Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Gilmar S.P.A. et Seminvest Investments B.V. à la demande no 1248727 visant l’enregistrement de la marque de commerce ICE LOUNGE au nom de Mynt Ultralounge Inc.________________________

 

 

[1]          Le 22 février 2005, Mynt Nightclub & Ultralounge Ltd. (la requérante initiale) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce ICE LOUNGE (la Marque). La demande est fondée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis le 15 décembre 2004, en liaison avec les marchandises et services suivants :

         articles promotionnels, nommément chemises, tee-shirts, pulls d’entraînement, verres, grosses tasses, chapeaux, casquettes de baseball, vestes, décalcomanies, affiches, images, chaînes porte-clés, portefeuilles, sous-verres, colliers, montres et bagues (les Marchandises);

         boîtes de nuit, restaurant et bar‑salon (les Services).

 

[2]          La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 21 septembre 2005. Gilmar S.P.A. et Seminvest Investments B.V. (collectivement appelées l’Opposante ou les Opposantes) ont produit une déclaration d’opposition le 21 novembre 2005, invoquant des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)a), b), c) et d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi).

 

[3]          La requérante initiale a produit et signifié une contre‑déclaration niant les allégations des Opposantes.

 

[4]          Le 20 avril 2006, une inscription relative à la cession de la demande d’enregistrement à Mynt Ultralounge Inc. (la requérante actuelle) a été portée au registre. Dans la suite des présents motifs, le terme « Requérante » désignera la requérante initiale et/ou actuelle.

 

[5]          À l’appui de leur opposition, les Opposantes ont produit un affidavit souscrit par Silvano Gerani.

 

[6]          Le 4 juillet 2007, les Opposantes ont été autorisées à modifier leur déclaration d’opposition.

 

[7]          La Requérante a produit à l’appui de sa demande un affidavit souscrit par Victor Choy.

 

[8]          Il n’y a pas eu de contre‑interrogatoire.

 

[9]          Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit, à la suite de quoi les Opposantes ont fait valoir que celui de la Requérante incluait indûment de nouveaux éléments de preuve. La Requérante a demandé l’autorisation de soumettre ces nouveaux éléments, mais elle ne l’a pas obtenue. Les parties du plaidoyer de la Requérante qui visent à présenter des éléments de preuve ne figurant pas déjà au dossier ou qui renvoient à de tels éléments ne seront donc pas prises en compte.

 

[10]      Les parties n’ont pas sollicité la tenue d’une audience.

 

Les motifs d’opposition

[11] Les motifs d’opposition sont résumés ci‑dessous.

1.    La demande n’est pas conforme à l’alinéa 30b) parce que la requérante originale n’avait pas employé la Marque de la manière alléguée ou ne l’avait pas employée du tout à la date de production de la demande, ou l’avait subséquemment abandonnée.

2.    Étant donné les faits énoncés dans la déclaration d’opposition, la requérante originale ne pouvait pas, à la date de la production de la demande, être dûment convaincue d’avoir le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les marchandises et services décrits dans la demande comme l’exige l’alinéa 30i).

3.    Aux termes des alinéas 38(2)b) et 12(1)d), la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec des marques déposées, à savoir la marque ICEBERG, propriété de Seminvest Investments B.V., enregistrée sous le no 345589 pour emploi en liaison avec des articles de parfumerie, broches en cuir, parapluies, lunettes, montures et verres de lunettes, étuis à lunettes, montres et bijoux, et la marque ICEBERG, propriété de Gilmar S.P.A., enregistrée sous le no 345589 pour emploi en liaison avec des sacs à main, ceintures, gilets en tricot, gilets de corps, vestes et jerkins, manteaux, imperméables, vestes et manteaux de fourrure, vestes et manteaux de cuir et de peaux, jupes, pantalons, jeans, justaucorps, shorts, ceinturons, foulards, gants, châles, mouchoirs, chaussettes, serviettes, maillots de bain, chapeaux, bottes, souliers et pantoufles (collectivement appelées les Marques déposées).

