Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 96

Date de la décision : 2015-05-29

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Wanted Shoes Inc. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,455,262 pour la marque de commerce WANT LES ESSENTIELS DE LA VIE au nom de Want Holdings Inc.

[1]               Le 14 octobre 2009, Want Holdings Inc. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque WANT LES ESSENTIELS DE LA VIE (la Marque) sur la base de son emploi au Canada en liaison avec divers sacs, étuis et produits en papier et sur la base de son emploi projeté en liaison avec divers vêtements et articles de papeterie. Les Produits (tels que modifiés) sont :

(1) Valises, sacs de voyage, ensembles de voyage pour transporter des cosmétiques, housses à vêtements pour le voyage, mallettes de toilette vendues vides, sacs à dos, sacs à main, sacs de plage, sacs à provisions, sacs à bandoulière, mallettes, serviettes, pochettes de voyage et de transport de marchandises, articles de maroquinerie, nommément portefeuilles, sacs à main, porte-clés, porte-cartes, étuis à lecteur MP3, étuis à téléphone cellulaire, étuis à ordinateur portatif; sacs à main, carnets, porte-documents de type serviette, portefeuilles, étuis à passeport, étuis pour cartes professionnelles, porte-monnaie; articles en papier et en carton, nommément affiches, catalogues de produits et brochures, blocs-notes, carnets, enveloppes, papier à lettres, boîtes en carton ou en papier, papier d'emballage, sacs en papier ou en plastique pour l'emballage, étiquettes, nommément étiquettes volantes. (Produits (1) – D'après l'emploi depuis novembre 2006)(2) Lingerie, sous-vêtements, culottes, slips, caleçons, boxeurs, pyjamas, vêtements de détente, sarongs, vêtements de nuit, tee-shirts, pantalons, chaussettes, sorties de bain, sauts-de- lit, vêtements de bain et maillots de bain, vêtement de villégiature, vêtements de plage, chaussures d'entraînement, bandanas, maillots de bain, ceintures, bermudas, casquettes, polos, shorts de gymnastique, tenues d'entraînement, chapeaux, vestes, jerseys, cravates, parkas, polos, chandails, imperméables, foulards, chemises habillées, vêtements de ski, pantalons sport, visières, bandeaux absorbants, ensembles d'entraînement, pantalons, combinaisons isothermes et débardeurs, chandails, débardeurs, jupes, robes, shorts de planche, pantoufles, sandales; marchandises en cuir ou en similicuir, nommément boîtes en cuir ou en carton cuir de voyage, enveloppes en cuir pour l'emballage de marchandises; malles; parapluies, ombrelles, parapluies de protection contre le soleil, cannes, cannes-sièges; sacs d'école, boîtes à chapeaux et boîtes à chaussures de voyage; articles en papier et en carton, nommément albums d'images de produits, magazines sur les produits, calendriers, onglets, photos; crayons, portecrayons, stylos à plume, stylos à bille, écritoires, plumes en or et cartes à jouer. (Produits (2) – D'après l'emploi projeté)

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 14 juillet 2010.

[3]               Le 14 décembre 2010, Wanted Shoes Inc (l'Opposante) a produit une déclaration d'opposition invoquant les motifs résumés ci-dessous.

(a)     La demande n'est pas conforme à l'alinéa 30b) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), puisque la date revendiquée n'est pas la date de premier emploi de la Marque au Canada et la Marque n'a pas été employée au Canada depuis cette date en liaison avec les Produits (1).

(b)     La demande n'est pas conforme à l'alinéa 30e) de la Loi, parce que la Requérante n'avait pas l'intention d'employer la Marque en liaison avec les Produits (2).

(c)     La demande n'est pas conforme à l'alinéa 30i) de la Loi, parce que la Requérante ne pouvait pas avoir été convaincue qu'elle avait le droit d'employer la Marque en liaison avec les Produits.

