Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de Platsch GmbH & Co. KG à la demande n° 1,038,472 produite par A.B. Dick Company en vue de l’enregistrement de la marque de commerce AMERICAN GRAFIX SERVICE & Design                                                             

 

Le 3 décembre 1999, A.B. Dick Company (la requérante) a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce AMERICAN GRAFIX SERVICE & DESIGN (la marque en cause), invoquant la priorité  sur la base d’une demande correspondante produite aux États-Unis. L’enregistrement de la marque en cause, qui est illustrée ci-dessous, a été demandé en liaison avec la réparation d’équipements et d’accessoires d’art graphique sur la double base de l’emploi projeté au Canada et de l’enregistrement et de l’emploi de la marque en cause aux États-Unis. Pendant le traitement de la demande, la requérante a produit une demande révisée dans laquelle elle a retiré la revendication de priorité.

AMERICAN GRAFIX SERVICE & DESIGN

Le droit à l’usage exclusif des mots AMERICAN et GRAPHIX SERVICE (non souligné dans l’original) en dehors de la marque en cause n’est pas accordé.

 

La demande a été publiée dans le Journal des marques de commerce du 12 septembre 2001. Je souligne que la description de la demande publiée dans le Journal des marques de commerce comporte une erreur, étant donné que la revendication de priorité y figurait.

 

Le 13 novembre 2001, Platsch GmbH & Co. KG (l’opposante) a produit une déclaration d’opposition. La requérante a produit une contre-déclaration le 4 avril 2002. Le 24 février 2004, l’opposante a obtenu l’autorisation de produire une déclaration d’opposition modifiée. Le 13 juin 2005, elle a également obtenu l’autorisation de produire une autre déclaration d’opposition modifiée en date du 24 mars 2005. Le 9 février 2006, la requérante a obtenu l’autorisation de produire une contre-déclaration modifiée dans laquelle elle a nié pour l’essentiel les motifs d’opposition.

 

Chacune des parties a produit des éléments de preuve et des observations écrites et était représentée à l’audience.

 

Au cours de l’audience, l’opposante a retiré les motifs d’opposition fondés sur la non‑conformité aux alinéas 30d), 30e) et 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi). En conséquence, les motifs d’opposition qui restent peuvent être résumés comme suit :

 

1.      La demande n’est pas conforme aux exigences de l’alinéa 30a) de la Loi, parce que l’état des services n’est pas dressé dans les termes ordinaires du commerce.

 

2.      La marque en cause n’est pas enregistrable au regard de l’alinéa 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce enregistrée GRAFIX & Design de l’opposante, qui se rapporte à des applicateurs servant à appliquer de la poudre sur la surface des matériaux en feuilles et devant être utilisés dans les machines à imprimer; à des générateurs servant à produire des mélanges de gaz-poudre; à des pièces de machines à imprimer, notamment des appareils de séchage à l’air chaud et aux infrarouges pour le séchage des couches de matériaux en feuilles.

 

  1. La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque en cause conformément aux alinéas 16(2)a) et 16(3)a) de la Loi, étant donné que les marques de commerce GRAFIX et GRAFIX & DESIGN ont précédemment été employées au Canada par l’opposante et le prédécesseur en titre de celle-ci en liaison avec des applicateurs servant à appliquer de la poudre sur la surface des matériaux en feuilles et devant être utilisés dans les machines à imprimer, avec des générateurs servant à produire des mélanges de gaz-poudre, et avec des pièces de machines à imprimer, notamment des appareils de séchage à l’air chaud et aux infrarouges pour le séchage des couches de matériaux en feuilles, et que les marques de commerce GRAFIX NORTH AMERICA et GRAFIX NORTH AMERICA & Design ont précédemment été employées au Canada par l’opposante et le prédécesseur en titre de celle-ci en liaison avec les services d’entretien et de réparation se rapportant aux marchandises de l’opposante.

 

4.      La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque en cause conformément aux alinéas 16(2)b) et 16(3)b), compte tenu de la demande d’enregistrement n° 818,271 que le prédécesseur en titre de l’opposante a produite à l’égard de la marque de commerce GRAFIX & Design.

 

5.      La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque en cause conformément aux alinéas 16(2)c) et 16(3)c), étant donné que l’opposante et le prédécesseur en titre de celle-ci ont antérieurement employé le nom commercial Grafix North America Inc. au Canada en liaison avec les services d’entretien et de réparation se rapportant aux marchandises de l’opposante.

 

  1. La marque en cause n’est pas distinctive parce qu’elle ne distingue pas et n’est pas adaptée à distinguer les services énumérés dans la demande des marchandises de l’opposante associées aux marques de commerce GRAFIX et GRAFIX & Design et des services d’entretien et de réparation de l’opposante associés aux marques de commerce GRAFIX NORTH AMERICA et GRAFIX NORTH AMERICA & Design et au nom commercial Grafix North America Inc.

 

La preuve de l’opposante

 

La preuve se compose des affidavits de Hans P. Platsch et de Robert C. Primeau.

 

L’affidavit de Hans P. Platsch

 

Monsieur Platsch est le directeur général de l’opposante depuis janvier 2001. De plus, il est le directeur général de Grafix Zerstäubungstechnik GmbH, également connue sous le nom de Grafix GmbH (ci-après Grafix GmbH), depuis 1982. Il est le principal actionnaire de l’opposante et de Grafix GmbH. Voici les paragraphes 4 et 5 de son affidavit :

 

[traduction]

4.   Jusqu’au 27 août 2001, je faisais affaires sous le nom de Grafix et j’étais le propriétaire de la marque de commerce GRAFIX (ci-après le prédécesseur de l’opposante). Le prédécesseur de l’opposante a autorisé par licence Grafix GmbH, sa filiale, à fabriquer et à vendre les produits GRAFIX qui sont décrits aux paragraphes 6 et 7 (ci-après appelés les produits GRAFIX) conformément aux normes et exigences de GRAFIX quant à la qualité.

