Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

 

DANS L'AFFAIRE DES OPPOSITIONS de Rothmans Benson & Hedges Inc. aux demandes nos 1122419, 1122420, 1122421 et 1122422 produites par la Compagnie du Maurier Inc. en vue, respectivement, de l'enregistrement des marques de commerce du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DISTINCTION, du MAURIER DELUXE et du MAURIER COLLECTION

 

 

[1].             Le 19 novembre 2001, la Compagnie du Maurier Inc. (la Requérante) a produit des demandes d'enregistrement pour les marques de commerce du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DISTINCTION, du MAURIER DELUXE et du MAURIER COLLECTION (les Marques), en se fondant sur leur emploi projeté au Canada en liaison avec des « produits du tabac manufacturés » (les Marchandises).

 

[2].             Ces demandes ont été annoncées aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce le 18 décembre 2002.

 

[3].             Le 20 mai 2003, la société Rothmans Benson & Hedges (l'Opposante) a produit des déclarations d'opposition pour l'essentiel identiques entre elles à l'égard de chacune des demandes susdites. Les motifs de ces oppositions, dans la version modifiée de leur exposé, peuvent se résumer comme suit :

a.       Les demandes ne satisfont pas aux exigences de l'alinéa 30e) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13, et ses modifications (la Loi), en ce que la Requérante n'a pas l'intention d'employer les Marques, comme marques de commerce, en liaison avec la catégorie générale de marchandises décrite dans ces demandes.

b.      La demande d'enregistrement de la marque de commerce du MAURIER PREFERENCE ne satisfait pas aux exigences de l'alinéa 30i) de la Loi en ce que la Requérante ne pouvait être convaincue qu'elle avait le droit d'employer cette marque comme marque de commerce en liaison avec les marchandises décrites dans cette demande, étant donné qu'elle avait connaissance de la marque déposée B & H PREMIUM (no d'enregistrement LMC293722) de l'Opposante avant la date de production de ladite demande.

c.       Les Marques ne sont pas enregistrables au sens de l'alinéa 12(1)b) de la Loi, puisqu'elles donnent une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des marchandises à l'égard desquelles on projette de les employer.

d.      Les marques de commerce du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE et du MAURIER COLLECTION ne sont pas enregistrables au sens de l'alinéa 12(1)d) de la Loi parce que les demandes produites en vue de leur enregistrement créent de la confusion avec les marques de commerce déposées qu'énumère l'annexe A de la présente décision.

e.       Les Marques ne sont pas distinctives à l’égard de la Requérante, étant donné qu'elles ne distinguent pas ses Marchandises de celles d'autres propriétaires ni ne sont adaptées à les en distinguer.

f.       La Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce du MAURIER DELUXE. À la date où la Requérante a produit sa demande d'enregistrement de cette marque de commerce en liaison avec les Marchandises, ladite marque créait de la confusion avec les marques de commerce BENSON & HEDGES 100’S DELUXE ULTRA LIGHTS MENTHOL & DESSIN et BENSON & HEDGES 100’S DELUXE ULTRA LIGHTS & DESSIN, que l'Opposante employait déjà en liaison avec des marchandises semblables ou identiques, pour lesquelles des demandes d'enregistrement avaient été antérieurement produites au Canada, sous les numéros de série 1125912 et 1125913 respectivement, et qui n'avaient été ni l'une ni l'autre abandonnées à la date de l'annonce de la demande de la Requérante.

 

[4].             La Requérante a produit et signifié dans chaque affaire une contre-déclaration niant la totalité des motifs d'opposition.

 

[5].             La preuve de l'Opposante dans chaque affaire consistait en l’affidavit de Perry J. Lao. J'emploierai le singulier pour désigner les quatre affidavits de Me Lao, leur structure étant la même. La Requérante a présenté un seul ensemble d'affidavits – souscrits par Edmond Ricard, Chantal Dorais, Adamo Santoianni, Timothy Owen Stevenson, Eric Weaver, Iva Morina et Gay Owens – relativement aux quatre présentes oppositions, ainsi qu'à deux autres formées contre elle par l'Opposante. Je n'examinerai ici que les aspects de la preuve pertinents pour les présentes oppositions.

 

[6].             Dans chaque affaire, chacune des parties a produit un plaidoyer écrit, et il a été tenu une audience, où seule la Requérante était représentée.

 

Résumé de la preuve de l'Opposante

 

L'affidavit de Perry J. Lao

 

[7].             Perry J. Lao atteste qu'il est un avocat employé par le cabinet qui représente l'Opposante dans les présentes procédures d'opposition.