(d)    La Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en liaison avec les Produits (1) en vertu des alinéas 16(1)a) et 16(1)c) de la Loi, puisqu'elle crée de la confusion avec la marque de commerce WANTED et le nom commercial Wanted Shoes Inc, précédemment employés au Canada par l'Opposante en liaison avec des articles chaussants.

(e)     La Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en liaison avec les Produits (2) en vertu des alinéas 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi, puisqu'elle crée de la confusion avec la marque de commerce WANTED et le nom commercial Wanted Shoes Inc, précédemment employés au Canada par l'Opposante en liaison avec des articles chaussants.

(f)      La Marque n'est pas distinctive des Produits ni n'a été adaptée pour distinguer les Produits des articles chaussants de l'Opposante, vendus sous la marque de commerce WANTED et le nom commercial Wanted Shoes Inc.

[4]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration, dans laquelle elle conteste les allégations de l'Opposante. À titre de preuve, l'Opposante a produit l'affidavit d'Allan Kishk. La Requérante a produit en preuve l'affidavit de Dexter Peart. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit et ont assisté à une audience tenue le 20 janvier 2015.

Dates pertinentes

[5]               Les dates pertinentes qui s'appliquent aux motifs d'opposition sont les suivantes :

         alinéa 38(2)a)/article 30 – la date de production de la demande d'enregistrement [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC) à la page 475];

         alinéa 38(2)c)/paragraphe 16(1)a) – la date de premier emploi alléguée dans la demande;

         alinéa 38(2)c)/paragraphe 16(3) – la date de production de la demande;

         alinéa 38(2)d)/article 2 – la date de production de l'opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 2004 FC 1185 (CanLII)34 CPR (4th) 317 (CF)].

Fardeaux de preuve

[6]               Avant de me pencher sur la question de la confusion entre les marques des parties, j'estime nécessaire d'examiner certaines exigences techniques relatives i) au fardeau de preuve initial imposé à une partie opposante au soutien des allégations figurant dans la déclaration d'opposition et ii) au fardeau ultime imposé à une partie requérante pour établir sa preuve.

[7]               En ce qui concerne le point i) susmentionné, il incombe à une partie opposante de démontrer les faits sur lesquels elle appuie ses allégations formulées dans la déclaration d'opposition : John Labatt Limited c The Molson Companies Limited, (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst) à la page 298. La présence d'un fardeau de preuve imposé à la partie opposante à l'égard d'une question donnée signifie que, pour que la question soit considérée, la preuve doit être suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de ladite question. Quant au point ii) susmentionné, c'est au requérant qu'incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande d'enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi invoquées par une partie opposante (concernant les allégations pour lesquelles la partie opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait). Le fait que le fardeau ultime incombe à la partie requérante signifie que s’il est impossible de parvenir à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l’encontre de la partie requérante.

Motifs d'opposition

Motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30b)

[8]               L'alinéa 30b) exige que la partie requérante indique, dans le cas d'une marque de commerce qui a été employée au Canada, la date à laquelle elle a commencé à employer la marque de commerce en liaison avec les produits ou les services décrits dans la demande.

[9]               Dans le motif d’opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30b), il est allégué que (1) la date revendiquée dans la demande, soit novembre 2006, n'est pas la date de premier emploi et que (2) la Requérante n'a pas employé la Marque au Canada avec chacun des Produits (1) depuis cette date. Il revient à priori à l'Opposante de prouver que la Requérante n'a pas respecté l'alinéa 30b) de la Loi. L’Opposante peut s'acquitter de ce fardeau au moyen non seulement de sa propre preuve, mais aussi de la preuve de la Requérante [Labatt Brewing Co c Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 CPR (3d) (CF 1re inst) p. 216 à 230]. S'il existe une preuve pour soutenir les allégations de l'Opposante concernant la date de premier emploi revendiquée, il revient donc à la Requérante de démontrer qu'elle emploie la Marque depuis novembre 2006 [voir Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd, 2014 FC 323 aux paragraphes 30 à 38 (CanLII)].