 

5.   Depuis le 27 août 2001, l’opposante est le propriétaire des marques de commerce GRAFIX et les produits GRAFIX sont encore fabriqués et vendus par Grafix GmbH, sous licence, conformément aux normes et exigences de l’opposante quant à la qualité.

 

Je comprends que M. Platsch lui-même, qui faisait affaires sous le nom de Grafix, était le prédécesseur en titre (le prédécesseur) de l’opposante. Je souligne que la description des produits GRAFIX qui figure au paragraphe 6 de l’affidavit correspond à l’état déclaratif des marchandises portant le numéro d’enregistrement TMA507,663. La description des produits GRAFIX apparaissant au paragraphe 7 de l’affidavit correspond à l’état déclaratif des marchandises et des services de la demande n° 1,053,781. J’aimerais également préciser que toute ambiguïté découlant de l’emploi par M. Platsch de l’expression « produits GRAFIX » pour désigner l’ensemble des marchandises et des services sera tranchée contre l’opposante [voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.)].

 

Monsieur Platsch déclare que l’opposante et le prédécesseur de celle-ci ont employé au Canada la marque de commerce GRAFIX & Design, portant le n° d’enregistrement TMA507,663, depuis 1987 ou avant et la marque de commerce GRAFIX & Design de la demande n° 1,053,781 depuis mai 2000. Il fournit des copies de l’enregistrement et de la demande imprimés à partir de la base de données Strategis le 28 octobre 2002. Il appert des notes de l’enregistrement n° TMA507,663 que l’opposante est devenue le titulaire de cet enregistrement par suite d’une cession consentie par Grafix Hans Platsch le 27 août 2001. Les marques de commerce GRAFIX & Design, que M. Platsch appelle collectivement les marques GRAFIX, sont illustrées ci-dessous :

 

Enregistrement n° TMA507,663         Demande n° 1,053,781

GRAFIX & DESIGN                                       GRAFIX & Design

(« marque enregistrée »)                      (« marque en instance »)

 

J’estime qu’une preuve d’emploi de la marque en instance au sens de l’article 4 de la Loi peut constituer une preuve d’emploi de la marque enregistrée, et vice versa [voir Canada (Registraire des marques de commerce) c. Cie internationale pour l'informatique CII Honeywell Bull, S.A., (1985) 4 C.P.R. (3d) 523 (C.A.F.), et Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535 (C.O.M.C.)]. De plus, toute preuve d’emploi de la marque enregistrée ou de la marque en instance peut constituer une preuve d’emploi de la marque de commerce GRAFIX alléguée dans la déclaration d’opposition.

 

Monsieur Platsch déclare que les produits GRAFIX vendus de façon continue au Canada sous les marques GRAFIX couvrent principalement deux types d’accessoires utilisés dans l’imprimerie, soit les dispositifs de séchage pour les films d’encre imprimés et les pulvérisateurs de poudre. Les produits GRAFIX permettent d’éviter que les feuilles collent ensemble après l’impression. MONSIEUR Platsch ajoute qu’au cours des 20 dernières années, l’opposante, le prédécesseur de celle-ci et Grafix GmbH ont conçu des produits visant à améliorer le séchage aux rayons ultraviolets et infrarouges et les appareils de séchage à l’air chaud. Il fournit des copies de brochures qu’il décrit comme des exemples de brochures préparées à l’intention des clients de l’opposante et du prédécesseur de celle-ci. Je souligne qu’aucun renseignement n’est fourni au sujet de la distribution des brochures aux consommateurs canadiens. De plus, le nom « Grafix GmbH » ou « Grafix GmbH Zerstäubungstechnik », suivi d’une adresse en allemand, apparaît au bas de la page arrière de chaque brochure, mais non le nom de l’opposante. Bien que la marque enregistrée ou la marque en instance figure dans les brochures, cette preuve n’établit pas l’emploi en liaison avec les marchandises au sens du paragraphe 4(1) de la Loi [voir Clairol International Corp. c. Thomas Supply & Equipment Co. Ltd (1968), 55 C.P.R. 176]. Cependant, les quatre dernières brochures comportent des photographies illustrant la marque en instance sur un panneau de commande, sur des pulvérisateurs de poudre ou sur des appareils de séchage. De plus, M. Platsch fournit des étiquettes qui [traduction] « sont employées en liaison avec les produits GRAFIX » et sur lesquelles figure la marque en instance. Même si je ne suis pas convaincue que les brochures permettent en soi de conclure que la marque en instance est apposée sur tous les produits GRAFIX, il m’apparaît raisonnable de conclure que cette marque est apposée sur certains d’entre eux.

 

Monsieur Platsch souligne qu’une bonne partie des produits GRAFIX sont vendus aux fabricants mondiaux de presses à imprimer. Ces fabricants intègrent les produits GRAFIX dans des ateliers d’imprimerie complets. Monsieur Platsch fournit des lettres de tierces parties à titre de preuve du fait que des machines à imprimer intégrant des produits GRAFIX ont été importées au Canada. Cependant, je rejette ces lettres, parce qu’elles constituent une preuve par ouï-dire inadmissible.

