Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 196

Date de la décision : 2015-10-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DES PROCÉDURES DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45

 

 

Gowling Lafleur Henderson LLP

Partie requérante

et

 

Liwayway Marketing Corporation

Propriétaire inscrite

 

 

 



 

LMC724,715 pour OISHI Dessin



 

Enregistrement

[1]               La présente décision concerne des procédures de radiation sommaires engagées à l'égard de l'enregistrement no LMC724,715 de la marque de commerce OISHI Dessin, reproduite ci-dessous (la Marque), dont la propriétaire est Liwayway Marketing Corporation.

[2]               La Marque est enregistrée en liaison avec les produits suivants :

[Traduction]
Viande, poisson, volaille et gibier; extraits de viande; fruits et légumes en conserve, séchés et cuits; gelées, confitures; œufs; lait et autres produits laitiers; huiles et graisses alimentaires; conserves, marinades.

[3]               Pour les raisons exposées ci-après, je conclus que l'enregistrement doit être maintenu seulement en ce qui concerne les produits visés par l'enregistrement suivant : [Traduction] « légumes séchés et cuits ».

La procédure

[4]               Le 12 avril 2013, le registraire des marques de commerce a donné à Liwayway Marketing Corporation (l'Inscrivante) l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Cet avis a été donné à la demande de Gowling Lafleur Henderson LLP (la Partie requérante).

[5]               L'avis exige de l'Inscrivante qu'elle fournisse une preuve démontrant qu'elle avait employé la Marque au Canada à un moment quelconque entre le 12 avril 2010 et le 12 avril 2013 (la période pertinente) en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l'enregistrement. Si la Marque n'avait pas été ainsi employée, l'Inscrivante devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[6]               La définition pertinente d'emploi est énoncée à l'article 4(1) de la Loi, lequel est ainsi libellé :

Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7]               Il est bien établi que de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Le niveau de preuve requis pour établir l'emploi dans le contexte des procédures prévues à l'article 45 est peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst), à 480], et il n'est pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)]. Néanmoins, il n'en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits visés par l'enregistrement au cours de la période pertinente [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004) CF 448, 31 CPR (4e) 270].

[8]               En réponse à l'avis du registraire, l'Inscrivante a produit l'affidavit d'Oszen A. Chan, président de l'Inscrivante. Les deux parties ontproduit des observations écrites. Les deux parties étaient représentées à l'audience qui a été tenue conjointement avec les audiences relatives aux procédures de radiation sommaires engagées à l'égard de trois autres enregistrements appartenant à l'Inscrivante. Des décisions distinctes seront rendues relativement à ces autres procédures qui concernent les enregistrements nos LMC605,878, LMC692,890 et LMC706,660.

La preuve

[9]               Dans son affidavit, M. Chan atteste que l'Inscrivante est une société dont le siège social est aux Philippines, œuvrant dans le domaine de la [Traduction] « fabrication et la distribution d'aliments et de boissons ».

[10]           En ce qui concerne l'emploi de la Marque au Canada, M. Chan atteste que depuis au moins aussi tôt que 2008, l'Inscrivante a commencé à distribuer et à vendre des [Traduction] « fruits et légumes séchés et cuits » en liaison avec la Marque, ce qu'elle a fait jusqu'en 2010. Il affirme que cette distribution et ces ventes se sont faites [Traduction] « surtout » au moyen des produits « OISHI Gourmet Picks Potato Chips » et « OISHI Ridges Potato Chips » de l'Inscrivante (ci-après les Produits OISHI).

[11]           En ce qui a trait à la pratique normale du commerce de l'Inscrivante pour ces produits, M. Chan atteste que les entreprises Apo Products Ltd. (siège social à Scarborough en Ontario) et Uno Foods Inc. (siège social à Richmond en C.-B.) achètent des produits arborant la Marque auprès de l'Inscrivante pour la revente au Canada. À l'appui de telles ventes, il produit des chiffres d'affaires globaux pour les Produits OISHI susmentionnés, pour les années 2009 à 2010, et joint des échantillons représentatifs de factures commerciales, ainsi que des bordereaux d'emballage et documents d'expédition connexes. Je note que les Produits OISHI sont mis en surbrillance sur les factures représentatives. M. Chan affirme que l'absence de ventes de Produits OISHI en 2011 et 2012 s'explique par le fait qu'il n'y a pas eu de nouvelles commandes pour ces produits. Toutefois, il atteste que, pour [Traduction] « l'année en cours », l'un des distributeurs de l'Inscrivante a exprimé son intention de commander de ces produits.

[12]           En ce qui concerne la mise en évidence de la Marque, M. Chan produit des échantillons représentatifs d'emballages de Produits OISHI, qu'il déclare avoir été bel et bien été vendus et distribués au Canada. La Marque figure bien en vue sur tous les emballages. Les produits identifiés sur les échantillons d'emballage sont comme suit : « OISHI Gourmet Picks Potato Chips » et « OISHI Ridges Potato Chips ».

