Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de
l’Association médicale canadienne à la demande n
o 853 709

produite par Enzymatic Therapy, Inc. en vue de l’enregistrement de la marque de commerce DOCTOR’S CHOICE

 

Le 15 août 1997, la requérante, Enzymatic Therapy, Inc., a déposé une demande d’enregistrement de la marque de commerce DOCTOR’S CHOICE. La demande est fondée sur l’emploi projeté de la marque de commerce au Canada en liaison avec des produits nutritionnels tels que des vitamines, des minéraux ainsi que des compléments alimentaires et des suppléments à base d’herbes médicinales.

 

La demande a été publiée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 16 septembre 1998. L’opposante, l’Association médicale canadienne, a déposé une déclaration d’opposition le 16 novembre 1998, la requérante déposant et signifiant une contre‑déclaration.

 

À titre de preuve, l’opposante a produit l’affidavit de Maira Hassan. La requérante a pour sa part déposé à titre de preuve l’affidavit de Tony Bortolin. Mme Hassan a fourni des copies certifiées conformes d’un avis publié en vertu de l’article 9 concernant la marque officielle DOCTOR et le numéro d’enregistrement TMA448,650 pour PATIENT’S CHOICE; la définition que les dictionnaires donnent du mot DOCTOR; un exemplaire du code de déontologie de l’Association médicale canadienne; ainsi qu’un exemplaire de la Loi sur les médecins de l’Ontario. M. Bortolin a produit pour sa part : des détails (ne précisant pas cependant **les marchandises ou services en liaison avec lesquels les marques sont employées) au sujet de 100 marques de commerce canadiennes enregistrées et contenant le mot DOCTOR ou l’abréviation DR.; des détails complets concernant une sélection de 16 enregistrements de marques de commerce canadiennes comprenant les termes DOCTOR, DR. or DR.’S; des détails complets au sujet de trois enregistrements de marques de commerce canadiennes comprenant les mots DOCTOR’S CHOICE (les trois ayant trait à des marchandises de nature tout à fait différente de celles dont il est question en l’espèce); des inscriptions commerciales d’annuaires téléphoniques canadiens pour des noms comportant l’appellation de DOCTOR ou DR.; des pages de sites Internet comportant les termes DOCTOR ou DR.; des enregistrements de marques de commerce aux États‑Unis pour des marques comprenant les mots DOCTOR ou Dr. et CHOICE; une copie du site Internet de l’opposante; le rappel que le titre DOCTOR est également employé à l’égard de personnes titulaires d’un doctorat; et des détails complets concernant l’enregistrement, au Canada, de 11 autres marques de commerce comprenant le mot CHOICE.

 

Les deux parties ont déposé des observations écrites et étaient représentées à l’audience.

 

Selon le premier motif d’opposition, la demande ne répond pas aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce étant donné que, compte tenu des éléments exposés dans la déclaration d’opposition, la requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque au Canada.

Selon le deuxième motif d’opposition, la marque en question n’est pas enregistrable aux termes de l’alinéa 12(1)d) étant donné qu’elle donne une description fausse ou trompeuse de la nature ou qualité des marchandises, les raisons pour cela étant exposées dans une autre partie de la déclaration d’opposition.

 

Le troisième motif d’opposition veut que, selon l’alinéa 12(1)d), la marque en question ne soit pas enregistrable étant donné qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce PATIENT’S CHOICE enregistrée sous le no 448,650 concernant des marchandises comprenant notamment des vitamines.

 

Selon le quatrième motif d’opposition, la marque n’est pas enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)c) car :

[traduction]

i)      l’adoption de la marque est interdite par le sous‑alinéa 9(1)n)(iii) car elle ressemble trop à DOCTOR, la marque officielle de l’opposante et risque d’être confondue avec elle. En ce qui concerne la marque officielle DOCTOR, le registraire a publié, le 2 août 1995, un avis public signalant l’adoption et l’emploi de cette marque par l’opposante;

 

ii)       en vertu d’un usage commercial ordinaire et effectif, le mot DOCTOR est reconnu, au Canada, comme désignant le genre et la qualité de services fournis par des médecins et l’Association médicale canadienne. Cela étant, l’adoption et l’emploi de la marque de commerce DOCTOR’S CHOICE, tel que se propose de le faire la requérante pour des vitamines et produits connexes seraient interdits par l’article 10;

 

iii)       l’adoption et l’emploi de la marque de commerce DOCTOR’S CHOICE comme envisage de le faire la requérante ainsi qu’en témoigne la demande no 853,709, exerceraient vraisemblablement un effet trompeur. Cela étant, l’adoption de la marque de commerce DOCTOR’S CHOICE est interdite par l’article 10.

