Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 19

Date de la décision : 2014-01-31 TRADUCTION

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Susan Fiedler Incorporated à l’encontre de la demande d’enregistrement n 1,472,201 pour la marque de commerce F CANCER & Dessin au nom de Yael Cohen

[1]               Le 8 mars 2010, Yael Cohen (la Requérante) a déposé une demande pour l’enregistrement de la marque de commerce F CANCER & Dessin (la Marque), reproduite ci-dessous, fondée sur son emploi au Canada depuis le 28 septembre 2009 en liaison avec « Vêtements, nommément tee-shirts » et « Exploitation d'un organisme de bienfaisance qui se consacre à la détection et à la prévention du cancer » (les Marchandises et Services).

F CANCER & Design

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 12 janvier 2011.

[3]               Le 14 mars 2011, Susan Fiedler Incorporated (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition. Les motifs d’opposition peuvent être résumés comme suit :

         la Marque n’est pas enregistrable sur la base qu’elle crée de la confusion avec les marques de commerce F CANCER, FUCK CANCER, F* CANCER et F--- CANCER de l’Opposante (les Marques F Cancer de l’Opposante) qui ont été employées au Canada par l’Opposante et ses prédécesseurs depuis mai 2008 en liaison avec des bijoux et des organismes de bienfaisance en lien avec le cancer;

         la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que la Requérante est une personne physique et que l’emploi revendiqué dans la demande, s’il en est, est offert par une organisation et en raison des faits plaidés dans le reste de la déclaration d’opposition;

         la Marque ne distingue pas les Marchandises et Services de ceux de l’Opposante qui sont employés en liaison avec les Marques F CANCER depuis avant la date d’emploi revendiquée par la Requérante;

         la demande n’est pas conforme à l’article 30 puisque la Requérante ne peut pas avoir été convaincue d’avoir droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises et Services pour les raisons exposées dans les autres motifs d’opposition.

[4]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration, dans laquelle elle conteste les allégations de l’Opposante et en exige la preuve.

[5]               À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit un affidavit de Susan Fiedler. Mme Fiedler a été contre-interrogée au sujet de son affidavit. L’Opposante a également produit un affidavit d’Andrew Tan en contre-preuve. Toutefois, lors de l’audience, l’Opposante a informé le registraire qu’elle ne s’appuierait plus sur l’affidavit de M. Tan et a demandé qu’il soit retiré du dossier.

[6]               À l’appui de sa demande, la Requérante a produit son propre affidavit. Mme Cohen n’a pas été contre-interrogée au sujet de son affidavit.

[7]               Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit et étaient représentées à l'audience.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[8]               C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l'Opposante de faire en sorte que chacun de ses motifs d'opposition soit dûment plaidé et de s'acquitter du fardeau de preuve initial en établissant les faits sur lesquels elle appuie ses motifs d'opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.), à 298].

[9]               Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         articles 38(2)a) et 30 – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469, à 475 (COMC) et Tower Conference Management Co c. Canadian Exhibition Management Inc (1990), 28 CPR (3d) 428 à 432 (COMC)];

         articles 38(2)b) et 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

         articles 38(2)c) et 16(1) – la date de premier emploi revendiquée [voir l’article 16(1) de la Loi].

         articles 38(2)d) et 2 – la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Rejet sommaire des motifs d'opposition

Non-enregistrabilité

[1]               L’Opposante ne fait pas précisément référence à l’article 12(1)d) de la Loi en plaidant un motif fondé sur la non-enregistrabilité en raison de la confusion avec les Marques F CANCER de l’Opposante. Toutefois, j’estime qu’il convient de déduire que ce motif est fondé sur l’article 12(1)d) de la Loi. Conformément à Novopharm Limited c. AstraZeneca AB (2002), 21 CPR. (4e) 289 (CAF), je dois évaluer le caractère suffisant des actes de procédure au regard de la preuve soumise. Comme plaidé, il n’y a pas de références à des numéros d’enregistrements pour les Marques F CANCER de l’Opposante. De plus, la preuve révèle que ces marques n’ont pas été enregistrées.