L'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve pour certains des Produits (1)

[10]           J'estime que la déclaration de M. Peart, le vice-président de la Requérante, selon laquelle le licencié de la Requérante « [Traduction] conçoit, vend et distribue, entre autres, des produits et des accessoires en cuir fonctionnels, intemporels et classiques qui sont utilisés dans la vie moderne de tous les jours ... sous la marque WANT Les Essentiels de la Vie », soulève d'importants doutes quant à l'emploi par la Requérante de la Marque en liaison avec des produits qui ne semblent pas reliés, comme ceux énoncés ci-dessous :

articles en papier et en carton, nommément affiches, catalogues de produits et brochures, blocs-notes, carnets, enveloppes, papier à lettres, boîtes en carton ou en papier, papier d'emballage, sacs en papier ou en plastique pour l'emballage, étiquettes, nommément étiquettes volantes.

Par conséquent, l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ces produits. Comme la Requérante n'a pas corroboré l'emploi de la Marque en liaison avec ces produits en vertu de l'article 4 de la Loi, ce motif d’opposition est accueilli à l'égard de ces produits. En outre, comme l'Opposante a réussi dans son opposition à ces produits, et que les parties n'ont produit aucune observation à l'audience relativement à la question de confusion sur ces produits, je n'en discuterai pas davantage dans le cadre de la présente décision.

L'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait relativement aux sacs et aux accessoires

[11]           En ce qui a trait aux produits et aux accessoires en cuir figurant dans les Produits (1), l'Opposante s'est concentrée sur ce qui manque dans l'affidavit Peart pour corroborer la date de premier emploi revendiquée par la Requérante plutôt que de souligner la preuve à l'appui de ses allégations telles qu'elles sont énoncées dans ce motif d'opposition. Par exemple, l'Opposante fait valoir que ce sont les marques de commerce NARITA, ARLANDA, MALPENSA et DEURNE que l'on voit sur le formulaire de commande joint en pièce C de l'affidavit Peart plutôt que la Marque. De plus, seulement deux factures jointes en pièce D sont datées de novembre 2006, et on n'y voit que les produits « De Gaulle 14 Leather Bag » et « Trudeau 17 Leather Bag ». Cependant, la preuve produite par M. Peart indique que la Marque est apposée directement sur les produits de la Requérante, lesquels sont vendus dans divers styles, chacun portant le nom d'un aéroport international, y compris ceux susmentionnés (affidavit Peart, paragraphe 9, pièce F).

[12]           Même s'il est vrai que la Requérante aurait pu fournir plus de détails sur l'emploi de la Marque en liaison avec ses produits et accessoires en cuir depuis au moins aussi tôt que novembre 2006, cela ne signifie pas que l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait. L'absence de preuve directe d'emploi de la Marque en liaison avec chaque produit et accessoire en cuir figurant parmi les Produits (1) ne permet pas de conclure que la Requérante n'a pas correctement employé la Marque en liaison avec ces produits depuis la date de premier emploi revendiquée. Je ne peux donc pas conclure que l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait relativement aux produits énumérés ci-dessous. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté pour les produits suivants :

Valises, sacs de voyage, ensembles de voyage pour transporter des cosmétiques, housses à vêtements pour le voyage, mallettes de toilette vendues vides, sacs à dos, sacs à main, sacs de plage, sacs à provisions, sacs à bandoulière, mallettes, serviettes, pochettes de voyage et de transport de marchandises, articles de maroquinerie, nommément portefeuilles, sacs à main, porte-clés, porte-cartes, étuis à lecteur MP3, étuis à téléphone cellulaire, étuis à ordinateur portatif; sacs à main, carnets, porte-documents de type serviette, portefeuilles, étuis à passeport, étuis pour cartes professionnelles, porte-monnaie;

Motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30e)

[13]           L'alinéa 30e) de la Loi exige que, dans le cas d'une marque de commerce projetée, la Requérante déclare qu'elle a l'intention d'employer la marque de commerce au Canada.

