Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSI-TION de Perks Coffee Limited à la demande no 1,058,640 produite par Blue Tree Hotels Investment (Canada), Ltd. (maintenant Blue Tree Hotels LP) en vue de l’enregistrement de la marque de commerce STANLEY PERKS AT BAYSHORE    ________________________

 

 

Le 11 mai 2000, Blue Tree Hotels Investment (Canada), Ltd. a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce STANLEY PERKS AT BAYSHORE (la marque) portant le numéro 1,058,640. Cette demande a depuis été cédée à Blue Tree Hotels LP. Blue Tree Hotels Investment (Canada), Ltd. et Blue Tree Hotels LP seront ci-après appelées collectivement la requérante.

 

La demande no 1,058,640 est fondée sur l’emploi projeté de la marque au Canada en liaison avec les marchandises et services suivants :

Marchandises :

1) Produits alimentaires, nommément vinaigrettes; marinades; chutneys; trempettes de focaccia.

Services :

1) Exploitation d’un bar, café et restaurant pour la vente d’aliments, et de boissons alcoolisées et non alcoolisées; et fourniture de services de traiteur.

 

La demande a été annoncée à des fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 19 décembre 2001. Le 16 mai 2002, Perks Coffee Limited (l’opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. La requérante a produit et signifié une contre-déclaration.

 

À titre de preuve visée par l’article 41 du Règlement sur les marques de commerce (1996) (le Règlement), l’opposante a produit l’affidavit de Mark Cullen, président de l’opposante, et des copies certifiées conformes des enregistrements canadiens des marques de commerce no 367,764 et no 464,085. M. Cullen a été contre-interrogé au sujet de son affidavit, et le dossier contient une copie de la transcription de même que des pièces et réponses données par suite des engagements pris.

 

À titre de preuve visée par l’article 42 du Règlement, la requérante a produit les affidavits de John L. Rogers, Bruce Malcolm MacMillan, Ida Crisostomo et Thomasina Carroll.

 

À titre de preuve visée par l’article 43 du Règlement, l’opposante a produit deux documents intitulés [TRADUCTION] « certificat de non-enregistrement » qui s’avèrent être une version électronique du certificat autorisé par la Direction des compagnies et des sûretés mobilières de la province d’Ontario. Je considère qu’une telle preuve ne fait pas partie de dossier puisqu’elle n’est pas conforme à l’article 42 du Règlement. La preuve dans une procédure en opposition doit être sous forme d’affidavit ou de déclaration solennelle ou de copie certifiée conforme d’un dossier conservé par le registraire des marques de commerce. [Voir l’article 54 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 (la Loi).]

 

Les parties ont produit une argumentation écrite, mais seule la requérante a participé à l’audience.

 

Motifs d’opposition

Les motifs d’opposition peuvent être résumés ainsi :

 

1.                  La demande ne satisfait pas aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi parce que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque au Canada en liaison avec les marchandises et les services décrits dans la demande d’enregistrement vu l’emploi et la révélation antérieurs

a)      des marques PERKS et PERKS Dessin enregistrées par l’opposante sous les numéros 464,085 et 367,764;

b)      de la marque non enregistrée PERKS Dessin (no 2) de l’opposante;

c)      des noms commerciaux « Perks », « Perks Coffee » et « Perks Coffee Limited » de l’opposante,

qui ont tous été employés antérieurement en liaison avec le café et café en grains, les beignes, muffins, croissants, danoises, pâtisseries et gâteaux au fromage, chemises, chapeaux et grosses tasses, et l’exploitation d’un établissement spécialisé dans la vente au détail et en gros de produits de boulangerie et de café; et les services de restaurant et de traiteur (les marchandises et services de l’opposante). La requérante connaissait ou aurait dû connaître les marques et noms commerciaux de l’opposante.

 

2.                  La marque n’est pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)d) de la Loi parce qu’elle crée de la confusion avec une marque ou une combinaison de marques déposées de l’opposante.

 

3.                  La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque suivant l’alinéa 16(3)a) de la Loi parce que, à la date du dépôt de la demande et à tout autre moment, la marque créait de la confusion avec une ou plusieurs marques de l’opposante, qui ont été employées antérieurement, et que l’opposante a fait connaître au Canada en liaison avec les marchandises et services de l’opposante.

 

4.                  La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque suivant l’alinéa 16(3)c) de la Loi parce que, à la date du dépôt de la demande et à tout autre moment, la marque créait de la confusion avec un ou plusieurs noms commerciaux de l’opposante, qui ont été employés antérieurement, et que l’opposante a fait connaître au Canada en liaison avec les marchandises et services de l’opposante.

 

5.                  La marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi parce qu’elle ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée à distinguer les marchandises et services de la requérante des marchandises et services des autres, notamment ceux de l’opposante.

