Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT LOPPOSITION de

lAssociation canadienne du médicament générique

(connue auparavant sous le nom dAssociation canadienne des

fabricants de produits pharmaceutiques) à la demande no 841986

pour la marque de commerce PLAQUENIL PILL DESIGN produite

par Sanofi‑Synthelabo Inc.

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Le 10 avril 1997, Sanofi‑Synthelabo Inc. a déposé une demande d’enregistrement d’un signe distinctif de la marque de commerce appelé PLAQUENIL PILL DESIGN, demande qui est fondée sur son emploi au Canada depuis décembre 1991 en liaison avec ce qui suit :

Préparations pharmaceutiques, notamment préparations pour le traitement de la malaria, de la polyarthrite rhumatoïde, du lupus érythémateux disséminé et des conditions semblables.

 

La demande en cause montre et décrit comme suit le signe distinctif de la marque de commerce :

 

 

 

La pilule a généralement la forme d’un sablier à deux côtés principaux. Observée à partir de l’un des côtés principaux, elle comprend deux extrémités semi-circulaires principalement convexes, dont une partie centrale est délimitée par deux courbes concaves. La pilule comprend une surface généralement centralisée, entre les côtés principaux du huit en grande partie uniforme qui prolonge le contour de la pilule sous forme de bande. Les deux côtés principaux comprennent des surfaces en pente, incurvées qui pénètrent dans la bande. Les quatre dessins de la version distincte sont simplement quatre perspectives de la même version distincte.

 


 

La Division de l’examen du Bureau des marques de commerce a informé la requérante que, conformément à l’article 32 de la Loi sur les marques de commerce, elle était tenue de fournir une preuve établissant que la marque était devenue distinctive de ses marchandises à la date du dépôt de la demande (10 avril 1997). La requérante a présenté la preuve exigée, soit l’affidavit de Vince Rizzi, qui a convaincu le Bureau que la marque était distinctive de ses marchandises à la date de production de la demande. Par conséquent, la marque en cause a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 1er mai 2002.

 

La demande en cause a été contestée par l’Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques (maintenant appelée l’Association canadienne du médicament générique) le 2 octobre 2002. Le registraire a transmis une copie de la déclaration d’opposition à la requérante le 22 octobre 2002. La requérante a répondu par le dépôt et la signification d’une contre‑déclaration. Au cours de l’instance, l’opposante a obtenu deux fois l’autorisation de modifier sa déclaration d’opposition. La présente décision se fonde sur la plus récente version de la déclaration d’opposition qui est datée du 8 juillet 2003.

 

Déclaration dopposition

Les motifs de l’opposition sont résumés ci‑après, la numérotation reprenant celle de l’opposante.

 

[Traduction]

2.  La demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce pour les motifs suivants :


a)         La marque visée par la demande n’est pas un signe distinctif. À cet égard, la forme est celle d’un comprimé ordinaire qui ne peut servir à distinguer les marchandises d’une partie. De plus, la forme est purement esthétique ou est fonctionnelle puisqu’elle permet d’indiquer l’ingrédient actif ou la dose, ou d’avaler le comprimé plus facilement.

 

b)(i)     La marque n’a pas été employée depuis décembre 1991 comme le prétend la requérante. À cet égard, les pilules de la requérante sont distribuées dans des flacons opaques de sorte que ceux‑ci ne sont pas visibles. Par conséquent, dans le cours normal du commerce, on ne remarque pas la forme de la pilule comprimé. Donc, il n’y a eu aucun emploi de la marque de la façon prescrite à l’article 4 de la Loi sur les marques de commerce.

 

b)(ii)    Le public ne fait pas de distinction entre la forme de la pilule et la présentation générale de celle‑ci. La présentation générale de la pilule est constituée du nom PLAQUENIL, d’autres marques sur la pilule et de sa couleur blanche.

 

c)         La demande ne renferme pas de dessin exact de la marque de commerce alléguée qui comprend la couleur blanche et d’autres marques, dont le nom PLAQUENIL.

 

d)(i)     La requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la forme alléguée comme marque de commerce en raison de l’emploi antérieur par d’autres de pilules ayant une forme semblable.

 

d)(ii)    La requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la forme alléguée comme marque d commerce parce que la monopolisation de la forme empêcherait d’autres fabricants pharmaceutiques de vendre des pilules de forme similaire.

 

3.         La marque visée par la demande n’est pas enregistrable aux termes de l’article 12 de la Loi pour les motifs suivants :

 

a) (i)     Il ne s’agit pas d’un signe distinctif au sens de l’article 2 de la Loi.

 

a)(ii)    La marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de l’ingrédient actif, de la dose ou de l’effet thérapeutique.