4.    Aux termes des alinéas 38(2)c) et 16(1)a) et du paragraphe 16(5), la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque car, à la date alléguée de premier emploi par la Requérante ou son prédécesseur en titre, cette marque créait de la confusion avec l’une ou l’autre des i) Marques déposées et/ou avec les marques ii) ICE B ICEBERG et Dessin, iii) ICE JEANS, iv) ICE ICE ICEBERG, v) ICE HISTORY, vi) ICE J, vii) ICE B, viii) ICE ICEBERG et ix) ICE, que les Opposantes ou l’une d’elles avaient antérieurement employées ou révélées au Canada en liaison avec des vêtements, des accessoires vestimentaires, des accessoires de mode, des articles chaussants, des couvre‑chef, des articles de parfumerie, des articles en cuir, des bijoux, des parapluies, des lunettes et articles connexes, des malles, des sacs de transport, des montres, du linge de maison, des articles de table, de l’eau minérale et diverses autres catégories de marchandises et qui n’avaient pas été abandonnées à la date à laquelle la demande de la Requérante a été annoncée. 

5.    Aux termes des alinéas 38(2)c) et 16(1)b) et du paragraphe 16(4), la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque car, à la date alléguée de premier emploi par la Requérante ou son prédécesseur en titre, cette marque créait de la confusion avec la marque ICE B et Dessin, visée par la demande d’enregistrement antérieure no 1219582, qui était pendante à la date à laquelle la demande de la Requérante a été annoncée.

6.    Aux termes des dispositions de l’alinéa 38(2)d) et de l’article 2, la Marque n’est pas distinctive car elle ne distingue pas véritablement les marchandises et services de la Requérante de ceux d’autres personnes, notamment des marchandises vendues par l’Opposante sous l’une ou l’autre des marques déposées ou des marques énumérées ci‑dessus aux paragraphes 4 et 5, et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi.

7.    Aux termes des dispositions de l’alinéa 38(2)d) et de l’article 2, la Marque n’est pas distinctive car son emploi excède le cadre d’emploi permis par l’article 50.

8.    Aux termes des dispositions de l’alinéa 38(2)d), de l’article 2 et du paragraphe 48(2), la Marque n’est pas distinctive car, après le transfert des droits afférents à la Marque, il subsistait chez deux ou plusieurs entités des droits à l’emploi de la Marque qui avaient été exercés.

 

[12]      Il appert de l’annexe jointe à la déclaration d’opposition que les marques décrites comme ICE B ICEBERG et Dessin et ICE B et Dessin forment une seule et même marque.

 

Résumé de la preuve des Opposantes

[13]      M. Gerani est le président de Gilmar S.P.A. (Gilmar). Il explique que Gilmar et Seminvest Investments B.V. (Seminvest) sont des sociétés affiliées, propriétés de la même société de portefeuille.

 

[14]      M. Gerani déclare que Gilmar est une entreprise italienne de mode qui conçoit et commercialise une vaste gamme de marchandises, dont des vêtements, des accessoires vestimentaires, des parfums, des bijoux, des montres, du linge de maison, des articles de table et de l’eau minérale, et les distribue dans le monde entier. Seminvest est une société néerlandaise.

 

[15]      Gilmar est la propriétaire originale de l’enregistrement canadien portant le no 345589 pour la marque de commerce ICEBERG. Une cession partielle en faveur de Seminvest a été consentie le 27 juin 2002 à l’égard de certaines des marchandises, faisant en sorte que Gilmar est propriétaire de la marque ICEBERG pour ce qui est des sacs à main, ceintures, gilets en tricot, gilets de corps, vestes et jerkins, manteaux, imperméables, vestes et manteaux de fourrure, vestes et manteaux de cuir et de peaux, jupes, pantalons, jeans, justaucorps, shorts, ceinturons, foulards, gants, châles, mouchoirs, chaussettes, serviettes, maillots de bain, chapeaux, bottes, souliers et pantoufles (collectivement appelées les marchandises Gilmar), et Seminvest pour ce qui est des articles de parfumerie, bijoux, lunettes, montres et parapluies (collectivement appelées les marchandises Seminvest).

 

[16]      M. Gerani déclare que Gilmar possède également d’autres marques ICE, à savoir ICE J, ICE B, ICE B et Dessin, ICE JEANS, ICE HISTORY, ICE ICEBERG et ICE ICE ICEBERG, (collectivement appelées les marques ICE) visant des vêtements, accessoires vestimentaires, accessoires de mode, articles chaussants, couvre‑chef, articles en cuir, lunettes et articles connexes, malles et sacs de transport (collectivement appelés les marchandises ICE).