 

Je reproduis ci-dessous les paragraphes 14 et 15 de l’affidavit :

 

[traduction]

14.  GRAFIX GmbH livre également une partie des produits GRAFIX au représentant exclusif pour le territoire de l’Amérique du Nord, GRAFIX LLC (et antérieurement, aux prédécesseurs en titre de celle-ci, GRAFIX NORTH AMERICA INC. et Stout Grafix Inc.). GRAFIX LLC et ses prédécesseurs agissent à titre de représentant exclusif de l’opposante au Canada depuis 1979 et depuis plus de 20 ans aux États-Unis. Grafix LLC est une filiale en propriété exclusive de Grafix GmbH.

 

15.La pièce H jointe au présent affidavit se compose de copies de différentes factures concernant les services de réparation et d’entretien qu’a fournis GRAFIX NORTH AMERICA INC. au Canada au fil des années sous le nom commercial GRAFIX NORTH AMERICA INC. Ces services sont maintenant fournis par GRAFIX LLC depuis le printemps dernier.

 

Je conviens avec la requérante que les allégations qui précèdent sont ambiguës. Il suffit de dire que M. Platsch ne précise pas la période au cours de laquelle Grafix North America Inc. et Stout Grafix Inc. ont agi à titre de représentant exclusif pour le territoire de l’Amérique du Nord. Étant donné qu’aucun détail n’est fourni au sujet des activités du représentant exclusif, il est permis de déduire, tout au plus, que ces activités concernent les services d’entretien et de réparation se rapportant aux produits GRAFIX. En tout état de cause, étant donné que toute ambiguïté doit être tranchée à l’encontre de l’opposante, je rejette les paragraphes 14 et 15. J’ajouterais que le rejet des factures n’a aucun effet sur l’issue de l’affaire, étant donné que ces factures portent uniquement sur les années 1985, 1991, 1992 et 1997. De plus, le nom Grafix North America Inc. apparaît sur les factures, mais non la marque de commerce GRAFIX NORTH AMERICA & Design. J’ajouterais également qu’au cours de l’audience, le mandataire de l’opposante a reconnu qu’aucun élément de preuve n’avait été présenté au sujet de l’emploi de la marque de commerce GRAFIX NORTH AMERICA & Design.

 

Monsieur Platsch déclare que les produits GRAFIX représentent une part importante des machines à imprimer vendues par les grands fabricants d’équipements d’imprimerie. Il fournit le volume approximatif de machines à imprimer comportant des produits GRAFIX qu’auraient vendues les grands fabricants d’équipements d’imprimerie en Amérique du Nord en 1997. En plus de constituer du ouï-dire, les données provenant de Grafix North America Inc. n’ont pas été réparties par pays. Je n’accorde donc aucun poids à ces données et aux allégations que M. Platsch a formulées à leur égard.

 

Monsieur Platsch affirme que les clients typiques des produits GRAFIX vendus un peu partout au Canada par le représentant exclusif de l’opposante ou par l’entremise des plus grands fabricants mondiaux sont des imprimeries, habituellement des centres d’imprimerie de moyenne et grande tailles, qui se spécialisent dans l’impression de magazines, de catalogues en couleurs et d’autres produits similaires.

 

Enfin, je n’accorde aucune importance aux allégations de M. Platsch concernant le risque de confusion pouvant exister dans l’industrie de l’imprimerie, parce qu’il s’agit de questions qu’il appartient au registraire de trancher.

 

L’affidavit de Robert C. Primeau

 

Monsieur Primeau est à l’emploi de Heidelberg Canada Graphic Equipment Limited (HCGE) depuis 1987. À la date de son affidavit (31 octobre 2002), il était vice-président principal, Finances et exploitation de HCGE, filiale de Heidelberg Druckmaschinen Aktiengesellschaft (Heidelberg), qui se trouve en Allemagne. Monsieur Primeau déclare que Heidelberg est l’un des plus grands fabricants mondiaux de machines à imprimer et que la part du marché canadien détenue par HCGE a atteint environ 50 p. 100 au cours des dix années précédant la date de son affidavit.

 

Selon M. Primeau, les activités que poursuit Heidelberg pour le marché canadien comprennent la fourniture d’équipements d’imprimerie prêts à l’emploi, y compris des presses à imprimer fabriquées par Heidelberg et des accessoires d’impression fabriqués par Heidelberg, par les filiales de celle-ci ou par des tierces parties comme Grafix GmbH. Heidelberg intègre certains accessoires d’impression fournis par Grafix GmbH, comme des pulvérisateurs de poudre et des appareils de séchage, dans les équipements d’imprimerie qu’elle fournit à ses clients canadiens. MONSIEUR Primeau affirme que ces accessoires portent la marque de commerce GRAFIX.

 

Selon M. Primeau, au cours des dix années précédant la date de son affidavit, environ 30 p. 100 en moyenne des équipements d’imprimerie vendus au Canada par Heidelberg comprenaient des accessoires d’impression fournis par Grafix GmbH. Les clients typiques de Heidelberg au Canada sont des imprimeries, habituellement des centres d’imprimerie de moyenne et grande tailles spécialisés dans l’impression de magazines, de catalogues en couleurs et d’autres produits similaires.

