Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

Référence : 2014 COMC 264

Date de la décision : 2014-12-01

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Michael Lannon à l'encontre des demandes d'enregistrement nos 1,381,044 et 1,458,132 pour la marque de commerce KOKO au nom de Cosmoda Concept Corporation

 

DEMANDE D'ENREGISTREMENT no 1,381,044 - KOKO

Dossier

[1]        Le 28 janvier 2008, Cosmoda Concept Corporation a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce KOKO, sur la base d'un emploi projeté, en liaison avec :

[traduction]
Foulards, gants, chapeaux, sacs à main, montres et lunettes de soleil.

Au cours de l’opposition, le 25 novembre 2009 ou aux environs de cette date, la requérante a changé son nom pour celui de Gabi Concepts Ltd.

[2]        En mai 2014, les marchandises ont été modifiées ainsi :

[traduction]
sacs à main isothermes pour transporter de la nourriture et des boissons,

sacs à main non isothermes pour transporter de la nourriture et des boissons :

rien de ce qui précède nétant des sacs à main en cuir

ou en simili cuir excepté pour des garnitures en cuir ou

en simili cuir.

[3]        La demande en l'espèce a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 13 juillet 2011 et Michael Lannon (situé à Rockland, Massachusetts aux États-Unis) s'y est opposé le 13 décembre 2011. Le registraire a transmis à la requérante une copie de la déclaration d'opposition le 5 janvier 2012, conformément à l'article 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13. Le 25 janvier 2012, la requérante a répondu en produisant et en signifiant une contre-déclaration niant de façon générale les allégations contenues dans la déclaration d'opposition.

[4]        La preuve de l'opposant est constituée de l'affidavit de Michael Lannon. M. Lannon a été contre-interrogé au sujet de son affidavit le 3 juin 2013. La transcription du contre-interrogatoire et une réponse à une question prise en délibéré font partie de la preuve au dossier. La réponse à la question prise en délibéré est constituée de deux contrats de licence entre l'opposant et (i) Après Health and Fitness, Inc., daté du 2 décembre 2005, et (ii) Koko Fitness, Inc. et Koko FitClub, LLC, daté du 23 avril 2008. La transcription et les contrats de licence ont été produits comme preuve par la requérante (conformément aux pratiques habituelles de la Commission) le 31 juillet 2013. Sinon, la requérante a choisi de ne produire aucune preuve.

[5]        Les procédures sont passées à l'étape du plaidoyer écrit le 28 octobre 2013. Peu après, le 26 novembre 2013, l'opposant a demandé (i) l'autorisation de produire comme preuve additionnelle un contrat de modification et de confirmation daté de juillet 2013, reproduit ci-dessous et (ii), par ailleurs, que les deux contrats de licence dont il est question au para 4, ci-dessus, soient radiés du dossier

CONTRAT DE MODIFICATION ET DE CONFIRMATION

Ce contrat modifie un contrat de licence conclu en date du 2 décembre 2005 entre Michael Lannon comme Concédant de licence, et Koko Fitness, Inc., appelé alors Après Health and Fitness, Inc. comme Licencié.

Ce contrat modifie un contrat de licence conclu le 23 avril 2008 entre Michael Lannon comme concédant de licence, Koko Fitness, Inc., comme licencié et Koko FitClub, LLC, comme Sous-Licencié.

Les parties sont d'accord que le Concédant de licence a pu exercer et devrait en tout temps pouvoir exercer le contrôle sur les caractéristiques et la qualité des marchandises et services offerts en liaison avec les Marques de commerce.

Les parties sont d'accord et confirment que les Marques de commerce licenciées et sous-licenciées en vertu de ce contrat comprennent, mais sans s'y limiter les marques de commerce KOKO, KOKO FITCLUB, SMARTRAINER, SMARTSTATION, QUICKTRAINER, Kokoman Dessin et SMARTRAINER.

