Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

de Black Box Inc. aux demandes nos 1146016 et 1146481 produites par Benisti Import-Export Inc.

en vue de l’enregistrement des marques de commerce ZERO NINETEEN et ZERO NINETEEN et Dessin

 

[1]            Le 10 juillet 2002, Benisti Import-Export Inc. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce ZERO NINETEEN fondée sur l’emploi de la marque au Canada depuis le 1er janvier 2002, en liaison avec les marchandises suivantes (dont l’état a été modifié) :

 

(1)  Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément vestes, pantalons, tee-shirts, chemises, jeans, chapeaux, casquettes, dessous, sous-vêtements, robes, jupes, maillots de bain, shorts, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandail et pulls (2) Chaussures, nommément bottes, chaussures, chaussures de course, souliers de sport, sandales et pantoufles (3) Accessoires, nommément montres, portefeuilles, ceintures, cravates, lunettes de soleil, lunettes, eau de Cologne, parfums, gels, déodorants, eau de toilette, bijoux, chaînes porte-clés, sacs à dos, sacs de voyage, sacs à vêtements, sacs à main, sacs d’écolier, sacs de plage, bagages, bourses, parapluies, gants et mitaines (4) Matériel de sport, nommément bicyclettes, scooters, planches à roulettes, skis, patins à glace, patins à roues alignées, ballons de basketball, ballons de football et ballons de soccer; (5) Équipement de camping, nommément tentes et sacs de couchage. (6) Articles de maison, nommément dessus de table, verres, tasses, fourchettes, cuillères, couteaux, draps de lit, couvertures, courtepointes, édredons, serviettes, rideaux.

 

 

Le 16 juillet 2002, la Requérante a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce ZERO NINETEEN et Dessin (illustrée ci-dessous) également fondée sur l’emploi de la marque au Canada depuis le 1er janvier 2002, en liaison avec la liste suivante des marchandises et services (dont l’état a été modifié) :

 

Marchandises :

(1) Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément vestes, pantalons, tee-shirts, chemises, jeans, chapeaux, casquettes, sous-vêtements, sous-vêtements, robes, jupes, maillots de bain, shorts, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandails et pulls. (2) Chaussures, nommément bottes, chaussures, chaussures de course, souliers de sport, sandales et pantoufles. (3) Accessoires, nommément montres, portefeuilles, ceintures, cravates, lunettes de soleil, lunettes, eau de Cologne, parfums, gels, déodorants, eau de toilette, bijoux, chaînes porte-clés, sacs à dos, sacs de voyage, sacs à vêtements, sacs à main, sacs d’écolier, sacs de plage, bagages, bourses, parapluies, gants et mitaines. (4) Équipement de sport, nommément bicyclettes, scooters, planches à roulettes, skis, patins à glace, patins à roues alignées, ballons de basketball, ballons de football et ballons de soccer. (5) Équipement de camping, nommément tentes et sacs de couchage. (6) Articles à usage domestique, nommément dessus de table, verres, tasses, fourchettes, cuillères, couteaux, ustensiles, draps de lit, couvertures, couverts, serviettes, rideaux.

 

Services :

Services de café et de restaurant, services de gestion immobilière, services de cartes de crédit.

 

ZERO NINETEEN & Design

 

Les deux demandes d’enregistrement pour les marques de commerce de la Requérante ont été annoncées aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 16 juin 2004.   

 

[2]            Le 16 novembre 2004, Black Box Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’égard de chaque demande. Les motifs d’opposition invoqués à l’égard de chacune des marques sont fondés sur la non-conformité aux exigences des alinéas 30b) et 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), sur la non-enregistrabilité en vertu de l’al. 12(1)d), sur l’absence de droit à la marque en vertu des al. 16(1)a), b) et c), et sur l’absence de caractère distinctif. La plupart de ces motifs reposent sur la confusion avec la marque de commerce ZERO de l’Opposante (enregistrement no LMC575741) employée en liaison avec des planches à roulettes et accessoires de planche à roulettes, nommément roues et roulements, et avec l’emploi antérieur par l’Opposante de la marque de commerce et nom commercial ZERO en liaison avec des vêtements et certains accessoires, dont des chemises, tee-shirts, chandails en molleton, pantalons, shorts, blousons, chapeaux, casquettes, ceintures, portefeuilles, sacs à dos et sacs; des planches à roulettes et accessoires de planche à roulettes, nommément roues et roulements. 

