Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2013 COMC 115

Date de la décision : 2013-06-20 TRADUCTION

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Nada Fashion Designs Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1487129 pour la marque de commerce NADA au nom de Joanna B. Ghodsi

Introduction

[1]               La présente déclaration d’opposition, déposée le 18 février 2011, fait référence à une demande soumise par Joanna B. Ghodsi (la Requérante) le 30 juin 2010 en vue d’enregistrer la marque de commerce NADA (la Marque) en liaison avec des parfums et des eaux de Cologne (les Marchandises).

[2]               Les motifs d’opposition soulevés par l’opposant Asset Inc. (l’Opposant) dans sa déclaration d’opposition sont énumérés dans l’annexe A jointe à ma décision. Toutefois, ceux qui demeurent en litige sont ceux invoqués aux termes des alinéas 12(1)d) et 16(3)b) et aux termes de l’article 2 (caractère distinctif) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi), puisque l’Opposant a informé le registraire à l’audience qu’il retirait les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 30i), 16(3)a) et c) de la Loi.

[3]               Le premier enjeu à régler est de déterminer si le registraire était dessaisi après la délivrance de sa lettre datée du 30 août 2011 par laquelle il informait l’Opposant que sa déclaration d’opposition serait traitée comme étant retirée, aux termes du paragraphe 38(7.1) de la Loi sur les marques de commerce. Si c’est le cas, alors cette opposition sera considérée comme ayant été retirée.

[4]               Si ce n’est pas le cas, je devrai décider si la Marque avait un caractère distinctif à la date pertinente. La Requérante affirme que la date pertinente pour déterminer le caractère distinctif de la Marque est la date de production de la demande et que, de toute façon, l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve pour prouver un emploi suffisant de sa marque de commerce NADA pouvant remettre en cause le caractère distinct de la Marque. Troisièmement, je dois déterminer si la Marque peut être enregistrée et, finalement, si la Requérante était la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque.

[5]               Pour ce qui est de la première question, j’estime que le registraire a le pouvoir de revenir sur sa décision du 30 août 2011. En ce qui a trait au caractère distinctif, la jurisprudence indique que la date pertinente est la date de production de la déclaration d’opposition. Toutefois, à cette date, il n’y avait pas suffisamment de preuve pour me permettre de tirer une conclusion à savoir si la marque de l’Opposant était suffisamment réputée pour remettre en cause le caractère distinctif de la Marque. Pour ce qui est du caractère enregistrable de la Marque, je penche en faveur de la Requérante et, par conséquent, la Marque est enregistrable aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi. Finalement, la Requérante a le droit d’enregistrer la Marque.

Validité de la décision du registraire datée du 22 septembre 2011

[6]               Le 5 mai 2011, la Requérante a présenté sa réplique. Conséquemment, l’Opposant avait jusqu’au 6 septembre 2011 pour soumettre sa preuve, conformément au paragraphe 41(1) du Règlement sur les marques de commerce (le Règlement), puisque le 5 septembre 2011 était une journée fériée. Le 30 août 2011, l’Opposant a soumis une requête pour proroger le délai pour le dépôt de sa preuve. Dans sa lettre datée du 30 août 2011, le registraire a refusé de repousser l’échéance, étant donné que l’Opposant n’avait pas soulevé de circonstances exceptionnelles et n’avait pas obtenu le consentement de la Requérante. C’est dans ce contexte que le registraire a mentionné à l’Opposant que [TRADUCTION] « la présente opposition sera considérée comme ayant été retirée » (je souligne).

[7]               Le 6 septembre 2011, avant l’heure limite pour le dépôt de la preuve de l’Opposant, celui-ci a demandé que le refus soit réévalué en fonction des faits supplémentaires décrits dans la lettre susmentionnée. Dans une lettre datée du 22 septembre 2011, le registraire a revu sa décision du 30 août 2011 et a accordé à l’Opposant une prorogation pour le dépôt de sa preuve.

