Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE PRÉVUE À L’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE :  LES RESTAURANTS DU MARCHE

NO D’ENREGISTREMENT : LMC 223707

 

 

Le 13 avril 2005, à la demande de Bayo Odutola (Odutola Professional Corporation) (la « partie requérante »), le registraire a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce à Cara Operations Limited, la propriétaire inscrite de l’enregistrement no 223707 associé à la marque de commerce LES RESTAURANTS DU MARCHE. La marque est enregistrée en liaison avec des [traduction] « services de restauration ».

 

L’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, exige que le propriétaire inscrit de la marque de commerce démontre que la marque a été utilisée au Canada en liaison avec chacune des marchandises et/ou services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date. En la présente espèce, la période pertinente pour établir l’emploi va du 13 avril 2002 au 13 avril 2005. 

 

Le paragraphe 4(2) de la Loi définit dans les termes suivants l’emploi en liaison avec des services :

4. (2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

 

En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a fourni l’affidavit de M. Martin Doyle. Chaque partie a produit un plaidoyer écrit, cependant aucune audience n’a été tenue.

 

Dans son affidavit, M. Doyle déclare qu’il est le directeur principal des approvisionnements de Compass Group Canada. Il explique qu’en décembre 2000 Compass Group Canada s’est portée acquéreur de Beaver Foods Limited, un licencié de la marque de commerce en question. Il explique de plus qu’il était vice-président régional de l’exploitation pour Beaver Foods Limited de 1994 à mars 2004. Il précise qu’il a été, et est toujours, étroitement lié à l’exploitation de l’entreprise de services de restauration et d’alimentation de Beaver Foods Limited. En sa qualité de vice-président de l’exploitation il répondait de l’exploitation des services d’aire de restauration à Carleton University exploités sous la marque de commerce LES RESTAURANTS DU MARCHE.  Il déclare de plus qu’il a souscrit l’affidavit en faisant appel à ses connaissances et expériences personnelles ou aux dossiers et registres de la société qu’il peut consulter.

 

Au paragraphe 2 de son affidavit, il explique que Beaver Foods Limited était anciennement une filiale de l’Inscrivante, licenciée par cette dernière pour l’emploi de la marque en question. Il ajoute que cette convention de licence est restée en vigueur postérieurement à l’acquisition de Beaver Foods Limited par Compass Group Canada en décembre 2000. Une copie de la convention de licence datée du 19 mai 1995 entre Beaver Foods Limited et l’Inscrivante est jointe au présent affidavit comme pièce « A ».

 

Au paragraphe 3 de l’affidavit, M. Doyle déclare que : [traduction] « Beaver Foods Limited  a commencé l’emploi de la marque de commerce LES RESTAURANTS DU MARCHE en liaison avec l’exploitation d’un service d’aire de restauration à l’université Carlton d’Ottawa dès 1995 ». Il précise que ces activités [traduction] « comprenaient un buffet à salades et à pâtes chiliennes, des comptoirs à café, boissons froides et desserts, une rôtisserie, une charcuterie et une aire avec places assisses ».

 

Enfin, au paragraphe 4, il explique que la marque de commerce en question figurait bien en vue sur l’affichage déployé dans cette aire de restauration qui mettait aussi en évidence la propriété de la marque de commerce comme suit : [traduction] « Une marque de commerce de Cara Operations Limited employée sous licence ». Voici les deux dernières phrases de ce paragraphe :

 

 

 

 

 

[traduction] Des photocopies de photographies de cet affichage sont jointes aux présentes comme pièce « B »; elles sont tirées des dossiers de ma société et on me dit qu’elles ont été prises le ou vers le 25 mai 1995, ce que je crois fermement. Ces photographies illustrent de façon précise l’affichage particulier constamment déployé dans l’aire de restauration de l’université Carlton à compter de cette date jusqu’en mai 2003 au moins.

 

La partie requérante soutient que l’Inscrivante n’a pas démontré l’emploi de la marque de commerce tel que le requiert la Loi. À cet égard, elle soutient que l’Inscrivante n’a présenté aucune preuve pour établir l’annonce et la disponibilité des services liés à la marque en question pendant la période pertinente. Elle fait valoir que pour qu’il y ait emploi de services au sens de l’article 4 de la Loi, les services doivent être annoncés en liaison avec la marque et être effectivement disponibles au Canada. Pour étayer cette position, elle se fonde sur les décisions Express File Inc. c.. HRB Royalty Inc. (2005), 39 C.P.R. (4th) 59, et Wenward (Canada) Ltd. c. Dynaturf Co. (1976), 28 C.P.R. (2d) (R.M.C.).

 

La partie requérante a aussi soumis des arguments relatifs à l’admissibilité de la preuve présentée. En particulier, elle fait valoir que les éléments de preuve contenus dans la pièce « B » (les photocopies des photographies des affiches du restaurant) et les deux dernières phrases du paragraphe 4 de l’affidavit renvoient à des faits dont l’auteur de l’affidavit n’a pas personnellement connaissance. De plus, elle soutient que comme

M. Doyle ne divulgue ni la source, ni les motifs de ce qu’il sait et croit, une telle preuve constitue une preuve par ouï-dire inadmissible.

 

En tout état de cause, la partie requérante fait valoir que l’Inscrivante ne peut tirer profit d’un quelconque emploi présumé. À cet égard, elle a non seulement contesté la suffisance des dispositions de la convention de licence relatives au contrôle de qualité (pièce « A »), mais elle a aussi soutenu que l’affidavit n’avait pas établi que cette convention était en vigueur pendant la période pertinente.