 

b)         La marque visée par la demande n’est pas enregistrable aux termes de l’article 13 de la Loi pour les motifs suivants :

 

b)(i)     La forme alléguée n’a pas été employée de façon à devenir distinctive des marchandises de la requérante à la date du dépôt. La preuve produite par la requérante au cours de l’examen de la demande n’établit pas le caractère distinctif. En outre, la forme de la pilule ne la distingue pas des marchandises de la requérante pour les motifs mentionnés ci‑dessus et parce que la forme de la pilule était, pendant toute la période pertinente, d’usage courant dans le commerce des produits pharmaceutiques (liste fournie à l’annexe A).

 


b)(ii)    L’emploi exclusif de la forme par la requérante a vraisemblablement pour effet de restreindre de façon déraisonnable le développement de l’industrie pharmaceutique.

 

c)         La marque visée par la demande n’est pas distinctive des marchandises de la requérante, aux termes de l’alinéa 38(2)d) et de l’article 2 de la Loi pour les motifs suivants :

 

c)(i)     Des pilules de forme généralement semblable étaient, pendant toute la période pertinente, d’usage courant dans l’industrie pharmaceutique comme le prouve le Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (le « CPS ») et le Compendium of Nonprescription Products (le « CNP »).

 

Le dernier motif d’opposition, figurant au sous-alinéa 3c)(ii), est reproduit ci‑dessous :

 

[Traduction] Chaque pilule de sulfate d’hydrochloroquine vendu par la requérante au Canada porte le nom « PLAQUENIL » et est de couleur blanche. Dans la mesure où les consommateurs identifient les comprimés de la requérante d’après leur apparence, ils se fondent sur les marques et/ou la couleur pour identifier les comprimés de la requérante. Les consommateurs n’identifient pas les pilules de la requérante d’après sa forme seulement. Ainsi, le signe distinctif visé par la demande ne permet ni ne peut permettre de distinguer les marchandises de la requérante.

 

Dans sa contre‑déclaration, la requérante rejette de façon générale chaque motif d’opposition et précise, plus particulièrement, que la preuve qu’elle a produite établit que son signe distinctif était distinctif à la date de production de la demande.

 

Preuve

 


La preuve produite par l’opposante est composée des affidavits du Dr Neil Marshall, de Julie Tam, de Sean Bugden, du Dr Philip Baer, de Paula Rembach, de Donna Zwarych et de Jennifer dela Cruz. À l’exception de Jennifer dela Cruz, les personnes susmentionnées ont été contre‑interrogées à l’égard de leur affidavit. La transcription de leurs contre‑interrogatoires, et les pièces qui y sont jointes, sont versées au dossier. La requérante n’a déposé aucun autre élément de preuve dans le cadre de la présente instance. Les deux parties ont déposé des observations écrites, mais seule l’opposante était représentée à l’audience.

 

Établissement du caractère distinctif dun signe distinctif

 

À l’article 2 de la Loi sur les marques de commerce, le signe distinctif est présenté comme un type de marque de commerce et est ainsi défini :

 

a) façonnement de marchandises ou de leurs contenants;

b) mode d’envelopper ou empaqueter des marchandises,

 

 

dont la présentation est employée par une personne afin de distinguer, ou de façon à distinguer, les marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou les services loués ou exécutés, par elle, des marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou des services loués ou exécutés, par d’autres;

 

 

En l’espèce, la requérante prétend que la forme de sa pilule constitue un signe distinctif. Il n’existe aucune raison de principe qui empêche la requérante de formuler cette prétention : voir la décision Novopharm Limited et Apotex Inc. c. Hoffman‑La Roche Limited/Hoffman‑La Roche Limitée concernant la demande no 1006334 pour la marque de commerce XENICAL Capsule Design, décision rendue le 5 mai 2006, COMC, non publiée.

 

L’alinéa 13(1)a) de la Loi exige que le signe distinctif soit distinctif des marchandises ou des services du requérant à la date du dépôt de la demande. Le paragraphe 32(1) exige que le requérant dépose auprès du registraire, pendant le traitement administratif de la marque (soit l’étape de l’examen), une preuve établissant que le signe distinctif est vraiment distinctif à la date du dépôt :

 


13(1) Un signe distinctif n’est enregistrable que si, à la fois :

 

a) le signe a été employé au Canada par le requérant ou son prédécesseur en titre de façon à être devenu distinctif à la date de la production d’une demande d’enregistrement le concernant;

 

 

32(1) Un requérant, qui prétend que sa marque de commerce est enregistrable en vertu du paragraphe 12(2) ou en vertu de l’article 13, fournit au registraire, par voie d’affidavit ou de déclaration solennelle, une preuve établissant dans quelle mesure et pendant quelle période de temps la marque de commerce a été employée au Canada, ainsi que toute autre preuve que le registraire peut exiger à l’appui de cette prétention. (Je souligne.)

