Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de

l’Association médicale canadienne à la demande

no. 1,008,313 produite au nom de Dr. C. Soldan GmbH

en vue de l’enregistrement de la marque DR. C. SOLDAN

 

 

Le 12 mars 1999, Soldan Holding & Bonbonspezialitäten GmbH a produit une demande d’enregistrement de la marque DR. C. SOLDAN. La demande est fondée sur l’emploi et l’enregistrement de la marque en République fédérale allemande en liaison avec les marchandises suivantes : médicaments et préparations pharmaceutiques, nommément médicaments pour le traitement de rhumes, de grippes et de congestions; plâtre utilisé pour les bandages; insecticides et herbicides; désinfectants; cacao; chocolat; friandises, nommément chocolats, pastilles et losanges; levure; levure chimique; parfumerie; cosmétiques, nommément crèmes, poudres et lotions; huiles essentielles; savons cosmétiques; agents de lessive et de blanchiment; additifs colorés pour la lessive; agents détachants pour enlever les taches sur les vêtements; agents de nettoyage et de polissage pour le nettoyage et le polissage de bijoux. Le 7 décembre 2000, l’Office de la propriété intellectuelle du Canada a enregistré une cession en faveur de Dr. C. Soldan GmbH, ci-après « la requérante ».

 

La demande a été annoncée à des fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce en date du 6 juin 2001. L’opposante, l’Association médicale canadienne, a produit une déclaration d’opposition le 29 octobre 2001. La requérante a produit et signifié une contre-déclaration. La déclaration d’opposition a été modifiée le 26 juillet 2002 sur permission, et la requérante a par la suite modifié sa contre-déclaration.

 

Les motifs actuels d’opposition sont les suivants :

 

1.      La demande ne remplit pas les conditions prévues à l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce étant donné que la requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque de commerce au Canada compte tenu que l’emploi de la marque de commerce contrevient à certaines dispositions législatives, dont notamment l’article 33 de la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées de l’Ontario, laquelle interdit d’employer le mot DOCTOR et ses abréviations lorsque une personne, autre qu’un membre de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario, de l’Ordre des chiropraticiens de l'Ontario, de l’Ordre des optométristes de l'Ontario, de l’Ordre des psychologues de l'Ontario ou du Royal College of Dental Surgeons of Ontario, offre ou fournit des soins de santé à une personne physique. Des restrictions similaires ont été adoptées dans d’autres provinces. L’emploi de la marque de commerce est donc trompeuse puisqu’elle suggère que les marchandises de la requérante ont été approuvées par un docteur sans que cela soit le cas.

 

2.      La demande ne remplit pas les conditions de l’alinéa 30d) de la Loi puisque, à la date de production de la demande, la requérante n’avait pas employé sa marque en Allemagne en liaison avec toutes les marchandises décrites dans l’enregistrement allemand.

 

3.      La marque n’est pas enregistrable selon l’alinéa 12(1)a) de la Loi étant donné que le mot SOLDAN est principalement le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou décédé dans les trente années précédentes.

 

4.      La marque n’est pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)b) de la Loi vu qu’elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des marchandises et/ou des conditions de leur production à l’endroit du consommateur moyen qui tiendrait pour acquis que les marchandises ont été conçues, produites, vendues ou approuvées par un médecin qualifié sans que cela soit le cas.

 

5.      La marque n’est pas enregistrable selon l’alinéa 12(1)e) de la Loi en raison de ce qui suit :

 

i)                    L’adoption et/ou l’emploi des mots DR. C. SOLDAN sont interdits par le sous‑alinéa 9(1)n)(iii) de la Loi parce que la ressemblance est telle qu’on pourrait vraisemblablement confondre la marque avec une ou plusieurs des marques officielles de l’opposante – DR. (s.n. 912,299); Dr (s.n. 913,001); Doctor (s.n. 907,423); Doctor (s.n. 912,998); Docteur (s.n. 913,000).