 

[8].             Me Lao déclare qu'il a acheté le 9 février 2004 des échantillons de divers paquets de cigarettes de la Requérante dans un dépanneur sis à Toronto. Il joint à son affidavit les pièces A à F, lesquelles sont des images obtenues par scanner des dessins et des textes apparaissant respectivement sur les faces antérieures des paquets de cigarettes de la Requérante « du MAURIER » et « du MAURIER Light, Extra Light, Ultra Light, Edition ou Special Mild ». Je reproduis ci‑dessous les éléments principaux des faces antérieures des paquets de cigarettes « du MAURIER Edition » et « du MAURIER Ultra Light » de la Requérante auxquels il est fait référence dans les présentes procédures d'opposition :

 

du MAURIER edition & DESIGN

DU MAURIER ULTRA LIGHT & DESIGN

 

[9].             Me Lao formule diverses observations concernant les signes qui figurent sur les paquets susdits. Il déclare en outre que, à partir des représentations des produits commercialement disponibles de la Requérante qui sont jointes à son affidavit à titre de pièces A à F, ainsi que d'un extrait imprimé de la base de données en ligne sur les marques de commerce de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada, joint au même affidavit sous la cote G, qui concerne une demande d'enregistrement de la marque « du MAURIER EDITION » produite par la Requérante et qui faisait aussi l'objet d'une opposition de l'Opposante à la date dudit affidavit, il est raisonnable de conclure que les Marques visées par les demandes apparaîtraient sur les paquets d'une façon semblable à celle dont elles apparaissent sur les produits commercialement disponibles de la Requérante représentés dans les pièces A à G, de telle sorte que le nom « du MAURIER » serait inscrit séparément des mots « PREFERENCE », « DISTINCTION », « DELUXE » ou « COLLECTION ». Je n'accorde aucun poids à cette dernière partie de l'affidavit de Me Lao, qui exprime de simples conjectures.

 

[10].         Me Lao joint aussi à son affidavit une copie conforme de chacun des enregistrements de marque de commerce, et de chacune des demandes ayant donné lieu à enregistrement, qu'invoque l'Opposante à l'appui des motifs d'opposition d) et f) résumés ci‑dessus, exception faite de la marque de commerce B & H PREMIUM, relativement à laquelle il n'a pas produit de copie conforme. Me Lao joint également à son affidavit des extraits de divers dictionnaires papier et en ligne disponibles au Canada qui définissent les mots « PREFERENCE », « DISTINCTION », « DELUXE » et « COLLECTION ». Enfin, Me Lao joint à son affidavit des copies conformes des rapports d'examinateur demandant un désistement du droit à l'usage exclusif du mot « COLLECTION » pour les marques qui comprennent ce mot et sont énumérées à l'annexe A de la présente décision.

 

Résumé de la preuve de la Requérante

 

L'affidavit d'Edmond Ricard

 

[11].         Edmond Ricard atteste qu'il est le chef du Service des marchés à terme et du développement à la Division de la commercialisation de la société Imperial Tobacco Canada Limited / Imperial Tobacco Canada Limitée (ITCan). Il déclare que, en tant que chef du service susdit, il est chargé entre autres de maintenir les marques de commerce que possèdent ITCan et ses filiales – notamment Imperial Tobacco Company Limited (ITCo), Imperial Brands Limited / Les Marques Imperial Ltée (Imperial Brands) et la Requérante –, ainsi que d'en surveiller l'emploi.

 

[12].         M. Ricard déclare que, en vertu d'un accord de licence liant la Requérante et Imperial Brands, celle‑ci est autorisée à employer toutes les marques de commerce de la Requérante en liaison avec la fabrication et la vente de produits du tabac. Cet accord autorise également Imperial Brands à sous-licencier ses droits, ce qu'elle a fait pour ITCan, à des conditions identiques à celles de la licence qu'elle tient de la Requérante.

 

[13].         M. Ricard déclare qu'ITCan fabrique, commercialise et vend les cigarettes du MAURIER EDITION au Canada depuis au moins le 6 mai 2002.

 

[14].         M. Ricard expose la manière dont les cigarettes du MAURIER EDITION sont vendues au Canada, et joint à son affidavit des échantillons représentatifs des paquets, des factures et des bulletins de commande relatifs à cette marque.

 

L'affidavit de Chantal Dorais

 

[15].         Chantal Dorais atteste qu'elle est cheffe du Service des relations avec les consommateurs chez ITCan. Mme Dorais déclare que son service s'occupe des communications avec les clients, notamment des questions, observations, compliments et plaintes concernant les produits fabriqués par ITCan, y compris les cigarettes du MAURIER EDITION.

 

[16].         Mme Dorais déclare que les clients communiquent le plus souvent avec ITCan par téléphone, en composant un numéro inscrit sur les paquets des produits de cette entreprise. Elle ajoute que les membres de son service, y compris elle-même, reçoivent ces communications téléphoniques et en inscrivent l'objet directement dans une base de données électroniques. À la fin de chaque entretien téléphonique, le service demande au client d'inscrire ses commentaires et des renseignements afférents sur une formule qu'on lui expédie par la poste et qu'il renvoie au service.

 

[17].         Mme Dorais déclare que, dans la plupart des cas, les clients désignent le produit dont il s'agit par son nom complet. Par exemple, les clients qui ont contacté son service à propos du produit du MAURIER EDITION d'ITCan l'ont désigné « du MAURIER EDITION » dans la majorité des cas. Mme Dorais ajoute qu'ITCan a reçu plus de 700 communications concernant les cigarettes du MAURIER EDITION et elle joint à son affidavit, sous la cote A, des échantillons représentatifs de communications reçues de consommateurs canadiens concernant ce produit d'ITCan.

 

L'affidavit d'Adamo Santoianni

 

[18].         Adamo Santoianni atteste qu'il est agent commercial chez ITCo. Il compte 23 ans d'expérience à ce poste, qu'il occupait aussi chez les prédécesseurs de cette société.

