Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 79

Date de la décision : 2015-04-28

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Orchard Yarn and Thread Company, Inc., DBA Lion Brand Yarn à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,540,891 pour la marque de commerce HOMESPUN KNITWEAR au nom de Darrin Bachinski, faisant affaire sous le nom de Standard Design

[1]               Le 23 août 2011, Darrin Bachinski, faisant affaire sous le nom de Standard Design (la Requérante), a produit la demande d'enregistrement no 1,540,891 pour la marque de commerce HOMESPUN KNITWEAR (la Marque). La demande est fondée sur l'emploi au Canada depuis au moins le 31 mars 2010 en liaison avec des [traduction] « chemises pour hommes et garçons » et depuis au moins 2008 en liaison avec la [traduction] « vente en gros de vêtements ».

[2]               La demande d'enregistrement a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 20 mars 2013 et, le 21 mai 2013, Orchard Yarn and Thread Company, Inc. DBA Lion Brand Yarn Company (l'Opposante) s'y est opposée en vertu de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi).

[3]               Les motifs d'opposition sont fondés sur les articles 30i), 12(1)b), 12(1)d), 16(3)a) et 2 (caractère distinctif) de la Loi.

[4]               La Requérante a nié chacune des allégations énoncées dans la déclaration d'opposition dans une contre-déclaration datée du 30 juillet 2013.

[5]               Comme preuve à l'appui de son opposition, l'Opposante a produit l'affidavit d'Edward F. Cooke, souscrit le 16 décembre 2013 (l'affidavit de M. Cooke), de même qu'une copie certifiée de l'enregistrement no LMC843,958 pour la marque de commerce HOMESPUN.

[6]               Comme preuve au soutien de sa demande, la Requérante a produit l'affidavit de Darrin Bachinski, souscrit le 7 avril 2014 (l'affidavit de M. Bachinski) et l'affidavit de Heather Young, souscrit le 7 avril 2014 (l'affidavit de Mme Young).

[7]               Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit; aucune audience n'a été tenue.

[8]               Pour les motifs qui suivent, l'opposition est rejetée.

Fardeau de preuve

[9]               La Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L'Opposante a toutefois le fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), p. 298].

Motifs d'opposition sommairement rejetés

Non-conformité – article 30i)

[10]           L'Opposante allègue que la demande relative à la Marque n'est pas conforme à l'article 30i) de la Loi, parce que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer la Marque, compte tenu de la marque de commerce déposée de l'Opposante.

[11]           Lorsqu'un requérant a fourni la déclaration exigée à l'article 30i), un motif d'opposition fondé sur cet article ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu'il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), p. 155].

[12]           La Requérante a fourni la déclaration requise et l'Opposante n'a pas démontré qu'il s'agissait d'un cas exceptionnel.

[13]           Par conséquent, ce motif est sommairement rejeté.

Absence de droit à l'enregistrement – article 12(1)b)

[14]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable, parce qu'elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou du lieu d'origine de ces marchandises.

[15]           Une déclaration d'opposition doit énoncer les motifs d'opposition avec suffisamment de détails pour permettre au requérant d'y répondre [voir l'article 38(3)a) de la Loi; Faber-Gastell Can Inc c Binney & Smith Inc (1991), 36 CPR (3d) 388 (COMC); et Benson and Hedges (Canada) Ltd c Imasco Ltd (1976), 25 CPR (2d) 269 (CF 1re inst)]. Une allégation qui reproduit simplement le libellé de l'article 12(1)b) de la Loi et qui ne fait donc qu'énoncer une conclusion de droit n'est pas suffisante, parce qu'elle ne renferme aucune allégation de fait à l'appui [voir Faber-Gastell, précité].

[16]           Je rejette, par conséquent, sommairement ce motif, parce qu'il n'est pas plaidé correctement. Je souligne que même si j'avais conclu que ce motif a été plaidé correctement, il aurait tout de même été sommairement rejeté, parce que l'Opposante n'a présenté aucune observation ni produit de preuve à l'appui pour s'acquitter de son fardeau de preuve initial.

Analyse des motifs d'opposition restants

Non-enregistrabilité – article 12(1)d)

[17]                 L'Opposante allègue que la Marque n'est pas enregistrable, parce qu'elle crée de la confusion avec sa marque de commerce HOMESPUN, qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC843,958.