 

ii)                  Le mot DOCTOR de même que son abréviation standard DR. et son équivalent phonétique dans les deux langues sont, en raison d'une pratique commerciale ordinaire et authentique, devenues reconnues au Canada comme désignant le genre et la qualité de services fournis par des médecins et l’opposante. C’est la raison pour laquelle la marque est interdite selon l’article 10 de la Loi.

 

iii)                L’adoption ou l’emploi de la marque est susceptible d’induire en erreur parce qu’elle suggère que les marchandises ont été approuvées ou vendues par un médecin qualifié sans que cela soit le cas. L’adoption de la marque est donc interdite par l’article 10.

 

iv)                L’adoption et/ou l’emploi de la marque sont interdites suivant l’alinéa 9(1)k) de la Loi parce que les mots DR. C. SOLDAN suggèrent faussement un rapport avec un particulier vivant.

 

6.  La marque n’est pas distinctive parce qu’elle ne distingue pas, et n’est pas adaptée à distinguer les marchandises de la requérante des marchandises et services des autres, notamment ceux de l’opposante, tout particulièrement parce que la marque induirait en erreur le public qui croirait que les marchandises ont été approuvées par un ou plusieurs professionnels de la santé.

 

Dans sa contre-déclaration, la requérante nie les allégations de l’opposante et déclare ce qui suit :

         L’opposante n’est pas une autorité publique et les marques officielles sur lesquelles elle s’appuie sont nulles.

 

         Le mot DOCTOR et son abréviation DR sont d’usage courant au Canada pour désigner des personnes, produits et services sans lien avec l’opposante, et ils sont couramment inscrits au registre des marques de commerce.

 

         L’opposante n’a jamais employé les marques officielles DOCTOR ou DR pour distinguer des biens ou des services.

 

         Le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif devrait être rejeté parce qu’il est insuffisamment étayé pour permettre à la requérante d’y répondre.

 

 

L’opposante a produit en preuve les affidavits de Leanne Mascolo et Samantha Jane Gervais.

 

La requérante a produit en preuve les affidavits de Shawn L.C. Peers et D. Jill Roberts. L’opposante s’est vu accorder une ordonnance autorisant le contre-interrogatoire de ces déposants, mais elle ne s’est pas prévalue de ce privilège.

 

Chaque partie a présenté une argumentation écrite. La requérante a ensuite produit une demande modifiée pour retirer les marchandises suivantes de son état déclaratif des marchandises : « plâtre utilisé pour les bandages, insecticides et herbicides, désinfectants, levure, levure chimique, agents de lessive et de blanchiment, additifs colorés pour la lessive, agents détachants pour enlever les taches sur les vêtements agents de nettoyage et de polissage pour le nettoyage et le polissage de bijoux ». En conséquence, l’état déclaratif des marchandises comprises dans la demande est maintenant ainsi rédigé : « médicaments et préparations pharmaceutique, nommément médicaments pour le traitement des rhumes, de grippes et de congestion; cacao; chocolat; friandises; nommément chocolats, pastilles et losanges; parfumerie; cosmétiques, nommément crèmes, poudres et lotions; huiles essentielles; savons cosmétiques. »

 

Les parties n’ont pas sollicité d’audience.

 

La requérante a la charge ultime d’établir, selon la prépondérance de la preuve, que sa demande remplit les conditions de la Loi sur les marques de commerce. Toutefois, l’opposante a la charge initiale de présenter une preuve admissible suffisante à partir de laquelle on puisse raisonnablement conclure à la véracité des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990) 30 C.P.R. (3d) 293, à la page 298. (C.F. 1re inst.)]. 

 

Preuve de l’opposante

Mme Mascolo, étudiante en droit au service de l’opposante, a fourni des copies des documents suivants :

         acte constitutif et règlements de l’opposante;

         document faisant état de la mission, de la philosophie et des valeurs de l’opposante;

         avis prévus à l’article 9 pour ce qui est des marques officielles DOCTOR et DR.;

         définitions du dictionnaire du mot « doctor » et de l’abréviation « Dr. » et du terme « health care »;

         certains articles de la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées de l’Ontario.