[6]        Les parties au contrat de juillet étaient l'opposant, M. Lannon; Koko Fitness, Inc.; et Koko FitClub, LLC. Il semble que l'opposant, M. Lannon, a signé pour chaque partie du contrat.

[7]        Comme mentionné par l'opposant à la page 2 de ses observations pour demander une permission, le contrat de juillet vise à établir que l'emploi de la marque KOKO par Koko Fitness, Inc. et par Koko FitClub, LLC s'applique en faveur de l'opposant en vertu de l'article 50 de la Loi sur les marques de commerce, reproduit ci-dessous :

50. (1) Pour l'application de la présente loi, si une licence d'emploi d'une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l'emploi, la publicité ou l'exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial - ou partie de ceux-ci - ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s'il s'agissait de ceux du propriétaire.

(2) Pour l'application de la présente loi, dans la mesure où un avis public a été donné quant à l'identité du propriétaire et au fait que l'emploi d'une marque de commerce fait l'objet d'une licence, cet emploi est réputé, sauf preuve contraire, avoir fait l'objet d'une licence du propriétaire, et le contrôle des caractéristiques ou de la qualité des marchandises et services est réputé, sauf preuve contraire, être celui du propriétaire.

[8]        Dans une décision datée du 2 décembre 2013, la Commission a rejeté la demande d'autorisation de lopposant de produire le contrat de juillet sur la base que la preuve supplémentaire n'était pas sous forme d'affidavit ou de déclaration solennelle. La requérante s'est opposée à l'admission de la preuve supplémentaire pour d'autres raisons également, dans des observations datées du 4 décembre 2013, qui auraient apparemment croisé la décision de la Commission dans le courrier. La Commission n'a pas traité l'autre demande de l'opposant de radier les deux contrats de licence du dossier ne pas l'avoir fait semble avoir été une omission involontaire. Après examen des observations des parties du 26 novembre et du 4 décembre, il est évident qu'il n'y avait pas de raison de radier les contrats de licence datés de 2005 et 2008 de la preuve au dossier. En aucun moment l'opposant n'a soulevé d'objection d'avoir subi un préjudice en raison de l'oubli par la Commission de prendre une décision en temps opportun concernant son autre demande.

[9]        Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient toutes deux représentées à l'audience qui a été tenue le 3 septembre 2014.

Déclaration d'opposition

Allégations

[10]      L'opposant, M. Lannon, allègue que :

(i) il est le propriétaire de la marque de commerce KOKO enregistrée au Canada pour emploi en liaison avec les marchandises et services suivants :

 [traduction]
Appareils d'exercice, nommément machines d'entraînement en force musculaire multifonctions à une place; logiciel vendu comme composant de machines d'entraînement en force musculaire.

Offre de services de centre de conditionnement physique.

(ii) il a vendu, au Canada, des appareils d'exercice arborant la marque KOKO depuis environ novembre 2009,

(iii) les centres de conditionnement physique au Canada emploient la marque KOKO, et des marques connexes comme KOKO FIT CLUB, sous licence de l'opposant depuis environ novembre 2009,

(iv) des marchandises sportives comme des vêtements, des gourdes à eau, des sacs et des sacs à dos arborant la marque KOKO de l'opposant ont été vendues par l'opposant et ses licenciés.

[11]      Je remarque que l'opposant a produit une demande pour enregistrer sa marque KOKO le 11 août 2008, et que la demande d'enregistrement était fondée sur un emploi projeté au Canada.

Question principale

[12]      Divers motifs d'opposition sont invoqués, cependant, la question décisive à trancher est celle de savoir si la marque visée par la demande, KOKO, crée de la confusion avec la marque KOKO de l'opposant. Les dates pertinentes pour l'examen de la question de la confusion sont la date de ma décision en ce qui concerne le premier motif d'opposition alléguant la non-enregistrabilité, en vertu de l'article 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce; la date de la production de la demande d'enregistrement (28 janvier 2008) en ce qui concerne le deuxième motif d'opposition alléguant l'absence du droit à l'enregistrement, en vertu de l'article 16(3)de la Loi; et la date de l'opposition (13 décembre 2011) en ce qui concerne le dernier motif alléguant l'absence de caractère distinctif, en vertu de l'article 2 : pour un survol de la jurisprudence relativement aux dates pertinentes dans le cadre des procédures d'opposition, voir American Retired Persons c Canadian Retired Persons (1998), 84 CPR(3d) 198 (CF 1re inst) aux pages 206 à 209.

