forte entre la Marque et chacune des marques de commerce de l'Opposante. Bien que l'élément ZERO soit commun aux marques de commerce des parties, j'estime que les marques POINT ZERO et POINT ZERO LUXURY sont considérablement différentes de la Marque P ZEROTEMPO sur les plans visuel et phonétique. On pourrait soutenir que la marque figurative de l'Opposante (Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO), laquelle pourrait en théorie être prononcée comme P POINT ZERO (entre autres façons), ressemble un peu plus à la Marque du fait de la présence de la lettre P. Cependant, dans l'ensemble, elle demeure très différente de par sa composition et sa structure, qui produisent une impression visuelle différente et engendrent des différences sur le plan phonétique.

[67]           En ce qui concerne l'idée suggérée, je souligne que la Marque est formée de la lettre P et du mot ZEROTEMPO. Si on la décomposait, on obtiendrait la lettre P, le mot ZERO et le mot TEMPO et on pourrait soutenir que chacun de ces éléments seraient reconnus comme une lettre ou comme un mot de la langue anglaise. Or, ces éléments ne sont pas décomposés de cette manière dans la Marque et je conviens avec la Requérante que, sous le coup de la première impression, la Marque serait plus probablement considérée comme un tout et perçue comme un mot inventé ou un mot étranger.

[68]           J'estime que les mots POINT ZERO, qui sont présents dans toutes les marques de commerce de l'Opposante, seraient reconnus comme des termes ayant des significations claires en anglais, mais, considérés conjointement, ils seraient également perçus comme une expression inventée (différente) sans signification.

[69]           Ainsi, bien que l'on puisse soutenir que les marques de commerce des parties se ressemblent dans une certaine mesure du fait principalement de la présence du mot ZERO et, dans le cas de la marque figurative de l'Opposante, de la lettre P, je ne considère pas qu'il existe entre elles une ressemblance particulièrement forte.

Circonstances de l'espèce

État du registre

[70]           À titre de circonstance additionnelle de l'espèce, la Requérante invoque les résultats des recherches de dilution effectuées par M. Balzamo dans le but de repérer les tierces parties qui vendent des montres, des horloges et/ou des bijoux en liaison avec des dénominations sociales, des noms commerciaux ou des marques de commerce qui comprennent la lettre P ou le mot ZERO. La Requérante soutient que l'emploi par des tierces parties au Canada de marques qui possèdent des caractéristiques fondamentales semblables à celles des marques de commerce de l'Opposante donne à penser que les marques de commerce de l'Opposante ont perdu leur caractère distinctif et qu'on ne peut donc pas raisonnablement conclure que la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce de l'Opposante.

[71]           Comme je l'ai souligné précédemment, dans son plaidoyer écrit, la Requérante mentionne seulement sept tierces parties différentes, repérées lors des recherches de M. Balzamo, qui semblent vendre des montres, des horloges et/ou des bijoux en liaison avec des marques de commerce ou des noms commerciaux qui comprennent le terme ZERO, et cinq parties différentes qui semblent le faire en liaison avec des marques de commerce ou des noms commerciaux qui comprennent la lettre P.

[72]           Au vu de cette preuve dans son ensemble, je ne suis pas disposée à conclure que les marques de commerce de l'Opposante ont un caractère distinctif moindre du fait que des marques de commerce ou des noms commerciaux similaires sont employés par des tierces parties, comme le soutient la Requérante.

La famille de marques de commerce POINT ZERO de l'Opposante

[73]           À l'audience, l'Opposante a indiqué que l'existence de sa famille de marques de commerce POINT ZERO rendrait la confusion plus probable. L'Opposante a défendu la thèse selon laquelle l'accent est mis sur la lettre P dans ses marques POINT ZERO et P ZERO et dans son logo (enregistrement no LMC695,670 pour Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINT ZERO). L'Opposante soutient donc qu'à la vue de la Marque, qui comprend également le mot ZERO et la lettre P, les consommateurs seraient portés à croire qu'il s'agit simplement d'une autre marque de la famille de marques de commerce de l'Opposante.

