Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 22

Date de la décision : 2015-01-30

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45, engagée à la demande de Martomagic, S.L.U., visant l'enregistrement no LMC557,725 de la marque de commerce BUNGIE au nom de Bungie, Inc.

[1]               Le 13 novembre 2012, à la demande de Martomagic S.L.U. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Bungie Inc. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l'enregistrement no LMC557,725 de la marque de commerce BUNGIE (la Marque).

[2]               L'avis enjoignait à la Propriétaire de fournir une preuve établissant que la Marque a été employée au Canada en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l'enregistrement à un moment quelconque entre le 13 novembre 2009 et le 13 novembre 2012. À défaut d'avoir ainsi employé la Marque, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[3]               La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les services [traduction] « services de jeu en ligne sur ordinateur » et les produits suivants [traduction] :

 

(1) Figurines en métaux non précieux.

(2) Logiciels de jeu.

(3) Publications imprimées, nommément livres de bandes dessinées, séries de livres de fiction et guides de stratégie, affiches, cartes de jeu préimprimées et fiches d’instructions.

(4) Articles vestimentaires, nommément chemises, chapeaux.

[4]               Les définitions pertinentes d'emploi en liaison avec des produits et des services sont énoncées aux articles 4(1) et 4(2) de la Loi, lesquels sont libellés comme suit :

(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

[5]               Il est bien établi que de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst.)], il n'en faut pas moins produire des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement au cours de la période pertinente.

[6]               En ce qui concerne les services, la présentation de la marque dans l'annonce des services est suffisante pour satisfaire aux exigences de l'article 4(2), du moment que le propriétaire de la marque de commerce offre et est prêt à exécuter les services au Canada [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)].

[7]               En réponse à l'avis de registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit de Ondraus Jenkins, chef de la division Stratégie et développement d'entreprise chez la Propriétaire, souscrit le 12 juin 2013 à Los Angeles, en Californie. Aucune des parties n'a produit de représentations écrites; aucune audience n'a été tenue.

La preuve de la Propriétaire

[8]               Dans son affidavit, M. Jenkins atteste que la Propriétaire est une entreprise de développement de jeux vidéo connue pour avoir conçu divers jeux vidéo populaires, tels que Myth et Halo. Il explique que la Propriétaire commercialise divers produits et services sous la Marque, y compris [traduction] « des figurines, des logiciels de jeu, diverses publications imprimées, des articles vestimentaires et des services de jeux en ligne sur ordinateur ».

[9]               Il atteste que les services de jeu en ligne sur ordinateur qui sont fournis par la Propriétaire consistent [traduction] « à rendre les jeux d'ordinateurs accessibles en ligne, et à tenir à jour et à rendre accessible une grande quantité de statistiques de jeu pour les joueurs ».

[10]           M. Jenkins explique que, pendant la période pertinente, la pratique normale du commerce pour la Requérante consistait à vendre ses produits de marque BUNGIE à divers distributeurs qui, à leur tour, les vendaient par l'intermédiaire de leurs chaînes de distribution à divers points de vente au détail partout dans le monde, y compris au Canada où ils étaient offerts en vente à la population canadienne. À titre d'exemple, il explique que Microsoft Inc. distribuait les jeux d'ordinateur de marque BUNGIE dans divers points de vente au détail au Canada. Il atteste que ces points de vente au détail comprenaient d'importants détaillants de produits électroniques grand public tels que Future Shop, Best Buy et Wal-Mart. Il affirme également que les produits de marque BUNGIE [traduction] « ont été vendus, et continuent d'être vendus, à des Canadiens par l'intermédiaire de divers points de vente en ligne, dont ebay.ca, amazon.ca et amazon.com », ainsi que par l'intermédiaire de la propre boutique en ligne de la Propriétaire, au www.bungiestore.com.

