Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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INSTANCE FONDÉE SUR L’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : TRIBUTE

N° DENREGISTREMENT 293,059

 

 

 

Le 16 septembre 1999, à la demande de MM. Brouillette et Kosie, le registraire a fait parvenir l’avis visé à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce à  Molson Breweries, une société de personnes, le propriétaire inscrit de la marque de commerce susmentionnée.

 

La marque de commerce TRIBUTE est enregistrée pour emploi en liaison avec des « boissons alcoolisées obtenues par brassage ».

 

L’article 45 de la Loi sur les marques de commerce exige du propriétaire inscrit qu’il montre que la marque de commerce a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services énumérés dans l’enregistrement, à quelque moment au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, qu’il indique la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date.   

 

Le propriétaire inscrit a répondu en transmettant au registraire l’affidavit de Mme Tracey Wamboldt, auquel étaient jointes des pièces. Chacune des parties a formulé des arguments par écrit et était représentée à l’audience.

 


Dans son affidavit, Mme Wamboldt dit que « Molson » brasse et met en bouteille des boissons alcoolisées obtenues par brassage destinées au marché intérieur et à l’exportation. Elle indique que « Molson » a employé et emploie actuellement la marque TRIBUTE en liaison avec la vente de boissons alcoolisées obtenues par brassage, et spécialement au cours de la période allant de juin 1997 à mai 1999. La pièce A correspond à un spécimen d’étiquette utilisée par Molson et portant la marque de commerce TRIBUTE. La pièce B est une photo montrant des bouteilles auxquelles ont été apposées des étiquettes portant la marque de commerce TRIBUTE. La pièce C reproduit une facture et des documents d’expédition se rapportant à une caisse de 24 bouteilles de 341 ml de bière TRIBUTE que Molson a expédiée à la division européenne de Foster’s International, dans le Surrey, en Angleterre. Mme Wamboldt affirme que ces bouteilles de bière TRIBUTE portaient l’étiquette correspondant à la pièce A jointe à son affidavit. Elle précise que la division européenne de Foster’s International avait passé la commande le 20 juin 1997. En guise de pièce D, elle joint à son affidavit la copie d’une facture et de documents se rapportant à l’expédition d’une caisse de 24 bouteilles de 341 ml de bière TRIBUTE par suite d’une commande passée le 19 mai 1998. La pièce E est la copie d’une facture et de documents se rapportant à l’expédition d’une caisse de 24 bouteilles de bière TRIBUTE après qu’une commande eut été passée le 28 octobre 1998. En guise de pièce F, la déposante joint les documents afférents à une expédition datant de mai 1999. Elle précise ensuite que ce sont les bouteilles expédiées en mai 1999 qui figurent sur la photographie jointe à titre de pièce B.

 


La partie requérante fait valoir que l’emploi allégué constitue du “token use” et qu’il ne s’agit pas d’un emploi dans la pratique normale du commerce mais plutôt un usage fait dans le seul but de protéger l’enregistrement.  Elle prétend en outre que la preuve n’établit pas que la marque de commerce a été apposée aux marchandises avant leur exportation du Canada. Elle ajoute que la preuve ne démontre pas si la bière vendue renfermait de l’« alcool » et donc on ne peut savoir s’il s’agit d’une « boisson alcoolisée obtenue par brassage ».

 

Pour sa part, la titulaire soutient que l’emploi établi est conforme au paragraphe 4(3) de la Loi, dont voici le libellé :

Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

Elle dit que, contrairement au paragraphe 4(1), le paragraphe 4(3) n’exige pas que la marque soit employée dans la pratique normale du commerce. Elle appuie sa prétention sur la décision Molson Companies Ltd. c. Moosehead Breweries Ltd., 32 C.P.R. (3d) 363, à la page 373. Elle prétend ensuite qu’il importe peu que les expéditions aient lieu ou non « dans la pratique normale du commerce », puisqu’elle a établi l’emploi comme l’exigeait le paragraphe 4(3).

 

La titulaire ajoute que, conformément au paragraphe 4(3) de la Loi, la preuve montre que la marque de commerce était apposée aux marchandises avant leur exportation. Elle invoque à l’appui les pièces A et B, qui montrent clairement que l’étiquette et les bouteilles de bière sont revêtues de la marque de commerce, de même que les énoncés des paragraphes 9, 10, 11 et 12 de l’affidavit de Mme Wamboldt selon lesquels les bouteilles de bière TRIBUTE expédiées portaient l’étiquette correspondant à la pièce A.