 

[3]            Dans chaque cas, la Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle a nié les allégations de l’Opposante. Dans chaque cas, l’Opposante a déposé en preuve l’affidavit de Mme Jamie Thomas. La preuve de la Requérante dans chacun des cas est constituée de l’affidavit de M. Mario Morellato. Dans chacun des cas, l’Opposante a également produit, comme preuve additionnelle,  un deuxième affidavit de M. Thomas.

 

[4]            Aucun des souscripteurs d’affidavit n’a été contre-interrogé. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit dans chacun des cas et une audience a été tenue lors de laquelle les deux parties étaient représentées. Lors de l’audience, l’Opposante a retiré le motif d’opposition fondé sur l’al. 16(1)c) pour chaque marque.

 

Question préliminaire

[5]            Étant donné que la question de savoir si la Commission a compétence pour rendre une décision partagée a été soulevée pour la première fois lors de l’audience, des observations portant sur la décision Produits Menagers Coronet Inc. c. Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH (1986), 10 C.P.R. (3d) 482, à la p. 492 (C.F.1re inst.) ont été demandées aux

deux  parties après l’audience. Nous accusons réception des observations de la Requérante et de l’Opposante.   

 

[6]            Après avoir examiné les observations de chacune des parties, je suis d’avis que la Commission a compétence pour rendre une décision partagée, en certaines circonstances.

 

Fardeau de la preuve et dates pertinentes

[7]            Il incombe à la Requérante d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que ses demandes sont conformes aux exigences de la Loi. Toutefois, l'Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d'opposition [voir la décision John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F.1re inst.), à la page 298;

Dion Neckwear Ltd.  c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.).]

 

[8]            Voici les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition :

art. 30 – la date de production des demandes [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475];

al. 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. and The Registrar of Trade Marks (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

      par. 16(1) – la date de premier emploi par la Requérante [voir parl16(1)];

absence de caractère distinctif – la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 

(C.F. 1re inst.)].

 

Motif fondé sur l’alinéa 30b)

[9]            L’Opposante fait valoir que les demandes ne répondent pas aux exigences de l’al. 30b) en ce que les marques de commerce de la Requérante n’ont pas été employées au Canada en liaison avec les marchandises et les services visés par les demandes depuis les dates de premier emploi qui y sont alléguées. Dans la mesure où il est plus facile pour la Requérante de mettre en preuve les faits pertinents relativement au présent motif d’opposition, le fardeau qui incombe à l’Opposante en ce qui concerne ce motif d’opposition est moins lourd, et elle peut s’en acquitter en s’appuyant sur la preuve de la Requérante [voir Tune Masters c. Mr. P’s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.); Labatt Brewing Company Limited c. Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 

(C.F. 1re inst.)]. En pareilles circonstances, l’Opposante doit cependant démontrer que la preuve est clairement incompatible avec les allégations formulées dans la demande de la Requérante [voir York Barbell Holdings Ltd. c. ICON Health & Fitness, Inc. (2001), 13 C.P.R. (4th) 156 (C.O.M.C.)].

 

[10]            Rien ne me permet de conclure que l’Opposante s’est acquittée, dans les deux cas, de son fardeau initial en ce qui concerne l’al. 30b). L’Opposante soutient qu’étant donné qu’elle a soulevé le motif fondé sur l’al. 30b) dans ses déclarations d’opposition, il incombe maintenant à la Requérante de démontrer l’emploi continu de ses marques de commerce depuis la date revendiquée. En toute déférence, je ne suis pas d’accord. 