[8]               Je ne vois pas pourquoi le registraire aurait été dessaisi de la cause après sa lettre du 30 août 2011. Tout d’abord, il indique que l’opposition « sera considérée comme ayant été retirée ». L’utilisation du futur permet au registraire de revenir sur sa décision si des faits pertinents supplémentaires lui sont soumis avant que l’opposition ne soit consignée comme étant retirée, conformément aux dispositions du paragraphe 38(7.1) de la Loi. Ces faits supplémentaires ont été portés à son attention moins d’une semaine après l’envoi de la lettre, le 30 août 2011. En outre, le délai pour le dépôt de la preuve par l’Opposant ou pour la demande d’une prorogation n’était pas encore expiré le 30 août 2011. L’Opposant pouvait encore déposer une nouvelle demande de prorogation pour soumettre sa preuve dans le temps prescrit, dans la mesure où les dispositions prévues au paragraphe 47(1) de la Loi étaient respectées. Conséquemment, le registraire n’était pas dessaisi de la cause le 22 septembre 2011, lorsqu’il a accordé la prolongation demandée par l’Opposant pour le dépôt de sa preuve.

Motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

[9]               L’Opposant allègue que la Marque n’a pas de caractère distinctif, car elle n’a jamais permis de distinguer et n’a jamais été adaptée pour distinguer les Marchandises des marchandises et services de l’Opposant ou de son prédécesseur en droit.

i) Date pertinente

[10]           La première question soulevée par la Requérante en lien avec ce motif d’opposition est la date pertinente pour l’évaluation du caractère distinctif. Le registraire et les tribunaux ont souvent fait référence à Andres Wines Ltd et E & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (CAF) et Park Avenue Furniture Corp c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et al (1991), 37 C.P.R. (3d) 41 (CAF) pour étayer la proposition selon laquelle le caractère distinctif de la marque visée par l’enregistrement, s’il existe, doit être déterminé à la date de production de la déclaration d’opposition. Je suis lié par les décisions de la Cour d’appel fédérale, et j’évaluerai donc ce motif en fonction de cette date, soit le 18 février 2011. Toutefois, compte tenu des observations formulées par la Requérante, j’aimerais faire quelques commentaires, puisqu’il semble qu’après examen de la preuve, la date pertinente pourrait avoir une incidence importante sur la conclusion de ce motif d’opposition.

[11]           Tout d’abord, dans Andres Wines, la Cour d’appel fédérale détermine que la date pertinente en lien avec le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif était la date de production de la déclaration d’opposition, sans analyser la question en profondeur. De ce fait, la Cour mentionne que les résultats auraient été les mêmes si on avait utilisé la date de dépôt de la demande. Or, dans le cas qui nous occupe, les résultats ne seraient pas les mêmes, puisque toute preuve d’emploi de la marque de commerce NADA de l’Opposant en liaison avec les parfums survient après la date de dépôt de la demande étudiée.

[12]           Pour ce qui est de Park Avenue, même si on y fait référence dans Andres Wines, la Cour d’appel fédérale devait déterminer quelle était la date pertinente en lien avec le motif fondé sur l’enregistrabilité aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi.

[13]           Nous pouvons consulter un bon examen de la jurisprudence à ce propos dans l’arrêt Big Apple Ltd c. Bab Holdings Inc. (2002), 16 C.P.R. (4th) 427 (C.F. 1re inst.). Dans cette cause, l’opposant suggérait une autre date pertinente possible : la date de la décision du registraire, afin de suivre le principe énoncé dans Park Avenue selon lequel si la date pertinente n’est pas indiquée dans la Loi, alors ce devrait être la date de la décision du registraire.

[14]           La Requérante affirme que ce motif d’opposition devrait être évalué en fonction de la date de dépôt de la demande, étant donné que l’intention de la Loi est de fixer les droits du requérant à la date de sa demande, à moins que le requérant ne revendique une date de premier emploi ou une date de priorité antérieure. Il y a de toute évidence des incertitudes pour le requérant si la date pertinente est postérieure à la date de dépôt de la demande. Comme dans le cas qui m’est soumis, un opposant peut se baser sur un usage postérieur d’une marque de commerce identique pour remettre en question le caractère distinctif de la marque visée par la demande. Si la date pertinente était la date de dépôt de la demande, alors cet usage postérieur n’aurait aucune incidence sur le caractère distinctif de la marque de commerce visée par la demande.