 

Mme Gervais, avocate, a présenté les documents suivants :

         les résultats d’une recherche menée le 30 juillet 2002 sur Internet dans le site Canada411 pour repérer des listes téléphoniques de personnes ayant pour nom de famille SOLDAN;

         une feuille imprimée sur laquelle on retrouve tous les produits apparaissant dans le site Internet de la requérante, www.soldan.com, en date du 30 juillet 2002.

 

Preuve de la requérante

M. Peers, avocat et agent de marque de commerce, a fourni la documentation suivante :

         des pages du site Internet de l’opposante, www.cma.ca, tel qu’il existait le 27 janvier 2003, accompagnées de sa déclaration portant qu’il a été incapable de repérer un seul emploi du mot DOCTOR ou de son abréviation DR. à titre de marques officielles dans ce site particulier;

         les résultats d’une recherche menée le 29 janvier 2003 dans le registre canadien des marques de commerce pour repérer les marques comprenant l’abréviation DR.;

         les résultats d’une recherche menée le 4 février 2003 dans le registre canadien des marques de commerce pour repérer les marques comprenant le mot DOCTOR;

         les résultats de recherches menées dans Internet le 28 janvier 2003 pour repérer le mot DOCTOR et l’abréviation DR.;

         les résultats de recherches menées en février 2003 dans différentes listes téléphoniques pour repérer des commerces dont le nom comprend le mot DOCTOR ou l’abréviation DR.;

         des définitions de dictionnaires du mot « doctor ».

 

Mme Roberts, commis juridique, a fourni la documentation suivante :

         des définitions de l’abréviation « DR » tirées de différents livres de référence;

         des pages tirées de 5 sites Internet qui emploient l’abréviation « DR. », nommément Dr. Seuss, Dr. Dobb’s, Dr. Science, Dr. Universe et Dr. Who;

         des copies d’emballage de produits pour les pieds DR. SCHOLL’S et de boissons gazeuses DR. PEPPER;

         des listes téléphoniques de commerces dont les noms comprennent l’abréviation « dr » ou le mot « doctor ».

 

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30

Le moment pertinent pour étudier les circonstances relatives au respect, par la requérante, des conditions posées à l’article 30 de la Loi est la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475].

 

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i) est rejeté parce que l’opposante n’a pas établi ni même invoqué que la requérante connaissait l’existence de dispositions législatives provinciales qui, selon l’opposante, lui interdisaient l’emploi de l’abréviation DR. lorsqu’elle a produit sa demande. En conséquence, la question de savoir si des telles dispositions interdisent l’emploi de la marque par la requérante n’a pas à être tranchée puisqu’il n’y a pas de fondement permettant de conclure que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque.

 

L’opposante se fonde sur le contenu du site Internet de la requérante pour s’acquitter de sa charge de présentation relative au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30d). Dans son argumentation écrite, l’opposante se fonde, en page 7, sur l’affidavit de Gervais pour soutenir sa prétention selon laquelle le site de la requérante ne mentionne pas un certain nombre de marchandises faisant l’objet de la demande. À la suite de l’échange des argumentations écrites, la requérante a retiré un certain nombre de marchandises de sa demande. En conséquence, les seules marchandises qui demeurent dans l’état déclaratif, et que l’opposante affirme ne pas vendre par l’intermédiaire de son site Internet tel qu’il était en date du 30 juillet 2002, sont : parfumerie, cosmétiques, nommément crèmes, poudres et lotions, savons cosmétiques. La requérante soutient que les ventes continues de cosmétiques et parfumerie se fondent sur l’énumération des produits suivants dans le site de la requérante : ACTIV gel, baume pour les pieds Begapinol, onguent contre les douleurs rhumatismales, alcoolat, gel douche. Je suis prêt à reconnaître que les « baumes » correspondent à un type de « parfumerie » et qu’un « gel douche » peut être considéré comme un « savon cosmétique », mais je ne puis considérer les autres marchandises annoncées comme des « cosmétiques, nommément crèmes, poudres et lotions ».