 


En ce qui concerne le produit vendu, la titulaire fait valoir qu’il ressort de l’étiquette jointe à l’affidavit de Mme Wamboldt à titre de pièce A que le produit renferme de l’« alcool » et donc  appartient à la catégorie des « boissons alcoolisées obtenues par brassage ».

 

Je conviens avec la titulaire que, pour prouver l’emploi aux fins du paragraphe 4(3) de la Loi, il lui suffit d’établir ce qui suit :

a) la marque de commerce est mise au Canada,

b) sur les marchandises ou sur les colis qui les contiennent,

c) quand ces marchandises sont exportées du Canada.

 


Même si, selon la décision Molson c. Moosehead, précitée, il appert que les marchandises doivent être expédiées du Canada vers un autre pays dans le cadre d’une opération commerciale (par opposition à un don), le paragraphe 4(3) n’exige pas que l’opération ait lieu « dans la pratique normale du commerce ». Dans la présente affaire, la bière semble avoir été expédiée à l’étranger dans le cadre d’une opération commerciale, puisque, selon les factures, la titulaire a imputé des frais à son client pour chacune des caisses de bière exportées.  Il convient également de signaler que chacune des factures porte la mention [Traduction] « à des fins d’évaluation du marché ».  Cela suggère que la titulaire ou son client pourrait être tenter d’établir un marché, en Angleterre, pour la bière TRIBUTE, ainsi que pour d’autres bières, ce qui pourrait venir m’appuyer dans l’opinion qu’il s’est agi d’« opérations commerciales ». La partie requérante a par ailleurs fait valoir que les frais d’expédition et de manutention étaient supérieurs à la somme figurant sur les factures.  Bien que cela semble peu ordinaire, je ne peux convenir avec la partie requérante que cela prouve que les opérations sont autres que des opérations commerciales.

 

En outre, je conviens avec la titulaire que l’on peut déduire de la preuve que la marque était apposée aux bouteilles de bière avant leur exportation du Canada. Plus particulièrement, les énoncés 9, 10, 11 et 12 de l’affidavit de Mme Wamboldt selon lesquels les bouteilles de bière expédiées étaient revêtues de l’étiquette correspondant à la pièce A confirment que l’emploi de la marque était conforme au paragraphe 4(3) de la Loi.

 

La partie requérante a par ailleurs signalé que l’étiquette porte la mention [Traduction] « Célébrant le 60e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale... ». Comme cet anniversaire sera célébré en 2005, elle fait valoir que l’étiquette n’est probablement pas employée à l’heure actuelle et que la titulaire projette plutôt de l’employer ultérieurement. À cet égard, l’avocat de la titulaire a soutenu que le texte de l’étiquette ne peut être considéré comme une preuve de non‑emploi de celle‑ci et, en outre, qu’aucun élément de preuve n’établit qu’un événement ne peut être célébré à l’avance. Il a ajouté que Mme Wamboldt  avait clairement déclaré sous serment qu’il s’agissait de l’étiquette apposée aux bouteilles de bière lors de leur exportation du Canada, ce qui prouve que cette étiquette était celle employée. Je suis d’accord avec l’avocat de la titulaire.  À mon sens, tirer la conclusion contraire serait imputer à Mme Wamboldt l’intention de tromper, et je ne vois aucune raison de le faire.

 


Je conviens également que l’on peut déduire de l’étiquette que la bière de la titulaire vendue sous la marque de commerce TRIBUTE appartenait à la catégorie des « boissons alcoolisées obtenues par brassage », soit les marchandises visées par l’enregistrement.

 

Même si la preuve offerte en l’espèce n’est pas abondante ni aussi précise qu’elle pourrait l’être, j’arrive à la conclusion, mais non sans difficulté, qu’il appert que la marque de commerce était employée au Canada pendant la période considérée et que cet emploi était conforme aux exigences du paragraphe 4(3) et de l’article 45 de la Loi. En conséquence, j’estime qu’il n’y a pas lieu de radier l’enregistrement de la marque de commerce.

 

En application du paragraphe 45(5) de la Loi, l’enregistrement n° 293,059 demeure.

 

FAIT À HULL (QUÉBEC), CE       20e        JOUR DE FÉVRIER 2002.                  

 

D. Savard

Agente d’audience supérieure

Section de l’article 45

 

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