[13]      Avant de traiter de la question de confusion, j'examinerai d'abord la preuve au dossier, la signification de la confusion dans le contexte de la Loi sur les marques de commerce et les facteurs qui doivent être considérés dans l'examen de la probabilité de confusion d'une marque de commerce.

Preuve de l'opposant

Affidavit de Michael Lannon

[14]      L'opposant se présente comme le PDG et cofondateur de Koko Fitness, Inc. et de Koko FitClub, LLC., quil désigne collectivement comme « Koko FitClub ». Les entreprises fabriquent et vendent des appareils d'exercice et offrent des franchises de centres de conditionnement physique au Canada et aux États-Unis. Koko FitClub (probablement la dernière entreprise susmentionnée) a été constituée en 2004 au Massachusetts aux États-Unis, où elle est située. En date du 22 août 2012 (la date de l'affidavit de M. Lannon), Koko FitClub avait des centres de conditionnement physique franchisés dans 20 États des États-Unis.

[15]      L'opposant octroie une licence sur sa marque KOKO à Koko FitClub qui octroie une sous-licence sur la marque à des franchisés. Les franchises Koko FitClub sont des [traduction] « studios d'entraînement personnel automatisés », c'est-à-dire qu'ils sont équipés d'appareils d'exercice qui programment et enregistrent les renseignements d'entraînement des clients sur une clé USB. La clé est insérée dans un port USB sur les appareils d'exercice. Environ 500 clés ont été vendues au Canada depuis 2008. La pièce B de l'affidavit de M. Lannon montre la marque KOKO apposée sur une clé USB.

[16]      En octobre 2009, Koko FitClub a conclu un contrat avec RosKo Fitness, Inc. selon lequel RosKo a ouvert deux centres de conditionnement physique Koko FitClub en Ontario. Un des centres était situé à Oakville; il a ouvert ses portes en novembre 2009. L'autre centre était situé à Woodbridge; il a ouvert ses portes en juillet 2010. Les deux centres ont fermé leurs portes en novembre 2011. La pièce C montre l'emploi de la marque KOKO en liaison avec les services de centres de conditionnement physique à lemplacement d'Oakville.

[17]      L'équipement d'exercice automatisé de lopposant arborant la marque KOKO et les clés USB KOKO sont également vendus à des non-franchisés dont Golds Gym à London et l'Université du Québec à Chicoutimi.

[18]      Les franchisés KOKO FitClub offrent à leurs membres, leurs employés et au public des vêtements, de l'équipement et des accessoires [traduction] « arborant les marques Koko », dont des sacs de sport et des sacs à dos (une liste complète est produite en pièce G). Les franchisés achètent de tels articles directement des fournisseurs de l'opposant.

[19]      M. Lannon explique pourquoi il est préoccupé par la probabilité de confusion entre la marque visée par la demande et sa marque aux paragraphes 19 à 22 de son affidavit.

[traduction]
19. L'industrie des centres de conditionnement physique fait un important emploi d'articles et daccessoires de promotion de marque. La gamme d'accessoires distribués par les centres de conditionnement physique est très vaste et comprend toutes les marchandises énumérées dans les demandes d'enregistrement de marque de commerce de Gabi Concepts.