[13]           Enfin, en ce qui a trait aux autres produits visés par l'enregistrement, M. Chan explique que l'Inscrivante a [Traduction] « tout à fait l'intention » d'employer la Marque pour ces produits au Canada. Il affirme que ces produits sont activement annoncés sur le site Web de l'Inscrivante, sur lequel figurent d'autres liens vers différents comptes de médias sociaux. Il affirme aussi que ces produits font l'objet de publicités destinées aux clients internationaux, y compris des Canadiens dans des foires commerciales internationales, et nomme deux de ces foires récemment tenues aux Philippines. Il conclut ensuite son affidavit en affirmant que [Traduction] « le Canada est un pays où notre entreprise a choisi de commercialiser activement tous ses produits OISHI & Dessin et ce n'est qu'une question de temps avant que tous les produits figurant dans l'enregistrement no LMC724,715 soient distribués et vendus au Canada ».

Observations des parties et analyse

[14]           Dans son affidavit, M. Chan ne revendique aucun emploi relativement aux produits visés par l'enregistrement, à l'exception des [Traduction] « fruits et légumes séchés et cuits ». La question est donc celle de savoir si la preuve suffit pour démontrer l'emploi en liaison avec des [Traduction] « fruits et légumes séchés et cuits » et si des circonstances spéciales ont été établies pour justifier le défaut d'emploi en liaison avec les autres produits visés par l'enregistrement.

[15]           La Partie requérante fait valoir que l'Inscrivante n'a établi l'emploi que pour les produits que sont les croustilles de pommes de terre (c.-à-d. OISHI GOURMET PICKS Potato Chips et OISHI RIDGES Potato Chips) et donc, l'Inscrivante a seulement établi l'emploi en liaison avec un [Traduction] « produit alimentaire dérivé d'un légume » plutôt qu'avec des [Traduction] « fruits et légumes séchés et cuits ». La Partie requérante fait valoir que le fait qu'un légume qui aurait été cuit constitue un ingrédient d'un produit alimentaire dérivé d'un légume, comme des croustilles de pommes de terre, n'établit pas l'emploi en liaison avec des [Traduction] « fruits et légumes séchés et cuits », sur la base du simple libellé de l'enregistrement [citant à l'appui Kellogg Co c Granovita UK Ltd, 2011 COMC 242, 99 CPR (4e) 1 aux para 34-35].

[16]           Par ailleurs, l'Inscrivante fait valoir que M. Chan a produit des déclarations claires d'emploi pour un ensemble limité de produits, et a présenté des échantillons représentatifs de ces produits. De plus, l'Inscrivante fait valoir que les déclarations solennelles de M. Chan ne sont pas incohérentes, et qu'un examen pour déterminer si les divers produits que sont les croustilles constituent des [Traduction] « produits alimentaires dérivés d'un légume » plutôt que des [Traduction] « légumes séchés et cuits » suppose une analyse rigoureuse des produits, ce qui constitue une méthode qui a été considérée comme incompatible avec l'objet de l'article 45 de la Loi [citant Smart & Biggar c Diversey, Inc, 2012 COMC 3 (CanLII)].

[17]           Je suis d'accord avec l'Inscrivante et j'estime que le cas qui nous occupe se distingue des faits présentés dans Kellog, précitée. En l'espèce, l'état déclaratif des produits que contient l'enregistrement désigne les produits en question comme étant [Traduction] « séchés et cuits », ce qui signifie qu'ils sont transformés d'une quelconque façon. De plus, à l'examen de l'échantillon d'emballages des Produits OISHI, on voit clairement que le principal ingrédient est la pomme de terre. L'Inscrivante fait valoir, et je suis d'accord avec elle, que les croustilles de pommes de terre sont faites de pommes de terre tranchées, cuites et souvent assaisonnées. Enfin, le fait que les tranches de pommes de terre frites aient été assaisonnées est selon moi sans conséquence; c'est-à-dire que l'assaisonnement ne change pas le produit dans la mesure où on ne le reconnaît plus comme des tranches de pommes de terre frites, et le produit doit être considéré seulement comme un [Traduction] « produit alimentaire dérivé d'un légume » plutôt que comme un légume transformé. Par conséquent, j'accepte que l'Inscrivante ait établi l'emploi de la Marque en liaison avec des [Traduction] « légumes séchés et cuits ». À cet égard, l'Inscrivante a produit un échantillon d'emballage représentatif arborant la Marque en liaison avec ces produits, ainsi que les ventes réalisées dans la pratique normale du commerce au Canada au cours de la période pertinente (conformément aux factures, bordereaux d'emballage et documents d'expédition connexes).