 

[19].         Il déclare que sa tâche consiste à collaborer avec les détaillants de la région montréalaise au marchandisage des produits fabriqués par ITCan, pour laquelle ITCo distribue des cigarettes. Il explique qu'il s'entretient régulièrement avec les détaillants, et qu'il leur rend visite dans leurs magasins pour leur remettre des documents d'information, pour assurer le maintien de leur stocks de présentoirs et ainsi de suite. Il ajoute que, dans l'exercice de ces fonctions, il a souvent l'occasion de s'entretenir avec les clients qui entrent dans les magasins en question ou d'entendre ce qu'ils disent. Il affirme que, au cours des 23 dernières années, il a parlé à des milliers de clients, ou les a entendus discuter ou acheter leurs cigarettes, et que dans l'immense majorité des cas (95 % selon son estimation), ils désignaient la marque de cigarettes en question par son nom complet. Il précise qu'il en va ainsi des cigarettes du MAURIER EDITION d'ITCan, que ces clients désignent « du MAURIER EDITION ».

 

[20].         M. Santoianni poursuit en faisant observer que cela n'est pas étonnant puisque, selon son expérience, il est courant qu'un fabricant de tabac offre plusieurs marques dont les noms comportent un premier élément commun. Il cite comme exemples de cette pratique, sans proposer d'autres éléments à l'appui, les marques PLAYER’S FILTER, PLAYER’S LIGHT SMOOTH, PLAYER’S SILVER et PLAYER’S SPECIAL BLEND, ainsi que les marques EXPORT A EXTRA LIGHT, EXPORT A LIGHT, EXPORT A MEDIUM, EXPORT A MEDIUM FLAVOUR et EXPORT A MILD.

 

[21].         Bien que l'Opposante n'ait pas contesté l'admissibilité en preuve des déclarations de M. Santoianni, j'examinerai cette question plus loin dans la présente décision.

 

Les affidavits d'Iva Morina, de Timothy Owen Stevenson et d'Eric Weaver

 

[22].         Iva Morina, Timothy Owen Stevenson et Eric Weaver attestent qu'ils sont respectivement technicienne juridique, stagiaire d'été et stagiaire en droit dans le cabinet d'avocats qui représente la Requérante dans les présentes procédures d'opposition.

 

[23].         Iva Morina et Timothy Owen Stevenson, chacun pour leur part, ont demandé verbalement un paquet de cigarettes du MAURIER EDITION dans un ou plusieurs magasins de proximité en novembre 2004. Chacun d'eux joint à son affidavit des photocopies du paquet que le vendeur leur a remis dans chaque cas, ainsi que le reçu correspondant.

 

[24].         Eric Weaver a visualisé et imprimé des extraits de la page Web www.whistlergrocery.com le 23 novembre 2004. À la même date, il a acheté un paquet de cigarettes du MAURIER EDITION sur ce site. Il joint à son affidavit les extraits en question, ainsi que la confirmation d'achat qu'il a imprimée à la suite de cette transaction.

 

L'affidavit de Gay Owens

 

[25].         Gay Owens atteste qu'elle est recherchiste en marques de commerce dans le cabinet d'avocats qui représente la Requérante dans les présentes procédures d'opposition. Elle joint à son affidavit les résultats de recherches assistées par ordinateur sur l'état du registre des marques de commerce qui visaient à trouver des demandes et des enregistrements actifs où figuraient les mots « DISTINCTION », « COLLECTION », « DELUXE » ou « PREFERENCE » employés en liaison avec des marchandises et/ou des services. J'examinerai les résultats de ces recherches plus loin dans la présente décision.

 

Le fardeau de preuve et les dates pertinentes

 

[26].         Il incombe à la Requérante d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que ses demandes sont conformes aux exigences de la Loi. Cependant, l'Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels s’appuie chacun de ses motifs d'opposition [voir : John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.); et Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

 

[27].         Les dates pertinentes pour l'examen des circonstances afférentes à chacun des motifs d'opposition invoqués dans les présentes espèces sont les suivantes :

 

         les motifs fondés sur l'article 30 de la Loi : la date de production des demandes d'enregistrement [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.)];

         les motifs fondés sur l'alinéa 12(1)b) de la Loi : la date de production des demandes d'enregistrement [voir General Housewares Corp. c. Fiesta Barbeques Limited (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F. 1re inst.)];

         les motifs fondés sur l'alinéa 12(1)d) de la Loi : la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         les motifs fondés sur les alinéas 16(3)a) et b) de la Loi : la date de production de la demande d'enregistrement;

         les motifs fondés sur l'absence de caractère distinctif des Marques : la date pertinente généralement admise est la date de production des déclarations d'opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re  inst.)].

 

[28].         J'analyserai maintenant les motifs d'opposition en fonction de la preuve au dossier, sans nécessairement suivre l'ordre où ils sont exposés dans les déclarations d'opposition.

 

Les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 30e)

 

[29].         Le premier motif d'opposition invoqué par l'Opposante dans chaque affaire indique que les demandes ne satisfont pas aux exigences de l'alinéa 30e) de la Loi, en ce que la Requérante n'a pas l'intention d'employer les Marques, comme marques de commerce au sens de l'article 2 de la Loi, en liaison avec la catégorie générale de marchandises décrite dans ces demandes. L'Opposante donne davantage de précisions à l’égard de ce motif d'opposition dans sa déclaration d'opposition visant la marque de commerce du MAURIER DISTINCTION. Elle y fait valoir expressément que la Requérante emploiera la marque alléguée du MAURIER DISTINCTION de telle manière que le public ne la percevra pas du premier coup d'œil comme une seule marque formant une unité. L'Opposante soutient que le nom « du MAURIER » et le mot « DISTINCTION » seront imprimés en caractères de polices ou de tailles différentes, et que le mot « DISTINCTION » sera compris comme un terme laudatif, si bien que le public ne verra pas dans cet élément une partie de l'ensemble de la marque, mais ne percevra comme marque de commerce que le nom « du MAURIER ».