[15]           Bien que je comprenne la position de la Requérante, je suis forcé de suivre les décisions de la Cour d’appel fédérale pour cette question, jusqu’à ce que cet enjeu soit réévalué par les tribunaux.

ii) Fardeau initial de l’Opposant

[16]           Comme pour tous les motifs d’opposition, l’Opposant doit s’acquitter du fardeau initial, c’est-à-dire qu’il doit présenter une preuve admissible adéquate permettant de conclure raisonnablement à l’existence de faits suffisants à l’appui de chacun des motifs invoqués. Si ces faits sont avérés, alors le requérant doit prouver que sa demande est conforme aux dispositions de la Loi et que les motifs d’opposition soulevés par l’opposant ne devraient pas empêcher l’enregistrement de la marque de commerce visée par sa demande [voir Joseph E Seagram & Sons Ltd et al c. Seagram Real Estate Ltd (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (COMC); John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.) et Wrangler Apparel Corp c. The Timberland Company [2005] CF, 722].

[17]           Conséquemment, il incombe à l’Opposant de s’acquitter du fardeau de preuve initial en prouvant que sa marque de commerce NADA était suffisamment réputée au Canada en date du 18 février 2011 pour remettre en question le caractère distinctif de la Marque [Motel 6, Inc. c. No 6 Motel Ltd (1981), 56 C.P.R. (2d), 44 à 58 (C.F. 1re inst.) et Bojangles » International LLC c. Bojangles Café Ltd (2006), 48 C.P.R. (4th), 427 (C.F. 1re inst.)]. Une fois ce fardeau initial acquitté, la Requérante devra démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était peu probable que la Marque ne crée de la confusion avec la marque de commerce NADA de l’Opposant à la date pertinente, qu’elle ait été adaptée pour distinguer ou qu’elle distingue réellement les Marchandises de celles de l’Opposant partout au Canada [voir Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd (1985), 4 C.P.R. (3d), 272 (COMC)].

[18]           La preuve de l’Opposant consiste en l’affidavit de Nada Shepherd. Elle est la fondatrice et présidente de l’Opposant. Elle affirme que durant l’été 2011, l’Opposant a cessé de mener ses activités dans une petite boutique de vente au détail située à Toronto. Mme Shepherd explique que lorsque la boutique était ouverte, la marque de commerce NADA était affichée à l’intérieur et à l’extérieur du magasin, et elle appuie ses dires en déposant comme preuve B des photos de ces affiches. Cependant, aucune preuve de la promotion et de la publicité pour ce magasin avant le 18 février 2011 n’a été soumise. L’Opposant n’a pas déposé ses chiffres de ventes, lesquels auraient permis de mesurer les activités commerciales de ce magasin de vente au détail avant la date pertinente.

[19]           Mme Shepherd allègue qu’en novembre 2010, l’Opposant a commencé à vendre du parfum au Canada selon la pratique normale du commerce en utilisant la marque de commerce NADA. Pour soutenir ses allégations, elle a déposé des photos d’une bouteille portant la marque de commerce NADA sur laquelle les lettres N-A-D-A figurent de façon séquentielle, chacune sur une des faces latérales de la bouteille en forme de cube. Elle explique que l’Opposant fait la promotion de son parfum sur son site Web, et elle a déposé une copie de la page Web concernée. Elle a également déposé trois reçus prouvant la vente de parfums portant la marque de commerce NADA : deux sont datés de décembre 2010 pour un total d’environ 335 $ et l’autre daté d’avril 2011, soit après la date pertinente.

[20]           Mme Shepherd a déposé également des copies d’articles publiés sur des sites Web. Je ne ferai référence qu’à ceux qui ont censément été publiés avant la date pertinente, c’est-à-dire l’article daté du 25 novembre 2010 affiché sur le site Web FLAIR.com, celui du 29 novembre 2010 publié sur le site Web www.stylebistro.com, et finalement celui publié sur le site Web www.alamodecanada.com le 10 décembre 2010. Je constate qu’aucun renseignement n’a été donné quant au nombre de Canadiens ayant consulté ces sites Web avant la date pertinente et ayant lu ces articles. De même, nous n’avons aucune information quant à la période durant laquelle ces articles étaient disponibles pour les consommateurs canadiens sur ces sites Web.

[21]           Nous n’avons aucun détail quant au volume des ventes réalisées par l’Opposant au Canada entre décembre 2010 et le 18 février 2011, à l’exception des deux ventes mentionnées plus tôt.

[22]           J’estime que cette preuve ne parvient pas à établir que la marque de commerce NADA de l’Opposant, en liaison avec des parfums, était suffisamment connue au Canada pour remettre en question le caractère distinctif de la Marque à la date pertinente. En conséquence, l’Opposant n’est pas parvenu à s’acquitter de son fardeau de preuve et le motif d’opposition fondé sur l’absence du caractère distinctif de la Marque est rejeté.