20. Cela peut être vérifié facilement dans les dossiers du registre des marques de commerce. Les marchandises énumérées dans les demandes d'enregistrement de Gabi Concepts sont couramment énumérées dans des demandes pour l'enregistrement de marques de commerce de centres de conditionnement physique au Canada. Des recherches dans le registre des marques de commerce pour le mot « fitness » [conditionnement] dans le champ des services et l'une des marchandises énumérées par Gabi dans le champ des marchandises ont donné le nombre de marques de commerce suivant :

               Bags [sacs]                               102

               Gloves [gants]                          634

               Hand bags [sacs à main]                      4

               Hats [chapeaux]                                   1130

               Gym bags [sacs de sport]         34

               Tote bags [sacs fourre-tout]     26

               Lunch bags [sacs à lunch]        1

               Scarves [foulards]                    343

               Sunglasses [lunettes de soleil]  8

               Watches [montres]                   16

                                                               . . . . .

22. En raison de cette pratique répandue, le public s'attend à ce que certains genres d'articles publics arborent les marques de centres de conditionnement physique. Ce genre d'articles comprend les marchandises énumérées au paragraphe 20 ci-dessus et aux pièces G et H. À la vue d'un logo sur ce genre d'articles, personne ne serait surpris de découvrir qu'il est associé à un centre de conditionnement physique. Une association avec notre centre de conditionnement physique viendrait facilement à l'esprit de toute personne familière avec nos logos qui entre en contact avec les produits de Gabi Concepts.

[20]      Il est évident que la preuve de l'affidavit de M. Lannon, daté du 22 août 2012, porte sur la demande d'enregistrement comme produite à l'origine plutôt que sur la demande d'enregistrement modifiée en 2014. La preuve susmentionnée devient moins pertinente en ce qui concerne les sacs à main pour transporter de la nourriture et des boissons puisque, à l'exception des sacs à lunch, il n'y a aucun recoupement significatif entre la liste de marchandises susmentionnées et les marchandises de la requérante.

Transcription du contre-interrogatoire

[21]      Koko Fitness, Inc. conçoit, fabrique et vend de l'équipement de conditionnement physique, alors que Koko FitClub, LLC. est impliquée dans [traduction] « le service des ventes et des franchises… » En date du contre-interrogatoire du 3 juin 2013, il n'y avait aucun centre de conditionnement physique KOKO FitClub en activité au Canada.

[22]      M. Lannon octroie sous licence sa marque à Koko Fitness Inc. qui, en retour, l'octroie sous licence à Koko FitClub LLC. Ces contrats de licence sont versés au dossier, voir le para 4, ci-dessus.

[23]      Le chiffre de 500 clés USB vendues au Canada est basé sur la vente de 250 clés à chacun des deux centres franchisés mentionnées au para 16, ci-dessus. L'opposant n'allègue pas que [traduction] « les franchisés canadiens ont vendu un nombre quelconque de clés à leurs clients », voir pages 9 à 12 de la transcription et en particulier la Q41 à la page 12.

[24]      M. Lannon ne sait pas si les franchisés doivent, selon les termes de leur contrat de licence avec Koko FitClub LLC., indiquer que M. Lannon est le propriétaire de la marque KOKO.

[25]      Il est clair selon la transcription du contre-interrogatoire, aux pages 26 à 28, que M. Lannon n'a pas fait les recherches de marque de commerce auxquelles il fait référence aux para 20 et 21 de son affidavit et qu'il n'est pas familier avec la façon dont les recherches ont été menées. J'estime donc que les para 20 et 21 constituent du ouï-dire inadmissible.

[26]      M. Lannon est interrogé au sujet des contrats de licence de la marque KOKO avec des fournisseurs à partir de la page 24 de la transcription :

[traduction]

97          Q. . . Paragraphe 17 [c.-à-d., para 17 de son affidavit] vous déclarez que vos franchisés peuvent acheter des articles de marque directement de vos fournisseurs?

 

R. Oui.

 

98           Q. Qui sont ces fournisseurs?

 

R. Nous utilisons plusieurs fournisseurs différents. Je -- c'est une liste de fournisseurs qui change constamment. Je ne crois pas que nous ayons divulgué cette information ou qu'elle fasse partie de l'affidavit, mais nous utilisons des fournisseurs tiers en Ontario.