 

Selon le premier motif d’opposition, la marque n’est pas suffisamment distinctive car elle ne distingue pas et ne permet pas de distinguer les marchandises de la requérante des marchandises et services offerts par d’autres, compte tenu des éléments exposés aux paragraphes 2, 3 et 4c) de la déclaration d’opposition. L’alinéa 4c) correspond au troisième motif d’opposition. Les paragraphes 2 et 3 sont reproduits ci‑dessous :

[traduction]

2.        L’Association médicale canadienne est une association nationale regroupant des médecins. L’Association médicale canadienne compte parmi ses objectifs celui de contribuer au système de santé publique du Canada. L’Association médicale canadienne est une autorité publique au sens du sous‑alinéa 9(1)n)(iii). Le registraire des marques de commerce a publié un avis au public concernant l’adoption et l’emploi par l’Association médicale canadienne de la marque officielle « DOCTOR » à l’égard de services en rapport avec le traitement, le diagnostic, la guérison, les troubles médicaux, y compris les maladies et les infirmités, tant pour le traitement que pour leur prévention. Les détails de cet avis au public ont été publiés dans le Journal des marques de commerce du 2 août 1995, volume 42, numéro 2127.

 

3.        Au Canada, dans l’esprit du public, le mot DOCTOR désigne essentiellement les médecins possédant un diplôme universitaire en médecine et les membres de l’Association médicale canadienne. Cette appellation est également liée aux services médicaux fournis par ces professionnels. Les marchandises et services énumérés dans la demande no 853,709 consistent en « produits nutritionnels tels que des vitamines, des minéraux ainsi que des compléments alimentaires et des suppléments à base d’herbes médicinales ». L’opposante estime que l’emploi de la marque de commerce DOCTOR’S CHOICE tendrait à induire le public en erreur en lui faisant croire que les marchandises en question sont homologuées par la profession médicale et plus précisément par l’Association médicale canadienne. Cela serait même susceptible nuire à la santé publique au Canada.

 

L’alinéa 30i)

Dans la mesure où, à l’appui du motif qu’elle invoque sur la base de l’article 30, l’opposante allègue un certain nombre de faits, il lui appartient de les prouver [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al. c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, aux pages 329 et 330. Si aucun des faits allégués par l’opposante n’était connu de la requérante, on ne pourrait pas conclure que la requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait le droit d’employer l’appellation DOCTOR’S CHOICE. Il convient également de noter que l’opposante n’a nullement fait valoir que la requérante était au courant des divers faits sur lesquels se base l’opposition. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30 doit être écarté à la fois parce qu’il n’a pas été régulièrement plaidé et parce que l’opposante ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve lui incombant initialement. En tout état de cause, le motif fondé sur l’article 30 ne pouvait être accueilli que si au moins un des autres motifs d’opposition l’était également.

 

L’alinéa 12(1)b)

En ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b) la date à retenir est la date de ma décision [voir Lubrication Engineers, Inc. c. Conseil canadien de ingénieurs professionnels, 41 C.P.R, (3d) 243 (C.A.F.)]. Il appartient initialement à l’opposante de rapporter une preuve étayant la véracité de ses allégations, mais la requérante doit, elle, pouvoir tout au long de la procédure, démontrer que sa marque n’est pas contraire à l’alinéa 12(1)b).

 

L’opposante estime que l’expression DOCTOR’S CHOICE est une expression élogieuse qui dénote clairement un produit d’une qualité telle qu’il a la préférence des médecins. L’opposante fait donc valoir que la marque est trompeuse étant donné qu’il serait contraire au code de déontologie de l’Association médicale canadienne pour un médecin de promouvoir un produit. La clause du code de déontologie qui, selon l’affidavit de Mme Hassan, serait à citer en l’espèce est la clause 40 qui, sous la rubrique « Responsabilités envers la profession » prescrit ceci : « Éviter de promouvoir, comme membre de la profession médicale, tout service (autre que le vôtre) ou produit dans le but d’en retirer des gains personnels. »

 

Je ne pense pas que l’article 40 du code de déontologie permette de conclure que la marque de la requérante a un caractère trompeur. D’abord, ce qui nous intéresse en l’occurrence c’est la manière dont le public va percevoir la chose. Rien ne permet d’affirmer que le public connaît le code de déontologie de l’opposante. Mais, même s’il le connaît, il convient de noter que l’article 40 ne pose aucune interdiction générale, et utilise le mot « Éviter » plutôt qu’une formulation plus péremptoire. Précisons en outre que l’article 40 s’inscrit sous la rubrique « Responsabilités envers la profession » et non pas « Responsabilités envers le patient » ou « Responsabilités envers la société ». L’article en question semble plutôt conseiller aux médecins de ne pas promouvoir un produit pour en retirer un gain.