 

Je conviens avec la requérante qu’aucun élément de preuve ne montre que HCGE a acheté des accessoires d’imprimerie directement à l’opposante ou au prédécesseur de celle-ci à quelque moment que ce soit. Je conviens également avec la requérante que les ventes d’accessoires d’imprimerie de Grafix GmbH à Heidelberg ont lieu en Allemagne. De plus, la preuve présentée par M. Primeau au sujet des activités de Heidelberg constitue du ouï-dire à plusieurs égards. Il n’y a aucun renseignement permettant de conclure que M. Primeau a accès aux registres de Heidelberg ou qu’il aurait eu accès à ceux-ci depuis 1987. Qui plus est, aucune explication n’a été donnée au sujet des raisons pour lesquelles une personne ayant une connaissance directe des activités de Heidelberg n’aurait pu fournir la preuve [voir R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531]. En conséquence, je ne suis pas convaincue que l’affidavit de M. Primeau constitue une preuve fiable de l’emploi des marques GRAFIX en liaison avec les produits GRAFIX au Canada au sens du paragraphe 4(1) de la Loi.

 

La question du contrôle

 

Au cours de mon analyse de la preuve de l’opposante, je dois examiner l’argument de la requérante selon lequel ni l’opposante non plus que le prédécesseur de celle-ci ne peuvent invoquer l’emploi des marques GRAFIX par Grafix GmbH comme le permet le paragraphe 50(1) de la Loi, parce qu’il n’y a aucun élément de preuve établissant un contrôle direct ou indirect sur les activités de Grafix GmbH.

 

L’opposante n’a présenté aucun accord de licence en preuve, mais l’article 50 de la Loi n’exige pas d’entente écrite. Une preuve du contrôle exercé par le propriétaire de la marque de commerce peut appuyer l’existence d’un accord de licence tacite [voir Well’s Dairy Inc. c. UL Canada Inc. (2000), 7 C.P.R. (4th) 77 (C.F. 1re inst.)].

 

J’ai du mal à comprendre comment Grafix GmbH aurait pu être une filiale de M. Platsch qui aurait été le prédécesseur de l’opposante. En tout état de cause, il est reconnu que la structure d’une entreprise en soi ne suffit pas à établir l’existence d’une licence au sens de l’article 50 de la Loi. Il doit également y avoir une preuve du fait que le propriétaire contrôle l’emploi de sa marque de commerce par ses filiales et qu’il prend des mesures pour préserver les caractéristiques et la qualité des marchandises et services fournis [voir MCI Multinet Communications Corp. c. MCI Multinet Communications Inc. (1995), 61 C.P.R. (3d) 245 (C.O.M.C.); Loblaws Inc. c. Tritap Food Broker (1999), 3 C.P.R. (4th) 108 (C.O.M.C.)]. Si l’opposante contrôle les caractéristiques ou la qualité des marchandises parce que M. Platsch est le principal actionnaire tant de l’opposante que de Grafix GmbH, M. Platsch aurait dû affirmer clairement qu’il en était ainsi [voir Automobility Distribution Inc. c. Jiangsu Electronics Industries Ltd. (2005), 43 C.P.R. (4th) 157 (C.O.M.C.)]. Cependant, M. Platsch est le directeur général de Grafix GmbH depuis 1982 et le directeur général de l’opposante depuis janvier 2001. Il m’apparaît donc possible de déduire que Grafix GmbH a employé les marques GRAFIX conformément à une autorisation obtenue verbalement de l’opposante et du prédécesseur de celle-ci ou conformément à une entente qui équivalait à une licence verbale et que, de ce fait, les marques GRAFIX sont demeurées sous le contrôle direct ou indirect de leur propriétaire [voir Lindy c. Registraire des marques de commerce (1999), 241 N.R. 362 (C.A.F.)]. Je suis donc d’avis que l’opposante a démontré qu’elle pouvait invoquer le paragraphe 50(1) de la Loi.

 

La preuve de la requérante

 

La preuve se compose des affidavits d’employés des anciens agents de marques de commerce de la requérante, soit Shelley Jones, agente de marques de commerce, Karen E. Thompson, recherchiste en marques de commerce, et Jean-Charles Grégoire et Iain Beaudoin, étudiants occupant un emploi d’été. L’opposante a obtenu une ordonnance l’autorisant à contre-interroger M. Beaudoin, mais elle n’a pas procédé à ce contre‑interrogatoire.

 

L’affidavit de Shelley Jones

 

Mme Jones présente en preuve les résultats des recherches qu’elle a menées sur l’Internet en juillet 2003 afin de trouver des exemples représentatifs de l’emploi du mot « graphics » et des équivalents phonétiques de celui-ci, « grafix » et « graphix », en liaison avec différents produits et services, y compris des exemples d’emploi de ces mots figurant près du mot « print ». Elle fournit les résumés des résultats de ses recherches ainsi que des copies de pages représentatives téléchargées depuis différents sites web. Les copies des pages de sites web ne peuvent servir de preuve de l’emploi de marques de commerce ou de noms commerciaux par des tiers au Canada. Tout au mieux, ces copies prouvent que les sites existaient sur le web lors des recherches en question.

 

L’affidavit de Karen E. Thompson

 

Madame Thompson présente en preuve les résultats de la recherche qu’elle a menée le 2 juillet 2003 dans la base de données CD NameSearch à l’égard des marques de commerce en instance et des marques de commerce enregistrées comportant le mot « graphics » ou « grafix » relativement à différents produits et services. Elle déclare que sa recherche a donné lieu à 137 marques de commerce, dont 111 sont enregistrées ou autorisées.