[18]           La date pertinente pour l'examen du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[19]           L'Opposante a produit une copie certifiée de son enregistrement; j'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et je confirme que l'enregistrement de l'Opposante est en vigueur [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L'Opposante s'est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif.

[20]           L'Opposante s'étant acquittée de son fardeau de preuve, il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre sa marque de commerce et la marque de commerce de l'Opposante.

[21]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi prévoit que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce, lorsque l'emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[22]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[23]           La marque de commerce de l'Opposante est uniquement formée du mot du dictionnaire d'usage courant HOMESPUN (tissé à la main) et la Marque se compose de ce même mot, de même que du mot KNITWEAR (tricots), qui est aussi un mot du dictionnaire d'usage courant.

[24]           Le mot « homespun » est défini comme suit dans la version en ligne du Canadian Oxford Dictionary (2 éd.) [traduction] : adjectif 1. (en parlant d'une étoffe) fait de fil fabriqué à domicile; (en parlant de fil) fabriqué à domicile. 2. ordinaire, simple, rudimentaire, sans attrait. nom 1. étoffe tissée à la main. 2. quelque chose d'ordinaire ou sans attrait. Le mot « knitwear » (tricots) est simplement défini comme suit [traduction] : « vêtements tricotés ».

[25]           Compte tenu de la nature quelque peu descriptive de ces mots, j'estime que les marques de commerce des parties possèdent un faible caractère distinctif inhérent.

[26]           Une marque de commerce peut acquérir une force accrue en devenant connue au Canada par la promotion ou l'emploi.

[27]           La preuve relative à la promotion et à l'emploi de la marque de commerce de l'Opposante se trouve dans l'affidavit de M. Cooke. M. Cooke est l'administrateur en chef de l'Opposante [affidavit de M. Cooke, para. 1 et 2]. Selon M. Cooke, l'Opposante emploie sa marque de commerce au Canada depuis au moins mai 1998 en liaison avec des [traduction] « fils » [affidavit de M. Cooke, para. 4]. M. Cooke affirme que les produits arborant sa marque de commerce HOMESPUN sont vendus dans les magasins spécialisés d'art et d'artisanat Michaels [affidavit de M. Cooke, para. 5].

[28]           Au paragraphe 6 de son affidavit, M. Cooke fournit des chiffres de vente se rapportant aux ventes des produits de l'Opposante arborant la marque de commerce HOMESPUN au Canada de 2007 à 2011. M. Cooke affirme que ces chiffres de vente représentaient les chiffres les plus récents disponibles au moment de souscrire son affidavit [affidavit de M. Cooke, para. 5]. Les ventes des produits de l'Opposante arborant la marque de commerce HOMESPUN au Canada ont varié de 526 891 $ CA à 786 137 $ CA et le nombre total d'unités vendues, de 63 640 à 187 387 au cours de ces années [affidavit de M. Cooke, para. 5].

[29]           Des imprimés de pages du site Web de Michaels qui, M. Cooke atteste-t-il, présentent les produits HOMESPUN de l'Opposante offerts en vente au Canada, sont joints comme Pièce « B » à l'affidavit de M. Cooke [affidavit de M. Cooke, para. 9]. Les imprimés montrent les produits textiles de l'Opposante sur lesquels figure bien en vue sa marque de commerce.

[30]           La preuve relative à la promotion et à l'emploi de la Marque se trouve dans l'affidavit de M. Bachinski. M. Bachinski affirme que la Requérante exerce ses activités comme vendeuse en gros de vêtements et en particulier de chemises pour hommes [affidavit de M. Bachinski, para. 2]. Un article de blogue qui, aux dires de M. Bachinski, donne des renseignements sur les produits de la Requérante est joint comme Pièce « B-1 » à l'affidavit de M. Bachinski [affidavit de M. Bachinski, para. 6]. Si les imprimés tirés d'Internet ne peuvent généralement pas tenir lieu de preuve de la véracité de leur contenu, étant donné que M. Bachinski est la Requérante et qu'il a indiqué que l'article fournit des renseignements sur ses produits, je suis disposée à examiner cette preuve. Selon l'article, HOMESPUN KNITWEAR a été créé en 2009 comme un produit dérivé de Standard Design et sa production s'effectue à l'échelle locale à Vancouver depuis ce temps.