[74]           Il est vrai que l'existence d'une famille de marques peut parfois accroître la probabilité que le public perçoive une marque de commerce de nature ou de composition similaire comme une autre marque de la famille et suppose, par conséquent, que le produit ou le service lié à cette marque de commerce est fabriqué ou exécuté par la même personne. Il a cependant été déterminé que, dans une procédure d'opposition, on ne peut pas simplement présumer de l'existence d'une famille de marques de commerce. La partie qui cherche à établir l'existence d'une famille de marques doit démontrer qu'elle emploie plus d'une ou deux marques de commerce appartenant à la famille alléguée (un enregistrement ou une demande n'établissant pas l'emploi) [voir Techniquip Ltd c Canadian Olympic Assn (1998), 1998 CanLII 7573 (CF), 145 ACF 59 (CF 1re inst), conf par 250 NR 302 (CAF); et Now Communications Inc c CHUM Ltd (2003), 32 CPR (4th) 168 (COMC)]. En l'espèce, l'Opposante n'a pas suffisamment fait la preuve de l'emploi de ses marques de commerce. Dans ce contexte, je ne considère pas que les arguments qu'elle a présentés à cet égard sont convaincants.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[75]           Contrairement à ses allégations, l'Opposante n'a pas établi qu'une ou plusieurs de ses marques de commerce sont devenues connues dans une mesure importante. Elle n'a pas non plus établi l'emploi prolongé ou continu de ses marques de commerce. Malgré le recoupement entre les produits des parties, compte tenu du fait qu'aucune des marques de commerce déposées de l'Opposante n'a acquis une notoriété significative, soit seule soit en conjugaison avec d'autres marques de commerce non déposées de l'Opposante, dont P ZERO (ce qui aurait constitué une circonstance pertinente de l'espèce), je suis d'avis que les différences entre les marques des parties dans la présentation, dans le son et dans les idées suggérées sont suffisantes pour éliminer toute probabilité raisonnable de confusion. Après examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce, je conclus par conséquent que, selon la prépondérance des probabilités, il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce en cause.

[76]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté.

Absence de droit à l'enregistrement

Article 16(3)a)

[77]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque parce que, à la date de production de la demande pour la Marque, cette dernière créait de la confusion avec les marques de commerce P ZERO, POINT ZERO (LMC309,311 et LMC800,971), POINT ZERO LUXURY et Lettre P stylisée et point ovale dans un rectangle accompagnés des mots POINTZERO (LMC695,670), qui avaient été antérieurement employées ou révélées au Canada en liaison avec les produits et services qui sont énumérés à l'annexe « A » jointe aux présentes.

[78]           L'Opposante a, relativement à ce motif d'opposition, le fardeau initial de démontrer que ses marques de commerce étaient déjà en usage à la date de production de la demande pour la Marque et qu'elle ne les avaient pas abandonné à la date d'annonce de la demande de la Requérante [article 16(5)].

[79]           En ce qui concerne la marque de commerce antérieurement déposée P ZERO de l'Opposante, comme je l'ai mentionné ci-dessus dans mon examen de la preuve, l'Opposante n'a pas établi que cette marque était déjà employée à la date de production de la demande pour la Marque en liaison avec des montres ou d'autres produits ou services. Bien que la pièce K jointe à l'affidavit Morellato montre l'emploi de P ZERO en liaison avec la vente d'un veston, cette vente a eu lieu en 2012, c'est-à-dire après la date pertinente pour l'appréciation ce motif d'opposition. Aucun autre exemple représentatif de l'emploi de la Marque sur ou en liaison avec des montres ou tout autre produit n'a été fourni. L'Opposante ne s'est donc pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l'égard de son motif fondé sur l'article 16(3)a), relativement à cette marque.