 

99          Q. Voyons la période durant laquelle vous aviez des établissements franchisés canadiens entre novembre 2009 et novembre 2011. Quels fournisseurs étaient autorisés à vendre des articles de marque Koko au Canada?

 

R. Je ne me souviens pas.

 

100         Q. Savez-vous s'il y en avait?

 

R. Oui.

 

101        Q. Vous souvenez-vous d'au moins un des fournisseurs qui étaient autorisés à vendre des articles de marque Koko au Canada?

 

R. Je ne me souviens pas quels fournisseurs. Comme je l'ai dit, nous utilisons différents fournisseurs à différents moments et ils étaient accessibles à ce moment pour les franchisés. Donc, quels fournisseurs étaient utilisés à ce moment il y a trois ans, je ne m'en souviens pas.

 

102        Q. Et ces fournisseurs fabriquaient-ils ces articles ou organisaient-ils la fabrication par des tiers?

 

R. C'est ce que je crois, oui.

 

103        Q. Et existe-t-il un contrat de licence entre vous personnellement et l'un ou l'autre de ces fournisseurs?

 

R. Non.

 

104        Q. Existe-t-il un contrat de licence entre Koko Fitness Inc. ou Koko FitClub avec l'un ou l'autre de ces fournisseurs?

 

R. Non.

[27]      D'après le témoignage ci-dessus de M. Lannon lors du contre-interrogatoire, il n'est absolument pas clair que tout emploi de la marque KOKO au Canada en liaison avec les services de l'opposant s'applique en faveur de l'opposant. De plus, comme susmentionné par l'avocat de la requérante lors de l'audience, les contrats de licence de l'opposant qui étaient en vigueur (i) ne font pas spécifiquement référence à la marque KOKO de l'opposant et (ii) ne comprennent aucune disposition relative au contrôle de la qualité. Comme il est de la responsabilité de l'opposant de démontrer chaque point de sa cause, et compte tenu du peu de preuve de l'opposant en ce qui concerne la licenciation de sa marque KOKO, j'hésite à estimer que M. Lannon, dans les faits, exerçait un contrôle direct ou indirect des caractéristiques ou de la qualité des services sous la marque KOKO fournis par l'un ou l'autre de ses licenciés ou sous-licenciés. Par conséquent, l'opposant ne peut pas prétendre que sa marque KOKO a acquis un caractère distinctif quelconque au Canada par l'entremise de la vente d'articles de marque KOKO provenant de fournisseurs : voir l'article 50 de la Loi sur les marques de commerce.

Signification de la confusion entre des marques de commerce

[28]      Les marques de commerce créent de la confusion lorsquil existe une probabilité raisonnable de confusion au sens de l'article 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, reproduit ci-dessous :

Lemploi dune marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque lemploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises. . . liées à ces marques de commerce sont fabriquées. . . ou que les services liés à ces marques sont... exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non. . . de la même catégorie générale.

[29]      Par conséquent, l'article 6(2) ne porte pas sur la confusion entre les marques elles-mêmes, mais sur une confusion qui porterait à croire que les produits ou les services d'une source proviennent d'une autre source. En l'espèce, la question que soulève l'article 6(2) est celle de savoir si des acheteurs des marchandises de la requérante vendues sous la marque KOKO croiraient que ces marchandises ont été produites ou autorisées ou octroyées sous licence par l'opposant qui (prétendument) vend des appareils d'exercice et des services de conditionnement physique au Canada sous sa marque KOKO. Cest à la requérante quincombe le fardeau ultime de démontrer, selon la norme habituelle de la prépondérance des probabilités qui sapplique en matière civile, quil ny aurait pas de probabilité raisonnable de confusion.