 

J’en profite pour rappeler que, comme l’a fait remarquer la requérante, c’est à tort que l’opposante, dans ses observations écrites, a soutenu que la Loi sur les médecins de l’Ontario interdit spécifiquement l’emploi du titre « DOCTOR » et « DR. » sauf autorisation précise découlant d’autres dispositions de la même loi. « DOCTOR » et DR. » ne sont, en effet, pas seulement employés par les médecins, et la Loi sur les médecins  de l’Ontario ne limite que l’emploi des titres « ostéopraticien », « médecin » et « chirurgien ».

 

Dans sa déclaration d’opposition, l’opposante affirme, aux paragraphes 2 et 3, plusieurs choses que ne confirment pas les preuves versées au dossier. C’est ainsi qu’aucune preuve ne confirme que l’opposante est une association nationale, que ses membres sont des médecins et que cette association compte parmi ses objectifs celui de promouvoir au Canada un système national de santé. Aucune preuve ne démontre non plus que « le mot DOCTOR est reconnu, au Canada, comme désignant le genre et la qualité de services fournis par des médecins et l’Association médicale canadienne. Cette appellation est également liée aux services médicaux fournis par ces professionnels ». L’opposante a également produit en preuve des définitions du mot « DOCTOR » tirées du dictionnaire, définitions qui permettent de constater qu’actuellement le mot a deux acceptions au moins : « titulaire du grade universitaire le plus élevé conféré par une université ou (de nos jours) par un autre organisme compétent. Généralement employé en tant que titre précédant un nom (souvent sous la forme abrégée de Dr); et, à l’origine, une sommité de la médecine ou de la chirurgie; un docteur en médecine, maintenant employé pour tout médecin ». J’estime, cependant, pouvoir constater d’office que, dans l’esprit du public, l’emploi du mot DOCTOR en liaison avec des produits nutritionnels, et notamment des vitamines, des minéraux et des suppléments alimentaires à base d’herbes médicinales, s’entendrait d’un médecin. Aucune preuve ne permet cependant d’affirmer qu’en employant la marque DOCTOR’S CHOICE en liaison avec les marchandises énumérées dans la demande en question, la requérante induirait le public en erreur, le portant à croire que les marchandises en question ont été approuvées par l’Association médicale canadienne et non simplement choisies par un ou par plusieurs médecins comme étant les meilleures.

 

J’en conclus que la marque de la requérante donne une description claire ou une description fausse ou trompeuse de la nature et de la qualité de ses marchandises. L’opposante n’a cependant pas fait valoir que la marque de commerce en question donnait une description claire des marchandises, affirmant au contraire que cette marque en donne une description fausse ou trompeuse. La marque de commerce ne donne, bien sûr, une description fausse ou trompeuse que si l’acheteur ordinaire des marchandises de la requérante est susceptible d’être induit en erreur par la marque DOCTOR’S CHOICE, qui le porterait à penser que les marchandises de la requérante ont effectivement été choisies par un médecin, alors qu’en fait un ou plusieurs médecins n’ont manifesté aucune préférence pour ces marchandises. La requérante aurait pu très facilement démontrer qu’un ou plusieurs médecins s’étaient prononcés en faveur de ses marchandises, à supposer que cela ait été effectivement le cas. Faute de preuve en ce sens, cependant, je crains que l’utilisation de cette marque induise le consommateur ordinaire en erreur. J’en conclus donc que la marque de commerce donne une description fausse ou trompeuse des produits nutritionnels de la requérante, celle‑ci ne m’ayant pas persuadé, selon la prépondérance de la preuve, que l’acheteur typique des produits DOCTOR’S CHOICE ne verrait dans cette marque qu’une appellation de fantaisie, un exemple de publicité tapageuse, ou une simple indication de la source des marchandises plutôt qu’une description fausse ou trompeuse des marchandises en faisant croire qu’elles ont la préférence du corps médical. Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)b) doit donc être retenu.