[80]           S'agissant des marques de commerce déposées de l'Opposante, même si cette dernière s'était acquittée du fardeau initial qui lui incombait à l'égard de ce motif relativement à une ou plusieurs de ces marques, ce motif serait rejeté pour des raisons semblables à celles exposées dans mon analyse du motif fondé sur l'article 12(1)d) ci-dessus. L'examen de chacun des facteurs énoncés à l'article 6(5) à la date de production de la demande pour la Marque, plutôt qu'à la date d'aujourd'hui, n'a pas d'incidence significative sur ma précédente analyse des circonstances de la présente espèce au titre de l'article 12(1)d).

[81]           En conséquence, ce motif d'opposition est également rejeté.

Article 16(3)b)

[82]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque compte tenu de la production antérieure de la demande no 1,472,367 pour la marque de commerce Écusson de forme ovale avec extrémité supérieure rectangulaire, qui comprend également les mots POINT ZERO.

[83]           La date pertinente pour l'appréciation de ce motif d'opposition est la date de production de la demande pour la Marque, soit le 14 mars 2011.

[84]           J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter les registres du Bureau des marques de commerce afin de confirmer l'existence de la demande de l'Opposante [voir Royal Appliance Mfg Co c Iona Appliances Inc (1990), 32 CPR (3d) 525 (COMC) à la p 529]. Je confirme que la demande de l'Opposante a été produite avant la demande de la Requérante et qu'elle était toujours pendante à la date d'annonce de la demande de la Requérante. L'Opposante s'est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif d'opposition. En conséquence, il incombe à la Requérante de démontrer qu'il n'existe pas de probabilité de confusion entre les marques en cause.

[85]           Même si l'Opposante s'est acquittée du fardeau initial qui lui incombait à l'égard de ce motif, ce motif est rejeté pour des raisons semblables à celles exposées dans mon analyse du motif fondé sur l'article 12(1)d) ci-dessus. Le degré de ressemblance entre la Marque et cette marque est encore plus faible qu'entre la Marque et n'importe laquelle des autres marques de commerce de l'Opposante. Cette marque ne possède pas un caractère distinctif plus fort que celui de la Marque et il n'a pas été démontré qu'elle a été employée pendant une quelconque période ou qu'elle est devenue connue dans une quelconque mesure. Dans ce contexte, comme c'était le cas pour les marques de commerce déposées de l'Opposante, malgré tout recoupement entre les produits liés à ces marques de commerce précises, je ne considère pas qu'il existe une quelconque probabilité raisonnable de confusion entre elles.

[86]           En conséquence, ce motif d'opposition est également rejeté.

Article 16(3)c)

[87]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque compte tenu de l'emploi antérieur par l'Opposante de son nom commercial POINT ZERO. La date pertinente pour l'appréciation de ce motif d'opposition est la date de production de la demande pour la Marque [article 16(3)c)]. Pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard de ce motif, l'Opposante doit démontrer que son nom commercial était déjà en usage à la date de production de la demande de la Requérante pour la Marque. Or, l'affidavit de M. Morellato est muet en ce qui concerne l'emploi d'un nom commercial. J'estime, par conséquent, que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l'égard de ce motif.

[88]           En conséquence, ce motif d'opposition est rejeté.

Autres motifs fondés sur l'absence de droit à l'enregistrement

[89]           Aux paragraphes 3.4.1 à 3.4.4 de sa déclaration d'opposition, l'Opposante allègue également que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque parce que 1) la demande n'est pas conforme aux exigences de l'article 30; 2) la Marque n'est pas une marque projetée, mais une marque en usage; 3) la Marque n'est pas enregistrable ou ne peut pas servir de marque de commerce parce qu'elle n'est pas distinctive; et 4) la Requérante n'est pas une personne. La Requérante n'a présenté aucune observation relativement à ces motifs et je considère que tous ces motifs sont un dédoublement des autres motifs énoncés dans la déclaration d'opposition et/ou sont incorrectement plaidés au titre de l'article 16 de la Loi.