[14]           Pour le motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30e), il est allégué que la Requérante n'avait pas l'intention d'employer la Marque au Canada en liaison avec chacun des Produits (2). L'Opposante fait valoir que la preuve de la Requérante ne corrobore pas la revendication de la Requérante selon laquelle elle a l'intention d'employer la Marque en liaison avec les Produits (2) puisqu'elle ne fait que référence aux produits et accessoires en cuir classique, comme des sacs à main, des étuis à ordinateurs portatifs et des sacs à provisions (affidavit Peart, paragraphe 4). Toutefois, comme la Requérante n'est pas tenue de démontrer l'emploi d'une marque de commerce avant que celle-ci soit acceptée [Molson Canada c Anheuser-Busch, Inc (2003), 29 CPR (4th) 315 aux pages 334 et 335 (CF)], le fait que la Requérante n'a pas commencé à employer la Marque en liaison avec les Produits (2) n'est pas pertinent. Ce motif d'opposition est donc rejeté.

Motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30i)

[15]           Pour le motif d'opposition fondé sur l'article 30i), il est allégué que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer la Marque au Canada. Lorsqu'une partie requérante présente la déclaration requise en vertu de l'alinéa 30i), ce motif ne doit être accepté que dans des situations exceptionnelles, comme lorsqu'il y a preuve de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC) à la page 155]. Étant donné que la demande renferme la déclaration exigée et qu'il n'y a en l'espèce ni allégation ni preuve de mauvaise foi ou d'autres circonstances exceptionnelles, le motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30i) est rejeté.

Absence de droit à l'enregistrement – Alinéas 16(1)a) et 16(1)c)

[16]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en liaison avec les Produits (1), car la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce WANTED et le nom commercial Wanted Shoes Inc de l'Opposante, lesquels ont été antérieurement employés au Canada en liaison avec des articles chaussants.

[17]            Avant d'examiner s’il y a ou non probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce et le nom commercial de l'Opposante, il est nécessaire de déterminer si l'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve, lequel consiste à démontrer que sa marque de commerce et son nom commercial étaient déjà employés avant la date pertinente qu'est novembre 2006 et qu'ils n'avaient pas été abandonnés à la date d'annonce de la demande, soit le 14 juillet 2010 [paragraphes 16(1) et 16(5) de la Loi].

L'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait relativement au motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)a)

[18]           M. Kishk, chef des opérations de l'Opposante, a produit une preuve indiquant que l'Opposante a vendu pour 150 000 $ de chaussures arborant la marque de commerce WANTED sur les semelles, les étiquettes ou les boîtes à chaussures au Canada en 2006 et qu'elle a continué de le faire jusqu'en 2010 (affidavit Kishk, paragraphes 12 à 14 et pièces F à G). Cette preuve suffit pour que l'Opposante s'acquitte du fardeau de preuve qui lui incombe relativement au motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)a).

L'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait relativement au motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)c)

[19]           L'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait relativement au motif d’opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)c), puisque l'Opposante n'a pas établi l'emploi du nom commercial Wanted Shoes Inc au titre du paragraphe 4(1) de la Loi [Professional Publishing Associates Ltd c Toronto Parent Magazine Inc (1986), 9 CPR (3d) 207 à la page 217 (CF 1re inst)]. Je ne considère pas l'emploi du nom de domaine wantedshoes.com sur les catalogues et les boîtes à chaussures (affidavit Kishk, pièces B et G) de l'Opposante comme l'emploi du nom commercial Wanted Shoes Inc. En outre, il n'y a aucune preuve indiquant que les factures ou les bordereaux d'expédition arborant Wanted Shoes ou Wanted Shoes Inc.(que je considère équivalents) ont été fournis aux clients au moment du transfert des produits en novembre 2006 (plutôt que des factures avec le nom commercial Wanted Asia, qui apparaît sur plusieurs factures représentatives) (affidavit Kishk, pièces C et H). Par conséquent, le motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)c) est rejeté.