 

Je précise, avant de passer aux autres motifs d’opposition, que les marques de commerce et noms employés par des tiers et invoqués par la requérante, ne me paraissent guère probantes en l’espèce car la plupart d’entre elles s’appliquent à des marchandises sensiblement différentes, un bon nombre se rattachant à un médecin en particulier ou employant à la fois le mot DOCTOR et un ou plusieurs autres mots, de sorte que le consommateur ordinaire ne serait pas porté à conclure à l’existence d’un lien entre la marque en question et le corps médical (je cite par exemple la marque DOCTOR DRIVEWAY). Je tiens également à évoquer les arguments de la requérante lorsqu’elle rappelle que sa marque emploie le mot DOCTOR, au singulier, et non pas au pluriel. La requérante excipe de ce singulier pour affirmer que l’acheteur ordinaire n’en conclurait aucunement que sa marchandise est agréée par l’ensemble du corps médical. Il ne faut cependant pas perdre de vue le fait que l’alinéa 12(1)b) s’intéresse à la forme graphique, écrite ou sonore de la marque. Or, dans sa forme sonore, il n’y a aucune distinction entre DOCTOR’S CHOICE et DOCTORS’ CHOICE.

 

 

L’alinéa 12(1)d)

En ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d), la date à retenir est celle de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (CAF)]. Il appartient à la requérante de démontrer qu’il n’y avait aucun risque raisonnable de confusion entre les marques en question. Cela veut dire que si ce point ne peut pas être tranché de manière concluante, la demande de la requérante doit être écartée [John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293].

 

Sur la question d’une confusion possible, le critère permettant de se prononcer est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Appliquant ce critère à la notion de confusion telle qu’employée au paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire, y compris celles qui sont énumérées au paragraphe 6(5) de la loi c’est‑à‑dire, le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids accordé à chacun de ces facteurs varie en fonction des circonstances [Clarox Co. c. Sears Canada Inc. 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.); Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].

Les marques DOCTOR’S CHOICE ou PATIENT’S CHOICE ne possèdent ni l’une ni l’autre ce caractère distinctif inhérent. Aucune preuve ne me porte à conclure que l’une ou l’autre de ces marques est devenue connue au Canada.

 

Aucun élément ne démontre que la marque de la requérante a été employée jusqu’ici. Selon la page d’enregistrement, la marque PATIENT’S CHOICE a été pour la première fois employée quelque temps avant le 5 septembre 1995. Les catégories de marchandises se chevauchent et l’on peut penser que cela est également vrai des entreprises et du commerce de leurs propriétaires.

 

Les marques de commerce se ressemblent dans une certaine mesure au niveau du son, de la présentation et des idées qu’elles suggèrent.

 

Une autre circonstance dont il peut être tenu compte est l’état du registre. Les preuves concernant l’état du registre n’ont de pertinence que si l’on peut en tirer des conclusions concernant l’état du marché [Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.)]. Il convient également de rappeler le jugement rendu dans l’affaire Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.) qui confirme que l’on ne peut se fonder sur des preuves concernant l’état du registre pour en tirer de conclusions concernant l’état du marché que lorsqu’on peut se fonder sur un nombre suffisamment important d’enregistrements en rapport avec la question qui se pose à nous.

On a pu citer plusieurs marques de commerce enregistrées au Canada et comprenant le mot CHOICE, mais une seule, PHARMACIST’S CHOICE, s’applique à des marchandises ayant quelque chose en commun avec les marchandises auxquelles s’appliquent les marques PATIENT’S CHOICE et DOCTOR’S CHOICE.

 

Bien sûr, en l’espèce, il s’agit essentiellement de décider si un consommateur qui a de la marque PATIENT’S CHOICE un souvenir général mais non précis, éprouvera une certaine confusion à la vue de la marque de la requérante. Je suis portée à conclure que la ressemblance entre la marque de la requérante et celle de l’opposante ne suffirait pas à créer une confusion dans l’esprit du consommateur ordinaire. Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1 )d) doit donc être écarté.

 

L’alinéa 12(1)e)

Dans l’affaire Conseil canadien des ingénieurs c. John Brooks Company Limited (décision non publiée en date du 3 décembre 2001 rendue à l’égard de la demande d’enregistrement no 732,837), le membre de la Commission Martin résume, à partir de la page 13 de sa décision, certaines questions entourant les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 12(1)e) :

[traduction]

              En ce qui concerne les circonstances entourant le quatrième motif d’opposition, la date à retenir est la date de ma décision : voir les décisions rendues dans les affaires Allied Corporation c. Association olympique canadienne (1989), 28 C.P.R. (3d) 161 (C.A.F.) et Olympus Optical Company Limited c. Association olympique canadienne (1991), 38 C.P.R. (3d) 1 (C.A.F.). L’opposant n’est en outre pas tenu de démontrer l’emploi et l’adoption des marques officielles sur lesquelles il se fonde, du moins en l’absence de preuve portant à penser que les marques n’ont pas été employées : voir la page 166 de la décision rendue dans l’affaire Allied Corporation [...]