 

[17]      M. Gerani déclare que Gilmar vend les marchandises Gilmar et les marchandises Seminvest au Canada en liaison avec la marque ICEBERG depuis 1982 au moins, dans le premier cas, et depuis 1998 au moins, dans le second. Depuis le 27 juin 2002, Gilmar emploie la marque ICEBERG au Canada en liaison avec les marchandises Seminvest en vertu d’une licence exclusive accordée par Seminvest et cette dernière contrôle les caractéristiques et la qualité de ces marchandises.

 

[18]      M. Gerani déclare en outre que les marchandises ICE sont vendues au Canada en liaison avec les marques ICE depuis 1998.

 

[19]      Des photos d’étiquettes représentatives portant les marques des Opposantes ont été déposées. Les marques sont parfois apposées directement sur les marchandises [pièces F à I].

 

[20]      Les marques des Opposantes ont été annoncées au Canada dans des revues, des brochures et des catalogues [paragraphes 18 à 20; pièces J à L]. Au paragraphe 22, M. Gerani énumère des montants annuels de dépenses publicitaires, mais ces chiffres ne sont d’aucune utilité puisqu’il s’agit de sommes totales pour le Canada et les États‑Unis.

 

[21]      Les chiffres d’affaires annuels ont été fournis pour la période 1998 à 2005, ventilés en deux catégories : 1) ICEBERG; 2) ICE et ICE B et Dessin. Dans la première catégorie, les montants vont de 52 000 à 107 000 euros et, dans la seconde de 159 000 à 260 000 euros. Des factures représentatives ont été fournies sous la cote N.

 

Observations préliminaires au sujet de la preuve des Opposantes

[22]      Ces observations porteront sur les effets du partage des droits de propriété relatifs à la marque ICEBERG.

 

[23]      Du fait de l’emploi de la marque ICEBERG en liaison avec les marchandises Gilmar, Gilmar a acquis une certaine réputation en lien avec cette marque dans le domaine du vêtement, des accessoires vestimentaires ou de mode et de la chaussure. Seminvest a elle aussi acquis une certaine réputation en lien avec ICEBERG à l’égard de marchandises qui sont souvent assimilées à des accessoires vestimentaires ou de mode, à savoir, des parfums, des bijoux, des lunettes, des montres et des parapluies. Bien que Gilmar et Seminvest soient des sociétés affiliées et que Seminvest ait conféré à Gilmar une licence l’autorisant à employer la marque ICEBERG en liaison avec les marchandises Seminvest, il reste que deux entités distinctes sont propriétaires d’une marque identique employée en liaison avec des marchandises qui se recoupent ou qui sont étroitement liées. Il s’ensuit que les marques ICEBERG de Gilmar et de Seminvest ne peuvent ni l’une ni l’autre prétendre à une protection étendue.

 

Résumé de la preuve de la Requérante

[24]      M. Choy, le président de la requérante actuelle, déclare que celle‑ci emploie la Marque au Canada depuis la date indiquée dans la demande, à savoir le 15 décembre 2004. Il a fourni trois articles de journaux parus respectivement les 21 janvier, 5 février et 29 décembre 2005 [pièces B à D] ainsi que plusieurs articles promotionnels relatifs à la Marque [pièces E à G].

 

[25]      Comme l’ont signalé les Opposantes, le reste de l’affidavit de M. Choy relève de l’argumentation et non de la preuve, et il n’en sera donc pas tenu compte.

 

Fardeau de preuve

[26]      La Requérante a le fardeau ultime de démontrer suivant la prépondérance des probabilités que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, les Opposantes ont le fardeau initial de présenter une preuve recevable suffisante pour fonder raisonnablement la conclusion que les faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition existent [voir la décision John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b)

[27]      Les Opposantes peuvent s’acquitter de leur fardeau à l’égard de l’alinéa 30b) en présentant des éléments de preuve, mais elles peuvent également s’appuyer sur la preuve de la Requérante [voir La Brasserie Labatt Limitée c. Les Brasseries Molson, Société en nom collectif (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.), à la page 230], ce qui ne les dispense pas, toutefois, de démontrer que la preuve soumise par la Requérante est « manifestement » incompatible avec les prétentions que cette dernière a formulées dans la demande d’enregistrement.