Absence de caractère distinctif

[90]           En premier lieu, l'Opposante allègue que la Marque n'est pas distinctive en ce qu'elle ne distingue pas et n'est pas adaptée à distinguer les produits en liaison avec lesquels la Requérante projette de l'employer de ceux de tiers, y compris ceux de l'Opposante.

[91]           En second lieu, l'Opposante allègue que la Marque ne distingue pas et n'est pas adaptée à distinguer les produits et services de la Requérante de ceux de tiers, y compris ceux de l'Opposante, car elle a seulement une vocation fonctionnelle ou décorative.

[92]           Pour que l'on puisse considérer que l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de son premier motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif, sa preuve doit démontrer qu'au moins une de ses marques de commerce était devenue suffisamment connue au moment où la procédure d'opposition a été engagée pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF) et Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44, à la p 58 (CF 1re inst)]. Comme je l'ai indiqué précédemment, en l'espèce, l'Opposante n'a pas produit une preuve suffisante pour me permettre de conclure qu'une ou plusieurs de ses marques de commerce sont devenues connues dans une quelconque mesure significative. J'estime, par conséquent, qu'elle ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l'égard de ce motif.

[93]           Quant au second motif d'opposition de l'Opposante fondé sur le caractère distinctif, je souligne que la Marque est une marque nominale et que l'Opposante n'a pas produit le moindre élément de preuve ni la moindre observation à l'appui de ce motif. Dans la mesure où l'on peut considérer que ce motif est correctement plaidé, j'estime par conséquent que l'Opposante ne s'est pas non plus acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait à l'égard de ce motif.

[94]           En conséquence, les motifs d’opposition fondés sur l’absence de caractère distinctif sont également rejetés.

VII      Décision

[95]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Lisa Reynolds

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

_________________________________________

 

 

DATE DE L’AUDIENCE : 2015-09-01

 

COMPARUTIONS

 

Mark Sumbulian                                                                      POUR L'OPPOSANTE

 

Philip Lapin                                                                             POUR LA REQUÉRANTE

 

AGENTS AU DOSSIER

 

Mark Sumbulian                                                                      POUR L'OPPOSANTE

 

Fetherstonhaugh & Co.                                                           POUR LA REQUÉRANTE

Annexe « A »

MARQUE DE COMMERCE

NUMÉRO D'ENREGISTREMENT

PRODUITS / SERVICES
[Traduction]

P ZERO

LMC786,620

(1) Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément; sous-vêtements, dessous, robes, jupes, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandails et pulls.
(2) Chaussures, nommément; bottes, chaussures, sandales et pantoufles.
(3) Accessoires, nommément; montres.

POINT ZERO

LMC309,311

(1) Tissus, couvre-lits; nappes de tables; vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément : manteaux, vestes, gilets, pantalons, sous-vêtements, chemises, blouses, shorts, jeans, chapeaux, casquettes, mouchoirs, écharpes, jump suits, robes, salopettes, T-shirts, pull-over, chandails, maillots de corps, maillots de bain, peignoirs de bain, chaussures, notamment: bottes, souliers, sandales et pantoufles [en français dans l'original].
(2) Montres, ballons de basket, portefeuilles, ceintures, lunettes de soleil, lunettes, cravates, eau de Cologne, parfums, gels, déodorants, eau de toilette, bijoux, chaînes porte-clés, sacs à dos, sacs de voyage, housses à vêtements, sacs à main, sacs d'école, sacs de plage, bourses, parapluies, gants et mitaines.

POINT ZERO

LMC800,971

PRODUITS :


(1) Chaussettes; pulls d'entraînement.
(2) Chaussures de course.
(3) Pantalons de neige; planches à neige.
(4) Vêtements de nuit; robes de chambre.
(5) Bonneterie; collants.
(6) Coutellerie, vaisselle, verres.
(7) Costumes sur mesure.
(8) Vélos.