 

Dates pertinentes

La date pertinente au regard des premier, troisième et quatrième motifs d’opposition est la date de dépôt de la demande. [Voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R. (3d) 469, page 475 et paragraphe 16(3).] La date pertinente au regard du second motif d’opposition est la date de ma décision. [Voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)] La date pertinente au regard du cinquième motif d’opposition est la date de dépôt de l’opposition. [Voir Metro-Goldwyn-Meyer Inc. c. Stargate Connections Inc.  (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.), à la page 324.]

 

Fardeau de la preuve

 

La requérante a le fardeau d’établir, selon la prépondérance de la preuve, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi. Un fardeau de présentation incombe cependant à l’opposante qui doit fournir une preuve admissible suffisante permettant de conclure raisonnablement que les faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition existent. [Voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, à la page 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)] De plus, selon les paragraphes 16(5) et 17(1) de la Loi, il incombe à l’opposante d’établir qu’elle n’a pas abandonné ses marques et ses noms à la date de l’annonce de la demande de la requérante.

 

Le premier motif d’opposition est rejeté parce que l’opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de présentation : elle n’a pas démontré que la requérante connaissait les droits antérieurs allégués par l’opposante lorsqu’elle a produit sa demande. De toute façon, lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée à l’alinéa 30i), un motif fondé sur cet alinéa ne devrait être accueilli que dans circonstances exceptionnelles comme en cas de preuve de mauvaise foi de la part du requérant. [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155.]

 

Le deuxième motif d’opposition est rejeté dans la mesure où il se fonde sur l’enregistrement no 367,764. Il en est ainsi parce que cet enregistrement a été radié le 9 novembre 2005, de sorte que l’opposante ne peut absolument pas s’acquitter de son fardeau initial d’établir qu’un tel enregistrement est, à ce jour, valablement inscrit.

 

Probabilité de confusion

Chacun des motifs d’opposition qui restent à trancher soulève la question de la possibilité de confusion.

 

Le critère applicable à la confusion en est un de première impression et de souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque crée de la confusion avec une autre marque lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liées à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Le paragraphe 6(3) énonce un critère similaire pour déterminer s’il existe une probabilité de confusion entre une marque et un nom commercial. En appliquant les critères relatifs à la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles spécifiquement énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi. Les éléments d’appréciation précisément énumérés à ce paragraphe sont les suivants : le caractère distinctif inhérent des marques ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; la période pendant laquelle les marques ou noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques ou noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

Dans l’arrêt Polo Ralph Lauren Corp. c. United States Polo Association et al. (2000), 9 C.P.R. (4th) 51 (C.A.F.), aux pages 58 et 59, le juge Malone a résumé ainsi les lignes directrices à suivre pour apprécier la probabilité de confusion :

 

L'examen de certains arrêts-clés fournit également des principes directeurs pratiques. Par exemple, la Cour doit se mettre à la place d'une personne ordinaire qui est familière avec la marque antérieure mais qui n'en a qu'un vague souvenir; la question à se poser est de savoir si un consommateur ordinaire, au vu de la marque postérieure, aura comme première impression que les marchandises avec lesquelles la seconde marque est employée sont en quelque façon associées à celles de la marque antérieure. S'agissant du degré de ressemblance dans la présentation, le son ou l'idée dont il est question à l'alinéa 6(5)e), les marques de commerce en cause doivent être examinées comme un tout. De la même façon, puisque c'est la combinaison des éléments qui constitue la marque de commerce et lui confère son caractère distinctif, il n'est pas correct, pour l'application du critère de la confusion, de placer les marques l'une en regard de l'autre et de comparer ou observer les ressemblances ou les différences des éléments ou des composantes de ces marques. En outre, les marques de commerce ne doivent pas être considérées séparément des marchandises ou services avec lesquels elles sont associées, mais en liaison avec ces marchandises ou services. Quand il s'agit de marques célèbres ou notoirement connues, il peut être plus difficile d'établir qu'il n'y a pas de probabilité de confusion, particulièrement quand le genre des marchandises est similaire. En dernier lieu, les facteurs énumérés au paragraphe 6(5) ne doivent pas nécessairement se voir attribuer le même poids. Chaque cas de confusion peut justifier qu'on accorde plus d'importance à l'un de ces critères.


 

Je vais apprécier la probabilité de confusion entre la marque de la requérante et la marque PERKS de l’opposante puisqu’il s’agit-là de l’argument le plus puissant de l’opposante.