 

Je sais que l’énumération des marchandises dans le site Internet de la requérante, en date du 30 juillet 2002, n’indique pas nécessairement quelles étaient les marchandises vendues par elle en liaison avec sa marque allemande avant la production de la présente demande. Toutefois, il va sans dire qu’il n’est pas facile pour une tierce partie d’établir l’absence de ventes d’une requérante dans un pays étranger à n’importe quel moment, et à plus forte raison s’il faut remonter plusieurs années en arrière. Je crois donc que l’opposante s’est acquittée de sa légère charge de présentation. Il aurait été relativement facile pour la requérante de répondre en produisant des éléments de preuve établissant l’emploi de sa marque en Allemagne à la date pertinente en ce qui a trait aux marchandises contestées. Puisque cela n’a pas été fait, j’estime que la requérante ne s’est pas acquittée de la charge qui lui incombait, et donc ce motif d’opposition est accueilli en ce qui concerne les « cosmétiques, nommément crèmes, poudres et lotions ».

 

Il est à remarquer que, contrairement à ce que dit l’opposante, j’estime que sa preuve ne suffit pas à exiger de la requérante qu’elle prouve son emploi en Allemagne avant le 12 mars 1999 et ce, en liaison avec toutes les marchandises faisant l’objet de la demande. De plus, je soulignerais que la requérante ne peut alléguer qu’il est évident qu’elle emploie effectivement sa marque en Allemagne en liaison avec les cosmétiques, en prenant pour fondement l’information disponible dans Internet, et que l’opposante a préféré ne pas mettre en preuve; s’il y avait des pages pertinentes non fournies par l’opposante, la requérante aurait dû contre-interroger le déposant de l’opposante sur ce point, ou produire ces pages en question par l’intermédiaire de son propre déposant.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)a)

Je rejette le motif fondé sur l’alinéa 12(1)a) parce que l’opposante a soutenu que SOLDAN est constitué d’un mot qui est principalement le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes plutôt que d’avancer l’allégation appropriée qui aurait été que DR. C. SOLDAN est constitué d’un mot qui est principalement le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes. Subsidiairement, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)a) est rejeté parce que l’opposante n’a pas prouvé que la marque est constituée d’un mot qui est principalement le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes. D’abord, la marque n’est évidemment pas principalement un nom de famille. Ensuite, il n’y a pas de preuve voulant qu’il existe un particulier nommé DR. C. SOLDAN qui est vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes. Il est vrai que l’opposante a produit en preuve deux entrées téléphoniques au nom de « C. Soldan », mais il n’y a pas d’indication qui permettrait de croire que ces personnes pourraient être appelées « doctor ».

 

Motif d’opposition fondé sur le paragraphe 12(1)b)

La question de savoir si la marque de la requérante donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse doit être considérée du point de vue de l’acheteur moyen de ces marchandises. De plus, la marque ne doit pas être décomposée en ses différents éléments constitutifs ni soigneusement examinée, mais plutôt considérée globalement en s'en tenant à la première impression [voir Wool Bureau of Canada Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1978), 40 C.P.R. (2d) 25 (C.F. 1re inst.), aux pages 27 et 28; Atlantic Promotions Inc. c. Registraire des marques de commerce (1984), 2 C.P.R. (3d) 183 (C.F. 1re inst.), à la page 186]. La date pertinente applicable à l’alinéa 12(1)b) est la date de production de la demande [voir Zorti Investments Inc. c. Party City Corporation, Re demande no 766,534 (C.O.M.C.), 12 janvier 2004; Havana Club Holdings S.A. c. Bacardi & Company Limited, Re demande no 795,803, 12 janvier 2004 (C.O.M.C.); Fiesta Barbeques Limited c. General Housewares Corporation (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F. 1re inst.)].