 

Ainsi que le prévoit le sous‑alinéa 9(1)n)(iii) de la Loi, il s’agit de se demander si la marque du requérant est composée de la marque officielle ou si sa ressemblance est telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec celle‑ci. Autrement dit, la marque du requérant est‑elle identique ou presque aux marques officielles de l’opposant? : voir la page 217 de la décision rendue en première instance dans l’affaire Les Grandes Soeurs citée ci‑dessus. L’opposant fait valoir que les mots « composé de » n’ont pas les même sens que les mots « identique à », mais le juge O’Keefe en a conclu autrement à la page 259 de sa décision dans l’affaire Conseil canadien des ingénieurs professionnels c. APA ‑ The Engineered Wood Assn :

 

Après avoir expliqué la protection dont jouissent les marques officielles, d’après les dispositions de la Loi, il faut maintenant déterminer quelle est l’étendue des marques interdites : c’est‑à‑dire plus spécifiquement le sens de l’expression « composé de ». Par suite de l’explication qui précède, qui démontre clairement la position privilégiée dont jouissent les marques officielles, je rejette l’interprétation que l’appelant propose du sous‑alinéa 9(1)n)(iii) et déclare que l’interprétation donnée par le registraire est correcte. Pour contrevenir au sous‑alinéa 9(1)n)(iii), et ne pas être enregistrable en vertu de l’alinéa 12(1)e), la marque projetée doit soit être identique à la marque officielle, soit avoir avec elle une ressemblance telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec elle. Les mots « composé de » utilisés au paragraphe de la Loi doivent être interprétés comme signifiant « identique à », conclusion à laquelle en est apparemment venu le registraire.

 

Aux pages 218 et 219 de la décision rendue en première instance dans l’affaire Les Grandes Soeurs, le juge Gibson a confirmé que pour se prononcer sur la ressemblance entre les marques en question, il convient de tenir compte des facteurs énumérés à l’alinéa 6(5)e) de la Loi. Il a en outre indiqué, à la page 218, qu’il s’agissait d’appliquer le critère de « la première impression et du souvenir imparfait » : voir également les pages 302 et 303 de l’arrêt de la Cour d’appel dans l’affaire Techniquip. [Techniquip Limited c. Association olympique canadienne (1999), 3 C.P.R. (4th) 298 (C.A.F.); conf. (1998), 80 C.P.R. (3d) 225, à la page 233 (C.F. 1re inst.)]. [...]

 

Les preuves produites par la requérante ne portent pas à penser que DOCTOR, la marque officielle de l’opposante, n’aurait pas été employée avant que l’opposante ne demande la publication d’un avis concernant son adoption et son emploi en tant que marque officielle. Le fait que la marque officielle ne figure pas en 2000 sur le site Internet de l’opposante ne permet pas de conclure que cette marque n’a pas été employée avant le 2 août 1995.

 

En se fondant sur la démarche adoptée par le juge O’Keefe, la marque DOCTOR’S CHOICE n’est pas composée du mot DOCTOR. Il s’agit donc de décider si DOCTOR’S CHOICE ressemble suffisamment à DOCTOR pour que les deux soient confondues. Au regard du critère de la première impression et du souvenir imparfait, je conclus que le degré de ressemblance entre DOCTOR’S CHOICE et DOCTOR, au niveau de la présentation, du son et de l’idée suggérée est assez important pour que DOCTOR’S CHOICE puisse vraisemblablement être confondue avec DOCTOR. Rappelons que « l’état du registre n’a rien à voir avec la question de savoir si la marque de commerce du requérant est composée de la marque officielle de l’opposante ou si sa ressemblance est telle qu’on pourrait vraisemblablement la confondre avec elle ». [Association olympique canadienne c. IMI Norgren Enots Ltd. (1989), 23 C.P.R. (3d) 389 (C.O.M.C.), à la page 392]. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)e) est, lui aussi, accueilli.

 

L’opposante ayant déjà obtenu gain de cause sur deux de ses motifs d’opposition, il n’y a pas lieu de se prononcer sur les autres motifs qu’elle invoque.

 

 

Décision

En vertu d’une délégation du registraire des marques de commerce aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette la demande au titre du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

FAIT À Gatineau (Québec), le 29 mai 2002

 


 

 

 

Jill W. Bradbury

Agente d’audience


 

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