 

[30].         Je ne suis pas certaine que le moyen d'opposition fondé sur l'alinéa 30e) soit suffisamment exposé pour ce qui concerne les marques de commerce du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE et du MAURIER COLLECTION, mais je crois comprendre à la lecture de l'affidavit de Me Lao et du plaidoyer écrit qu'elle a présentés dans chaque affaire que l'Opposante invoque à l'appui de ce motif les mêmes arguments qu'elle a avancés dans l'affaire du MAURIER DISTINCTION. À cet égard, se fondant sur les représentations de produits commercialement disponibles de la Requérante annexées à l'affidavit de Me Lao sous les cotes A à F, l'Opposante soutient que les Marques apparaîtraient sur les paquets de la même manière que la marque du MAURIER EDITION y apparaît maintenant, c'est‑à‑dire que le nom « du MAURIER » serait séparé des mots « COLLECTION », « DELUXE » ou « PREFERENCE ». Les marques de commerce du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE ou du MAURIER COLLECTION, ainsi utilisées, ne seraient donc pas employées comme des marques de commerce formant chacune une unité.

 

[31].         La Requérante fait valoir de son côté que cette preuve établit tout au plus de quelle manière elle a vendu en 2004 sa marque de cigarettes du MAURIER EDITION, non liée aux présentes espèces, et ne peut absolument pas être considérée comme établissant comment elle envisageait, environ trois ans plus tôt, de vendre ses marques du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE, du MAURIER DISTINCTION et du MAURIER COLLECTION. En conséquence, soutient la Requérante, il n'est pas possible de conclure de la preuve au dossier qu'elle n'avait pas en 2001 l'intention d'employer les Marques du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE, du MAURIER DISTINCTION et du MAURIER COLLECTION, en particulier si l'on tient compte des déclarations sans équivoque et contemporaines figurant dans ses demandes, selon lesquelles elle emploierait les Marques comme marques de commerce. Je suis d'accord en cela avec la Requérante.

 

[32].         Dans l'hypothèse où les allégations de l'Opposante seraient étayées de preuves, je souscrirais en outre à l'affirmation de la Requérante selon laquelle un tel usage constituerait bel et bien un emploi des Marques comme marques de commerce.

 

[33].         En effet, si la Requérante devait employer les Marques sous la même forme qu'elle utilise sa marque du MAURIER EDITION, je pense qu'on pourrait dire qu'elle les emploie comme marques de commerce, puisque le fait que les éléments « du MAURIER » et « EDITION » [« COLLECTION », « DELUXE », « DISTINCTION » ou « PREFERENCE »] apparaissent [apparaîtraient] en caractères de polices, de tailles et de couleurs différentes sur la face antérieure, ainsi que sur les sections latérale et supérieure, des paquets de cigarettes n'empêche pas en soi la mise en œuvre de ces éléments d'être considérée comme un emploi de la marque nominale du MAURIER EDITION [du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE, du MAURIER DISTINCTION ou du MAURIER COLLECTION] en tant qu'unité. Les éléments « du MAURIER » et « EDITION » [« COLLECTION », « DELUXE », « DISTINCTION » ou « PREFERENCE »] apparaissent [apparaîtraient] toujours en étroite proximité l'un de l'autre, et isolément soit d'autres signes (sur la section latérale), soit d'autres mots (sur la section supérieure). Ces éléments sont en outre les seuls mots de taille importante imprimés sur la face antérieure.

 

[34].         L'hypothèse susdite selon laquelle les marques du MAURIER PREFERENCE, du MAURIER DELUXE, du MAURIER DISTINCTION et du MAURIER COLLECTION seraient employées comme marques de commerce sur les paquets de cigarettes se trouve en outre étayée par l'usage fait de la marque du MAURIER EDITION sur les factures et les bulletins de commande annexés à l'affidavit de M. Ricard. La mention « du MAURIER EDITION » apparaît dans le corps des factures, qui accompagnent les marchandises ou sont expédiées à leurs acheteurs. La même mention figure aussi sur les formules qu'utilisent détaillants et grossistes pour commander des cigarettes à ITCo. On la trouve enfin sur les reçus de vente au détail, ainsi que l'attestent les affidavits de Mme Morina et de M. Stevenson. 

 

[35].         En outre, les échantillons de communications annexés à l'affidavit de Mme Dorais attestent que les clients désignent par leur nom complet les cigarettes du MAURIER EDITION.

 

[36].         Je n'ai pas à me prononcer sur l'admissibilité des déclarations de M. Santoianni, étant donné que j'estime la preuve résumée ci‑dessus suffisante pour conclure que, vu les faits, si la Requérante utilisait les Marques visées par les demandes sous la même forme que sa marque du MAURIER EDITION, cet usage pourrait être considéré comme un emploi des marques de commerce projetées.