 

Je ne comprends pas en quoi la marque donne censément une description claire de la nature ou de la qualité des marchandises, et je conclus que l’opposante a, en fait, seulement allégué que la marque donne une description fausse ou trompeuse. Je ne crois pas que le public interpréterait la marque comme donnant une description claire ou donnant une description fausse et trompeuse de la personne employée pour produire les marchandises, mais il semble vraisemblable que le public tiendrait pour acquis qu’il existe un particulier connu sous le nom de Dr. C. Soldan qui serait, d’une façon ou d’une autre, lié aux marchandises faisant l’objet de la demande. La question qui en découle est de savoir si cette situation serait de nature à tromper le public qui croirait qu’un médecin est lié aux marchandises. Le seul élément de preuve concernant les qualifications du Dr. C. Soldan consiste en la mention suivante qu’on retrouve dans le site Internet de la requérante : « produit contre la toux selon la recette du chimiste Dr. Soldan ». Dans son argumentation écrite, la requérante soutient qu’anciennement on nommait chimiste un professionnel qui aujourd’hui porterait probablement le titre de pharmacien. La requérante ne prétend pas que le Dr. C. Soldan était un médecin qualifié.

 

Je ne crois pas que la marque en litige donne une description fausse ou trompeuse des marchandises non pharmaceutiques parce que, dans ce cas, le public a moins de chance d’associer un médecin à de telles marchandises. Toutefois, en ce qui concerne les «  médicaments et préparations pharmaceutiques, nommément médicaments pour le traitement de rhumes, de grippes et de congestions », je crois qu’il est raisonnable de conclure que, selon la prépondérance de la preuve, le consommateur moyen interpréterait la marque, en s’en tenant à sa première impression, comme indiquant qu’un médecin du nom de Dr. C. Soldan est à l’origine de telles marchandises. Puisque la requérante n’a pas prouvé que le Dr. C. Soldan était médecin, la marque donne une description fausse et trompeuse au regard des «  médicaments et préparations pharmaceutiques, nommément médicaments pour le traitement de rhumes, de grippes et de congestions ».

 

Motif d’opposition fondé sur le sous-alinéa 9(1)n)(iii)

Dans la décision WWF-World Wide Fund for Nature c. 615334 Alberta Limited (2000), 6 C.P.R. (4th) 247 (C.O.M.C.), à la page 253, le commissaire Martin a étudié le critère applicable au sous-alinéa 9(1)n)(iii) en se reportant aux décisions Association des grandes soeurs de l’Ontario c. Les grands frères du Canada (1999), 86 C.P.R. (3d) 504 (C.A.F.); conf. (1997), 75 C.P.R. (3d) 177 (C.F. 1re inst.). Voici ce qu’il déclare :

   [TRADUCTION] Comme l’énonce le sous-alinéa 9(1)n)(iii) de la Loi, le critère applicable consiste à savoir si la marque du requérant est la marque officielle ou si elle lui ressemble tellement qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec la marque officielle. En d’autres mots, la marque de la requérante est-elle identique ou pratiquement identique à une quelconque marque officielle de l’opposante? : voir page 217 de la décision de première instance dans la décision Grandes soeurs susmentionnée. Aux pages 218 et 219 de la décision de première instance, le juge Gibson a confirmé que pour évaluer la ressemblance entre les marques en question, il faut tenir compte des facteurs énoncés à l’alinéa 6(5)e) de la Loi. De plus, à la page 218, le juge Gibson a indiqué que le critère applicable était celui de la première impression et du souvenir imparfait : voir aussi les pages 8 et 9 de l’arrêt non publié de la Cour d’appel fédérale intitulé L’Association olympique canadienne c. Techniquip Limited (dossier A-266-98; 10 novembre 1999).

 

En l’espèce, la marque de commerce de la requérante n’est identique à aucune marque officielle de l’opposante. De plus, alors que la marque Dr. C. SOLDAN comprend la marque officielle de l’opposante DR., j’estime que la marque de la requérante, lorsqu’elle est considérée dans son ensemble, comporte peu de ressemblances dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elle suggère avec la marque officielle DR. ou avec toute autre marque officielle de l’opposante. En conséquence, la marque de la requérante n’est pas pratiquement identique à l’une quelconque des marques de l’opposante, et il en découle que ce motif d’opposition est rejeté.