[11]           Pour étayer ses dires, M. Jenkins a joint les pièces suivantes à son affidavit :

         La pièce A est formée de trois photographies de divers jeux vidéo Halo. M. Jenkins explique que ces photographies sont représentatives de l'emballage des jeux vidéo qui étaient offerts et en vente et vendus au Canada pendant la période pertinente. La Marque figure dans le coin inférieur droit de l'emballage.

         La pièce B comprend une photographie d'un chapeau et de deux chemises qui, atteste M. Jenkins, sont représentatifs des articles vestimentaires qui étaient vendus au Canada pendant la période pertinente. La Marque figure bien en vue sur le chapeau et les chemises.

         La Pièce C est constituée de quatre photographies de documents imprimés qui, atteste M. Jenkins, sont représentatifs des documents imprimés de marque BUNGIE qui [traduction] « étaient offerts en vente et vendus au Canada » pendant la période pertinente. La première image est celle de [traduction] « un guide de stratégie pour le jeu vidéo HALO 3 »; on peut voir que la Marque figure dans le coin inférieur droit de la page couverture. La deuxième image est celle de [traduction] « l'affiche de BungieTown »; on peut voir que la Marque figure dans le coin inférieur droit de l'affiche à même l'insigne soulignant le 20e anniversaire. Bien que M. Jenkins ne les ait pas décrites expressément, la troisième photo semble montrer un guide de stratégie pour un jeu Halo différent et la quatrième un livre intitulé « The Halo Graphic Novel ». La Marque figure sur les pages couvertures des deux documents.

         La Pièce D est constituée de six photographies montrant diverses figurines qui, atteste M. Jenkins, [traduction] « étaient offertes en vente et vendues au Canada » pendant la période pertinente. La Marque figure sur le devant et au dos de l'emballage des figurines. Je souligne que les dates de copyright qu'il est possible de discerner au dos de certains emballages sont de 2007 ou antérieures à 2007.

         Les pièces E et K sont composées de plusieurs imprimés de pages Web tirés du site Web de jeu de la Propriétaire, bungie.net, lequel, atteste M. Jenkins, [traduction] « est accessible partout dans le monde et est utilisé par des internautes du Canada et du monde entier, y compris pendant la période pertinente ». Il atteste que les pages présentent [traduction] « de la publicité pour des jeux ainsi que des statistiques de jeu » et que les imprimés de la pièce K montrent l'apparence qu'avait le site Web de la Propriétaire en octobre et en novembre 2010. La Marque figure au haut des pages Web.

Les imprimés de la pièce E semblent être postérieurs à la période pertinente puisque la date de copyright indiquée est 2013. Je souligne qu'au haut des deux pages Web qui présentent des statistiques de jeu, on retrouve la mention [traduction] « Les données affichées sur la présente page ne sont plus mises à jour. La dernière mise à jour date du 03/31/2012 ».

         La pièce F est constituée de huit imprimés tirés du site Web de la boutique en ligne de la Propriétaire qui datent de juin et juillet 2010 et qui, atteste M. Jenkins, montrent des exemples de la marchandise qui était disponible à l'achat pendant la période pertinente. Je souligne toutefois que ces imprimés ne comportent aucune indication donnant à penser que le site Web s'adressait aux consommateurs canadiens, tels que des prix en dollars canadiens ou de l'information sur l'expédition de marchandises au Canada.

         La pièce G est un document qui, atteste M. Jenkins, est [traduction] « représentatif des rapports sur les redevances documentant les ventes du jeu vidéo Halo : Reach au Canada pendant les premier et deuxième trimestres de l'année financière 2011 ». Les rapports semblent indiquer que des milliers de licences du jeu Halo ont été achetées au Canada au cours des deux premiers trimestres de 2011.