Enregistrabilité aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi

[23]           L’Opposant affirme que la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce enregistrée ci-dessous :

NADA, certificat d’enregistrement LMC565840

NADA NUFF, certificat d’enregistrement LMC478859

[24]           La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de la décision du registraire [voir Park Avenue, supra].

[25]           On estime que l’Opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve en lien avec le motif d’opposition aux termes de l’alinéa 12(1)d) si les enregistrements sur lesquels il se base sont en règle à la date de la décision relative à l’opposition. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de vérifier le registre pour confirmer l’existence des enregistrements invoqués par un opposant [voir Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada ltée c. Menu Foods Ltd (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (COMC)]. Des copies notariées de ces enregistrements ont été déposées. J’ai exercé le pouvoir discrétionnaire conféré au registraire pour vérifier le registre et je confirme que ces enregistrements existent toujours. En conséquence, l’Opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve initial.

[26]           Le test pour la probabilité de confusion est résumé au paragraphe 6(2) de la Loi. Certaines des circonstances de l’espèce qui doivent être examinées lors de l’évaluation de la probabilité de confusion entre deux marques de commerce sont décrites au paragraphe 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Ces critères ne sont pas exhaustifs et il n’est pas nécessaire d’accorder à chacun la même valeur [voir Clorox Co c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.) et Gainers Inc. c. Marchildon (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].

[27]           Le juge Binnie de la Cour suprême du Canada a commenté l’évaluation de ces critères [voir Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot ltée et al (2006), 49 C.P.R. (4th) 401 et Mattel Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321]. Le facteur le plus important est le degré de ressemblance. Je dois également comparer la Marque avec chacune des marques déposées de l’Opposant [voir Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc. et al (2011), 96 C.P.R. (4th) 361 (CSC)].

i) NADA

Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[28]           Le mot « nada » est défini dans le dictionnaire anglais Canadian Oxford Dictionary comme étant une version informelle du mot « rien ». L’Opposant allègue que sa marque de commerce est fondamentalement distinctive, car elle n’a aucun sens lorsqu’utilisée en liaison avec les marchandises visées par son enregistrement, soit : bijoux, nommément chaînettes, breloques, bracelets, boucles d’oreilles, bagues, boutons de manchettes, lunettes et chopes en or 10 kt, 14 kt et 18 kt, argent sterling. Toutefois, la même affirmation peut être faite au sujet de la Marque lorsqu’utilisée en liaison avec les Marchandises.

[29]           La Requérante affirme que la marque de commerce de l’Opposant est une marque faible, puisqu’elle représente le prénom de la présidente de l’Opposant. Je n’ai aucune preuve que le consommateur canadien moyen associe le mot « nada » à un prénom féminin. Peu importe, si je concluais effectivement que NADA est une marque de commerce faible, alors cette conclusion s’appliquerait également à la Marque, puisqu’elle est identique à celle de l’Opposant.

[30]           Le caractère distinctif d’une marque peut être acquis par son emploi ou par sa promotion au Canada. Toutefois, dans le présent cas, il n’y a pas de preuve quant à l’usage ou à la promotion de la marque déposée de l’Opposant au Canada en liaison avec l’une ou l’autre des marchandises énumérées dans le certificat d’enregistrement. Pour ce qui est de l’emploi de la Marque, il n’y a pas de preuve versée au dossier à ce sujet. Bien qu’il soit vrai que l’enregistrement de l’Opposant revendique un usage au Canada depuis le 1er mai 1999, dans le meilleur des cas, cela me permet de conclure à l’emploi minimal de la marque de commerce NADA de l’Opposant [voir Entre Computer Centers Inc. c. Global Upholstery Co (1991), 40 C.P.R. (3d) 427 (COMC), à 430]. L’emploi minimal n’étaye pas la conclusion que la marque de commerce NADA de l’Opposant était réputée dans une mesure significative. Ce facteur ne favorise donc aucun des deux camps.