 

La requérante a présenté ses prétentions en relation avec les questions de savoir si l’opposante est en fait une autorité publique, et si elle a effectivement employé l’abréviation DR. ou le mot DOCTOR à titre de marques officielles avant leur publication suivant l’article 9. Je ne prends aucune décision en ce qui concerne ces questions, et nul n’est besoin de le faire étant donné ma conclusion selon laquelle la marque de la requérante ne contreviendrait pas de toute façon à l’article 9.

 

Motif d’opposition fondé sur l’article 10

Pour s’acquitter de la charge de présentation qui lui incombe relativement à son motif d’opposition fondé sur l’article 10, l’opposante devait produire des éléments de preuve pour établir que le mot DOCTOR (ou son abréviation DR.) est, en raison d'une pratique commerciale ordinaire et authentique, devenue reconnue au Canada comme désignant le genre et la qualité de services fournis par les médecins et l’opposante. Les services auxquels se reporte l’opposante demeurent pour moi obscurs, mais de toute façon j’estime que l’opposante ne s’est pas acquittée de sa charge initiale. Même si je prends connaissance judiciaire du fait que le mot DOCTOR (ou l’abréviation Dr.) est souvent associé à une personne qui est qualifiée comme médecin, je ne considère pas que la requérante a adopté une marque dont la ressemblance à l’abréviation DR. est telle qu'on pourrait vraisemblablement la confondre avec celle-ci comme l’exige le critère posé par l’article 10. En conséquence, la marque DR. C. SOLDAN ne contrevient pas à l’article 10 de la Loi.

 

J’ajouterais aussi que, comme l’a indiqué la requérante, l’abréviation DR. est également couramment employée par un certain nombre de professionnels de la santé qui ne sont pas médecins comme, par exemple, les dentistes et les chiropraticiens.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 9(1)k)

L’opposante allègue que la marque de la requérante suggère faussement un rapport avec un particulier vivant, mais n’a pas fait la preuve qu’il existe un tel particulier connu sous le nom de Dr. C. Soldan. En conséquence, je rejette ce motif parce que l’opposante ne s’est pas acquittée de sa charge initiale.

 

 

Motif d’opposition fondé sur le caractère non distinctif

La date pertinente en ce qui a trait au caractère non distinctif est la date de production de l’opposition [voir  Metro-Goldwyn-Meyer Inc. c. Stargate Connections Inc., 2004 CF 1185]. Je ne vois pas comment la marque de la requérante n’est pas adaptée à distinguer ses marchandises des marchandises et services de l’opposante ou de ceux des autres. La marque de la requérante est très précise, et ne se rapporte pas de façon générale à la profession médicale. De plus, la requérante a mis en preuve l’existence de nombreuses marques de commerce inscrites au registre canadien qui appartiennent à des tiers depuis le 29 octobre 2001, et qui contiennent l’abréviation DR. On peut tirer des inférences au sujet de l'état du marché à partir de la preuve fondée sur l’état du registre dans la mesure où cette preuve révèle un grand nombre d’enregistrements pertinents. [voir Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]. J’estime donc qu’il y a suffisamment de marques de commerce sur le marché qui comprennent l’abréviation DR. pour conclure que le public est capable de distinguer une marque comprenant cette abréviation d’une autre marque comprenant cette même abréviation en se fondant sur les mots qui suivent l’abrègement. En conséquence, ce motif d’opposition est rejeté.

 

Dispositif

En ma qualité de personne déléguée par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette l’opposition suivant le paragraphe 38(8) de la Loi quant aux marchandises « cacao; chocolat; friandises, nommément chocolats, pastilles et losanges; parfumerie; huiles essentielles; savons cosmétiques » et rejette la demande relativement aux marchandises « médicaments et préparations pharmaceutiques nommément médicaments pour le traitement de rhumes, de grippes et de congestions; cosmétiques, nommément crèmes, poudres et lotions ». [Voir Produits Ménagers Coronet Inc. c.. Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH (1986), 10 C.P.R. (3d) 492 (C.F. 1re inst.) compétence pour rendre une décision favorable à l’égard de partie seulement des marchandises.]

 

 

FAIT À GATINEAU (QUEBEC), LE 22 NOVEMBRE 2004.

 

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

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