Y a-t-il confusion entre la marque de commerce WANTED et la Marque?

[20]           Selon le test en matière de confusion énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi, l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits et les services liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus ou loués par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Aux fins de cette appréciation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l'espèce, y compris celles énumérées au paragraphe 6(5) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Les critères énoncés au paragraphe 6(5) ne sont pas exhaustifs et le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces critères varie selon les circonstances de l’espèce [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, [2006] 1 SCR 772 (SCC) au paragraphe 54]. Je m'appuie également sur l'affirmation de la Cour suprême du Canada dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), au paragraphe 49, selon laquelle le critère énoncé à l'alinéa 6(5)e), la ressemblance entre les marques, est souvent celui qui revêt le plus d'importance dans l'analyse relative à la confusion.

[21]           Le test à appliquer est celui de la première impression que la vue de la Marque produit dans l'esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé qui n'a qu'un vague souvenir de la marque de commerce WANTED de l'Opposante et qui ne s'arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner les marques en détail [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, [2006] 1 RCS 824, para 20]. De plus, ce consommateur est anglophone, francophone ou bilingue anglais-français [Pierre Fabre Médicament c SmithKline Beecham Corp (2001), 11 CPR (4th) 1, para. 15 (CAF)].

Caractère distinctif inhérent

[22]           Ce facteur ne s'applique en faveur d'aucune des parties, puisque les marques de commerce présentent un caractère distinctif inhérent similaire; en effet, les deux marques de commerce sont composées de mots courants de la langue française ou de la langue anglaise, lesquels ont tous un caractère laudatif. Plus particulièrement, les mots « want » et « wanted » ont un caractère laudatif indiquant le besoin, le désir ou le souhait de quelque chose [voir à titre d'exemple la définition du mot « want » dans le Canadian Oxford Dictionary (2e éd.); voir Tradall SA c Devil’s Martini Inc (2011), 92 CPR (4th) 408 (COMC) au paragraphe 29, qui confirme que je peux admettre d'office des définitions tirées du dictionnaire]. Pareillement, la phrase LES ESSENTIELS DE LA VIE évoque des produits qui sont nécessaires à la vie.

Degré de ressemblance

[23]           Que le consommateur soit anglophone, francophone ou bilingue, j'estime que ce facteur s'applique légèrement en faveur de la Requérante. Les marques de commerce sont semblables sur le plan de la présentation, puisqu'elles commencent par les mots connexes WANT et WANTED. La phrase LES ESSENTIELS DE LA VIE réduit toutefois la similitude de la Marque sur le plan du son et des idées suggérées. Pour les consommateurs francophones, l'élément WANTED ou WANT serait perçu comme un mot de langue étrangère. Pour les consommateurs anglophones, la phrase LES ESSENTIELS DE LA VIE évoquerait probablement le mot anglais « essentials » et raison de sa ressemblance avec le mot « essentiels ». Bien que la Marque laisse entendre que les produits connexes sont essentiels, la marque de commerce WANTED de l'Opposante n'a pas cette connotation. Enfin, je considère également le fait que la Marque combine des éléments anglais et français (qui ne sont pas une traduction l'un de l'autre) pour ajouter un degré d'intérêt.

Mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et période pendant laquelle elles ont été en usage

[24]           Ce facteur s'applique en faveur de l'Opposante, dont la preuve indique qu'elle a introduit la marque WANTED au Canada en 2000 et qu'en 2006, elle a vendu pour 150 000 $ de chaussures de marque WANTED pour femmes et enfants au Canada par l'entremise de détaillants et sur son site Web www.wantedshoes.com (affidavits Kishk, paragraphes 6, 7 et 12). En outre, la marque WANTED a également fait l'objet de promotions Canada, par la distribution de catalogues et la présence de la marque dans des magazines. Bien que les chiffres fournis sur les ventes de l'Opposante pour 2006 concernent la période de mai à décembre 2006, il semble raisonnable de conclure qu'un bon pourcentage de ces ventes ont été conclues avant novembre 2006. En revanche, la preuve de la Requérante indique que la Marque a été conçue en 2006 et que les dépenses de promotion au Canada pour les produits vendus sous la Marque en 2006 s'élevaient à 21 700 $ (affidavit Peart, paragraphes 6 et 19). M. Peart joint également des factures montrant les ventes d'une petite quantité de sacs en cuir à Holt Renfrew en novembre 2006 (affidavit Peart, pièce D).