 

[37].         Vu l'analyse qui précède, je conclus que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau initial dont elle devait s'acquitter pour mettre en litige les allégations suivant lesquelles la Requérante n'aurait pas l'intention d'employer les Marques, comme marques de commerce, en liaison avec les Marchandises. Les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 30e) sont en conséquence rejetés.

 

Les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 12(1)b)

 

[38].         L'Opposante soutient que les Marques ne sont pas enregistrables au sens de l'alinéa 12(1)b) de la Loi, puisque, qu'elles soient sous forme graphique, écrite ou sonore, elles donnent une description claire ou une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises à l'égard desquelles on projette de les employer. L'Opposante précise davantage ce motif d'opposition relativement aux Marques du MAURIER COLLECTION, du MAURIER DELUXE et du MAURIER PREFERENCE de la manière suivante :

 

Concernant du MAURIER COLLECTION :

            [TRADUCTION] COLLECTION donne une description claire ou une description fausse et trompeuse selon lesquelles les Marchandises de la Requérante feraient partie d'une collection particulière ou déterminable. En outre, le mot COLLECTION, employé dans le contexte des Marchandises, présente un caractère laudatif, dans la mesure où il évoque une collection ou une sélection supérieures de produits. L'ensemble du MAURIER COLLECTION donne ainsi une description claire ou une description fausse et trompeuse des Marchandises de la Requérante, en ce qu'il désigne une collection supérieure de produits du tabac manufacturés qu'elle aurait à offrir.

 

Concernant du MAURIER DELUXE :

            [TRADUCTION] Le mot DELUXE est laudatif, ayant la signification de luxueux ou de supérieur. L'ensemble du MAURIER DELUXE donne ainsi une description claire ou une description fausse et trompeuse des Marchandises de la Requérante, en ce qu'il signifie qu'elles sont plus luxueuses, ou d'une nature ou d'une qualité supérieures, par rapport à d'autres produits du tabac manufacturés de la Requérante ou à ceux d'autres entreprises.

 

Concernant du MAURIER PREFERENCE:

            [TRADUCTION] Le mot PREFERENCE est laudatif, dans la mesure où il signifie que la chose qu'il qualifie est placée au‑dessus des autres, ou qu'on l'aime plus que d'autres ou plus que toutes les autres. L'ensemble du MAURIER PREFERENCE donne ainsi une description claire ou une description fausse et trompeuse des Marchandises de la Requérante, en ce qu'il signifie que leur nature ou leur qualité sont préférées ou meilleures par rapport à d'autres produits du tabac manufacturés de la Requérante ou à ceux d'autres entreprises.

 

[39].         Le critère applicable sous le régime de l'alinéa 12(1)b) de la Loi consiste à se demander si la marque de commerce considérée dans son ensemble donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des marchandises ou des services en liaison avec lesquels elle est employée, ou à l'égard desquels on projette de l'employer. Il ne convient pas de diviser la marque de commerce en ses éléments et de l'analyser avec soin, mais plutôt de la considérer dans son ensemble pour voir quelle est l'impression immédiate qu'elle produit [voir à ce sujet : Wool Bureau of Canada Ltd. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1978), 40 C.P.R. (2d) 25 (C.F. 1re inst.), aux pages 27 et 28; et Atlantic Promotions Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1984), 2 C.P.R. (3d) 183 (C.F. 1re inst.), à la page 186]. En corollaire, si seulement une partie de la marque de commerce projetée se révèle inacceptable, cette marque considérée dans son ensemble peut néanmoins être enregistrable, à condition que la partie inacceptable ne domine pas l'ensemble de la marque de commerce visée par la demande à tel point qu'on ne puisse en envisager l'enregistrement [voir Conseil canadien des ingénieurs c. John Brooks Co. Ltd. (2004), 35 C.P.R. (4th) 507]. Le terme « nature » s'entend d'une caractéristique, d'un trait ou d'une particularité du produit, et l'adjectif « claire » veut dire évidente, qui va de soi, facile à comprendre [voir Drakett Co. of Canada c. American Home Products Corp. (1968), 55 C.P.R. 29 (C. Éch.), à la page 34].

 

[40].         Pour les raisons exposées ci‑dessous, l'application de ces principes aux présentes espèces me convainc que, comme le soutient la Requérante, les motifs fondés sur l'alinéa 12(1)b) doivent être rejetés.

 

[41].         L'Opposante a reconnu dans son plaidoyer écrit relatif à chaque opposition que les Marques sont composées de deux éléments, à savoir [TRADUCTION] « la marque maison bien connue du Maurier », d'une part, et d'autre part, les mots ordinaires du dictionnaire « PREFERENCE », « DISTINCTION », « DELUXE » ou « COLLECTION », dont le caractère distinctif inhérent est faible. L'Opposante n'a pas soutenu que le nom « du MAURIER » serait de quelque façon une description claire ou fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des Marchandises. En conséquence, aucune des Marques, considérée dans son ensemble, ne peut être une description claire ou fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité desdites Marchandises. L'élément « du MAURIER » domine chacune des Marques et la rend intégralement non descriptive.

