Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

AFFAIRE CONCERNANT L’OPPOSITION

de Culinar Inc. à la demande no 873,247

produite par National Importers Inc.

en vue de l’enregistrement de la marque de commerce CARAMELLA

 

Le 25 mars 1998, National Importers Limited (maintenant National Importers Inc., ci-après la requérante) a produit une demande (ci-après la demande) d’enregistrement de la marque de commerce CARAMELLA.  La demande est basée sur l’emploi projeté de la marque au Canada en liaison avec les marchandises suivantes :

« produits alimentaires, nommément produit à tartiner à utiliser en cuisson, et en boulangerie et pâtisserie ».

La demande a été annoncée, aux fins de toute opposition éventuelle, dans le Journal des marques de commerce du 10 mars 1999.

Le 30 juin 1999, Culinar Inc. a produit une déclaration d’opposition à la demande.  La déclaration d’opposition a été transmise à la requérante le 10 août 1999.

Selon le premier motif d’opposition, contenu dans la déclaration d’opposition, la marque de commerce n’est pas enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce [ci-après la Loi] parce qu’elle crée de la confusion avec les marques déposées TMA444815-AH CARAMEL! et TMA441509-CARAMEL & Design de l’opposante.

Selon le deuxième motif d’opposition, la requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce en vertu de l’alinéa 16(3)a) de la Loi parce que, à la date de dépôt de la demande, c.-à-d. le 25 mars 1998, la marque de commerce créait de la confusion avec les marques de commerce AH CARAMEL! et CARAMEL & Design de l’opposante, lesquelles avaient été antérieurement employées au Canada par l’opposante ou par ses prédécesseurs en titre en liaison avec des marchandises et services.

Selon le troisième motif d’opposition, la marque de commerce n’est pas distinctive de la requérante eu égard à l’article 2 de la Loi étant donné l’adoption, l’emploi et l’enregistrement des marques de commerce AH CARAMEL! et CARAMEL & Design par l’opposante.

Le 10 novembre 1999, la requérante a produit et signifié une contre -déclaration dans laquelle elle niait globalement les motifs d’opposition de l’opposante.

Le 21 février 2000, l’opposante a produit à titre de preuve la déclaration solennelle de Dino Dello Sbarba, vice-président exécutif, Ventes et Marketing de la société opposante.  M. Dello Sbarba n’a pas été contre-interrogé en ce qui concerne sa déclaration solennelle.

Le 19 septembre 2000, la requérante a produit à titre de preuve l’affidavit de Linda Joyce Elford, recherchiste en marque de commerce, et l’affidavit de Casey Wust, vice-président et chef de l’exploitation de la société requérante.  Ni l’une ni l’autre de ces personnes n’ont été contre-interrogées en ce qui concerne leur affidavit.

Dans sa déclaration solennelle, M. Dello Sbarba indique que les activités de l’opposante consistent à fabriquer, à distribuer, à commercialiser et à vendre divers produits alimentaires, notamment des produits vendus sous la marque de commerce AH CARAMEL!.  Selon l’auteur de la déclaration solennelle, la marque de commerce AH CARAMEL! a été enregistrée au Canada sous le numéro TMA444 815 depuis le 30 juin 1995, et elle a été employée au Canada depuis aussi tôt que le 11 mai 1995.  Il indique qu’à chaque année entre 1996 à 1999, les ventes des produits et services aux distributeurs sous la marque de commerce AH CARAMEL! se sont élevées de vingt-quatre à vingt-sept millions de dollars.  Il indique également que les produits vendus sous la marque de commerce AH CARAMEL! sont disponibles partout au Canada chez diverses sources, notamment des épiceries.  Il a joint à son affidavit, comme pièce DDS-2, des copies de factures représentatives indiquant la vente de produits sous la marque de commerce AH CARAMEL! à divers endroits au Canada.  Il a également joint à son affidavit, comme pièce DDS-3, des emballages représentatifs sur lesquels figure la marque de commerce AH CARAMEL!  Finalement, M. Dello Sbarba a joint à son affidavit, comme pièce DDS-4, des échantillons de documents promotionnels sur lesquels figure la marque de commerce AH CARAMEL!, et il indique que l’opposante a dépensé au minimum 100 000 $ par année depuis 1995 pour la publicité et la promotion.