Le genre de produits et la nature du commerce

[25]           Pour évaluer la question de la confusion dans le contexte de l'article 16 de la Loi, il faut comparer produits et/ou services réellement vendus sous la marque d'une partie opposante et les produits et/ou services tels qu'ils sont précisés dans la demande [London Life Insurance Company c Manufacturers Life Insurance Company, (1996), 67 CPR (3d) 563 (COMC)]. La preuve de ventes de l'Opposante concerne seulement des articles chaussants pour femmes et enfants. En revanche, les produits de la Requérante sont des sacs et des accessoires en cuir. Selon moi, le fait que les articles chaussants de l'Opposante sont des articles mode comme le sont les sacs et accessoires de la Requérante entraîne un chevauchement important du genre de produits.

[26]           La preuve démontre que les produits de l'Opposante et ceux de la Requérante sont vendus au moyen de voies de commercialisation différentes. Les chaussures, bottes, sandales, espadrilles, pantoufles, chaussons, sans-gêne et chaussures d'entraînement pour femmes et enfants de l'Opposante sont vendus dans les grandes surfaces que sont Winners, Sears Canada et Wal-Mart (affidafit Kishk, paragraphe 7) et par l'entremise du site Web et des catalogues de Wanted Shoes (affidavit Kishk, paragraphe 6) à bas prix (entre 12,89 $ et 80 $) (affidavit Kishk, pièces D et I). Les produits, sacs et étuis en cuir de la Requérante sont vendus dans à des détaillants haut de gamme, dont Holt Renfrew et Gravity Pope Tailored Goods, et en ligne par l'entremise de Barneys et Nordstroms (affidavit Peart, paragraphes 14 et 15) à des prix variant de 75 $ pour un étui à iPod à 1 795 $ pour un sac de voyage (affidavit Peart, pièce C). La différence dans la nature du commerce (les grandes surfaces par rapport aux détaillants haut de gamme qui vendent des articles dispendieux et exclusifs) favorise largement la Requérante, puisque les produits de chaque partie sont vendus dans différents types de magasins et il n'y a aucune preuve que les voies de commercialisation des parties sont susceptibles de se croiser à quelque moment que ce soit dans un avenir rapproché [Jacques Vert Group Limited c YM Inc (Sales), 2014 CF 1242 aux paragraphes 45 et 46].

Conclusion

[27]           La question à trancher est celle de savoir si un consommateur ayant un souvenir imparfait de marque de commerce WANTED de l'Opposante, risque de croire, à la vue de la Marque, que les produits liés à cette marque proviennent de la même source. Le paragraphe 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques elles-mêmes, mais sur la confusion quant à la source des produits.

[28]           Bien que je reconnaisse que la marque de commerce WANTED de l'Opposante a été employée dans une certaine mesure au Canada depuis 2000, et que cet emploi pourrait avoir contribué à accroître son caractère distinctif, j'estime que les différences dans les marques de commerce des parties sur le plan du son et des idées suggérées, de pair avec les différences dans le genre de produits et leurs voies de commercialisation, suffisent pour empêcher toute probabilité de confusion, que le consommateur soit anglophone, francophone ou bilingue. Le motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)a) est donc rejeté.