[2]               Compte tenu de ce qui précède, j’estime que ce motif d’opposition a été plaidé de façon insuffisante et qu’il est par conséquent rejeté.

Absence de droit à l'enregistrement – section d’introduction

[3]               L’Opposante allègue que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que la Requérante est une personne physique et que l’emploi revendiqué dans la demande, s’il en est, est offert par une organisation et en raison des faits plaidés dans les autres motifs d’opposition (c.-à-d. la confusion avec les Marques F CANCER de l’Opposante).

[4]               Bien qu’il n’y ait pas de référence précise en ce sens, il semble que la première partie de ce motif d’opposition soit fondée sur la section d’introduction de l’article 16(1) de la Loi en alléguant que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi.

[5]               La section d'introduction de l’article 16(1) de la Loi ne constitue pas le fondement d'un motif d'opposition tel que défini à l’article 38(2) de la Loi du fait que l'ensemble de l’article 16(1) concerne le motif d'opposition fondé sur le droit à l'enregistrement. Par conséquent, je rejette ce motif d'opposition fondé uniquement sur la section d'introduction de l’article 16(1) de la Loi.

[6]               La partie du motif d’opposition fondée sur l’absence de droit à l’enregistrement qui concerne la confusion avec les marques de commerce de l’Opposante déjà employées est, lorsque considérée en lien avec l’ensemble de la déclaration d’opposition, dûment plaidée et sera évaluée en détail ci-dessous.

Motif fondé sur l’absence de droit à l'enregistrement – article 16(1)a)

[7]               Bien que la Requérante ait le fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques F CANCER de l’Opposante, l’Opposante a, pour sa part, le fardeau initial de démontrer qu’une ou plusieurs des marques de commerce invoquées à l’appui de son motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) de la Loi étaient déjà employées au Canada à la date de premier emploi revendiquée pour la Marque (28 septembre 2009) et qu’elles n’avaient pas été abandonnées à la date d’annonce de la demande d’enregistrement de la Marque (12 janvier 2011) [article 16(5) de la Loi].

[8]               L’Opposante a plaidé que ses Marques F CANCER étaient employées en liaison avec des bijoux et des campagnes de financement pour des organismes de bienfaisance en lien avec le cancer depuis au moins mai 2008.

[9]               Dans son affidavit, Mme Fiedler déclare solennellement que, depuis mai 2008, l’Opposante et ses prédécesseurs en titre vendent et font de la publicité pour des bracelets en liaison avec les Marques F CANCER. Mme Fiedler explique également que la vente des bracelets était associée à un geste de bienfaisance par le don d’une partie des profits (50 $/bracelet) à un organisme de bienfaisance. En plus d’une photographie du bracelet, qui montre clairement la marque de commerce FUCK CANCER affichée sur celui-ci (pièce A), Mme Fiedler fournit des exemples de factures qui attestent les ventes des bracelets cités sous le nom de F--- CANCER sur les factures par le prédécesseur de l’Opposante en mai 2008 (pièce C). Le 14 mai 2008, la facture fait référence à un [traduction] « don pour lymphome » ce qui signifie un don collecté par le prédécesseur de l’Opposante pour la Société de leucémie et lymphome du Canada. Mme Fiedler joint également à son affidavit une copie certifiée conforme d’une facture du 14 novembre 2008 qui montre la vente de deux bracelets cités sous la marque de commerce F-CANCER et la collecte de deux dons de 50 $ pour InspireHealth (pièce D).