[31]           Un exemple de chemise HOMESPUN KINTWEAR qui semble être tiré d'un site Web offrant les chemises en vente est joint comme Pièce « B-2 » [affidavit de M. Bachinski, para. 6]. La marque de commerce de la Requérante n'y est pas visible. M. Bachinski affirme que les chemises HOMESPUN KNITWEAR sont vendues par l'entremise de magasins de vente de vêtements au détail à un prix de détail suggéré variant de 80 $ US à 145 $ US, le prix de détail moyen étant de 110 $ US [affidavit de M. Bachinski, para. 3]. Des photos de l'intérieur des magasins de vente de vêtements au détail qui sont clients de la Requérante sont jointes comme Pièces « A-1 » à « A-7 » [affidavit de M. Bachinski, para. 5]. Les magasins sont situés à Vancouver, à Edmonton, à Toronto et à Calgary. Selon M. Bachinski, ils vendent principalement des vêtements pour hommes de grands couturiers et ils n'œuvrent pas dans le secteur des fournitures d'artisanat, pas plus qu'ils n'offrent de faisceaux de fils à tricoter [affidavit de M. Bachinski, para. 4 et 5].

[32]           Selon M. Bachinski, les produits de la Requérante sont annoncés dans le magazine Inventory Magazine, qui est publié deux fois par année et est distribué par l'entremise de détaillants de vêtements pour hommes haut de gamme et est vendu dans les kiosques à journaux pour 20,00 $ US [affidavit de M. Bachinski, para. 13]. M. Bachinski ne dit pas si ces magazines sont distribués au Canada.

[33]           Comme M. Bachinski n'a pas fourni de chiffres de ventes ou de dépenses publicitaires, il est difficile d'évaluer la mesure dans laquelle la marque de commerce de la Requérante est devenue connue au Canada. En revanche, compte tenu de la preuve qui a été produite par l'Opposante et en particulier de ses chiffres de vente et de la disponibilité de ses produits dans les magasins d'artisanat Michaels, je puis conclure que sa marque de commerce est devenue connue dans une certaine mesure au Canada.

[34]           Dans l'ensemble, j'estime, par conséquent, que ce facteur favorise l'Opposante.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été en usage

[35]           La demande relative à la Marque est fondée sur l'emploi au Canada depuis au moins le 31 mars 2010 en liaison avec des [traduction] « chemises pour hommes et garçons » et depuis au moins 2008 en liaison avec la [traduction] « vente en gros de vêtements ». Cependant, la Requérante n'a fourni aucune facture, chiffre de vente ou photographie démontrant l'emploi de la Marque sur ou en liaison avec des [traduction] « chemises », pas plus qu'elle n'a fourni de preuve établissant l'emploi de la marque de commerce dans l'annonce ou l'exécution de ses services. En revanche, l'Opposante a démontré au moins un certain emploi de sa marque de commerce et a fourni des chiffres de vente remontant à 2007.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

[36]           S'agissant des facteurs énoncés aux articles 6(5)c) et d) de la Loi, l'appréciation de la probabilité de confusion aux termes de l'article 12(1)d) de la Loi repose sur la comparaison de l'état déclaratif des produits qui figure dans la demande relative à la Marque avec l'état déclaratif des produits qui figure dans l'enregistrement de l'Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF) et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)].

[37]           L'état déclaratif des produits qui figure dans l'enregistrement de l'Opposante vise des [traduction] « fils » et la demande relative à la Marque vise des [traduction] « chemises pour hommes et garçons » et la « vente en gros de vêtements ». Les produits des parties sont seulement liés dans la mesure où du fil peut potentiellement servir à fabriquer des articles vestimentaires. Outre ce lien, ils sont complètement différents.

[38]           En ce qui concerne les voies de commercialisation, les parties ont toutes deux produit une preuve.

[39]           Dans son affidavit, M. Cooke déclare qu'il sait que Michaels, le magasin dans lequel le fil de l'Opposante est vendu au Canada, vend également des vêtements [affidavit de M. Cooke, para. 10]. Un imprimé du site Web de Michaels qui montre divers articles vestimentaires est joint comme Pièce « C » à son affidavit. Les articles vestimentaires entrent principalement dans les catégories de la [traduction] « Création de vêtements » et de l'« Artisanat pour les enfants » et sont annoncés comme étant destinés à diverses activités reliées à l'artisanat (p. ex., peinture pour tissu, teintures sur nœuds, ornements ou appliqués à apposer au fer à repasser, ornements cousus, etc.).