 

[11]            Afin de s’acquitter du fardeau qui lui incombe à l’égard de ce motif, l’Opposante devait soit présenter une preuve soulevant un doute quant à la déclaration de la Requérante selon laquelle la date de premier emploi de ses marques remontait au 1er janvier 2002, soit faire valoir que la preuve de la Requérante comporte suffisamment d’ambiguïtés ou d’incohérences pour mettre en doute la véracité de la déclaration de la Requérante quant à la date de premier emploi. Même si je conviens avec l’Opposante que M. Morellato n’a présenté aucune preuve documentaire au soutien de l’emploi de l’une ou l’autre des marques de commerce de la Requérante dont il est question en l’espèce, au sens de l’art. 4 de la Loi,  M. Morellato a déclaré dans son témoignage que la Requérante avait employé ses marques de commerce depuis au moins le 1er  janvier 2002. Compte tenu des autres déclarations figurant dans son l’affidavit, je n’ai aucune raison de douter que M. Morellato comprend ce qu’est un emploi au sens de l’art. 4, lorsqu’il dit que les marques de commerce de la Requérante ont été employées en liaison avec les marchandises et les services visés par la demande. Bien que je convienne avec l’Opposante qu’il est curieux que M. Morellato ait seulement annexé à son affidavit des spécimens de publicité de sa marque de commerce POINT ZERO, ce fait ne suffit pas à lui seul à soulever, à mes yeux, de doute sur la véracité de la déclaration de la Requérante portant qu’elle a employé ses marques de commerce depuis au moins le 1er  janvier 2002.

 

[12]            En conséquence, comme l’Opposante n’a pas réussi à soulever de doute sur la véracité de la déclaration de la Requérante selon laquelle elle a employé ses marques de commerce depuis au moins le 1er janvier 2002, la Requérante n’était pas tenue de démontrer l’emploi de ses marques de commerce depuis cette date. Si l’Opposante avait souhaité approfondir la question, elle aurait pu contre-interroger M. Morellato. Ce motif d’opposition est donc rejeté dans les deux cas.    

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[13]            Lorsqu’un requérant produit la déclaration exigée par l’al. 30i), le motif fondé sur cet alinéa ne devrait être accueilli qu’en des circonstances exceptionnelles, notamment lorsque la mauvaise foi du requérant est établie. [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155]. Étant donné que ce n’est pas le cas en ce qui concerne les deux demandes, je rejette ce motif d’opposition dans les deux cas.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)b)

[14]            Le cinquième motif de l’Opposante n’est pas un motif d’opposition valable. Même si la demande d’enregistrement numéro LMC575741 a été produite avant la date de premier emploi de la Requérante, elle n’était pas pendante à la date de l’annonce des deux marques de la Requérante, tel que le requiert le paragraphe 16(4) de la Loi, ayant été accordée le 17 février 2003 [voir Governor and Co. of Adventurers of England trading into Hudson’s Bay c. Kmart Canada Ltd. (1997), 76 C.P.R. (3d) 526 (C.O.M.C.)]. Le motif fondé sur l’al. 16(1)b) est donc rejeté.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)d)

[15]            S’agissant de ce motif, l’Opposante a soutenu que les marques de commerce de la Requérante n’étaient ni adaptées ni aptes à distinguer les marchandises et les services en liaison avec lesquels elles auraient été employées par la Requérante des marchandises de l’Opposante. Afin de déterminer si les marques de commerce de la Requérante sont distinctives, il convient d’examiner si l’une ou l’autre risque de créer de la confusion avec la marque ZERO de l’Opposante.

 

[16]            Afin de s’acquitter du fardeau qui lui incombe à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer qu’à la date de dépôt de l’opposition, sa marque de commerce ZERO était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif des marques de commerce de la Requérante [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, à la page 58 (C.F.1re inst.); Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A.F.); et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, à la page 424 (C.A.F.)]. Une marque doit être connue, au moins jusqu’à un certain point, pour annuler le caractère distinctif établi d’une autre marque, et sa réputation au Canada devrait être importante, significative ou suffisante; il n’est pas nécessaire qu’elle soit bien connue au Canada. [Bojangles International, LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F. 1re inst.); Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), à la page 58; Andres Wines Ltd. c. E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), à la page 130; et Park Avenue Furniture Corp. c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.), à la page 424].