 

En ce qui concerne les observations de la partie requérante relativement à l’admissibilité de la preuve présentée sous la cote « B », je souligne que M. Doyle déclare précisément que « ces photographies illustrent de façon précise l’affichage particulier constamment déployé dans l’aire de restauration de l’université Carlton à compter de cette date jusqu’en mai 2003 au moins ». Ceci dit, je conviens que cette pièce a été  présentée pour illustrer la façon dont la marque de commerce a été déployée durant la période pertinente et que M. Doyle a fondé cette déclaration sur une connaissance personnelle. Compte tenu des responsabilités découlant du poste de vice-président de l’exploitation qu’il occupait à cette époque, on peut raisonnablement déduire et on s’attendrait à ce qu’il ait effectivement une telle connaissance [voir MacDonald v. Vapor Canada Ltd. (1972), 6 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.)]. De plus, comme il a clairement déclaré qu’il donnait l’affidavit en se fondant sur sa propre connaissance et sur les dossiers auxquels il avait accès, je suis convaincue que cette déclaration était fondée sur la connaissance personnelle qu’avait M. Doyle de ces sujets.

 

Toutefois, après avoir examiné la preuve, je partage la position de la partie requérante, à savoir que l’affidavit ne fournit pas d’éléments de preuve clairs au sujet de la disponibilité des services durant la période pertinente. La déclaration de M. Doyle selon laquelle « Beaver Foods Limited a commencé l’emploi de la marque de commerce LES RESTAURANTS DU MARCHE en liaison avec l’exploitation d’un service d’aire de restauration à l’université Carlton d’Ottawa dès 1995 » est ambiguë quant à l’exécution  des services durant la période pertinente. Même si l’auteur de l’affidavit a indiqué que la marque en question a été constamment déployée à partir de la période commençant le ou vers le 25 mai 1995 jusqu’en mai 2003 au moins, d’une façon similaire à celle illustrée par la pièce «  B », il n’a fourni ni élément de preuve, ni déclaration précise indiquant que les services étaient exécutés ou étaient disponibles pendant la période pertinente. Par conséquent, je dois interpréter cette ambiguïté en défaveur de l’Inscrivante[voir Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc., 45 C.P.R. (2d) 194].

 

Il est de jurisprudence constante que l’« emploi » s’agissant des services, au paragraphe  4(2) de la Loi, exige, à tout le moins, que les services soient disponibles au Canada [voir Porter c. Don the Beachcomber (1966), 48 C.P.R. 280 (C. É.), et Bedwell Management Systems Inc. c. Mayflower Transit, Inc. (1999), 2 C.P.R. (4th) 543]. Je ne peux pas dire que la preuve soumise en l’espèce établisse clairement un tel « emploi ». Le simple déploiement d’une marque de commerce n’équivaut pas à son déploiement dans l’exécution des services.

 

Les faits en l’espèce sont nettement différents de l’affaire Borden & Elliot c. Cara Operations Ltd. (1997) 82 C.P.R. (3d) 115, dans laquelle la même marque que celle en litige faisait l’objet de la procédure prévue à l’article 45. Dans cette affaire, des déclarations précises et non ambiguës avaient été fournies sur l’emploi de la marque en question dans la prestation des services pendant la période pertinente. Une distinction semblable peut être faite d’avec l’arrêt de la Cour d’appel fédérale Central Transport, Inc. c. Mantha & Associes/Associates (1995), 64 C.P.R. (3d) 354. En l’espèce, comme je l’ai déjà mentionné, l’affidavit est ambigu quant à savoir si les services ont effectivement été exécutés ou étaient disponibles pendant la période pertinente.

 

Comme j’ai conclu que l’Inscrivante n’avait pas démontré l’emploi de la marque de commerce dans l’exécution des services pendant la période pertinente tel que la Loi le requiert, je n’ai pas à déterminer si cette dernière a tiré profit d’un tel emploi. Je ferais observer cependant que, bien que l’affidavit ne précise pas clairement si la convention de licence produite comme pièce « A » était en vigueur pendant la période pertinente, l’affichage personnalisé produit comme pièce « B », qui aurait été déployé comme tel jusqu’en mai 2003 au moins, identifie non seulement Cara Operations Limited (l’Inscrivante) comme propriétaire, mais indique aussi que tout emploi de la marque en question fait l’objet d’une licence. Comme avis public de l’emploi sous licence de la marque de commerce et de l’identité du propriétaire a été donné, conformément aux dispositions du paragraphe 50(2) de la Loi, on pourrait présumer du contrôle des caractéristiques et de la qualité des marchandises [voir Well’s Dairy Inc. c. U.L. Canada Inc. (2000), 7 C.P.R. (4th) 77 (C.F. 1re inst.)]. 

 

Même si les exigences pour prouver l’emploi ne sont pas très strictes dans une procédure prévue par l’article 45 (Woods Canada Ltd. c. Lang Michener (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (C.F. 1re inst.) p. 480), et qu’il n’est pas nécessaire d’apporter une surabondance de preuves pour répondre adéquatement à un avis en vertu de l’article 45, le registraire doit disposer de suffisamment de faits pour conclure à l’emploi de la marque de commerce en liaison avec les services enregistrés pendant la période pertinente. Après examen de la preuve, je conclus que l’Inscrivante ne s’est pas acquittée du fardeau de prouver

l’« emploi » pour maintenir la marque de commerce au registre.

 

Compte tenu de ce qui précède, l’enregistrement no 223707 sera radié en application des dispositions du paragraphe 45(5) de la Loi.

 

 

 

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), CE 5e JOUR DE MARS 2008.

 

 

 

Kathryn Barnett

Agente d'audience subalterne pour les procédures en vertu de l'article 45

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

 

 

 

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