 

Il appert clairement de la jurisprudence que la preuve sur l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où elle permet de faire des déductions au sujet de l’état du marché. De plus, des déductions de ce type ne peuvent être tirées à partir de cette preuve que lorsqu’un nombre élevé d’enregistrements pertinents est trouvé [voir Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432 (C.O.M.C.); Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]. L’opposante soutient que les seules marques de commerce pertinentes sont celles qui comportent le mot « grafix ». À son avis, exception faite de ses marques GRAFIX, seules sept marques de commerce comportent le mot « grafix » et seulement deux sont associées aux services pertinents.

 

L’affidavit de Jean-Charles Grégoire

 

Monsieur Grégoire présente en preuve des extraits de définitions du mot « graphics » tirés de différents dictionnaires dont The Canadian Oxford Dictionary.

 

L’affidavit de Iain Beaudoin

 

Monsieur Beaudoin présente en preuve les résultats des recherches qu’il a menées en juillet 2003 dans l’annuaire téléphonique Canada 411 afin de trouver des entreprises dont le nom comporte le mot « grafix » (pièce A), « graphix » (pièce C) ou « graphics » (pièce D). Je souligne que, compte tenu des adresses municipales identifiées, il est évident que certains noms d’entreprise figurent plusieurs fois dans la même pièce. De plus, la preuve ne permet pas de déterminer le type d’entreprise exercée par les entités mentionnées dans les pièces A, C et D. Monsieur Beaudoin déclare qu’il a téléphoné aux entreprises mentionnées à la pièce A (45 inscriptions) afin de savoir depuis combien de temps elles étaient en affaires et si elles poursuivaient des activités dans le domaine de l’imprimerie. Monsieur Beaudoin présente un résumé des résultats de ses enquêtes (pièce B) et affirme qu’au moins 11 de ces entreprises sont actives depuis au moins dix ans. Je n’accorde aucun poids au témoignage de M. Beaudoin qui est fondé sur les résultats de conversations téléphoniques, car ce témoignage constitue une preuve par ouï-dire. En conséquence, il n’y a aucun élément de preuve montrant que l’une ou l’autre des entreprises mentionnées à la pièce A poursuit des activités dans les domaines pertinents.

 

Analyse des motifs d’opposition

 

L’alinéa 30a)

 

La date pertinente pour l’examen des circonstances concernant ce motif d’opposition est la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.)]. Il appartient dans un premier temps à l’opposante d’établir les faits qu’elle invoque au soutien du motif d’opposition. Une fois que l’opposante s’est déchargée de ce fardeau de preuve initial, il incombe à la requérante de prouver que le motif d’opposition ne devrait pas empêcher l’enregistrement de la marque en cause [voir Joseph E. Seagram & Sons Limited c. Seagram Real Estate Ltd. (1984) 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.); John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990) 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.)].

 

La déclaration d’opposition ne comporte aucune allégation à l’appui du motif d’opposition selon lequel les services ne sont pas décrits dans les termes ordinaires du commerce. Bien qu’elle n’ait produit aucun élément de preuve au sujet de ce motif d’opposition, l’opposante a expliqué ce motif dans son plaidoyer écrit et à l’audience. Dans McDonald's Corp. c. M.A. Comacho-Saldana International Trading Ltd. (1984) 1 C.P.R. (3d) 101 (C.O.M.C.), l’agent d’audience a conclu qu’il suffisait aux opposants de présenter un argument suffisant pour se décharger du fardeau de preuve initial qui leur incombe en ce qui concerne un motif d’opposition visé à l’alinéa 30a). Quant au critère à appliquer, le registraire des marques de commerce a décidé, dans Dubiner c. Heede International Ltd. (1975), 23 C.P.R. (2d) 128, qu’une partie requérante doit décrire clairement les marchandises ou services de la façon dont ils sont habituellement désignés dans le commerce.

 

Dans son plaidoyer écrit, l’opposante a soutenu que l’expression vague et imprécise « équipements et accessoires d’art graphique » ne permet pas de connaître avec précision le type d’équipements et d’accessoires que vise la demande et que, de ce fait, il est impossible de déterminer la nature exacte des services de réparation. Au cours de l’audience, le mandataire de l’opposante a ajouté que, d’après les définitions de dictionnaires présentées par la requérante en preuve, l’expression « équipements et accessoires d’art graphique » peut couvrir une gamme variée de produits. Au soutien de son motif d’opposition, l’opposante invoque la décision Everything for a Dollar Store (Canada) Inc. c. Dollar Plus Bargain Centre Ltd. (1998), 86 C.P.R. (3d) 269, où il a été conclu que la description [traduction] « exploitation de points de vente à rabais de marchandises » figurant dans l’état déclaratif des services n’était pas conforme aux exigences de l’alinéa 30a) de la Loi. Pour en arriver à cette conclusion, G.W. Partington, alors président de la Commission, a souligné que l’alinéa 30a) de la Loi [traduction] « exige une certaine précision en ce qui concerne les services visés par une demande d’enregistrement de marque de commerce ». Cependant, je suis d’avis qu’une distinction très nette peut être établie entre la décision Everything for a Dollar et la présente affaire. À mon sens, la requérante a eu raison de soutenir que les différentes décisions que G.W. Partington a examinées dans Everything for a Dollar permettent de conclure que la demande est conforme aux exigences de l’alinéa 30a) de la Loi. Bien que les mots « équipements et accessoires d’art graphique » ne soient peut-être pas suffisamment précis dans un état déclaratif de marchandises, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit d’un état déclaratif de services.

 

Compte tenu de ce qui précède, je rejette le motif d’opposition fondé sur la non-conformité à l’alinéa 30a) de la Loi.