[10]           Mme Fiedler déclare qu’en date de son affidavit, l’Opposante avait, par l’entremise de la vente de bracelets, collecté plus de 100 000 $ pour des organismes de bienfaisance en lien avec le cancer. De plus, elle déclare que les [traduction] « bracelets et le message “cancer, va te faire foutre” sont très populaires » (paragraphe 23). Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante fait valoir que ses Marques F CANCER sont devenues très connues dans la région de Vancouver et partout dans le monde grâce à la vente des bracelets et en liaison avec la collecte de fonds pour des organismes de bienfaisance en lien avec le cancer. Mme Fiedler déclare solennellement que les bracelets et les activités de bienfaisance de l’Opposante ont reçu un grand appui de la part de gens provenant de partout au monde, y compris de vedettes comme Sarah McLaughlin et les Barenaked Ladies (paragraphe 23). Elle déclare avoir donné des entrevues lors d’émissions de télévision pour parler du travail de l’Opposante (paragraphe 23). À l’appui de ces déclarations, Mme Fiedler fournit des copies papier des sites Web de l’Opposante, susanfiedler.com et fcancerembracelife.com, de même qu’un article tiré de SamaritanMag.com (paragraphes 23, 24, pièce G). Bien que l'on ne puisse pas se fier aux copies papier provenant de sites Web en tant que preuve de la véracité de leur contenu, j’estime qu’ils apportent une preuve qui corrobore les déclarations de Mme Fiedler en ce qui concerne l’attention médiatique reçue par l’Opposante pour ses bracelets et ses activités de campagne de financement [Candrug Health Solutions Inc c. Thorkelson (2007), 60 CPR (4th) 35 (CF); infirmée pour d’autres motifs par 2008 CAF 100].

[11]           Lors de l’audience, l’agent de la Requérante a essentiellement reconnu que l’Opposante vendait des bracelets et collectait des fonds en lien avec les mots [traduction] « cancer, va te faire foutre » depuis avant la date d’emploi revendiquée par la Requérante. Toutefois, la Requérante a fait valoir que cela ne posait pas problème puisque les activités de l’Opposante ne représentent pas un emploi des Marques F CANCER selon l’article 4 de la Loi.

[12]           La Requérante fait valoir que l’Opposante n’avait pas l’intention d’employer les Marques F CANCER pour indiquer une source, mais plutôt simplement comme un slogan/cri de ralliement/message. Plus précisément, la Requérante indique les déclarations de Mme Fiedler voulant que le slogan [traduction] « “cancer, va te faire foutre” transmettait les puissantes émotions ressenties pendant [sa] bataille contre cette horrible maladie et en particulier, l’intense peur et la rage qui constituaient une partie tellement puissante de cette expérience. Des mots puissants semblaient appropriés » (paragraphe 7). Mme Fiedler a également déclaré que [traduction] « plusieurs personnes partagent l’attitude envers le cancer représenté par le bracelet. Les mots étaient évocateurs pour des gens qui luttaient contre le cancer ou qui avaient perdu des amis et des membres de leur famille à cause du cancer » (paragraphe 9). La Requérante indique également les commentaires lors du contre-interrogatoire quand celle-ci s’est dite d’accord avec les déclarations voulant que le message [traduction] « “cancer, va te faire foutre” était un vœu de bonne chance » et « a inspiré une approche audacieuse pour aborder le cancer », etc. (p. 3 à 5 de la transcription du contre-interrogatoire de Mme Fiedler).

[13]           Sur cette base, la Requérante fait valoir que l’Opposante n’a pas employé la marque de commerce en liaison avec les bijoux et des services de campagne de financement selon les articles 4(1) et 4(2) de la Loi.

[14]           Je ne suis pas d'accord sur ce point avec les observations de la Requérante. Il est vrai que les Marques F CANCER de l’Opposante communiquent un message de lutte contre le cancer avec une sorte de slogan ou de cri de ralliement. Toutefois, la preuve montre clairement que l’Opposante a satisfait aux exigences des articles 4(1) et 4(2) dans le sens où l’affichage des Marques F CANCER sur les bracelets et par ailleurs associées avec les services de l’Opposante, comme susmentionné, constitue une preuve d’emploi des Marques F CANCER de l’Opposante avant le 28 septembre 2009 et le non-abandon de ces marques à la date de l’annonce. Rien n’empêche une marque de commerce d’avoir deux fonctions, soit celles de communiquer un message et d’indiquer une source.