Dans son affidavit, Casey Wust indique que la requérante a commencé à employer la marque de commerce CARAMELLA au Canada en liaison avec un produit à tartiner à utiliser en cuisson, et en boulangerie et pâtisserie depuis mai 1999.  Est joint à l’affidavit de Wust, comme pièce A, un échantillon d’étiquette qui, selon l’auteur de l’affidavit, est apposée sur le produit CARAMELLA de la requérante.  M. Wust indique que la requérante a vendu son produit CARAMELLA à des épiceries et à des marchés d’alimentation partout au Canada, y compris au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à Terre-Neuve, au Québec, en Ontario, au Manitoba, en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique.  Est jointe à l’affidavit de Wust, comme pièce B, une liste des magasins qui ont acheté le produit CARAMELLA de la requérante entre mai 1999 et mars 2000.  Est jointe à l’affidavit de Wust, comme pièce C, une copie d’une annonce promotionnelle sur laquelle figure la marque de commerce CARAMELLA.  Finalement, l’auteur de l’affidavit indique qu’il n’a pas eu connaissance de cas de confusion, que ce soit au niveau du détaillant ou du consommateur, entre le produit CARAMELLA de la requérante et les produits qui, selon les allégations, sont vendus par l’opposante sous ses marques de commerce AH CARAMEL! ou CARAMEL & Design.

Dans son affidavit, Linda Elford, recherchiste en marque de commerce, indique que les agents de la requérante lui ont demandé de mener une recherche dans les registres du Bureau des marques de commerce du Canada afin de repérer toutes les marques de commerce déposées et en suspens dans lesquelles il y a les lettres « CARAM » en liaison avec des « produits alimentaires ».  L’auteur de l’affidavit a joint à son affidavit, comme pièce A, les résultats de ses recherches avec le « CD NameSearch » du Bureau des marques de commerce du Canada.  Sont jointes à l’affidavit de Elford, comme pièce B, des copies des enregistrements et des demandes d’enregistrement des marques de commerce figurant dans son rapport de recherche établi à partir des registres du Bureau des marques de commerce du Canada.

La requérante et l’opposante ont produit des arguments écrits.  Il n’y a pas eu d’audition orale.

La date pertinente en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi est la date de la présente décision [voir : Park Avenue Furniture Corp. v. Wickes/ Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].  Dans la présente affaire, la date pertinente en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement est le 25 mars 1998, c’est-à-dire la date de dépôt de la demande [voir l’article 16 de la Loi].  Il est généralement reconnu, que la date pertinente en ce qui concerne la question du caractère distinct est la date de dépôt de l’opposition (dans la présente affaire, le 30 avril 1999) [voir Andres Wines Ltd. and E&J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 à la p. 130 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412 à la p. 424 (C.A.F)].

 

À l’appui des motifs d’opposition, l’opposante, dans sa déclaration d’opposition, mentionne ses numéros de marques de commerce déposées TMA444, 815-AH CARAMEL! et TMA441, 509-CARAMEL & Design.  Même si dans les éléments de preuve et l’argumentation écrite de l’opposante, il n’est fait mention que de la marque de commerce AH CARAMEL!, j’ai quand même pris en considération les deux marques en ce qui concerne les motifs d’opposition invoqués dans la présente affaire.

Pour déterminer s’il y a un risque raisonnable de confusion entre les marques de commerce en litige en application du paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles qui sont expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.  Toutefois, il est évident que la liste des circonstances susmentionnées n’est pas exhaustive et que le poids à donner à chaque facteur peut varier en fonction des circonstances [voir par exemple, Clorox Co. v. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.) et Gainers Inc. v. Marchildon (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].  De plus, comme l’a signalé le juge Cattanach dans Beverly Bedding & Upholstery Co. v. Regal Bedding & Upholstery Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145, confirmée par 60 C.P.R. (2d) 70:

[TRADUCTION] « Suivant une évaluation pratique, le plus souvent, c’est le degré de ressemblance entre les marques de commerce sur le plan de la présentation, du son et des idées qu’elles suggèrent qui est le facteur le plus important; ce degré de ressemblance est le facteur dominant et les autres facteurs jouent un rôle subordonné dans l’ensemble des circonstances de l’espèce.»