[40]           Une preuve semblable a été produite dans l'affidavit de M. Bachinski, comme M. Bachinski a également visité le site Web de Michaels et a imprimé des instantanés de la catégorie de produits [traduction] « Création de vêtements » [affidavit de M. Bachinski, para. 8]. Les instantanés sont joints comme Pièces « C-1 » à « C-13 » à son affidavit. De plus, M. Bachinski s'est rendu dans un magasin Michaels et a pris des photographies de divers présentoirs de vêtements pour l'artisanat [affidavit de M. Bachinski, para. 9]. Les photographies qu'il a prises pendant sa visite sont jointes comme Pièces « D-1 » à « D-6 ». Elles montrent, par exemple, des tee-shirts annoncés à deux pour 7 $.

[41]           La Requérante a aussi produit l'affidavit de Mme Young. Mme Young atteste qu'elle est chargée d'enseignement dans le programme de mode de l'Université Kwantlen et qu'elle est titulaire d'une maîtrise en design de mode et design textile [affidavit de Mme Young, para. 2]. Elle affirme que, en tant que professionnelle dans le domaine du design textile et adepte de l'artisanat textile, elle connaît très bien la chaîne de vente au détail Michaels et, que si elle devait acheter des pelotes de fil, elle ne se rendrait pas dans un magasin de vêtements pour hommes. Elle affirme également que si elle devait acheter des chemises pour hommes, elle ne se rendrait pas chez Michaels. De plus, elle exprime une opinion sur la probabilité de confusion en l'espèce [affidavit de Mme Young, para. 3-7].

[42]           J'estime que l'affidavit de Mme Young ne renferme pas suffisamment de détails pour me permettre d'évaluer si elle possède les qualifications nécessaires en tant qu'experte. De plus, la probabilité de confusion est une question que je dois apprécier, et cette question n'exige pas un témoignage d'expert.

[43]           Dans l'ensemble, la preuve des parties démontre que du fil et des vêtements peuvent être vendus dans les mêmes points de vente au détail. Cependant, comme l'a souligné la Requérante, il y a une différence entre les vêtements de mode qu'elle vend et les vêtements qui sont vendus dans les magasins Michaels, qui sont essentiellement des vêtements pour l'artisanat. La Requérante soutient qu'aucun consommateur ne se rendra dans un magasin d'artisanat pour acheter des vêtements de mode et qu'aucun consommateur ne se rendra dans le magasin de détail dans lequel elle distribue ses vêtements pour acheter du fil en vue de ses projets d'artisanat.

[44]           Je souligne que les vêtements visés par la demande relative à la Marque ne se limitent pas à des [traduction] « vêtements de mode » et que rien n'indique dans l'enregistrement de l'Opposante que la vente de son fil se limite aux magasins d'artisanat. Ceci étant dit, il a été établi que l'examen de l'état déclaratif des produits et des services figurant dans une demande ou un enregistrement doit être effectué dans l'optique de déterminer le genre probable d'entreprise ou de commerce envisagé par les parties, et non tous les types de commerces susceptibles d'être visés par le libellé, et que la preuve relative aux commerces réels des parties peut être utile à cet égard [McDonald's Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[45]           Compte tenu de la preuve produite en l'espèce, j'estime raisonnable de conclure que les vêtements et les services connexes de la Requérante ne viseraient généralement pas le même consommateur que les fils qui sont vendus par l'Opposante dans les magasins d'artisanat.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce

[46]                 Dans la décision rendue dans l'affaire Masterpiece, la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que le facteur le plus important parmi ceux énoncés à l'article 6(5) de la Loi est souvent le degré de ressemblance entre les marques de commerce [Masterpiece, précité, au para. 49].

[47]                 Il est bien établi en droit que, lorsqu'il s'agit de déterminer le degré de ressemblance entre des marques de commerce, les marques doivent être considérées dans leur ensemble. Le test qu'il convient d'appliquer est celui du souvenir imparfait qu'un consommateur peut avoir de la marque d'un opposant; il ne consiste pas à placer les marques côte à côte dans le but de les comparer.

[48]           En outre, bien que la première partie d'une marque de commerce soit généralement la plus importante pour distinguer des marques entre elles [voir Conde Nast Publications Inc c Union des Editions Modernes (1979), 46 CPR (2d), 183 (CF 1re inst), p. 188], dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a fait observer qu'il est préférable, lorsqu'il s'agit de comparer des marques de commerce, de se demander d'abord si les marques présentent un aspect particulièrement frappant ou unique [Masterpiece, précité, au para. 64].