 

L’alinéa 12(1)d)

 

Étant donné que l’opposante a prouvé qu’elle était propriétaire de l’enregistrement n° TMA507,663, il incombe maintenant à la requérante de convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucun risque raisonnable de confusion entre la marque en cause et la marque enregistrée. La date pertinente pour l’examen de la question de la confusion selon l’alinéa 12(1)d) est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corp c. Wickers/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

 

Le critère pertinent en ce qui a trait à la confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Le paragraphe 6(2) de la Loi énonce que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Lorsqu’il applique le critère de la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont explicitement mentionnées au paragraphe 6(5) de la Loi, soit a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage, c) le genre de marchandises, services ou entreprises, d) la nature du commerce, et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et il n’est pas nécessaire de donner à chacun de ces critères le même poids. [Voir Clorox Co. c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.), et Gainers Inc. c. Marchildon (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].

 

Dans les arrêts Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al, 2006 CSC 23, [2006] 1 R.C.S. 824, et (2006), 49 C.P.R. (4th) 401, et Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22, [2006] 1 R.C.S. 772, et (2006), 49 C.P.R. (4th) 321, la Cour suprême du Canada a décrit la démarche à suivre pour évaluer toutes les circonstances de l’espèce afin de savoir si deux marques de commerce prêtent à confusion.

 

Dans Veuve Clicquot Ponsardin, le juge Binnie a commenté le critère de la confusion comme suit :

 

20. Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue du nom Cliquot sur la devanture des boutiques des intimées ou sur une de leurs factures, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce VEUVE CLICQUOT et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.  Pour reprendre les termes utilisés par le juge Pigeon dans Benson & Hedges (Canada) Ltd. c. St. Regis Tobacco Corp., [1969] R.C.S. 192, p. 202 :

 

[traduction] Nul doute que si une personne examinait les deux marques attentivement, elle les distinguerait facilement.  Ce n’est toutefois pas sur cette constatation qu'il faut se fonder pour déterminer s’il existe une probabilité de confusion.

 

 . . .les marques ne paraîtront pas côte à côte et [la Cour doit] essayer d'empêcher qu’une personne qui voit la nouvelle marque puisse croire qu’il s’agit de la même marque que celle qu’elle a vue auparavant, ou même qu’il s’agit d’une nouvelle marque ou d’une marque liée appartenant au propriétaire de l’ancienne marque. (Citant Halsbury’s Laws of England, 3e éd., vol. 38, par. 989, p. 590.)

 

Dans Mattel, Inc. le juge Binnie a formulé les commentaires suivants au sujet du consommateur :

 

56. Quel point de vue faut‑il alors adopter pour apprécier la probabilité d’une « conclusion erronée »?  Ce n’est pas celui de l’acheteur prudent et diligent.  Ni, par ailleurs, celui du « crétin pressé », si cher à certains avocats qui plaident en matière de commercialisation trompeuse : Morning Star Co‑Operative Society Ltd. c. Express Newspapers Ltd., [1979] F.S.R. 113 (Ch. D.), p. 117.  C’est plutôt celui du consommateur mythique se situant quelque part entre ces deux extrêmes, surnommé [traduction] « l’acheteur ordinaire pressé » par le juge en chef Meredith dans une décision ontarienne de 1927 : Klotz c. Corson (1927), 33 O.W.N. 12 (C.S.), p. 13.[…]

[…]

58. De toute évidence, le consommateur ne prend pas chacune de ses décisions d’achat avec la même attention, ou absence d’attention.  Il prend naturellement plus de précautions s’il achète une voiture ou un réfrigérateur, que s’il achète une poupée ou un repas à prix moyen : General Motors Corp. c. Bellows, [1949] R.C.S. 678.  Dans le cas de l’achat de marchandises ou de services ordinaires de consommation courante, ce consommateur mythique, quoique d’intelligence moyenne, est généralement en retard sur son horaire et a plus d’argent à dépenser que de temps à perdre à se soucier des détails.  Dans certains marchés, il conviendra de présumer le bilinguisme fonctionnel de cette personne : Four Seasons Hotels Ltd. c. Four Seasons Television Network Inc. (1992), 43 C.P.R. (3d) 139 (C.O.M.C.).  Pour ces consommateurs mythiques, l’existence des marques de commerce ou des noms commerciaux accélère et facilite les décisions d’achat.  Le droit reconnaît que, lorsque la nouvelle marque de commerce accroche leur regard, ils n’ont qu’un souvenir général et assez vague de la marque antérieure, aussi célèbre soit‑elle ou, ainsi qu’il est dit dans Coca‑Cola Co. of Canada Ltd. c. Pepsi‑Cola Co. of Canada Ltd., [1942] 2 D.L.R. 657 (C.P.), ils s’en souviennent comme le ferait [traduction] « une personne dont la mémoire n’est ni bonne ni mauvaise, avec ses imperfections habituelles » (p. 661).  La norme applicable n’est pas celle des personnes [traduction] « qui ne remarquent jamais rien », mais celle des personnes qui ne prêtent rien de plus qu’une [traduction] « attention ordinaire à ce qui leur saute aux yeux » : Coombe c. Mendit Ld. (1913), 30 R.P.C. 709 (Ch. D.), p. 717.  Or, si ces consommateurs occasionnels ordinaires plutôt pressés sont susceptibles de se méprendre sur l’origine des marchandises ou des services, le critère prévu par la loi est rempli.

 

C’est en gardant ces principes généraux à l’esprit que j’évaluerai maintenant le risque de confusion entre la marque en cause et la marque enregistrée.