En ce qui concerne le caractère distinctif inhérent des marques en litige, c’est le mot « CARAMEL » qui domine et qui est descriptif des marchandises liées.  Il y a une jurisprudence considérable qui appuie le fait que les mots descriptifs des marchandises liées à la marque ne peuvent pas faire l’objet d’un monopole en faveur d’un seul commerçant.  Par exemple, dans la décision de la Chambre des lords Cleaning Services Ltd. v. Westminster Window & Gen'l Cleaners Ltd. (1946), 63 R.P.C. 39, lord Simonds a indiqué ce qui suit [en examinant les noms 'Office Cleaning Services Ltd.' et 'Office Cleaning Association'] :

 

[TRADUCTION] « En fin de compte, je crois qu’il s’agit tout simplement de ceci : quand un commerçant décide que son nom commercial contiendra des mots courants, il y aura, inévitablement, une certaine confusion.  Mais le risque est acceptable, sauf si le premier utilisateur est autorisé injustement à s'approprier pour lui seul ces termes.  Le tribunal acceptera des différences peu importantes comme étant suffisantes pour éviter toute confusion.  Il faut s'attendre à une plus grande discrimination de la part du public lorsqu'un nom commercial est formé en tout ou en partie de termes qui décrivent les articles vendus ou les services offerts.

Dans General Motors Corp. v. Bellows (1949), 10 C.P.R. 101, le juge a cité le passage susmentionné et a statué que FRIGIDAIRE ne créerait probablement pas de confusion avec FROZENAIRE, même si les deux marques étaient employées en liaison avec les réfrigérateurs.

De plus, dans Ultravite Laboratories Ltd. v. Whitehall Laboratories Ltd. (1965) 44 C.P.R. 189, le juge Spence, au nom de la Cour suprême du Canada, a statué que DANDRESS ne créait pas de confusion avec RESDAN, même si les deux marques étaient employées en liaison avec un produit antipelliculaire.   M. le juge Spence a cité avec approbation l’affaire General Motors, précitée, et a fait les observations suivantes :

[TRADUCTION] « Il est tout à fait évident que les deux mots RESDAN et DANDRESS sont formés par une partie du mot« dandruff », et, évidemment, le mot « dandruff » est un mot ordinaire dans le commerce.  Je suis d’avis que l’opposition de l’intimé à l’utilisation de la syllabe “dand” serait, selon le juge Rand, dans General Motors v. Bellows, précitée, une appropriation en bloc du seul terme convenable disponible ».

Il ressort clairement de ce qui précède que les éléments descriptifs des marques de commerce sont considérés faibles et qu’aucun commerçant n’a le droit de monopoliser un terme comme CARAMEL en liaison avec des produits alimentaires.  Il n’est pas étonnant, compte tenu de sa nature descriptive, que l’opposante ait renoncé au droit à l’usage exclusif du mot CARAMEL en dehors de la marque de commerce à l’égard de ses deux enregistrements.

Même si les marques de commerce de l’opposante et la marque de commerce de la requérante ont un certain caractère distinctif inhérent en raison de leurs éléments additionnels, les éléments en question sont relativement mineurs par rapport à la domination du mot CARAMEL et, par conséquent, le caractère distinctif inhérent de chacune des marques est relativement faible.

La mesure dans laquelle les marques sont devenues connues favorise clairement l’opposante car, selon la déclaration solennelle de Dello Sbarba, la marque de commerce AH CARAMEL! a été employée largement au Canada de 1995 à 1998, et durant cette période des ventes de plus de 75 000 000 $ ont été réalisées à des distributeurs, et, pour 1999, des ventes de 27 000 000 $ sont prévues.  Même si la marque visée par la demande d’enregistrement a été, selon l’affidavit de Wust, employée au Canada de mai 1999 à la date de l’affidavit (le 27 juillet 2000), aucun chiffre de vente se rapportant au produit CARAMELLA n’a été produit.

La période pendant laquelle les marques ont été en usage favorise également l’opposante.  Comme il a été signalé ci-dessus, les éléments de preuve produits par l’opposante démontre l’emploi de la marque de commerce AH CARAMEL! au Canada de 1996 à la date de la déclaration solennelle de Dello Sbarba (le 16 février 2000).  Selon l’affidavit de Wust, la marque visée par la demande d’enregistrement a été en usage au Canada pour seulement un peu plus d’un an, de mai 1999 à la date de l’affidavit (le 27 juillet 2000).

En ce qui concerne la genre de marchandises et la nature du commerce des parties, les marchandises de la requérante sont désignées de la façon suivante dans sa demande d’enregistrement :

« produits alimentaires, nommément produit à tartiner à utiliser en cuisson, et en boulangerie et pâtisserie ».

Dans l’enregistrement AH CARAMEL! de l’opposante, les marchandises sont décrites de la façon suivante :

« grignotines et desserts, nommément gâteaux, pâtisseries, pâtisseries danoises, muffins, beignes, barres granola, pâtes feuilletées et craquelins ».