 

[28]      M. Choy affirme dans son affidavit que Mynt Ultralounge Inc. emploie la Marque depuis la date indiquée dans la demande mais, suivant le formulaire de demande, c’est Mynt Nightclub & Ultralounge Ltd. qui emploie la Marque depuis cette date. Il y a donc contradiction entre le témoignage de M. Choy et la demande, et la cession de la demande à Mynt Ultralounge Inc. en 2006 n’explique pas cette absence de concordance. La déclaration de M. Choy que Mynt Ultralounge Inc. emploie la Marque depuis le 15 décembre 2004 reste manifestement incompatible avec la prétention que Mynt Nightclub & Ultralounge Ltd. emploie cette marque depuis la même date. 

 

[29]      Par conséquent, le premier motif d’opposition est retenu.

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[30]      Lorsqu’un requérant a produit la déclaration exigée à l’alinéa 30i), le motif d’opposition fondé sur cette disposition n’est reçu que dans des cas exceptionnels, par exemple, lorsqu’il y a preuve de mauvaise foi de la part du requérant [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155)].

 

[31]      Puisque la déclaration a bien été produite et qu’il n’existe pas d’élément de preuve de mauvaise foi, le deuxième motif d’opposition est écarté.

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[32]      S’agissant du troisième motif d’opposition, les Opposantes s’acquittent de leur fardeau si l’enregistrement dont elles se réclament est en cours de validité, ce qui est le cas de l’enregistrement no 345589.

 

[33]      La date pertinente pour l’appréciation du risque de confusion, relativement à ce motif, est la date de la décision [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd., 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

 

[34]      Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

[35]      Dans l'application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, dont celles qui sont expressément énumérées au par. 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, de services ou d'entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids égal à ces facteurs [voir, en général, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.)].

 

[36]      Puisque la marque déposée ICEBERG est la propriété de deux parties différentes, c’est‑à‑dire que ces parties en sont individuellement et non solidairement propriétaires, il convient selon moi d’évaluer le risque de confusion avec la Marque de la requérante de façon distincte. Je commencerai par l’évaluation du risque de confusion entre la marque déposée de Gilmar et la Marque.

 

(a) Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[37]      La marque ICEBERG de Gilmar possède un caractère distinctif inhérent. C’est aussi le cas de la marque ICE LOUNGE de la Requérante, mais à un degré moindre à l’égard des services de cette dernière, du fait que « lounge » décrit ces services. 

 

[38]      Il est possible d'accroître la force d'une marque de commerce en la faisant connaître par la promotion et l'usage. M. Gerani a fourni des éléments de preuve établissant qu’il a employé la marque ICEBERG et en a fait la promotion mais, à compter de 2002, cette preuve ne sépare pas ce qui s’applique à la marque de Gilmar de ce qui s’applique à celle de Seminvest. Avant 2002, lorsque Gilmar était propriétaire d’ICEBERG à l’égard de toutes les marchandises visées par l’enregistrement, les ventes réalisées au Canada ont excédé 350 000 euros. Les chiffres d’affaires fournis pour les années postérieures à 2002 ne sont d’aucune aide parce qu’ils portent sur les marques des deux propriétaires. Je suis donc disposée à reconnaître uniquement que la marque ICEBERG de Gilmar est devenue connue dans une mesure indéterminable à l’heure actuelle.

 

[39]      Je dispose de très peu d’éléments de preuve au sujet de la promotion ou de l’emploi de la Marque de la Requérante, de sorte que je ne puis conclure qu’elle est aujourd’hui devenue connue de façon appréciable.

 

(b) La période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[40]      Gilmar déclare employer la marque ICEBERG depuis 1982, tandis que la date d’emploi de la Marque déclarée par la Requérante est le 15 décembre 2004.

 

(c) Le genre de marchandises, de services ou d'entreprises

[41]      L’enregistrement de Gilmar englobe des vêtements, des accessoires vestimentaires ou de mode et des chaussures. La demande d’enregistrement de la Requérante porte sur des services de boîtes de nuit, restaurants et bars‑salons et sur des marchandises promotionnelles comprenant des vêtements et des accessoires vestimentaires ou de mode.  