         La pièce H est formée de deux pages qui, atteste M. Jenkins sont [traduction] « représentatives des rapports sur les redevances de 2010 documentant les ventes d'abonnements à des jeux et le service Games on Demand de Bungie au Canada ». Il explique que le service Games on Demand est un service accessible au moyen des consoles de jeu Xbox360 de Microsoft, qui permet aux clients de rechercher des jeux dans une boutique en ligne, puis de télécharger et d'installer les jeux achetés directement sur leurs consoles. Cependant, M. Jenkins n'a pas joint de captures d'écran ou d'autres éléments de preuve se rapportant au service Games on Demand, de sorte qu'on ne sait pas exactement si la Marque était affichée lorsque les clients naviguaient dans la boutique en ligne ou effectuaient des achats à l'aide de ce service.

         La pièce I est constituée de neuf pages de tableaux qui, atteste M. Jenkins, sont [traduction] « des tableaux de commande provenant de Amazon.com datant de juillet 2011 et de décembre 2012, qui font état d'achats de vêtements et de documents imprimés effectués par des clients canadiens ». Il explique que les articles répertoriés dans les tableaux de commande comme le [traduction] « T-shirt Burn Bright Bum Blue » et l'affiche [traduction] « Bungie Town » sont représentés à la pièce J.

         La pièce J est formée de trois photographies de t-shirts, et d'une photographie de l'affiche qui est également reproduite à la pièce C. La Marque figure au dos du t-shirt, ainsi que dans le coin inférieur droit de l'affiche.

Emploi de la Marque en liaison avec les Produits

[12]           Malheureusement, bien que M. Jenkins allègue l'emploi de la Marque en liaison avec la plupart des produits spécifiés dans l'enregistrement, j'estime que la Propriétaire n'a pas adéquatement démontré que des transferts de ces produits ont eu lieu au Canada dans la pratique normale du commerce.

[13]           À cet égard, bien que M. Jenkins affirme que la plupart des produits étaient [traduction] « accessibles » aux Canadiens et vendus au Canada, il ne fournit d'éléments de preuve corroborant cette affirmation qu'à l'égard des logiciels de jeu (rapports sur les redevances fournis comme pièce G) et des chemises et affiches (rapports de ventes de amazon.com fournis comme pièce I).

[14]           Bien qu'il donne un exemple d'une chaîne de distribution au Canada pour les logiciels de jeu de la Propriétaire, il n'apparaît pas clairement que la même chaîne de distribution est également utilisée pour les autres produits de la Propriétaire. En outre, bien que certains des produits, tels que les figurines et les bandes dessinées, soient affichés sur le site Web de la Propriétaire, M. Jenkins n'a fourni aucune preuve de ventes réelles au Canada. De même, si l’un ou plusieurs des autres produits ont été vendus à des Canadiens par l'intermédiaire du site amazon.com ou d'un autre site Web de vente au détail, M. Jenkins n'a fourni aucune preuve que ces ventes.

[15]           Bien qu'il ne soit pas obligatoire de produire des factures pour répondre de façon satisfaisante à un avis en vertu de l'article 45 [Lewis Thomson & Son Ltd c Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst.); Gowling Lafleur Henderson LLP c Neutrogena Corporation (2009), 74 CPR (4th) 153 (COMC)], l'emploi n'en doit pas moins être établi en liaison avec tous les produits spécifiés dans l'enregistrement [John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co et al (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)]. Par conséquent, une certaine preuve que des transferts ont eu lieu dans la pratique normale du commerce au Canada est requise. Une telle preuve peut prendre la forme de factures ou de rapports de ventes, mais peut également être présentée sous la forme de déclarations claires faites sous serment. Toutefois, comme c'est le cas en l'espèce, il n'est pas suffisant de simplement affirmer que les produits étaient annoncés ou disponibles à l'achat au Canada [voir Michaels & Associates c WL Smith & Associates Ltd (2006), 51 CPR (4th) 303 (COMC); Riches, McKenzie & Herbert LLP c Cleaners Supply Inc, (2012) COMC 211].

[16]           Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque au sens des articles 4 et 45 de la Loi uniquement en liaison avec les produits « logiciels de jeu », « affiches » et « chemises ». Étant donné que je ne dispose d'aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi de la Marque, les autres produits seront supprimés de l'enregistrement.