 

Alinéa 6(5)a) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

 

L’opposante soutient que la marque enregistrée est foncièrement distinctive. Elle fait valoir que, étant donné que le mot « grafix » n’est pas un mot du vocabulaire français ou anglais, l’orthographe fantaisiste de ce mot est une création originale et distinctive. Je reconnais que le mot « grafix » n’est pas un mot du dictionnaire. Néanmoins, il constitue une déformation évidente du mot « graphics » (graphique) qui, selon le premier sens donné dans The Oxford Canadian Dictionary, s’entend [traduction] « des produits des arts graphiques, p. ex., l’illustration ou le dessin commercial ». En ce qui concerne la marque en cause, il est évident que la requérante a reconnu la connotation descriptive que comportent les termes « American » et « grafix service » en refusant d’accorder le droit à l’usage exclusif de ces mots en dehors de la marque en cause en liaison avec les services. En conséquence, malgré les caractéristiques graphiques de chacune d’elles, aucune des marques de commerce des parties n’est intrinsèquement forte.

 

Il n’y a aucun élément de preuve établissant l’emploi de la marque en cause. La preuve de l’opposante ne me permet pas de tirer la moindre conclusion au sujet de la mesure dans laquelle la marque enregistrée est devenue connue au Canada. De plus, l’existence de l’enregistrement me permet de présumer, tout au plus, qu’il y a eu un emploi minime de la marque enregistrée [voir Entre Computer Centers, Inc. c. Global Upholstery Co. (1992), 40 C.P.R. (3d) 427 (C.O.M.C.)]. En conséquence, la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues est peu significative.

 

Alinéa 6(5)b) : la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

 

L’enregistrement de la marque en cause a été demandé sur la double base de l’emploi projeté au Canada ainsi que de l’enregistrement et de l’emploi aux États-Unis. Je reconnais que la marque déposée a été enregistrée en fonction de son usage au Canada depuis 1987 ou avant. Cependant, l’opposante ne m’a pas convaincue qu’elle avait établi un emploi continu de la marque enregistrée pendant près de 20 ans. De plus, même s’il m’a semblé raisonnable de conclure que la marque enregistrée est apposée sur certains des produits GRAFIX, l’opposante n’a présenté aucun élément de preuve fiable montrant l’emploi de cette marque enregistrée au Canada. Par conséquent, la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage devient aussi peu significative. C’est pourquoi il ne m’apparaît pas nécessaire d’examiner l’argument de la requérante selon lequel l’intégration des produits GRAFIX dans les presses à imprimer n’établit pas l’emploi des marques GRAFIX, parce que ce sont les presses qui sont vendues plutôt que les produits GRAFIX.

 

Alinéas 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

 

Lors de l’examen du genre de marchandises et de services ainsi que de la nature du commerce, c’est à partir de l’état déclaratif des services figurant dans la demande et de l’état déclaratif des marchandises apparaissant dans l’enregistrement qu’il faut évaluer le risque de confusion selon l’alinéa 12(1)d) de la Loi [voir Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.); Miss Universe, Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.)].

 

La marque enregistrée est associée « à des applicateurs servant à appliquer de la poudre sur la surface des matériaux en feuilles et devant être utilisés dans les machines à imprimer, à des générateurs servant à produire des mélanges de gaz-poudre et à des pièces de machine à imprimer, notamment des appareils de séchage à l’air chaud et aux infrarouges pour le séchage des couches de matériaux en feuilles ». Il appert de la preuve de l’opposante que les marchandises visées par l’enregistrement sont vendues principalement aux fabricants d’équipements d’imprimerie qui intègrent les marchandises dans des installations d’imprimerie, y compris des presses à imprimer, destinées aux centres d’imprimerie de moyenne et grande tailles. Les services associés à la marque en cause correspondent à la réparation d’équipements et d’accessoires d’art graphique. La requérante n’a présenté aucun élément de preuve au sujet de ses services et de ses réseaux de distribution.

 

Eu égard à la preuve au dossier, il m’apparaît raisonnable de conclure que les services de réparation d’équipements et d’accessoires d’art graphique peuvent être perçus comme des services liés aux marchandises visées par l’enregistrement. Il m’apparaît également raisonnable de conclure qu’il y a chevauchement entre les réseaux de distribution, étant donné que les imprimeurs de magazines, de catalogues en couleurs et d’autres documents similaires utilisent probablement les services d’entreprises qui réparent des équipements et accessoires d’art graphique.

 

Je souligne que la requérante reconnaît l’existence d’un lien entre ses services et les marchandises visées par l’enregistrement. Toutefois, elle soutient que les marchandises et services spécialisés des parties seraient offerts à des clients sophistiqués qui prendront soin de faire une distinction entre les marques de commerce, étant donné, surtout, que le mot « grafix » est général et courant dans l’industrie. Indépendamment des lacunes de la preuve qu’elle a présentée au sujet de l’utilisation répandue du mot « grafix » ou « graphics », cet argument de la requérante serait peut-être plus valable si celle-ci avait présenté des éléments de preuve au sujet de ses services et de ses réseaux de distribution.

 

Eu égard à ce qui précède, je conclus que tant le genre de marchandises et de services que la nature du commerce favorisent l’opposante.