Dans l’enregistrement CARAMEL & Design de l’opposante, les marchandises sont décrites de la façon suivante :

« produits alimentaires, nommément gâteaux ».

Pour évaluer un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d), ce sont les états des marchandises de la requérante et de l’opposante qui doivent être examinés [voir : Mr. Submarine Ltd. v. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.) aux pages 10-11; Henkel Kommanditgesellschaft Auf Aktien v. Super Dragon Import Export Inc. (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (C.A.F.) à la page 112; et Miss Universe, Inc. v. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.) aux pages 390-392].  Toutefois, les états des marchandises doivent être interprétés dans le but de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce voulu par les parties, et les éléments de preuve se rapportant aux commerces véritables des parties peuvent être utiles [voir McDonald's Corp. v. Coffee Hut Stores Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.) à la page 169].

Dans la présente affaire, il semble, selon la déclaration solennelle de Dello Sbarba, que la marque de commerce AH CARAMEL! de l’opposante est employée en liaison avec des biscuits miniatures prêts à manger.  La marque de commerce visée par la demande d’enregistrement, selon la demande d’enregistrement, est destinée à l’usage en liaison avec «…produit à tartiner à utiliser en cuisson, et en boulangerie et en pâtisserie ».  La publicité jointe, comme pièce C, à l’affidavit de Wust indique que le produit est « parfait en tant que produit à tartiner sur les rôties ou pour accompagner un dessert ».  Il est clair que les marchandises des parties respectives, même si elles tombent sous la catégorie de « produits alimentaires », sont différentes, le produit de l’opposante étant un biscuit ou un dessert prêt à manger, le produit de la requérante étant principalement destiné à accompagner d’autres produits alimentaires.

En ce qui concerne la nature des commerces, les produits des deux parties semblent, selon les éléments de preuve produits, être vendus dans des établissements semblables, comme des épiceries.

En ce qui concerne le degré de ressemblance entre les marques de commerce en litige, la marque de commerce visée par la demande d’enregistrement et les marques de commerce de l’opposante ont une certaine similitude sur le plan visuel, phonétique et dans les idées qu’elles suggèrent, car « CARAMEL » est l’élément dominant dans toutes les marques.  Toutefois, il est bien établi en droit que lorsqu’on évalue le risque de confusion entre des marques, il faut examiner les marques dans leur totalité et ne pas les disséquer [voir, par exemple Park Avenue Furniture Corp. v. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.) et Ultravite Laboratories Ltd. v. Whitehall Laboratories Ltd. (1965), 44 C.P.R. 189 (C.S.C.)].  Dans la présente affaire, lorsqu’on examine les marques en litige dans leur totalité, j’arrive à la conclusion que la marque de commerce visée par la demande d’enregistrement n’est pas vraiment si semblable aux marques de l’opposante.  Cela est particulièrement vrai si on examine, comme il est mentionné ci-dessus, des marques dominées par des mots d’usage courant, de petites différences sont alors suffisantes pour les distinguer.

Comme circonstance additionnelle, la requérante a produit l’affidavit de Elford pour tenter d’établir qu’il existe un certain nombre de marques de tiers qui comprennent l’élément « CARAM », dans la base de données du Bureau des marques de commerce du Canada, et qui sont employées en liaison avec des produits alimentaires.  La jurisprudence est claire, les éléments de preuve  « basés sur l’état du registre » ne sont pertinents que si l’on peut en tirer des conclusions sur l’état du marché : voir Ports International Ltd. v. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432  (COMC) et Del Monte Corporation v. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.).  L’affaire Kellogg Salada Canada Inc. v. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.) appuie la proposition voulant que des conclusions sur l’état du marché ne peuvent être tirées des éléments de preuve basés sur l’état du registre que s’il y a un grand nombre d’enregistrements pertinents qui sont repérés.