 

(d) La nature du commerce

[42]      S’agissant des services de la Requérante, il semble évident que les voies de commercialisation des parties diffèrent. Toutefois, je ne suis pas en mesure d’apprécier si elles se recoupent pour ce qui est de leurs marchandises. Gilmar vend ses marchandises aux consommateurs canadiens par l'intermédiaire de distributeurs et d’établissements de vente au détail. Pour ce qui est de la Requérante, on ne sait pas si elle vend ses marchandises uniquement dans ses boîtes de nuit, restaurants et bars‑salons ou si elle peut avoir recours à d’autres voies.

 

e) Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent

[43]      Bien qu’il faille examiner les marques dans leur ensemble, lorsqu’il s’agit de les distinguer, le premier élément revêt souvent plus d’importance [Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.)]. Toutefois, un mot descriptif commun commande un degré de protection moindre qu’un mot unique ou inventé [Park Avenue Furniture Corp. c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

 

[44]      Dans l’ensemble, j’estime que les marques ICEBERG et ICE LOUNGE ne se ressemblent pas beaucoup. Bien qu’elles commencent toutes deux par le mot ordinaire « ice » figurant au dictionnaire, les marques dans leur ensemble diffèrent passablement dans la présentation, le son ou les idées qu’elles suggèrent.

 

Autres circonstances

[45]      J’estime que la preuve que Seminvest est propriétaire de la marque ICEBERG à l’égard de l’emploi en liaison avec des accessoires vestimentaires ou de mode est une circonstance favorisant la Requérante. Les Opposantes ont prouvé, en substance, que deux entités emploient activement la marque ICEBERG dans l’industrie de la mode et du vêtement, ce qui restreint nécessairement la protection dont peut se réclamer l’un ou l’autre propriétaire.

 

[46]      L’adoption par Gilmar de plus d’une marque commençant par ICE constitue une autre circonstance à prendre en considération. Toutefois, elle n’oblitère pas le fait que la propriété partagée de la marque ICEBERG réduit le degré de protection qui peut lui être accordée.

 

Conclusion relative à l’application de l’alinéa 12(1)d) à l’enregistrement de la marque ICEBERG par Gilmar

[47]      Après examen de l’ensemble des circonstances, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) pour ce qui est de l’enregistrement de la marque ICEBERG au nom de Gilmar. Je suis d’avis qu’il risque peu d’y avoir confusion entre les marques. Cette conclusion découle principalement des différences existant entre les marques. Le facteur prédominant dans l’appréciation de la question de la confusion est celui du degré de ressemblance entre les marques,  les autres facteurs jouant un rôle secondaire [Beverley Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstery Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.), à la page 149, conf. par 60 C.P.R. (2d) 70].  

 

Conclusion relative à l’application de l’alinéa 12(1)d) à l’enregistrement de la marque ICEBERG par Seminvest

[48]      L’examen de l’ensemble des circonstances relatives à la marque déposée ICEBERG de Seminvest n’améliore pas la position des Opposantes. L’emploi de cette marque en liaison avec les marchandises Seminvest a commencé plus tard que l’emploi avec les marchandises Gilmar (27 juin 2002), et il n’est pas possible d’établir avec certitude dans quelle mesure Seminvest a employé cette marque ou en fait la promotion jusqu’à maintenant. De plus, les marchandises visées par l’enregistrement de Seminvest diffèrent davantage que les marchandises Gilmar des marchandises de la Requérante.

 

[49]      Du fait, principalement, de la différence entre les marques, je rejette donc également le motif d’opposition fondée sur l’alinéa 12(1)d) à l’égard de l’enregistrement de la marque ICEBERG au nom de Seminvest.

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a)

[50]      S’agissant des motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 16(1)a), les Opposantes doivent démontrer qu’elles ont employé leurs marques ou en ont fait la promotion avant le 15 décembre 2004 et qu’elles ne les avaient pas abandonnées à la date à laquelle la demande de la Requérante a été annoncée (par. 16(5)).

 

[51]      M. Gerani a fourni la date de premier emploi de chacune des marques énumérées à l’égard du motif fondé sur l’alinéa 16(1)a). Il a également fourni le chiffre des ventes réalisées au Canada pour chacune des années de la période 1998‑2005. Ces chiffres sont ventilés en fonction de deux groupes : 1) ICEBERG et 2) les autres marques invoquées, collectivement, c’est‑à‑dire, une somme globale pour toutes ces marques.