 

[42].         La variété et le nombre des marques de commerce comprenant les mots « PREFERENCE », « DISTINCTION », « DELUXE » ou « COLLECTION », dont l'affidavit de Mme Owens atteste l'existence actuelle au registre, viennent également étayer la conclusion que ces mots, en eux-mêmes, ne font pas nécessairement des Marques, considérées chacune dans leur ensemble, des descriptions claires ou des descriptions fausses et trompeuses. Le registre révèle en effet ce qui suit :

 

Concernant du MAURIER PREFERENCE : À la date de la recherche, il y avait plus de 30 enregistrements actifs ou demandes d'enregistrement accueillies visant des marques de commerce qui contenaient le mot PREFERENCE, dont une marque relative à des produits du tabac d'un tiers.

 

Concernant du MAURIER DISTINCTION : À la date de la recherche, il y avait plus de 40 enregistrements actifs ou demandes annoncées visant des marques de commerce qui contenaient le mot DISTINCTION, dont deux marques relatives à des produits du tabac de tiers.

 

Concernant du MAURIER DELUXE : À la date de la recherche, il y avait plus de 50 enregistrements actifs ou demandes annoncées visant des marques de commerce qui contenaient le mot DELUXE, dont cinq sont les enregistrements qu'invoque l'Opposante à l'appui de son motif d'opposition fondé sur l'alinéa 12(1)d), et deux sont les demandes qu'elle cite à l'appui de son motif d'opposition fondé sur l'article 16.

 

Concernant du MAURIER COLLECTION : À la date de la recherche, il y avait plus de 30 enregistrements actifs ou demandes annoncées visant des marques de commerce qui contenaient le mot COLLECTION, quatre de ces enregistrements étant ceux que l'Opposante invoque à l'appui de son motif d'opposition fondé sur l'alinéa 12(1)d).

 

[43].         Je pense comme la Requérante que le fait qu'un bon nombre de ces enregistrements et demandes contiennent une déclaration de désistement du droit à l'usage exclusif des mots « PREFERENCE », « DISTINCTION », « DELUXE » ou « COLLECTION » en dehors de la marque de commerce visée ne signifie aucunement qu'il conviendrait de repousser les présentes demandes au motif que ces mots, considérés chacun isolément, donnent une description claire des Marchandises et auraient donc dû faire l'objet d'un désistement. Bien que l'Opposante ne l'ait pas invoquée dans les présentes espèces, je rappelle que l'absence de désistement ne peut constituer un motif valable d'opposition [voir Canadian Schenley Distilleries Ltd. c. Registraire des marques de commerce et Bodegas Rioja Santiago, S.A. (1974), 15 C.P.R. (2d) 1, à la page 10 (C.F. 1re inst.)].

 

[44].         Vu l'analyse qui précède, je conclus que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau initial dont elle devait s'acquitter pour mettre en litige les allégations suivant lesquelles les Marques donneraient une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des Marchandises. Les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 12(1)b) sont en conséquence rejetés.

 

[45].         Dans chacune des présentes affaires, l'Opposante a formulé dans son plaidoyer écrit le moyen subsidiaire suivant :

 

[TRADUCTION] Pour le cas où l'agent d'audience conclurait que la marque en cause ne donne pas une description claire des marchandises visées au motif que l'élément du MAURIER est distinctif, nous soutenons subsidiairement que le mot COLLECTION [DELUXE/DISTINCTION/PREFERENCE] lui-même donne une telle description et qu'aucune entreprise ne devrait avoir le droit exclusif de l'employer.

 

[46].         Étant donné les observations que j'ai formulées ci‑dessus et le fait que la Requérante ne demande pas l'enregistrement des mots « PREFERENCE », « DISTINCTION », « DELUXE » et « COLLECTION » considérés chacun isolément, mais plutôt en tant qu'éléments d'ensembles (comme d'autres entités, y compris l'Opposante elle-même, qui ont obtenu l'enregistrement de marques de commerce comprenant l'élément DELUXE ou d'autres termes laudatifs, combinés à des éléments distinctifs), j'estime qu’il n’est pas nécessaire d'ajouter d’autre remarques concernant ces dernières affirmations de l'Opposante.

 

Les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 12(1)d)

 

[47].         Comme je le disais plus haut, l'Opposante a produit dans chaque affaire des copies conformes des enregistrements de marque de commerce qu'elle invoquait à l'appui de ce motif d'opposition, exception faite de la marque de commerce B & H PREMIUM. J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire d'examiner le registre des marques de commerce et de vérifier l'état actuel de ces enregistrements. Comme ils sont en règle, l'Opposante s'est acquittée du fardeau initial qui lui incombait relativement à chacun de ces motifs d'opposition.

 

[48].         Étant donné ces éléments versés en preuve par l'Opposante, la Requérante doit établir suivant la prépondérance des probabilités qu'il n'y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre les Marques et les enregistrements susdits.

 

[49].         Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi dispose que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

[50].         Dans l'application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, notamment des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi, soit : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Cette liste n'est pas exhaustive, et l'on attribuera respectivement des poids différents aux facteurs suivant le contexte. Le lecteur trouvera un examen approfondi des principes généraux de l'application du test relatif à la confusion dans les deux arrêts suivants : Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.); et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 C.P.R. (4th) 401, [2006] 1 R.C.S. 824 (C.S.C.).

 

[51].         Il n'est pas nécessaire d'effectuer une analyse détaillée à partir des facteurs du paragraphe 6(5) dans les présentes espèces. Qu'il me suffise de dire que, bien que les marchandises et les voies de commercialisation puissent coïncider en partie, chacune des marques de tiers est suffisamment différente des Marques du MAURIER COLLECTION, du MAURIER DELUXE ou du MAURIER PREFERENCE pour rendre la confusion improbable.