 

Sont joints à l’affidavit de Elford, comme pièce B, un certain nombre de marques de tiers qui comprennent le mot CARAMEL (ou de légères variations de celui-ci) et qui sont utilisés en liaison avec des produits alimentaires.  Par exemple, les enregistrements suivants sont révélés : 18 CARA-MEL pour du chocolat (no d’enrg. TMA441,640); CARAMEL CONE EXPLOSION pour de la crème glacée (nd’enrg. 424,692); CARAMEL PECANBON pour des produits de boulangerie (nd’enrg. TMA522,307); CARAMEL WHIRLS pour des bonbons (no d’enrg. TMA457, 697); CARAMELLO pour des tablettes de chocolat (TMA210, 706); CARAMILK pour des tablettes de chocolat et des confiseries en crème glacée (no d’enrg. UCA10536); CARAMIUM pour de la garniture au caramel écossais (no d’enrg. TMA259, 211); CARAMOOMEL pour un produit à tartiner à base de lait qui peut être également utilisé comme garniture (no d’enrg. TMA384, 586); JUNIOR CARAMELS pour des bonbons (no d’enrg. TMA377, 168); JERSEY CARAMELS pour des tablettes de chocolat (no d’enrg. TMA208, 400); MIGHTY CARAMEL pour des confiseries glacées et des glaces de fantaisie (no d’enrg. TMA 455, 552); SHIRIFF BEURRE DE CARAMEL SPREAD & Design pour des produits à tartiner au caramel (no d’enrg. TMA383, 102); SUPER CARAMEL CRUNCH pour des gâteaux (no d’enrg. TMA520, 752).  Même si la requérante n’a pas produit d’élément de preuve quant à l’emploi de ces marques sur le marché, je suis prête à conclure, sur la base du grand nombre de marques révélées, qu’un certain nombre de ces marques sont probablement en usage.

 

Le fait qu’il y ait un nombre important de marques de tiers qui comprennent le mot CARAMEL (ou de légères variations de celui-ci) qui sont utilisées en liaison avec des produits alimentaires, réduit l’application de la protection que pourrait recevoir la marque de l’opposante.  Dans l’affaire Cara Operations Ltd. v. Lowney’s Ltd. (1976), 27 C.P.R. (2d) 265, des éléments de preuve basés sur l’état du registre similaires ont été invoqués, et voici les observations faites par le registraire des marques de commerce intérimaire à cet égard :

 

[TRADUCTION] « Il ressort clairement de l’état du registre et des éléments de preuve produits dans la présente affaire que “Cara” est utilisé couramment comme élément faisant partie d’une marque en liaison avec des confiseries.  La marque CARA utilisée comme élément de marques en liaison avec des confiseries, est la première partie du mot caramel.  Le caramel est un produit à base de sucre qui plaît au goût d’un grand nombre de consommateurs de confiserie.  Étant donné le grand nombre d’enregistrement ayant le préfixe “cara”, l’emploi d’un grand nombre de marques comprenant le préfixe “cara” en liaison avec des confiseries et la différence entre les marques CARA & Design et la marque CARA-CORN, j’arrive à la conclusion que la marque CARA-CORN de la requérante, telle que celle-ci est employée avec les marchandises que sont les maïs éclatés confits, ne risque pas de créer de la confusion au Canada avec la marque CARA & Design de l’opposante, telle que celle-ci est employée avec des noix mélangés, des arachides et des noix-cajou.  En ce qui concerne l’emploi de la marque CARA en liaison avec des tablettes de chocolat, j’arrive à la conclusion que cet emploi n’a pas été établi par l’opposante.  Si je me trompe et que l’opposante a employé la marque CARA en liaison avec des tablettes de chocolat, je suis d’avis qu’étant donné l’état du registre et l’usage courant de "Cara" comme élément de marques employées par différents fabricants au Canada pour distinguer leurs confiseries, j’arrive à la conclusion que la marque CARA-CORN de la requérante ne crée pas de confusion avec la marque CARA employée en liaison avec des tablettes de chocolat par l’opposante.»

 

 

Dans la présente affaire, j’arrive à la conclusion que les résultats des recherches de Elford appuient ma conclusion antérieure, à savoir que l’élément CARAMEL des marques de commerce en litige est faible et qu’aucun commerçant n’a le droit de monopoliser une terme comme CARAMEL en liaison avec des produits alimentaires.

Comme dernière circonstance en l’espèce, la requérante a fait valoir, qu’étant donné que M. Wust a indiqué dans son affidavit qu’il n’était au courant d’aucun incident de confusion entre les marques de commerce, que ce fait devrait favoriser la requérante.  Toutefois, il n’est pas clair, d’après l’affidavit de Wust, si la requérante dispose d’un mécanisme en place pour l’informer de tels incidents de confusion.  Ce fait, combiné au fait qu’il n’y a pas d’élément de preuve réel quant aux ventes concomitantes des produits de la requérante et de l’opposante réalisées au Canada, m’amène à conclure qu’on ne doit pas accorder beaucoup d’importance aux observations de M. Wust à cet égard.