Test en matière de confusion

[30] Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Les facteurs à prendre en considération pour déterminer si deux marques créent de la confusion sont « toutes les circonstances de l’espèce, y compris » celles expressément énoncées aux articles 6(5)a) à 6(5)e) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste nest pas exhaustive et tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération. De plus, ces facteurs n’ont pas nécessairement tous le même poids, car le poids qu’il convient d’accorder à chacun varie selon les circonstances : voir Gainers Inc c Tammy L. Marchildon et le Registraire des marques de commerce (1996), 66 CPR (3d) 308 (CF 1re inst). Toutefois, comme l’a souligné le juge Rothstein dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), le degré de ressemblance est souvent le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce, même s’il est mentionné en dernier lieu à l'article 6(5).

Examen des facteurs énoncés à l'article 6(5)

[31]      En ce qui concerne le premier facteur, les marques des parties sont le même mot inventé qui n'a pas de connotation suggestive en liaison avec les marchandises et services des parties. Par conséquent, ni l'une ni l'autre des parties n'est favorisée en ce qui concerne le caractère distinctif inhérent. Il n'y a aucune preuve que la marque visée par la demande a acquis un quelconque caractère distinctif par l'emploi ou la promotion aux plus récentes dates pertinentes. Toutefois, compte tenu de l'absence de précision en ce qui concerne la période pendant laquelle la marque de l'opposant a été employée, et l'absence de certitude à savoir si un certain emploi de la marque de l'opposant au Canada s'applique en faveur de l'opposant, j'estime que, au mieux, l'opposant a établi un emploi minimal de sa marque KOKO. Ce premier facteur, qui est une combinaison des caractères distinctifs inhérent et acquis, ne s'applique donc pas en faveur de l'opposant dans une mesure notable à l'une ou l'autre des dates pertinentes. Dans le même ordre d'idée, l'opposant a, au mieux, démontré l'emploi de sa marque sur une courte période (de novembre 2009 à novembre 2011, dans deux emplacements) et la mesure d'un tel emploi est indéterminée. Dans de telles circonstances, le deuxième facteur ne s'applique pas en faveur de l'opposant dans une mesure notable à l'une ou l'autre des dates pertinentes.

[32]      Les marchandises de la requérante comme énumérées dans la demande d'enregistrement en l'espèce ont peu ou pas de lien avec les marchandises et services de l'opposant. En l'absence de preuve du contraire, je suppose que les voies de commercialisation des parties seraient également différentes. Par conséquent, les troisième et quatrième facteurs s'appliquent en faveur de la requérante. Évidemment, le cinquième facteur s'applique en faveur de l'opposant puisque les marques des parties sont les mêmes. Toutefois, comme on le verra ci-dessous à l'examen de la jurisprudence, la ressemblance entre les marques n'est pas toujours un facteur déterminant lorsque les marchandises et services des parties sont très différents.

Jurisprudence

[33]      Je suis généralement en accord avec les observations de la requérante aux paragraphes 53 à 56 de son plaidoyer écrit en ce qui concerne l'importance des troisième et quatrième facteurs :

[traduction]
53.          Dans Suzuki Motor Corp. c. Sahara Corp. (1998), 86 CPR (3d) 235 (COMC), la Commission a traité d'une opposition à la marque SIDEKICK pour des sièges rehausseurs de voiture basée, en partie, sur l'enregistrement antérieur par l'opposant d'une marque identique pour des automobiles.

54.          La Commission, en rejetant l'opposition, a fait remarquer les différences entre les marchandises des parties, de même quentre leurs voies de commercialisation. À la page 240, l'agent d'audience Martin a fait remarquer ce qui suit :

[traduction]
Il est possible que certains consommateurs qui voient la marque SIDEKICK sur un siège rehausseur portable pour voiture dans un magasin de détail pensent au véhicule SIDEKICK de l'opposant. Mais il est fort improbable qu'ils concluent que le produit de la requérante provient de, ou est approuvé par l'opposant, compte tenu des grandes différences entre les marchandises et les voies de commercialisation.