 

[17]            Compte tenu de la preuve, je suis convaincue que l’Opposante s’est acquittée, dans chaque cas, du fardeau qui lui incombait pour ce qui est de ce motif. À cet égard, M. Thomas déclare que l’Opposante, par l’intermédiaire de son prédécesseur en titre, Tum Yeto, a utilisé la marque de commerce ZERO au Canada en liaison avec des articles vestimentaires, sacs à dos, sacs, portefeuilles, planches à roulettes et accessoires de planche à roulettes depuis au moins 1996. Une facture datée du 22 janvier 1996 établie par le prédécesseur en titre de l’Opposante, Tum Yeto, à l’intention de son distributeur canadien pour divers vêtements vendus sous la marque ZERO est jointe comme pièce A au deuxième affidavit de M. Thomas. Des marchandises, nommément des planches à roulettes, accessoires de planche à roulettes, tee-shirts, chandails en molleton, pantalons, shorts, blousons, chapeaux, casquettes, ceintures, sacs à dos, sacs et portefeuilles arborant la marque ZERO de l’Opposante sont illustrées dans des catalogues des années 2003 à 2005, joints à son affidavit comme pièces N à T, et M. Thomas déclare qu’ils sont distribués par des distributeurs canadiens ou postés directement à des clients. Au paragraphe 8 de son affidavit, M. Thomas déclare que les ventes au Canada de marchandises portant la marque de commerce ZERO pour les années 2002, 2003 et 2004 ont respectivement atteint les sommes de 390 854 $, 724 616 $ et 676 337 $. Même si M. Thomas ne fournit pas le détail des ventes de marchandises de l’Opposante, je suis convaincue de l’ensemble de la preuve que l’Opposante a établi que sa marque est connue, au moins jusqu’à un certain point, pour annuler le caractère distinctif établi des marques de commerce de la Requérante.

 

le test en matière de confusion

[18]            Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Le paragraphe 6(2) de la Loi énonce que l’emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Lorsqu’il applique le critère de la confusion, le registraire tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées au par. 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent. Les facteurs énumérés ne reçoivent pas nécessairement le même poids.

 

[19]            Dans les arrêts Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401, l a Cour suprême du Canada a décrit le processus à suivre pour évaluer toutes les circonstances à prendre en considération quand il s’agit de savoir si deux  marques de commerce créent de la confusion entre elles. C’est donc à la lumière de ces principes généraux que j’évaluerai maintenant toutes les circonstances de l’espèce.

 

 

al. 6(5)a) - Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[20]            Les marques composées de chiffres sont intrinsèquement faibles [voir Pepsico c. Daiwa 80 C.P.R. (2d) 160 (C.O.M.C.)].  En l’espèce, la marque ZERO NINETEEN de la Requérante et la marque ZERO de l’Opposante sont exprimées sous forme de chiffres et possèdent donc un caractère distinctif très faible. La marque ZERO NINETEEN et Dessin de la Requérante possède un caractère distinctif plus élevé que la marque ZERO NINETEEN de l’Opposante en raison de l’originalité de sa composante graphique.

 

[21]            Le renforcement d’une marque de commerce peut se réaliser en étendant sa renommée grâce à la publicité ou l’usage. La marque de l’Opposante est devenue connue dans une certaine mesure au Canada. Malgré les nombreux éléments de preuve produits par la Requérante au soutien de sa marque de commerce POINT ZERO, le présent facteur joue en faveur de l’Opposante étant donné que ces éléments de preuve ne me permettent pas de tirer des conclusions quant à la mesure dans laquelle les marques de commerce de la Requérante ont été employées ou sont devenues connues au Canada.

 

al. 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque de commerce a été en usage

[22]            La période pendant laquelle chaque marque de commerce a été utilisée joue en faveur de l’Opposante.