 

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

 

Le dernier critère à examiner est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Dans la plupart des cas, il s’agit du facteur dominant et les autres facteurs jouent un rôle accessoire dans l’évaluation des circonstances de l’espèce [voir Beverly Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstery Ltd., (1980) 47 C.P.R. (2d) 145, conf. 60 C.P.R. (2d) 70]. Il est reconnu qu’au moment d’appliquer ce critère, il ne faut pas décomposer la marque de commerce en ses éléments constitutifs, mais il faut plutôt la considérer dans son ensemble.

 

Je souligne que les couleurs suivantes ont été revendiquées comme caractéristique de la marque enregistrée : le fond est bleu, le mot GRAFIX est écrit en lettres blanches et le dessin est bleu et blanc. Je conviens avec la requérante qu’un examen des marques de commerce dans leur ensemble montre des différences entre elles. Néanmoins, le mot « grafix » figure clairement dans les deux marques de commerce. En conséquence, je souscris à l’argument de l’opposante selon lequel le mot « grafix » de la marque en cause est probablement l’élément dont le consommateur se souviendra. Je reconnais que les mots « American » et « service » de la marque en cause donnent lieu à des différences entre celle-ci et la marque enregistrée dans le son. Cependant, je ne crois pas que ces mots engendrent des différences importantes entre les idées qu’ils suggèrent, parce qu’ils se rapportent tous deux au mot « grafix ».

 

À mon avis, l’examen global du degré de ressemblance entre les deux marques de commerce dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent favorise l’opposante.

 

Lorsque j’ai appliqué le critère de la confusion, j’ai examiné la question du point de vue de la première impression et du vague souvenir. Je suis d’avis qu’il existe une possibilité raisonnable que la marque en cause incite les consommateurs à croire que les services associés à celle‑ci proviennent de la même source que les marchandises liées à la marque enregistrée ou qu’ils sont par ailleurs associés à l’opposante. En conséquence, il n’est pas nécessaire que j’examine l’argument de celle-ci au sujet de la preuve concernant l’état du registre pour conclure en faveur de l’opposante. Même si je convenais avec la requérante que les marques de commerce comportant le mot « graphics » ou « grafix » sont pertinentes, je conclurais, tout au plus, que la preuve sur l’état du registre est une circonstance de l’espèce qui égalise les chances entre une conclusion en faveur de l’existence d’un risque de confusion et une conclusion contraire. Étant donné qu’il appartient à la requérante de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la marque en cause ne crée pas de confusion avec la marque enregistrée, j’arriverais encore à une décision défavorable à la requérante.

 

Eu égard à ce qui précède, je conclus que la requérante ne s’est pas déchargée du fardeau qu’elle avait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la marque en cause ne crée pas de confusion avec la marque enregistrée. En conséquence, j’accueille le motif d’opposition fondé sur la confusion avec la marque de commerce GRAFIX & Design portant le numéro d’enregistrement TMA507,663.

 

Absence de droit

 

Je rejette dès le départ les motifs d’opposition relatifs à l’absence de droit à l’enregistrement qui sont prévus aux alinéas 16(2)b) et 16(3)b), parce qu’ils ont été mal plaidés. La demande alléguée avait déjà été enregistrée (n° TMA507,663) à la date de publication de la demande relative à la marque en cause [voir Governor and Co. of Adventurers of England trading into Hudson’s Bay c. Kmart Canada Ltd. (1997), 76 C.P.R. (3d) 526 (C.O.M.C.)].

 

La date pertinente en ce qui concerne l’examen des circonstances relatives à l’existence du droit à l’enregistrement conformément aux paragraphes 16(2) et 16(3) de la Loi est la date de production de la demande. Bien qu’il appartienne à la requérante de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucun risque raisonnable de confusion entre la marque en cause et les marques de commerce et le nom commercial allégués dans la déclaration d’opposition, l’opposante doit d’abord établir que ceux-ci étaient en usage à la date pertinente et n’avaient pas été abandonnés à la date de publication de la demande [paragraphe 16(5) de la Loi].

 

Après avoir examiné la preuve de l’opposante, je ne suis pas convaincue que celle‑ci a établi, comme elle devait le faire, l’usage antérieur de l’une ou l’autre des marques de commerce alléguées au soutien des motifs d’opposition relatifs à l’absence de droit à l’enregistrement. Je rejette donc les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 16(2)a) et 16(3)a) de la Loi.

 

Je suis également d’avis que l’opposante ne s’est pas déchargée du fardeau de preuve initial qui lui incombait en ce qui concerne les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 16(2)c) et 16(3)c) de la Loi. Subsidiairement, étant donné qu’il n’y a aucun élément de preuve établissant le droit de propriété afférent au nom commercial allégué, je rejetterais ces motifs d’opposition parce qu’ils ont été mal plaidés, étant donné que l’opposante peut invoquer uniquement l’usage antérieur du nom commercial allégué par elle-même ou son prédécesseur.

 

Caractère distinctif

 

Il appartenait d’abord à l’opposante de montrer que ses marques de commerce et son nom commercial allégués étaient devenus suffisamment connus le 13 novembre 2001 pour nier le caractère distinctif de la marque en cause [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd., 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.); Bojangles’ International, LLC et Bojangles Restaurants, Inc. c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F. 1re inst.), et Metro-Goldwyn-Meyer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)]. Après avoir examiné la preuve de l’opposante, je conclus que celle-ci ne s’est pas déchargée de ce fardeau. En conséquence, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif.

 

Conclusion

 

Compte tenu de ce qui précède, et dans l’exercice des pouvoirs qui me sont conférés en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 15 JUIN 2007.

 

 

Céline Tremblay

Présidente intérimaire

Commission des oppositions des marques de commerce

 

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