Période pendant laquelle les marques de commerce ou les noms commerciaux ont été en usage

[31]           Il a été établi que le registraire peut consulter un certificat d’enregistrement pour établir la période d’emploi de la marque de commerce d’un opposant [voir Cartier Men’s Shops Ltd c. Cartier Inc. (1981), 58 C.P.R. (2d) 68]. Comme je l’ai déjà mentionné plus tôt dans mon analyse sur le facteur de l’alinéa 6(5)a), l’enregistrement de l’Opposant ne me permet de conclure qu’à un usage minimal de sa marque de commerce NADA. Bien qu’il soit vrai que l’usage minimal est supérieur au non-emploi, en l’absence de preuve d’emploi des marques d’une partie ou de l’autre, ce facteur ne fait pas vraiment pencher la balance dans un camp ou dans l’autre.

Nature des marchandises, des services ou des entreprises et nature du commerce

[32]           Puisque les marques en litige sont identiques, ce facteur aura une incidence importante sur ma décision. Je dois comparer les Marchandises (parfums) aux marchandises visées par l’enregistrement de l’Opposant (bijoux). Dans Omnium de la Parfumerie de Luxe c. First Jewellery Co of Canada (1992), 41 C.P.R. (3d) 444 (COMC), le juge Partington conclut que les bijoux et les parfums sont différents. Je ne vois pas pourquoi je tirerais une conclusion différente dans le cas qui nous occupe. Il n’y a aucune preuve au dossier qui prouverait un lien entre les bijoux et les parfums.

[33]            Le dossier contient une preuve que l’Opposant vend des bijoux par Internet. Je n’ai aucune preuve traitant des voies de commercialisation de la Requérante.

Autres circonstances de l’espèce

[34]           L’Opposant a soumis une preuve de l’état du registre. Cette preuve fait partie de l’affidavit de Mme Shepherd. Mme Shepherd joint à son affidavit une recherche du mot « NADA » dans le champ « Repérage de MC », effectuée dans la base de données sur les marques de commerce en ligne de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. La Requérante allègue que cette partie de la preuve est inadmissible, étant donné que Mme Shepherd n’a pas décrit les qualifications du recherchiste, le cas échéant et, plus encore, parce que les spécificités des références ne sont pas indiquées.

[35]           Dans l’arrêt Quebec Maple Products Inc. c. Stafford Foods Ltd (1988), 20 C.P.R. (3d) 404 (COMC), le registraire a conclu que si un tel procédé de preuve est acceptable, il faut accorder un poids moindre au sommaire des résultats obtenus pour cette recherche, étant donné qu’il n’indique qu’une partie des détails des enregistrements et des demandes repérées. Dans le cas présent, certaines entrées sont indiquées comme étant des dessins de marque sans qu’elles ne soient illustrées, et aucune référence ne contient la liste des marchandises ou des services en liaison avec la marque de commerce. Je ne considère pas que cette preuve soit un facteur important pour ma décision, en raison de la faible force probante qui lui est accordée.

Conclusion

[36]           Bien que les marques litigieuses soient identiques, il n’y aucune preuve que la marque de commerce NADA de l’Opposant ait développé un fort caractère distinctif. Il n’y a aucune preuve de l’usage réel de la marque de commerce de l’Opposant en liaison avec les marchandises visées par l’enregistrement. Finalement, et plus important encore, les marchandises des parties sont différentes et jusqu’à preuve du contraire, je dois conclure que leurs voies de commercialisation sont également différentes.

[37]           Globalement, je suis convaincue que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de persuasion, selon la prépondérance des probabilités, qu’il est peu probable que l’enregistrement de la Marque ne crée de la confusion avec la marque de commerce NADA de l’Opposant, visée par le certificat d’enregistrement LMC565840, lorsqu’elle est utilisée en liaison avec les Marchandises.

 

ii) NADA NUFF

[38]           La marque de commerce NADA NUFF a un caractère distinctif inhérent plus prononcé que la Marque, grâce à l’ajout du mot inventé NUFF. Le certificat d’enregistrement LMC478859 fait référence à l’emploi de la marque de commerce NADA NUFF depuis le 19 juin 1997 en liaison avec une gamme de vêtements pour femmes, nommément jeans, chemises, jupes, vestes, pantalons, gilets, shorts, chandails, survêtements, chandails à manches courtes, débardeurs et chapeaux. Toutefois, le dossier ne contient aucune preuve quant à ce type d’emploi.