[15]           Compte tenu de ce qui précède, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial pour ce motif d’opposition. Je dois maintenant examiner si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime.

[16]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Conformément à l’article 6(2) de la Loi, l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

[17]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont précisées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même [voir, de manière générale, Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 96 CPR (4th) 361 (CSC).]

[18]           Dans l’arrêt Masterpiece, la Cour suprême du Canada a abordé l’importance du facteur de l’article 6(5)e) dans l’examen de la probabilité de confusion entre les marques des parties, conformément à l’article 6 de la Loi (voir para 49) :

[traduction]

... le degré de ressemblance, soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s’il est mentionné en dernier lieu à l’article 6(5) ... si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion. En effet, ces autres facteurs ne deviennent importants que si les marques sont jugées identiques ou très similaires [...]. [je souligne]

[19]           Dans les circonstances de l’espèce, j’estime qu’il convient de commencer par l’examen du degré de ressemblance entre les marques des parties.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[20]           Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante fait valoir que sa marque de commerce F--- CANCER est celle qui ressemble le plus à la Marque dans la présentation puisqu’elle comprend une ligne horizontale à côté de la lettre « F » tout comme la Marque présente un dessin de ruban. L’Opposante fait valoir que la seule raison d’être de la ligne horizontale dans la marque de commerce F--- CANCER est de tronquer le mot « fuck » [foutre] qui est offensant pour certaines personnes et n’est pas enregistrable en lui-même comme marque de commerce.

[21]           Je suis d'avis que les marques des parties sont essentiellement identiques. Bien que la Marque comporte des éléments graphiques, le mot dominant, F CANCER, est identique aux marques de commerce F CANCER, F* CANCER et F--- CANCER de l’Opposante, et presque identique à la marque de commerce FUCK CANCER. Toutes les marques évoquent l’idée de lutte contre le cancer avec une sorte de cri de ralliement qui exprime la frustration des personnes qui ont le cancer (ou qui en sont affectées d’une quelconque manière).

[22]           Comme j'ai conclu qu’il existe une importante ressemblance entre les marques des parties, je dois maintenant évaluer si l’un des autres facteurs suffit pour faire pencher la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante.

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent et la mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[23]           Comme discuté plus en détail précédemment, les marques des parties sont formées d’une lettre et d’un mot du dictionnaire qui, dans les deux cas, fonctionnent ensemble pour créer un « slogan » qui possède un caractère distinctif inhérent relativement modéré.

[24]           La force d'une marque de commerce peut être accrue si elle devient connue au Canada par la promotion ou l’emploi. Je vais maintenant examiner la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues au Canada.

[25]           La preuve de la Requérante établit un emploi de la Marque depuis septembre 2009. Dans son affidavit, Mme Cohen déclare que la Requérante exploite un site Web au www.letsfcancer.com auquel il est possible d’accéder partout au Canada et qui affiche la Marque bien en vue (pièce D). Mme Cohen explique que le site Web possède un magasin en ligne qui vend des tee-shirts arborant la Marque. Elle explique également que les profits provenant de la vente de ces tee-shirts sont remis aux organismes de bienfaisance de la Requérante qui s’occupent d’informer les gens et de financer le dépistage précoce du cancer. Elle fournit un instantané d'écran du magasin officiel provenant de sa page Web qui montre des tee-shirts arborant la Marque qui sont en vente. Mme Cohen fournit également le volume total approximatif des ventes de tee-shirts au Canada pour les années 2009-2012 avec des ventes variant entre 25 000 $ et 46 000 $. Mme Cohen fournit également des statistiques du nombre de visites sur son site Web pendant la même période ainsi que les factures appuyant la vente de tee-shirts à différentes personnes et entreprises entre le 7 octobre 2009 et le 8 juillet 2011 (pièce F).