 

[52]      M. Gerani a produit des étiquettes représentatives pour les marques suivantes (les numéros correspondent à ceux qui sont employés dans les actes de procédure : i) ICEBERG, iii) ICE JEANS, iv) ICE ICE ICEBERG, v) ICE HISTORY, vi) ICE J, vii) ICE B, viii) ICE ICEBERG et ix) ICE. Il a aussi produit des photos des marchandises associées aux marques invoquées suivantes : i) ICEBERG, iii) ICE JEANS, iv) ICE ICE ICEBERG, v) ICE HISTORY, vi) ICE J, vii) ICE B, et ix) ICE, ainsi que des annonces publiées dans des magazines à l’égard des marques : ICEBERG et iii) ICE JEANS.

 

[53]      J’estime que c’est la marque ICE des Opposantes qui ressemble le plus à la Marque de la Requérante. C’est donc à l’égard de cette marque que la position des Opposantes est le plus solide concernant le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a). L’appréciation du risque de confusion en rapport avec ce motif se fera donc en comparant les marques ICE et ICE LOUNGE. La date pertinente pour l’appréciation du risque de confusion dans le cadre de ce motif est la date de premier emploi revendiquée, à savoir le 15 décembre 2004 en l’espèce.

 

(a) Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[54]      La marque ICE des Opposantes possède un caractère distinctif inhérent. C’est aussi le cas de la marque ICE LOUNGE de la Requérante, mais à un degré moindre à l’égard des services de cette dernière, du fait que « lounge » décrit ces services. 

 

[55]      La preuve n’indique pas que la Marque de la Requérante soit devenue connue à un degré quelconque avant le 15 décembre 2004. Je ne puis établir dans quelle mesure la marque ICE des Opposantes est devenue connue avant cette date. 

 

 (b) La période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[56]      Les Opposantes affirment que la marque ICE est employée depuis 1987, tandis que la Requérante déclare que l’emploi de ICE LOUNGE a commencé le 15 décembre 2004.

 

(c) Le genre de marchandises, de services ou d’entreprise

[57]      La marque ICE des Opposantes est associée à des vêtements. La demande d’enregistrement de la Requérante vise des services de boîtes de nuit, restaurants et bars‑salons et sur des marchandises promotionnelles comprenant des vêtements et des accessoires vestimentaires ou de mode.  

 

(d) La nature du commerce

[58]      S’agissant des services de la Requérante, il semble évident que les voies de commercialisation des parties diffèrent. Toutefois, je ne suis pas en mesure d’apprécier si elles se recoupent pour ce qui est de leurs marchandises. Gilmar vend ses marchandises aux consommateurs canadiens par l'intermédiaire de distributeurs et d’établissements de vente au détail. Pour ce qui est de la Requérante, on ne sait pas si elle vend ses marchandises uniquement dans ses boîtes de nuit, restaurants et bars‑salons ou si elle a recours à d’autres voies.

 

e) Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent

[59]      La totalité de la marque ICE des Opposantes est incluse dans la Marque et en forme la première partie. En outre, j’estime qu’en dépit de différences d’ordre visuel et auditif et quant aux idées suggérées, les marques ICE et ICE LOUNGE se ressemblent passablement.

 

Autres circonstances

[60]      Il ressort clairement de la preuve que Gilmar a adopté des marques de vêtements dont le mot ICE forme la première partie. Des éléments de preuve établissent aussi que Seminvest a employé la marque ICEBERG en liaison avec des accessoires vestimentaires.

 

Conclusion relative à l’application de l’alinéa 16(1)a)

[61]      La Requérante ne m’a pas convaincue qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les vêtements ICE et les vêtements ICE LOUNGE. Même si la Requérante décrit ses vêtements comme des articles promotionnels, cela n’écarte pas le risque de confusion puisque sa Marque incorpore la totalité de la marque des Opposantes et que les voies de commercialisation susceptibles d’être employées pour la distribution des vêtements ne sont pas clairement établies. Compte tenu des différences significatives existant entre les articles vestimentaires et les services et autres marchandises de la Requérante, je suis d’avis que ces derniers ne créent pas de probabilité raisonnable de confusion. Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a) est donc retenu, mais seulement à l’égard des marchandises suivantes : chemises, tee-shirts, pulls d’entraînement, chapeaux, casquettes de baseball, vestes; à l’égard des autres marchandises et services, il est rejeté.