[18]           Bien que j'accepte que l'Inscrivante ait établi l'emploi de la Marque en liaison avec des [Traduction] « légumes séchés et cuits », je ne vois aucune preuve corroborant l'emploi de la Marque par l'Inscrivante en liaison avec des [Traduction] « fruits séchés et cuits ». En effet, je note que même dans les propres observations écrites de l'Inscrivante, il est question de [Traduction] « légumes séchés et cuits » plutôt que de [Traduction] « fruits et légumes séchés et cuits ». Comme l'article 45 exige que l'emploi soit établi « à l’égard de chacun des produits ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement » [voir John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)], je conclus que l'Inscrivante n'a pas établi l'emploi de la Marque en liaison avec des [Traduction] « fruits séchés et cuits ».

[19]           Compte tenu de ce qui précède, j'accepte que l'Inscrivante ait démontré l'emploi de la Marque en liaison avec des [Traduction] « légumes séchés et cuits » au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Toutefois, je ne suis pas convaincue que l'emploi de la Marque a été établi relativement aux autres produits visés par l'enregistrement. Je dois maintenant déterminer si l'existence de circonstances spéciales justifiant un tel défaut d'emploi a été démontrée.

Circonstances spéciales

[20]           Pour déterminer si l'existence de circonstances spéciales a été démontrée, le registraire doit en premier lieu déterminer, à la lumière de la preuve, les raisons pour lesquelles la marque de commerce n'a pas été employée au cours de la période pertinente. Le registraire doit ensuite déterminer si les raisons de ce défaut d'emploi constituent des circonstances spéciales [selon Registraire des marques de commerce c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF)], de sorte que soit faite une exception à la règle générale qui porte que le défaut d’emploi est sanctionné par la radiation [Smart & Biggar c Scott Paper Ltd (2008), 65 CPR (4e) 303 (CAF) au para 22]. Les circonstances spéciales sont des [Traduction] « circonstances qui sont rares, peu communes ou exceptionnelles » [voir John Labatt Ltd c The Cotton Club Bottling Co (1976), 25 CPR (2d) 115 (CF 1re inst.)].

[21]           Pour déterminer s'il existe des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi, il faut tenir compte des trois critères suivants : (1) la durée de la période pendant laquelle la marque n'a pas été employée; (2) si les raisons du défaut d'emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit; et (3) s'il existe une intention sérieuse de reprendre l'emploi de la marque à court terme [selon Harris Knitting Mills, précitée]. Le simple fait de démontrer une intention de reprendre l'emploi ne suffit pas en soi [selon Scott Paper, précitée]. L'intention de reprendre l'emploi doit être corroborée par la preuve [voir Arrowhead Spring Water Ltd c Arrowhead Water Corp (1993), 47 CPR (3d) 217 (CF 1re inst); NTD Apparel Inc c Ryan 2003, CFPI 780, 27 CPR (4e) 73].

[22]           En l'espèce, M. Chan n'a pas présenté de raisons ni de preuves indiquant pourquoi la Marque n'a pas été employée en liaison avec les autres produits, ni n'a produit de date de dernier emploi. À l'audience, l'Inscrivante a fait valoir que certains produits n'ont simplement pas été vendus, que l'Inscrivante a tenté de vendre ces produits et a démontré les étapes concrètes qui ont été suivies pour vendre ces produits au Canada.

[23]           Cependant, bien qu'il puisse être vrai que l'Inscrivante a activement tenté de vendre les autres produits au Canada, aucune raison n'a été présentée pour expliquer pourquoi elle n'a pas été en mesure de vendre ces produits. En l'absence d'une telle preuve, je me vois incapable de déterminer s'il existe des raisons justifiant le défaut d'emploi qui constitueraient des circonstances spéciales, encore moins pour une période de près de cinq ans [voir Oyen Wiggs Green & Mutala c Rath, 2001 COMC 34, 82 CPR (4e) 77 au para 10, concernant la date d'enregistrement considérée comme la date pertinente, lorsqu'une date de dernier emploi n'a pas été fournie]. De plus, même si je devais considérer les activités de mise en marché des produits de l'Inscrivante (c.-à-d. en ligne et dans les foires commerciales internationales) comme démontrant une intention de reprendre ou de commencer sous peu l'emploi de la Marque au Canada, comme susmentionné, ces activités ne suffisent pas en elles-mêmes pour maintenir l'enregistrement à l'égard des autres produits [selon Scott Paper, précitée].

[24]           Par conséquent, compte tenu de ce qui précède, je conclus que l'Inscrivante n'a pas établi que le défaut d'emploi de la Marque en liaison avec les autres produits était attribuable à des circonstances spéciales qui justifieraient un tel défaut d'emploi.

Décision

[25]           Compte tenu de ce qui précède, dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera maintenu seulement pour les produits visés par l'enregistrement que sont les [Traduction] « légumes séchés et cuits ».

_____________________________

Kathryn Barnett

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

Date de l’audience : 2015-06-04

 

Comparutions

 

Bayo Odutola                                                                          Pour l'Inscrivante

 

James Green                                                                             Pour la Partie requérante

 

Agents au dossier

 

G. Ronald Bell & Associates                                                   Pour l'Inscrivante

 

Gowling Lafleur Henderson LLP                                           Pour la Partie requérante

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