[26]           Comme discuté plus en détail précédemment, l’Opposante fournit des preuves d’emploi et de la réputation de ses Marques F CANCER depuis mai 2008. L’Opposante a collecté des fonds considérables et a reçu une importante attention médiatique. Bien que l’Opposante n’ait pas directement fourni les chiffres de ventes pour la vente de ses bracelets, Mme Fiedler déclare que la vente des bracelets a généré au moins 100 000 $ en argent collecté pour des organismes de bienfaisance. Étant donné que cela n’équivaut qu’à une partie de l’argent collecté grâce à la vente des bracelets, je suis prête à déduire que les chiffres de vente des bracelets sont importants.

[27]           D'après l'ensemble de la preuve, je suis d’avis que les considérations relatives au caractère distinctif inhérent et à la mesure dans laquelle les marques sont devenues connues ne favorisent de manière significative ni l’une ni l’autre des parties.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été en usage

[28]           La Requérante revendique l’emploi de la Marque depuis le 28 septembre 2009. L’Opposante revendique et a établi l’emploi de ses Marques F CANCER depuis mai 2008.

Article 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

[29]           Les services des parties sont identiques. Bien que les marchandises des parties ne soient pas identiques, les bijoux et les vêtements sont tous les deux des objets personnels en lien avec la mode, et par conséquent, ils possèdent un certain degré de ressemblance.

Conclusion

[30]           Comme susmentionné, dans l’arrêt Masterpiece, la Cour suprême du Canada souligné l’importance du facteur de l’article 6(5)e) dans l’examen de la probabilité de confusion entre les marques des parties. En l’espèce, j’ai conclu qu'il existe une ressemblance importante entre les marques des parties dans le son, la présentation et les idées qu'elles suggèrent. Aucun autre des facteurs n’était suffisant pour faire pencher la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante et par conséquent, je ne suis pas convaincue que la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime d’établir qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de parties. Compte tenu de ce qui précède, j’estime que le motif d'opposition fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement invoqué en vertu de l’article 16(1)a) est accueilli.

Motif fondé sur l’absence de caractère distinctif – article 38(2)d)

[31]           Bien qu'il incombe à la Requérante de démontrer que la Marque distingue véritablement ses marchandises et services de ceux d'autres entités au Canada, ou qu'elle est adaptée à les distinguer ainsi [voir Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd (1985), 4 CPR (3d) 272 (COMC)], l'Opposante doit s'acquitter du fardeau de preuve qui lui incombe et établir les faits sur lesquels elle s'appuie pour soutenir le motif d'opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif.

[32]           Sur le fondement du fardeau de preuve qui lui incombe, l'Opposante est tenue de démontrer qu'à la date de production de la déclaration d'opposition, l’une ou plusieurs de ses Marques F CANCER étaient devenues suffisamment connues pour annuler le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c. Bojangles Café Ltd (2004), 40 CPR (4th) 553, confirmé (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF)].

[33]           Comme discuté plus en détail précédemment dans l’examen du motif d’opposition fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement selon l’article 16(1)a) de la Loi, l’Opposante a réussi à établir que l’une ou plusieurs de ses Marques F CANCER était devenue connue dans une certaine mesure à la date de production de la déclaration d’opposition et, par conséquent, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve.

[34]           La différence entre les dates pertinentes n'est pas importante et, par conséquent, les conclusions que j’ai tirées quant au motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) de la Loi s’appliquent également ici. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que la Requérante s'est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombe, à savoir qu'il lui faut démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et l’une ou plusieurs des Marques F CANCER de l’Opposante à la date de production de la déclaration d’opposition et, en conséquence, le motif fondé sur l’absence de caractère distinctif est également accueilli.

Autre motif d’opposition

[2]               Comme j’ai déjà repoussé la demande pour deux motifs d’opposition, je n’examinerai pas l’autre motif d’opposition alléguant la non-conformité à l’article 30i).

Décision

[35]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

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Andrea Flewelling

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay, trad.

 


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