 

[52].         En effet, comme je le disais plus haut, les Marques sont chacune composées de deux éléments, soit, d'une part, [TRADUCTION] « la marque maison bien connue du MAURIER », qui apparaît en première place, et d'autre part, les mots ordinaires du dictionnaire « PREFERENCE », « DELUXE » ou « COLLECTION ». La seule ressemblance entre les Marques et les enregistrements invoqués, qui contiennent d'autres éléments distinctifs et à propos desquels il n'a pas été produit d'éléments de preuve tendant à établir l'emploi ou la révélation au Canada, est le fait qu'ils ont en commun l'un de ces mots ordinaires du dictionnaire. Étant donné les différences très importantes qui séparent les Marques de chacune des marques invoquées sous les rapports de la présentation, du son et des idées qu'elles suggèrent, et le fait que la Requérante aussi bien que l'Opposante ont reconnu dans leurs plaidoyers écrits le faible caractère distinctif inhérent des mots « PREFERENCE », « DELUXE » et « COLLECTION », j'estime qu’il n’est pas nécessaire d'exposer ici en détail l'analyse effectuée relativement à chacune de ces marques. Ainsi qu’il a  été observé à la page 149 de Beverley Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstering Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.) :

 

Il est évident que tous ces facteurs n'ont pas nécessairement la même importance et que dans certains cas quelques-uns d'entre eux peuvent être absents. À toutes fins pratiques, le facteur le plus important dans la plupart des cas, et celui qui est décisif, est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent, les autres facteurs jouant un rôle secondaire.

 

[53].         Vu mes conclusions qui précèdent, je constate que la Requérante s'est acquittée du fardeau qui lui incombait d'établir suivant la prépondérance des probabilités qu'il n'y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques en question pour ce qui concerne la source des marchandises. Les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 12(1)d) sont en conséquence rejetés.

 

[54].         Dans ses plaidoyers écrits concernant les Marques du MAURIER COLLECTION et du MAURIER DELUXE, l'Opposante a formulé le moyen subsidiaire suivant :

 

[TRADUCTION] C.3 j) Pour le cas où l'agent d'audience conclurait que la marque en cause dans la présente espèce ne crée pas de confusion avec les marques de commerce déposées que nous citons, au motif que les autres éléments respectifs de l'une et des autres suffisent à distinguer chacune, nous soutenons subsidiairement que le mot COLLECTION [DELUXE] contenu dans ladite marque en cause constitue un élément non distinctif et faible, et un mot commun de la langue anglaise qui devrait être à la disposition de tous les commerçants du secteur.      

 

[55].         Étant donné les observations que j'ai formulées ci‑dessus touchant les motifs d'opposition fondés sur l'alinéa 12(1)b), j'estime qu’il n’est pas nécessaire d'ajouter d’autres commentaires à l’égard de ces dernières affirmations de l'Opposante.

 

Les motifs d'opposition fondés sur l'absence de caractère distinctif

 

[56].         L'Opposante soutient que les Marques ne sont pas distinctives en ce qu'elles ne distinguent pas les Marchandises de la Requérante de celles d'autres propriétaires ni ne sont adaptées à les en distinguer. L'Opposante a donné davantage de précisions à l’égard de ce motif d'opposition dans ses déclarations d'opposition aux marques de commerce du MAURIER COLLECTION et du MAURIER DISTINCTION de la manière suivante :

Concernant  du MAURIER COLLECTION :

            [TRADUCTION] La marque du MAURIER COLLECTION n'est pas distinctive [...] étant donné qu'elle donne une description claire des marchandises visées et qu'elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées que cite le présent mémoire [c'est‑à‑dire les marques de commerce déposées qui sont énumérées à l'annexe A de la présente décision].

Concernant du MAURIER DISTINCTION :

            [TRADUCTION] La marque alléguée du MAURIER DISTINCTION n'est pas distinctive. Le terme « distinctive », relativement à une marque de commerce, qualifie celle qui distingue véritablement les marchandises en liaison avec lesquelles elle est employée par son propriétaire, des marchandises d'autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi. Or la marque alléguée du MAURIER DISTINCTION n'est pas distinctive, parce qu'elle n'est pas, ni ne sera perçue comme étant, une marque de commerce, pour les raisons exposées à l'alinéa 3a) ci‑dessus [c'est‑à‑dire sous le motif d'opposition a)].

 

[57].         Le motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif doit être rejeté à l'égard de chacune des demandes, au moins pour les mêmes raisons que les motifs d'opposition fondés respectivement sur les alinéas 30e), 12(1)b) et 12(1)d) l'ont été.

 

Le motif d'opposition fondé sur l'alinéa 30i)

 

[58].         L'Opposante fait valoir que, étant donné l'existence au Canada de l'enregistrement no LMC293722 visant la marque de commerce B & H PREMIUM, dont elle soutient que la Requérante avait connaissance, cette dernière ne pouvait être convaincue qu'elle avait le droit de faire enregistrer sa marque de commerce du MAURIER PREFERENCE.