Emploi de la Marque en liaison avec les Services

[17]           En ce qui concerne les services de jeu en ligne sur ordinateur, je soulignerai, en premier lieu, qu'il n'est pas certain que les rapports sur les redevances concernant les abonnements aux jeux produits comme pièce H constituent une preuve de l'exécution des services en liaison avec la Marque. Comme je l'ai souligné précédemment, la Propriétaire n'a fourni aucune capture d'écran ou aucun autre élément de preuve se rapportant au service Games on Demand offert sur la console Xbox360 pour démontrer que les consommateurs voient la Marque lorsqu'ils effectuent des achats au moyen de ce service.

[18]           Quant au « site Web de jeu » de la Propriétaire auquel se rapporte la pièce K, même si je considérais que le fait de rendre accessibles des « statistiques de jeu » correspond aux services qui sont spécifiés dans l'enregistrement, il n'en demeurerait pas moins que rien dans les imprimés fournis n'indique que les statistiques étaient accessibles aux Canadiens pendant la période pertinente ou autrement. Bien qu'il affirme que le site Web était [traduction] « accessible » aux Canadiens, M. Jenkins ne fournit aucune preuve que des utilisateurs canadiens ont accédé au site Web de la Propriétaire pendant la période pertinente.

[19]           Plus important encore, il ne fait aucune déclaration claire quant à la question de savoir si les services offerts sur le site Web étaient prêts à être exécutés au bénéfice de Canadiens. M. Jenkins ne fournit aucun détail en ce qui concerne l'utilisation du site Web et de ses statistiques de jeu par des clients canadiens. Si les imprimés produits comme preuve présentent les statistiques de jeu de clients canadiens, M. Jenkins n'affirme rien de tel. En l'absence d'une déclaration claire selon laquelle les Canadiens pouvaient accéder au site Web pour visualiser leurs statistiques de jeu ou utiliser le site Web pour jouer comme tel (par opposition à visualiser le contenu du site Web simplement), il m'est impossible de conclure que les « services de jeu en ligne » de la Propriétaire étaient exécutés ou prêts à être exécutés au Canada en liaison avec la Marque.

[20]           Bien que M. Jenkins atteste de la popularité des jeux d'ordinateur produits par la Propriétaire, je souligne que les dates qu'il fournit en ce qui concerne leur développement sont pour la plupart bien antérieures à la période pertinente, et que le développement de l'un de ces jeux remonte à 1991. Seule la série de jeux Halo est associée à une période (2001-2010) qui chevauche en partie la période pertinente.

[21]           Ainsi, en l'absence de déclarations claires concernant les consommateurs canadiens, la popularité historique des jeux d'ordinateur de la Propriétaire ne me permet pas à elle seule d'inférer que les services de jeu en ligne sur ordinateur de la Propriétaire étaient accessibles aux consommateurs situés au Canada pendant la période pertinente et qu'ils ont été exécutés pour des consommateurs situés au Canada pendant cette même période.

[22]           Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque en liaison avec les services spécifiés dans l'enregistrement au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi. Étant donné que je ne dispose d'aucune preuve de l'existence de circonstances spéciales, l'enregistrement sera modifié en conséquence.

Décision

[23]           Compte tenu de tout ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi, l'enregistrement sera modifié afin de supprimer l'état déclaratif des services ainsi que les articles suivants de l'état déclaratif des produits :

[traduction]
(1) Figurines en métaux non précieux; …
(3)… livres de bandes dessinées, séries de livres de fiction et guides de stratégie..., cartes de jeu préimprimées et fiches d’instructions;
(4)… chapeaux.

[24]           L'état déclaratif des produits modifié sera libellé comme suit :

[traduction]
(1) Logiciels de jeu;
(2) Publications imprimées, nommément affiches;
(3) Articles vestimentaires, nommément chemises.

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Andrew Bene

Agent d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

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