Motifs d'opposition invoqués en vertu des alinéas 16(3)a) et 16(3)c)

[29]           L'Opposante a également fait valoir que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement au titre des alinéas 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi, puisque la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce WANTED et le nom commercial Wanted Shoes Inc. de l'Opposante. En ce qui concerne ces motifs d'opposition, l'Opposante a le fardeau de preuve initial d'établir l'emploi de sa marque de commerce et de son nom commercial avant la date de dépôt de la demande de la Requérante et de démontrer qu'elle n'a pas abandonné sa marque de commerce ni son nom commercial au 14 juillet 2010 [paragraphes 16(3) et 16(5) de la Loi].

L'Opposante s'est acquittée de ses fardeaux de preuve qui lui incombait relativement aux motifs d'opposition invoqués en vertu des alinéas 16(3)a) et 16(3)c)

[30]           La preuve de l’Opposante montre qu'elle employait la marque de commerce Wanted sur des articles chaussants et boîtes à chaussures pour femmes (affidavit Kishk, paragraphe 4, pièces F et G) et le nom commercial Wanted Shoes Inc sur des factures à la date pertinente de ce motif d'opposition (affidavit Kishk, pargraphe 9, pièce C). Par conséquent, l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait pour ces motifs d'opposition. Bien que les propos qui suivent seront centrés sur l'emploi par l'Opposante de la marque de commerce WANTED, mes conclusions s'appliquent aussi à l'emploi du nom commercial Wanted Shoes.

Caractère distinctif inhérent et degré de ressemblance

[31]           Mes conclusions présentées relativement au motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(1)a) ci-dessus, lequel porte sur le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et le degré de ressemblance, s'appliquent également aux présentes et ne feront pas l'objet d'autres discussions.

Mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et période pendant laquelle elles ont été en usage

[32]           Les facteurs portant sur la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues et la période pendant laquelle elles ont été en usage s'appliquent en faveur de l'Opposante. Sa marque de commerce WANTED est employée depuis 2000 (affidavit Kishk, paragraphe 7), alors que la Marque a été introduite en 2006 (affidavit Peart, paragraphe 6, pièce D). En outre, en 2009, les ventes d'articles chaussants arborant la marque WANTED ont dépassé les 150 000 $ (affidavit Kishk, paragraphe 12) et cette marque a également fait l'objet de promotions au moyen de catalogues et par la présence de la marque dans des magazines (affidavit Kishk, paragraphes 11 et 16 et pièces E et I). En revanche, la Requérante n'a fourni aucune preuve indiquant que l'emploi de la Marque avait débuté avec les Produits (2) à la date pertinente.

Le genre de produits et la nature du commerce

[33]           En ce qui concerne la nature des produits, les articles suivants sont identiques ou chevauchent largement des produits vendus par l'Opposante : chaussettes, chaussures d'entraînement, pantoufles, sandales et boîtes à chaussure pour le voyage. En outre, je considère que les produits décrits comme étant des vêtements de détente, vêtements de nuit, vêtements de plage et vêtements de villégiature peuvent aussi comprendre des articles chaussants du même type que ceux vendus par l'Opposante et donc, il existe un important chevauchement entre ces produits et les produits de l'Opposante. En ce qui concerne les autres produits, tout chevauchement dans la nature des produits repose exclusivement sur le fait que les articles chaussants similaires peuvent être considérés comme des articles mode; je n'estime pas que cela suffise pour donner lieu à un important chevauchement dans la nature des produits. En outre, il n'y a aucune preuve sur laquelle je peux m'appuyer pour conclure que la nature des commerces se chevaucherait dans quelque mesure que ce soit, puisque la preuve démontre que la Requérante vend ses produits de façon continue à des détaillants haut de gamme et exclusifs, ce que l'Opposante ne fait pas. Ainsi, je conclus qu'il est improbable qu'il y ait chevauchement relativement aux voies de commercialisation.

Conclusion

[34]            Étant donné le genre similaire des produits et le degré de ressemblance entre les marques de commerce, j'estime que la Requérante ne s'est pas acquittée du fardeau ultime qui lui incombait relativement aux produits suivants : vêtements de détente, vêtements de nuit, chaussettes, vêtements de villégiature, vêtements de plage, chaussures d'entraînement, pantoufles, sandales et boîtes à chaussures pour le voyage, que le consommateur soit anglophone, francophone ou bilingue. Les motifs d'opposition invoqués en vertu des alinéas 16(1)a) et 16(1)c) sont donc accueillis.