 

als. 6(5)c) et d) - le genre de marchandises, services ou entreprises;  la nature du commerce

[23]            Les articles de vêtements, les accessoires tels que des sacs à dos, sacs et portefeuilles, et les planches à roulettes de la Requérante chevauchent clairement les marchandises de l’Opposante. Quant aux voies de commercialisation, il appert de la preuve que la vente de planches à roulettes et d’accessoires connexes constitue l’activité principale de l’Opposante.  Néanmoins, comme la demande d’enregistrement de la Requérante ne contient aucune restriction quant à ses voies de commercialisation, rien n’empêcherait la vente des marchandises de la Requérante qui chevauchent celles de l’Opposante dans le même genre de lieux où ces dernières sont habituellement vendues.

 

[24]            Dans les deux demandes de la Requérante, les marchandises restantes (c.-à-d. les chaussures, nommément : bottes, chaussures, chaussures de course, souliers de sport, sandales et pantoufles; montres, cravates, lunettes de soleil, lunettes, eau de Cologne, parfums, gels, déodorants, eau de toilette, bijoux, chaînes porte-clés, parapluies, gants et mitaines; bicyclettes, scooters, planches à roulettes, skis, patins à glace, patins à roues alignées, ballons de basketball, ballons de football et ballons de soccer, équipement de camping, nommément tentes et sacs de couchage; articles à usage domestique, nommément dessus de table, verres, tasses, fourchettes, cuillères, couteaux, ustensiles, draps de lit, couvertures, couverts, serviettes, rideaux) diffèrent des marchandises de l’Opposante, tout comme les services visés par la demande d’enregistrement de la marque ZERO NINETEEN et Dessin de la Requérante. Les voies de commercialisation pour ces marchandises et services seraient en conséquence différentes de celles de l’Opposante.

 

al. 6(5)e) - le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[25]            Il a déjà été jugé que c’est le premier mot ou la première syllabe d'une marque de commerce qui constitue l'aspect le plus important pour ce qui est du caractère distinctif [voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183]. En l’instance, la marque ZERO NINETEEN de la Requérante contient la totalité de la marque de l’Opposante comme première composante. Il existe donc un degré raisonnable de ressemblance entre cette marque et celle de l’Opposante sur le plan de la présentation, du son et des idées qu’elles suggèrent. 

 

[26]            En ce qui concerne la marque ZERO NINETEEN et Dessin de la Requérante, malgré le fait que le dessin du chiffre « 19 » apparaisse au-dessus du mot ZERO, on pourrait soutenir que la composante ZERO est l’élément dominant de cette marque. J’estime donc également qu’il existe un degré raisonnable de ressemblance entre cette marque et la marque de l’Opposante.  

 

Circonstances de l’espèce

[27]            Au titre de circonstance additionnelle, la Requérante a soulevé la question de la légalité de l’emploi que l’Opposante fait de sa marque. La Requérante soutient que l’enregistrement par l’Opposante de la marque ZERO (LMC575741) et sa demande d’enregistrement pour la marque de commerce ZERO en liaison avec des articles de vêtement (demande no 1233575) portent clairement atteinte aux droits de la Requérante découlant de son emploi de la marque de commerce POINT ZERO (LMC309311), en liaison avec des marchandises similaires depuis 1984. 

 

[28]            Même si je conviens avec la Requérante que l’Opposante ne devrait pas être autorisée à s’appuyer sur des actes de contrefaçon pour fonder son opposition à une demande d’enregistrement [voir Lunettes Cartier Ltée c. Cartier, Inc. (1991), 36 C.P.R. (3d) 391 (C.O.M.C.)] en l’espèce aucun tribunal n’a conclu à la contrefaçon, et aucune preuve n’étaye l’introduction d’une action devant une cour de justice. Je ne peux donc pas considérer l’allégation de la Requérante comme une circonstance pertinente dans l’un et l’autre des cas.    