 

Même si le mot « perks» a plus d’un sens, dans la mesure où les marchandises et services des parties se rapportent au café, le sens dominant serait celui du « café percolateur ». En conséquence, la marque PERKS de l’opposante n’est pas intrinsèquement forte. L’opposante a toutefois démontré que sa marque PERKS est devenue assez connue. En particulier, la marque PERKS a été employée de façon continue en Nouvelle-Écosse depuis au moins 1988 en liaison avec du café et des produits de boulangerie-pâtisserie ainsi qu’avec l’exploitation d’un établissement spécialisé dans la vente au détail de produits de boulangerie et les services de restaurant. De plus, les ventes et revenus en liaison avec ces marchandises et services s’élevaient à environ 15,5 millions de dollars avant 2000, et les ventes et revenus pour 2000, 2001, 2002 et 2003 ont atteint entre 2,5 et 3,3 millions de dollars.

 

Je conclus que la marque de la requérante est intrinsèquement plus distinctive que celle de l’opposante. Même si l’opposante a soutenu que les mots que la requérante a combinés avec le mot suggestif PERKS peuvent eux-mêmes être suggestifs du lieu, la marque dans son ensemble possède un caractère distinctif inhérent assez grand. De plus, comme il a été avancé par la requérante, la marque contient un jeu de mots en ce que le parc Stanley (Stanley Park) est situé à côté du lieu d’exploitation de son entreprise.

 

Je ne peux apprécier le degré de notoriété de la marque parce qu’aucune preuve n’a été fournie quant à l’étendue des ventes ou de la publicité en liaison avec la marque. Nous avons tout au plus devant nous une déclaration portant que la marque a été employée en premier lieu le 1er juin 2000. Aussi je conclus que la marque PERKS de l’opposante est devenue connue à une plus grande échelle que la marque de la requérante.

 

L’alinéa 6(5)b) étaye clairement la thèse de l’opposante étant donné qu’elle a commencé à employer sa marque PERKS plus de dix ans avant le premier emploi de la marque de la requérante.

 

Les marchandises, services et entreprises des parties sont extrêmement semblables sinon identiques. Les deux parties emploient leurs marques en liaison avec l’exploitation de cafés qui vendent du café, et une variété d’aliments légers, et la marque de l’opposante est enregistrée pour du café et café en grains, des produits de boulangerie-pâtisserie, nommément des beignes des croissants, danoises ainsi que l’exploitation d’un établissement spécialisé dans la vente au détail de produits de boulangerie et les services de restaurant.

 

Il est vrai que la marque de la requérante incorpore totalement la marque PERKS de l’opposante; toutefois, la requérante a ajouté des mots significatifs devant et après l’élément commun. Ces éléments additionnels combinés au fait que le mot « perks » a un sens suggestif font en sorte que la marque de la requérante dans son ensemble ne ressemble pas substantiellement à la marque PERKS de l’opposante dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elle suggère.

 

Même s’il n’y a pas de preuve de confusion entre les marques, cette circonstance de l’espèce ne m’apparaît pas importante parce que l’opposante semble n’être active qu’à Halifax alors que la requérante ne semble l’être qu’à Vancouver.

 

Une autre circonstance de l’espèce est l’état du registre ou du marché.

 

La preuve de l’état du registre est pertinente dans la seule mesure où quelqu’un peut en tirer des conclusions relatives à l’état du marché, et des conclusions relatives à l’état du marché ne peuvent être tirées que lorsqu’un nombre important d’enregistrements pertinents est localisé. Dans la présente affaire, le nombre d’enregistrements pertinents appartenant à des tiers est, à mon avis, insuffisant pour rendre une décision significative en ce qui concerne l’état du marché. [Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432 (C.O.M.C.); Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]

 

La preuve de l’état du marché est d’une aide limitée pour la requérante eu égard à l’ensemble des motifs autres que celui fondé sur l’alinéa 12(1)d) pour les motifs suivants. Premièrement, la plus grande partie de la preuve (sinon toute) est postérieure à toutes les dates pertinentes autres que celle relative au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d). Deuxièmement, il existe une certaine preuve que l’opposante a soulevé des objections à l’égard de certains tiers propriétaires de marques/noms commerciaux. Troisièmement, il y a peu de preuve de l’emploi véritable de marques/noms commerciaux par des tiers, et certainement aucune preuve de l’étendue de leur emploi.

 

Compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait selon lequel elle devait démontrer qu’il n’y avait pas de possibilité raisonnable de confusion entre STANLEY PERKS AT BAYSHORE et la marque PERKS de l’opposante à quelque date pertinente que ce soit. Comme il a été énoncé dans Beverley Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstery Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.), à la page 149, conf. 60 C.P.R. (2d) 70 : « À toutes fins pratiques, le facteur le plus important dans la plupart des cas, et celui qui est décisif, est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent, les autres facteurs jouant un rôle secondaire. »

 

Pour des motifs similaires à ceux déjà examinés, la marque de la requérante n’est pas susceptible de créer de la confusion avec les autres marques ou les noms commerciaux de l’opposante à toutes les dates pertinentes.

 

Décision

En ma qualité de personne déléguée par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition suivant le paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 5 JUIN 2006.

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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