 

[59].         Ce motif est rejeté, parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau initial qui lui incombait à cet égard. Plus précisément, elle n'a présenté aucun élément tendant à établir que la Requérante avait connaissance des enregistrements en question, aucun élément expliquant pour quelles raisons elle aurait dû en avoir connaissance, ni aucun non plus tendant à prouver que la Requérante n’était pas en fait convaincue d'avoir le droit d'employer sa Marque au Canada. Un motif d'opposition fondé sur l'alinéa 30i) ne doit être accueilli que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque la preuve établit que le requérant est de mauvaise foi, ce qui n'est pas le cas en l’espèce.

 

Les motifs d'opposition fondés sur l'article 16

 

[60].         L'Opposante soutient que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce du MAURIER DELUXE, au motif que, à la date de production de sa demande d'enregistrement de cette marque, celle‑ci créait de la confusion avec les marques de commerce BENSON & HEDGES 100’S DELUXE ULTRA LIGHTS MENTHOL & DESSIN et BENSON & HEDGES 100’S DELUXE ULTRA LIGHTS & DESSIN, antérieurement employées par l'Opposante en liaison avec des marchandises semblables ou identiques au Canada et pour lesquelles des demandes d'enregistrement y avaient été antérieurement produites, sous les numéros de série 1125912 et 1125913 respectivement.

 

[61].         Comme la Requérante l'a souligné, l'Opposante n'a produit les demandes d'enregistrement en question que le 20 décembre 2001, soit après que la Requérante eut produit sa demande d'enregistrement de la marque de commerce du MAURIER DELUXE. En conséquence, l'Opposante ne peut invoquer les demandes susdites sous le régime de l'alinéa 16(3)b) de la Loi. En outre, si l'Opposante voulait invoquer l'alinéa 16(3)a) de la Loi, elle ne s'est pas acquittée du fardeau initial à cet égard, puisqu'elle n'a pas présenté d'éléments établissant qu'elle avait employé ses marques de commerce alléguées BENSON & HEDGES 100’S DELUXE ULTRA LIGHTS MENTHOL & DESSIN et BENSON & HEDGES 100’S DELUXE ULTRA LIGHTS & DESSIN avant la date de production de la demande de la Requérante, ni qu'elle ne les avait pas abandonnées à la date de l'annonce de ladite demande. Les motifs d'opposition fondés sur l'article 16 sont en conséquence rejetés.

 

Décision

[62].         Dans l’exercice des pouvoirs que m’a délégués le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette les oppositions à l'enregistrement des Marques conformément au paragraphe 38(8).

FAIT À MONTRÉAL (QUÉBEC), LE 16 JUILLET 2009.

 

 

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme,

Linda Brisebois, LL.B


 

ANNEXE A

 

Nod'enr.

Marque de commerce

Marchandises

Propriétaire

actuel

Concernant du MAURIER PREFERENCE

LMC293722

B & H PREMIUM

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif du mot PREMIUM en dehors de la marque de commerce)

 

Cigarettes

Opposante

Concernant du MAURIER DELUXE

LMC392027

BENSON & HEDGES 100’S & DESSIN

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des éléments DE LUXE ULTRA LIGHTS et « 100 % »  en dehors de la marque de commerce)

 

Cigarettes

Opposante

LMC489833

BENSON & HEDGES 100’S DE LUXE ULTRA LIGHT & DESSIN

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des éléments DE LUXE ULTRA LIGHTS et « 100 % »  en dehors de la marque de commerce)

 

Produits du tabac manufacturés

Opposante

LMC258121

BENSON & HEDGES DELUXE FILTER

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des mots DELUXE FILTER en dehors de la marque de commerce)

 

Cigarettes

Opposante

LMC155356

BLACK & WHITE & DESSIN

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des mots MARCOVITCH et DE LUXE en dehors de la marque de commerce)

 

Cigarettes

Philip Morris Products S.A.

LMC535917

STATOS DE LUXE

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des mots DE LUXE en dehors de la marque de commerce)

 

Cigares, cigarillos, cigarettes et tabac haché

Corporacion Habanos, S.A.

Concernant du MAURIER COLLECTION

LMC524696

CANADIAN COUNTRY COLLECTION & DESIGN

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des mots CANADIAN et COLLECTION en dehors de la marque de commerce)

« [S]ouvenirs, nommément [...] vases et cendriers [...] Exploitation d'un commerce spécialisé dans la distribution d'articles au détail et aux magasins de souvenirs. »

Canadian Duty Free Group Inc.

LMC391118

CHARTER COLLECTION

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif du mot COLLECTION en dehors de la marque de commerce)

« Appareils domestiques électriques et non électriques, nommément [...] tabac et accessoires de tabagie, nommément cigarettes, cigares, tabac, pipes, supports à pipes, tabatières, alésoirs, humidors, fume-cigarettes et fume-cigares, étuis à cigarettes et à cigares, briquets, étuis à briquets, livrets d'allumettes [...] »

COMPAGNIE DE LA BAIE D'HUDSON

LMC308810

COLLECTION VENICE SIMPLON-ORIENT-EXPRESS

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif des mots VENICE et COLLECTION en dehors de la marque de commerce)

 

« Préparations de blanchiment; savons, parfums, huiles essentielles, lotions capillaires [...] Tabac, brut ou manufacturé, cigares; allumettes. »

Société nationale des chemins de fer français

LMC551902

ISLAND COLLECTION

 

(Désistement du droit à l'usage exclusif du mot COLLECTION en dehors de la marque de commerce)

 

Cigares

DSI, LIMITED

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.