[49]           Compte tenu de la nature descriptive des termes HOMESPUN (tissé à la main) et KNITWEAR (tricots) figurant dans les marques de commerce des parties, j'estime qu'aucun des aspects des marques des parties n'est particulièrement frappant ou unique. Comme les marques de commerce des parties renferment toutes deux le terme HOMESPUN, il existe un degré de ressemblance élevé entre elles. Cependant, la Marque est légèrement différente dans la présentation, le son et la connotation, compte tenu de l'ajout du mot KNITWEAR (tricots), qui renforce l'idée que les produits et services liés à la Marque se rapportent à des vêtements tricotés.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[50]           Après examen de toutes les circonstances de l'espèce, j'estime que la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion entre les marques de commerce des parties est peu probable. Bien qu'il y ait un degré de ressemblance relativement élevé entre les marques de commerce des parties, celles-ci possèdent un faible caractère distinctif inhérent, et si l'Opposante a démontré un certain emploi et une certaine notoriété de sa marque de commerce, il n'en demeure pas moins que le genre de produits des parties diffère considérablement et, compte tenu de la preuve dont je dispose, il existe aussi des différences dans les voies de commercialisation connexes.

[51]           En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté.

Absence de droit à l'enregistrement – article 16(3)a)

[52]                 L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque au titre de l'article 16(3)a) de la Loi, compte tenu de l'emploi antérieur par l'Opposante de sa marque de commerce HOMESPUN au Canada en liaison avec des fils.

[53]           Malgré le fardeau de preuve qu'a la Requérante d'établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce de l'Opposante, l'Opposante a le fardeau initial de démontrer que sa marque de commerce était employée avant la date de production de la demande relative à la Marque du 23 août 2011 et n'avait pas été abandonnée à la date de l'annonce de la demande relative à la Marque du 20 mars 2013 [article 16(5) de la Loi].

[54]           Comme je l'ai mentionné plus en détail ci-dessus dans mon analyse du motif d'opposition fondé sur la non-enregistrabilité, j'estime que l'Opposante a établi l'emploi de sa marque de commerce HOMESPUN et son non-abandon aux dates pertinentes.

[55]           Cependant, la différence entre les dates pertinentes n'a aucune incidence et, pour les raisons exposées ci-dessus dans mon analyse du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d), j'estime que la Requérante s'est acquittée de son fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties.

[56]           Par conséquent, ce motif d'opposition est également rejeté.

Absence de caractère distinctif – article 2

[57]           L'Opposante allègue que la Marque n'est pas distinctive eu égard à l'article 2 de la Loi, du fait qu'elle ne distingue pas les produits de la Requérante de ceux de tiers et, en particulier, de ceux de l'Opposante.

[58]           Bien que la Requérante ait le fardeau ultime de démontrer que la Marque est adaptée à distinguer ou distingue véritablement ses produits de ceux de tiers partout au Canada, l'Opposante n'en doit pas moins s'acquitter du fardeau de preuve initial d'établir les faits invoqués à l'appui du motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif [voir Muffin Houses Incorporated c The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 272 (COMC)].

[59]           Pour s'acquitter de son fardeau de preuve, l'Opposante doit démontrer que, à la date de production de la déclaration d'opposition, sa marque de commerce HOMESPUN était devenue suffisamment connue pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif [voir Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd (2004), 40 CPR (4th) 553, confirmée par (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF)].

[60]           Comme je l'ai mentionné en détail dans mon analyse du motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d), l'Opposante a établi que sa marque de commerce HOMESPUN était devenue connue dans une certaine mesure en liaison avec ses produits à la date de production de la déclaration d'opposition. Dans l'ensemble, j'estime que la preuve de l'Opposante est suffisante pour lui permettre de s'acquitter de son fardeau de preuve à l'égard de ce motif d'opposition.

[61]           Cependant, à l'instar du motif d'opposition fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement, la différence entre les dates pertinentes n'a pas d'incidence importante sur ma conclusion à l'égard du motif fondé sur l'article 12(1)d) exposée ci-dessus.

[62]           Par conséquent, ce motif d'opposition est également rejeté.

Décision

[63]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition, conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

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Lisa Reynolds

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.

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