SERVICES :


(1) Services de crédit et de prêt.
(2) Services immobiliers; gestion immobilière.
(3) Services de magasin de vente au détail de vêtements.

POINT ZERO LUXURY

LMC693,470

(1) Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément : manteaux, vestes, costumes, pantalons, tee-shirts, shorts, jeans, chapeaux, casquettes, sous-vêtements, dessous, robes, jupes, maillots de bain, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandails, pantalons d'entraînement, pulls d’entraînement, vêtements de nuit, pyjamas, robes de
 chambre et pulls.


Stylized letter P and an oval dot in a rectangle with the words POINTZERO

LMC695,670

PRODUITS :


(1) Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément : manteaux, vestes, costumes, pantalons, tee-shirts, shorts, jeans, chapeaux, casquettes, sous-vêtements, dessous, robes, jupes, maillots de bain, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandails, pantalons d'entraînement, pulls d’entraînement, vêtements de nuit, pyjamas, robes de
 chambre et pulls; (2) articles chaussants, nommément : bottes, chaussures, chaussures de course, chaussures de sport, sandales et pantoufles; (3) accessoires mode, nommément : montres, portefeuilles, ceintures, bretelles, cravates, chaussettes, mouchoirs, bonneterie, lunettes de soleil, lunettes, bijoux, chaînes porte-clés, bourses, parapluies, gants et mitaines; (4) produits cosmétiques et préparations nettoyantes, nommément : eau de Cologne, parfums, gels bronzants, gels capillaires, déodorants et eau de toilette; (5) valises et sacs de voyage, nommément : mallettes, sacs à dos, sacs de voyage, housses à vêtements, sacs à main, sacs d'école et sacs de plage ; (6) équipement de sport, nommément : vélos, scooters, planches à roulettes, skis, patins, patins à roues alignées, ballons de basket, ballons de football et ballons de soccer; (7) équipement de camping, nommément : tentes et sacs de couchage; (8) mobilier et accessoires d'intérieur, nommément : dessus de table, verres, tasses, fourchettes, cuillères, couteaux, ustensiles, casseroles et poêles, draps, catalognes, couvertures, serviettes, rideaux, stores horizontaux et stores verticaux.

SERVICES :


(1) Services de café et de restaurant; services de financement par prêt et services de carte de crédit; services de gestion immobilière; services de magasin de vente au détail de vêtements.

Patch with oval shape and rectangular shaped top.

1,472,367

(1) Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément : manteaux, vestes, costumes, pantalons, tee-shirts, shorts, jeans, chapeaux, casquettes, sous-vêtements, dessous, robes, jupes, maillots de bain, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandails, pantalons d'entraînement, pulls d’entraînement, vêtements de nuit, pyjamas, robes de
 chambre et pulls; (2) articles chaussants, nommément : bottes, chaussures, chaussures de course, chaussures de sport, sandales et pantoufles; (3) accessoires mode, nommément : montres, portefeuilles, ceintures, bretelles, cravates, chaussettes, mouchoirs, bonneterie, lunettes de soleil, lunettes, bijoux, chaînes porte-clés, bourses, parapluies, gants et mitaines; (4) produits cosmétiques et préparations nettoyantes, nommément : eau de Cologne, parfums, gels bronzants, gels capillaires, déodorants et eau de toilette; (5) valises et sacs de voyage, nommément : mallettes, sacs à dos, sacs de voyage, housses à vêtements, sacs à main, sacs d'école et sacs de plage ; (6) équipement de sport, nommément : vélos, scooters, planches à roulettes, skis, patins, patins à roues alignées, ballons de basket, ballons de football et ballons de soccer; (7) équipement de camping, nommément : tentes et sacs de couchage.

 

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