55.          La décision de la Cour d'appel fédérale dans Lexus Foods Inc.c. Toyota Jidosha Kabushiki Kaisha (2000), 9 CPR (4th) 297 est également riche en renseignements quant aux circonstances de l'espèce. Le juge Linden, au nom du tribunal, a déclaré ce qui suit :

[traduction]
Comme il est souligné dans Pink Panther, « celui qui enregistre une marque de commerce n'est pas propriétaire des mots ou des images que contient cette marque ». La protection accordée doit être en liaison avec certaines marchandises ou certains services, car la confusion est moins probable lorsque les marchandises sont sensiblement différentes, même quand la marque en est une qui est bien connue. L'emploi de la phrase « que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale », apparaissant aux articles 6(2), 6(3) et 6(4), ne signifie pas que la nature des marchandises n'est pas pertinente pour déterminer s'il y a confusion; cette phrase donne uniquement à penser que la confusion peut être engendrée par des biens qui ne sont pas de « la même catégorie générale », mais qui ont tout de même une certaine ressemblance ou un certain lien avec les marchandises en question. Le genre de biens comparés afin de déterminer s'il peut y avoir de la confusion demeure pertinent, et lorsqu'ils sont à ce point différents comme des autos et des aliments en conserve, il faut donner une importance considérable à ce facteur, ce que le juge de première instance n'a pas fait, mais ce que le registraire a fait de façon appropriée. Cette question était esquissée dans Pink Panther où la Cour a déclaré : [traduction] « si une marque renvoie à des produits d'entretien domestique tandis que l'autre s'applique à des produits automobiles et que ces produits sont distribués dans des boutiques d'un genre différent, la probabilité que les consommateurs confondent une marque avec l'autre sera moins grande ». [Non souligné dans l'original]

56.          En l'espèce, l'opposant cherche en réalité à ignorer qu'il possède un enregistrement qui est restreint à des marchandises et services bien précis et quil cherche maintenant à obtenir un monopole sur des marchandises complètement différentes qui circuleraient par des voies de commercialisation différentes.

Conclusion

[34]      Compte tenu de l'examen précédent des facteurs énoncés à l'article 6(5) et de la jurisprudence, j'estime que, à toutes les dates pertinentes, la requérante s'est acquittée de son fardeau de preuve de démontrer que les marques des parties ne créent pas de confusion.

DEMANDE D'ENREGISTREMENT no 1,458,132 - KOKO

[35]      La deuxième demande d'enregistrement a été produite le 5 novembre 2011. Elle est également fondée sur un emploi projeté au Canada en liaison avec les marchandises suivantes :

[traduction]
sacs repas isothermes, gourdes autres qu'en métal;

fourre-tout d'épicerie isothermes, fourre-tout non isothermes.

[36]      Comme dans le cas précédent, les marchandises ont été modifiées en mai 2014. Les marchandises au dossier sont :

[traduction]
sacs repas isothermes, fourre-tout d'épicerie isothermes et fourre-tout d'épicerie non isothermes, rien de ce qui précède nétant en cuir ou en simili cuir excepté pour des garnitures en cuir ou en simili cuir; gourdes autres qu'en métal.

[37]      La deuxième demande d'enregistrement a été publiée dans le Journal des marques de commerce du 7 décembre 2011 et a fait l'objet d'une opposition le 6 février 2012.

[38]      Les questions dans les deux cas sont complètement analogues et la preuve au dossier est la même dans chaque cas. Quoique les dates pertinentes pour les motifs d'opposition diffèrent dans une certaine mesure, et que la deuxième demande d'enregistrement comprend des [traduction] « gourdes autres qu'en métal », l'examen de la confusion est essentiellement le même que pour la première opposition. Il est également important de noter que la même jurisprudence s'applique. J'estime donc que, à toutes les dates pertinentes, la requérante s'est acquittée de son fardeau de preuve de démontrer que les marques des parties ne créent pas de confusion.

Décision

[39]      Compte tenu de ce qui précède, les oppositions produites à l'encontre des demandes nos 1,381,044 et 1,458,132 sont rejetées. Les présentes décisions sont rendues dans lexercice des pouvoirs qui mont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu de larticle 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

 

__________________

Myer Herzig, membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 



Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay, trad.

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