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)b)

[62]      Relativement à ce motif, les Opposantes doivent démontrer que leur demande a été produite avant le 15 décembre 2004 et qu’elle était toujours pendante à la date de parution de l’annonce de la demande d’enregistrement, à savoir le 21 septembre 2005 (par. 16(4)).

 

[63]      La marque ICE B et Dessin visée par la demande d’enregistrement no 1219582 invoquée par les Opposantes est reproduite ci‑dessous :


ICE B & Design

 

[64]      Cette marque a été enregistrée le 2 février 2006 pour emploi en liaison avec les marchandises suivantes : cuir et similicuir, nommément vestes, manteaux, pantalons, jupes, shorts, gilets, hauts, sacs à dos à armature, porte-monnaie, portefeuilles, porte-clés; malles et sacs de voyage; peaux d’animaux; cuirs bruts; cannes de marche; fouets, harnais et sellerie; vêtements d’athlétisme; vêtements de plage; tenues décontractées; vêtements pour enfants; vêtements pour bébés; vêtements hivernaux de plein air; vêtements imperméables; vêtements d’exercice; vêtements de pêche; vêtements de golf; vêtements de ski; tenues de soirée; vêtements de protection; vêtements de mariée; sous-vêtements; articles chaussants d’athlétisme; articles chaussants de plage; articles chaussants pour enfants; articles chaussants pour bébés; articles chaussants hivernaux de plein air; articles chaussants imperméables; articles chaussants d’exercice; articles chaussants de golf; articles chaussants de ski; articles chaussants de soirée; articles chaussants de sécurité; articles chaussants de mariée; chapeaux, casquettes et casques.

 

[65]      Les Opposantes se sont donc acquittées de leur fardeau de preuve initial.

 

[66]      M. Gerani atteste que Gilmar vend des marchandises au Canada sous la marque ICE B et Dessin depuis le 25 janvier 2004. Toutefois, cette déclaration n’est appuyée d’aucune pièce (étiquettes, photos des marchandises, factures, etc.)

 

[67]      L’examen des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) est, à l’égard de ce motif, moins favorable aux Opposantes que l’examen se rapportant au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a), étant donné que la marque ICE B et Dessin ressemble moins que ICE à ICE LOUNGE et que la preuve des Opposantes à l’égard de la marque ICE B et Dessin est moins abondante que celle qu’elles avaient soumise à l’égard de la marque ICE.

 

[68]      Ce motif est donc écarté.

 

Le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

[69]      La date pertinente pour l’évaluation du caractère distinctif est la date à laquelle l’opposition a été produite [Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

 

[70]      Les Opposantes ne se sont pas acquittées de leur fardeau de preuve initial à l’égard des faits sur lesquels elles appuient leurs septième et huitième motifs d’opposition. Ces motifs sont donc rejetés.

 

[71]      Pour satisfaire à leur fardeau de preuve initial à l’égard du sixième motif d’opposition, les Opposantes doivent démontrer que le 21 novembre 2005, au moins l’une des marques invoquées était devenue suffisamment connue pour priver de caractère distinctif la marque visée par la demande d’enregistrement [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, à la page 58 (C.F. 1re inst.)]. 

 

[72]      La preuve dont je dispose n’est pas suffisante pour me permettre de formuler une conclusion au sujet du caractère distinctif que possédait l’une ou l’autre des marques autres que ICEBERG des Opposantes le 21 novembre 2005. J’ai déjà conclu qu’il n’existe pas aujourd’hui de probabilité raisonnable de confusion entre les marques ICEBERG et ICE LOUNGE et l’examen de cette question en fonction de la date pertinente antérieure qui s’applique au présent motif ne modifierait pas cette conclusion.

 

[73]      Les motifs se rapportant au caractère distinctif sont donc tous rejetés.

 

Dispositif

[74]      Dans l'exercice du pouvoir qui m'a été délégué par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), le 12 novembre 2009.

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

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