 

[29]            La Requérante a également soutenu que son droit à l’emploi de ses marques de commerce en liaison avec les marchandises et services visés par la demande découle de droits qu’elle a acquis depuis 1984 en vertu de l’emploi de sa marque de commerce POINT ZERO

(LMC309311), déposée en liaison avec des marchandises similaires. Je ne suis pas d’accord avec la Requérante sur ce point étant donné que l’art. 19 de la Loi ne confère pas au propriétaire de l’enregistrement le droit automatique d’obtenir l’enregistrement d’autres marques peu importe qu’elles soient  étroitement liées à la marque visée par l’enregistrement initial [voir Groupe Lavo Inc. c. Procter & Gamble Inc. (1990), 32 C.P.R. (3d) 533 (C.O.M.C.), à la page 538].

 

Conclusion relative au risque de confusion

La question qui se pose est de savoir si un consommateur qui a un souvenir général et imparfait de la marque ZERO de l'Opposante pourrait vraisemblablement croire, en voyant les marques ZERO NINETEEN et ZERO NINETEEN et Dessin de la Requérante, que les marchandises similaires ont la même origine. J’estime que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause, en ce qui concerne les marchandises similaires des parties. Cependant, je ne crois pas qu’il y ait une probabilité raisonnable de confusion entre la marque de l’Opposante et celles de la Requérante en liaison avec les chaussures, nommément : bottes, chaussures, chaussures de course, souliers de sport, sandales et pantoufles; montres, cravates, lunettes de soleil, lunettes, eau de Cologne, parfums, gels, déodorants, eau de toilette, bijoux, chaînes porte-clés, parapluies, gants et mitaines; bicyclettes, scooters, planches à roulettes, skis, patins à glace, patins à roues alignées, ballons de basketball, ballons de football et ballons de soccer, équipement de camping, nommément tentes et sacs de couchage; articles à usage domestique, nommément dessus de table, verres, tasses, fourchettes, cuillères, couteaux, ustensiles, draps de lit, couvertures, couverts, serviettes, rideaux de la Requérante; ou avec les services visés par la demande d’enregistrement de la marque ZERO NINETEEN et Dessin de la Requérante. 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a)

[30]            L’Opposante a également soutenu que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de ses marques de commerce conformément à l’al. 16(1)a) parce que celles-ci sont similaires à la marque de commerce ZERO de l’Opposante qui a été antérieurement employée au Canada et qui avait été abandonnée aux dates de premier emploi alléguées par la Requérante. Je suis convaincue que l’Opposante s’est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait en ce qui concerne le présent motif d’opposition.

 

[31]            Mes conclusions précédentes concernant la question de la confusion s’appliquent également pour la plupart au présent motif d’opposition. Le motif d’opposition fondé sur l’art. 16 est accueilli en partie parce que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre l’une ou l’autre de ses marques et la marque de l’Opposante en ce qui concerne les marchandises qui se chevauchent.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[32]            Comme l’opposition a été accueillie à l’égard de deux motifs, je n’estime pas nécessaire d’examiner le motif d’opposition fondé sur l’al. 12(1)d).   

 

 

Dispositif

 

[33]            Compte tenu de ce qui précède, et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués conformément au paragraphe  63(3) de la Loi, je repousse les demandes de la Requérante en ce qui concerne les marchandises suivantes :

 

(1 Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément vestes, pantalons, tee-shirts, chemises, jeans, chapeaux, casquettes, dessous, sous-vêtements, robes, jupes, maillots de bain, shorts, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons-pantalons, chandail et pulls (3) portefeuilles, ceintures, sacs à main, sacs d’écolier, sacs de plage, bagages, bourses (4) planches à roulettes.

 

et je rejette les autres oppositions de l’Opposante. Comme je l’ai déjà mentionné, on peut trouver un fondement jurisprudentiel à ce résultat partagé dans la décision Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH (1986), 10 C.P.R. (3d) 482 (C.F.1re inst.), à la page 492. 

 

FAIT À Gatineau (Québec), le 28 octobre 2009.

 

 

C.R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-Jacques Goulet, LL.L.

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