[35]           Étant donné qu'il n'y a aucun chevauchement entre le genre de produits et la nature du commerce relativement aux autres produits figurant parmi les Produits (2), les différences entre la Marque et la marque de commerce et le nom commercial de l'Opposante suffisent pour qu'on puisse les distinguer les uns des autres, que le consommateur soit anglophone, francophone ou bilingue. Par conséquent, bien que l'Opposante se soit acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait, la Requérante s'est également acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu'il n'existe aucune probabilité raisonnable de confusion relativement aux produits énumérés ci-dessous.


 


Lingerie, sous-vêtements, culottes, slips, caleçons, boxeurs, pyjamas, sarongs, tee-shirts, pantalons, sorties de bain, sauts-de- lit, vêtements de bain et maillots de bain, bandanas, maillots de bain, ceintures, bermudas, casquettes, polos, shorts de gymnastique, tenues d'entraînement, chapeaux, vestes, jerseys, cravates, parkas, polos, chandails, imperméables, foulards, chemises habillées, vêtements de ski, pantalons sport, visières, bandeaux absorbants, ensembles d'entraînement, pantalons, combinaisons isothermes et débardeurs, chandails, débardeurs, jupes, robes, shorts de planche, marchandises en cuir ou en similicuir, nommément boîtes en cuir ou en carton cuir de voyage, enveloppes en cuir pour l'emballage de marchandises; malles; parapluies, ombrelles, parapluies de protection contre le soleil, cannes, cannes-sièges; sacs d'école, boîtes à chapeaux; articles en papier et en carton, nommément albums d'images de produits, magazines sur les produits, calendriers, onglets, photos; crayons, portecrayons, stylos à plume, stylos à bille, écritoires, plumes en or et cartes à jouer

Motif d'opposition fondé sur le caractère distinctif

[36]           Je ne discuterai pas de ce motif d'opposition en détail puisqu'il ne s'applique pas plus en faveur de l'Opposante que les motifs d'opposition invoqués en vertu des paragraphes 16(1) et 16(3) dont il a été question précédemment. Comme dans le cas des motifs invoqués en vertu du paragraphe 16(3), étant donné le chevauchement dans la nature des produits décrits comme étant des vêtements de détente, des vêtements de nuit, des chaussettes, des vêtements de villégiature, des vêtements de plage, des chaussures d'entraînement, des pantoufles, des sandales et des boîtes à chaussures pour le voyage et les articles chaussants de l'Opposante, l'opposition est accueillie pour ces produits. Étant donné les différences entre la nature et le genre de commerce des autres produits et les marques de commerce des parties, la preuve d'emploi et de promotion de la marque de commerce WANTED de l'Opposante et de son nom commercial Wanted Shoes n'est pas suffisamment importante pour annuler le caractère distinctif de la Marque pour un emploi en liaison avec les autres produits de la demande à la date pertinente, soit le 14 décembre 2010.

La décision

[37]           Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement relativement aux produits suivants :

articles en papier et en carton, nommément affiches, catalogues de produits et brochures, blocs-notes, carnets, enveloppes, papier à lettres, boîtes en carton ou en papier, papier d'emballage, sacs en papier ou en plastique pour l'emballage, étiquettes, nommément étiquettes volantes, vêtements de détente, vêtements de nuit, chaussettes, vêtement de villégiature, vêtements de plage, chaussures d'entraînement, pantoufles, sandales et boîtes à chaussures de voyage et je rejette l'opposition à l'égard des autres produits, conformément aux dispositions du paragraphe 38(8) de la Loi [voir Produits Menagers Coronet Inc c Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 CPR (3d) 482 (CF 1re inst) à titre d'autorité en matière de décision partagée].

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Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

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