 

 

Suivant l’article 37,  le registraire doit examiner la preuve produite par le requérant et rejeter la demande s’il est convaincu que la marque n’est pas enregistrable; sinon, la demande de marque de commerce passe à l’étape administrative suivante :

 

37(1) Le registraire rejette une demande d’enregistrement d’une marque de commerce sil est convaincu que, selon le cas :

 

a) la demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30;

b) la marque de commerce nest pas enregistrable;

c) le requérant n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la marque de commerce parce que cette marque crée de la confusion avec une autre marque de commerce en vue de l’enregistrement de laquelle une demande est pendante.

Lorsque le registraire n’est pas ainsi convaincu, il fait annoncer la demande de la manière prescrite.

 

Avis au requérant

(2) Le registraire ne peut rejeter une demande sans, au préalable, avoir fait connaître au requérant ses objections, avec les motifs pertinents, et lui avoir donné une occasion convenable d’y répondre.

 

Cas douteux


(3) Lorsque, en raison d’une marque de commerce déposée, le registraire a des doutes sur la question de savoir si la marque de commerce indiquée dans la demande est enregistrable, il notifie, par courrier recommandé, l’annonce de la demande au propriétaire de la marque de commerce déposée. (Je souligne.)

 

 

Il ressort clairement de l’article 37 susmentionné que le registraire doit être convaincu qu’une marque de commerce n’est pas enregistrable, c’est‑à‑dire que ce nest pas au requérant quil incombe détablir que le signe distinctif est enregistrable. Le fardeau de la preuve ne repose pas sur lui. Il s’ensuit que, dans le cadre d’une opposition, le requérant ne peut prétendre qu’il existe une présomption d’enregistrabilité du simple fait que la marque en cause a franchi l’étape de l’examen par le registraire aux termes de l’article 37. Par conséquent, dans le cadre d’une opposition, la question du caractère distinctif d’un signe distinctif demeure entière. De plus, dans le cadre d’une opposition, une fois que la question du caractère distinctif a été soulevée, le requérant porte le fardeau civil habituel, c’est‑à‑dire qu’il doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que le signe distinctif de la marque de commerce possède un caractère distinctif : voir la décision Molson Breweries c. Canada (Registre des marques de commerce) (1992), 41 C.P.R. (3d) 234, p. 241 à 243, dans laquelle le juge Strayer a abordé des questions semblables en ce qui concerne la preuve fournie au registraire sous le régime du paragraphe 12(2).

 


En l’espèce, la requérante a fourni au registraire, à l’étape de l’examen, l’affidavit de Vince Rizzi afin d’établir la mesure dans laquelle le signe distinctif avait été employé au Canada. De façon générale, le requérant n’est pas tenu, dans le cadre d’une opposition, de déposer à nouveau la preuve qu’il a fournie au registraire sous le régime du paragraphe 32(1); toutefois, le requérant doit informer la Commission ainsi que l’autre partie qu’il se fonde sur cet élément de preuve, fournir à l’opposant une copie de l’élément de preuve et s’assurer que la personne qui a fourni la preuve est disponible pour un contre-interrogatoire. Dans la présente opposition, la requérante n’a pas indiqué, autrement que par référence indirecte dans sa contre‑déclaration, qu’elle se fondait sur le témoignage de M. Rizzi. Ainsi, aucun élément de preuve n’appuie sa prétention selon laquelle le signe distinctif en cause était distinctif de ses marchandises en date du 10 avril 1997. Il serait donc injuste envers l’opposante que la Commission tienne compte du témoignage de M. Rizzi alors que M. Rizzi n’est pas disponible pour être contre‑interrogé.

 


décision

Compte tenu de ce qui précède, l’opposante obtient gain de cause à l’égard du motif d’opposition figurant au sous-alinéa 3b)(i) ci‑dessus. La demande en cause est donc rejetée.

 

            De plus, l’opposante aurait vraisemblablement pu obtenir gain de cause à l’égard des motifs d’opposition figurant aux sous-alinéas 3c)(i) et (ii). À cet égard, les témoignages des médecins et des pharmaciens sont suffisants pour que l’opposante s’acquitte du fardeau qui lui incombe d’étayer les motifs d’opposition susmentionnés, tandis que la requérante n’a présenté aucun élément de preuve visant à établir que son signe distinctif était distinctif pendant la période pertinente.

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 14 DÉCEMBRE 2006.

 

 

 

Myer Herzig,

Membre,

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

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