Dans son argumentation écrite, la requérante a mentionné l’affaire Salada Foods Ltd. v. John MacIntosh & Sons Ltd. (1964), 43 C.P.R. 230, dans laquelle la présente commission a rejeté l’opposition du propriétaire de la marque de commerce CARAMIA, laquelle était utilisée en liaison avec des gaufrettes, à une demande d’enregistrement de la marque CARAMAC en liaison avec des gâteaux, biscuits, craquelins et garnitures.  Dans ladite affaire, le registraire des marques de commerce à l’époque a statué que la partie dominante des deux marques était dérivée du mot « caramel » et que les différences entre les marques de commerce, qui consistaient en leurs suffixes respectifs, étaient suffisantes pour les distinguer.  Il en est de même dans la présente affaire, je suis d’avis que les différences entre les marques de commerce sont suffisantes pour les distinguer.

Dans son argumentation écrite, l’opposante a fait valoir que la requérante a simplement pris l’élément le plus distinctif de la marque AH CARAMEL! de l’opposante, à savoir  (“AH”) et l’a placé à la fin de sa marque.  Même si des marques de commerce avec des éléments inversés peuvent, dans certaines circonstances, créer de la confusion, je n’arrive pas à la conclusion que cet argument est particulièrement convaincant dans la présente situation, surtout que la marque de commerce de la requérante est “CARAMELLA” et non “CARAMEL AH”.

Ayant pris en considération toutes les circonstances de l’espèce, et surtout le fait que le seul élément commun entre les marques est le mot descriptif CARAMEL, j’arrive à la conclusion que la requérante s’est acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait d’établir qu’il n’y a pas de risque raisonnable de confusion avec les marques de commerce déposées de l’opposante.  Par conséquent, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi.

En ce qui concerne le deuxième motif d’opposition, afin de s’acquitter du fardeau de la preuve qui lui incombait à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(3)a), l’opposante doit produire assez d’éléments de preuve pour établir que ses marques ont été employées avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la requérante (dans la présente affaire, le 25 mars 1998).  De plus, en vertu des paragraphes 16(5) et 17(1) de la Loi, il incombe à l’opposante d’établir qu’elle n’a pas abandonné ses marques de commerce à la date de l’annonce de la demande d’enregistrement de la requérante (dans la présente affaire, le 10 mars 1999).  Dans ses éléments de preuve produits, l’opposante ne mentionne pas sa marque de commerce CARAMEL & Design qui est l’objet du numéro d’enregistrement TMA441509, mais ses éléments de preuve établissent clairement que sa marque de commerce AH CARAMEL! était employée au Canada depuis avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la requérante et qu’elle n’a pas été abandonnée à la date de l’annonce de la marque de commerce de la requérante.

La plus grande partie de mes observations antérieures en ce qui concerne le risque de confusion s’appliquent également au présent motif, la seule exception étant que, selon les éléments de preuve de la requérante, il n’y avait pas eu d’emploi de la marque de commerce visée par la demande d’enregistrement à la date pertinente qui permet de prendre en considération le présent motif d’opposition (la date de dépôt étant le 25 mars 1998).  Par conséquent, même si la prise en considération de la mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et de la période durant laquelle elles ont été en usage est encore plus favorable à l’opposante à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’article 16, je suis quand même d’avis que la prise en compte de toutes les circonstances de l’espèce m’amène à conclure qu’il n’y a pas de risque de confusion entre les marques en litige.  Par conséquent, je rejette également le deuxième motif d’opposition de l’opposante.

Selon le troisième et dernier motif d’opposition, la marque de commerce de la requérante n’est pas distinctive, car elle n’est pas apte à distinguer les marchandises de la requérante des marchandises de l’opposante.  Encore une fois, même si les éléments de preuve de la requérante indiquent que la marque de commerce visée par la demande d’enregistrement n’était pas employée à la date pertinente pour prendre en considération le présent motif d’opposition, je suis quand même d’avis que la prise en compte de toutes les circonstances de l’espèce m’amène à conclure qu’il n’y a pas de risque de confusion entre les marques en litige.  Par conséquent, je rejette également ce motif d’opposition de l’opposante.

Pour les motifs qui précèdent, conformément au pouvoir qui m’a été délégué par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition de l’opposante en vertu du paragraphe 38(8) de la Loi sur les marques de commerce.

FAIT À GATINEAU, QUÉBEC, CE 5 AOÛT 2004.

 

 

 

Jennifer McKay

Agente d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

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