[39]           Pour ce qui est du lien qui pourrait exister entre les vêtements et les parfums, je me range à l’opinion formulée par le juge David Martin dans l’arrêt St. Lawrence Textiles Ltd c. Leo Chevalier International Ltd (1985), 7 C.P.R. (3d) 511 (COMC) [TRADUCTION] :

Même si, en général, on estime que « ... les produits cosmétiques et les vêtements font tous deux partie de l’industrie de la mode... » (voir Esprit de Corp. c. S.C. Johnson & Son Inc. (1984), 3 C.P.R. (3d) 451 à 456 (COMC)), cette observation ne s’applique pas à tous les types de vêtements. Elle s’applique clairement dans des situations comme le cas d’Esprit de Corp., dans lequel les marchandises de l’Opposant étaient des vêtements de haute couture pour femmes, et elle s’appliquerait sans aucun doute dans le présent cas si l’opposant avait pu prouver davantage qu’un usage minimal de sa marque CHEVALIER pour certaines des marchandises précises énumérées dans son enregistrement.

[40]           Malgré le fait que la Marque ressemble à la marque de commerce déposée NADA NUFF de l’Opposant, puisqu’elle est identique au premier élément de la marque de commerce de l’Opposant, je tranche en faveur de la Requérante pour des raisons semblables à celles décrites dans mon évaluation de l’enregistrabilité de la Marque, en fonction de la marque de commerce NADA de l’Opposant. La requérante s’est acquittée de son fardeau de persuasion, qui était de prouver qu’il est peu probable que la Marque ne crée de la confusion avec la marque de commerce déposée NADA NUFF de l’Opposant.

[41]           Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’enregistrabilité est également rejeté.

Droit à l’enregistrement selon l’alinéa 16(3)b) de la Loi

[42]           Le motif d’opposition, tel qu’invoqué, ne fait référence qu’aux marques de commerce déposées de l’Opposant NADA (LMC565840) et NADA NUFF (LMC478859). Les demandes correspondant à ces enregistrements n’étaient plus en instance à la date de publication de la présente demande [voir le paragraphe 16(4) de la Loi]. Ce motif d’opposition est donc rejeté.

[43]           Je suis parfaitement conscient du fait que, dans les paragraphes d’introduction de la déclaration d’opposition, l’Opposant a fait référence à la demande 1363611. Cette demande n’est toutefois pas mentionnée au paragraphe 1(vii)b) de la déclaration d’opposition qui sert de pierre d’assise à ce motif d’opposition. Dans son mémoire, l’Opposant affirme dans son motif d’opposition aux termes de l’alinéa 16(3)b) que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque, en raison de cette demande déposée antérieurement. Même si mon interprétation stricte du paragraphe 1(vii)b) de la déclaration d’opposition s’avérait erronée, j’aurais tout de même rejeté le motif d’opposition pour les raisons suivantes.

[44]           L’Opposant a déposé une copie notariée de la demande no 1363611 et, par conséquent, il se serait acquitté de son fardeau de preuve si cette demande avait été précisément citée au paragraphe 1(vii)b) de la déclaration d’opposition. J’ai fait appel aux pouvoirs discrétionnaires du registraire pour vérifier le registre et confirmer que cette demande était en instance au moment de la publication pour l’enregistrement de la Marque. La demande no 1363611 vise les produits suivants :

(1) Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements de sport, vêtements habillés, blazers, manteaux, manteaux de fourrure, vestes, imperméables, vestes imperméables, capes, pèlerines, pardessus, pantalons, shorts, jupes, jupes-shorts, chemises, chemisiers, hauts, tee-shirts, polos, débardeurs, chandails, chandails à col roulé, gilets, chapeaux, combinaisons-pantalons, salopettes, robes, robes du soir, gants, ceintures, chaussures, sandales, chapeaux. 
(2) Bottes, chaussures de sport, sacs à main, valises, portefeuilles, porte-monnaie, sacs à dos, bijoux, foulards, accessoires pour cheveux, chaussettes, bas, bonneterie, cravates.

et les services suivants :

(1) Services de création de mode, fabrication de vêtements, présentation de vêtements dans des expositions commerciales et des défilés de mode, tenue et organisation de défilés de mode.
(2) Exploitation d’un site Web et d’un magasin de détail en ligne dans le domaine de la mode.

[45]           Mon analyse des circonstances de l’espèce réalisée pour le motif d’opposition fondé sur l’enregistrabilité pourrait s’appliquer également à la présente question, dans la mesure où les marchandises de l’Opposant énumérées dans la demande en instance sont concernées, étant donné qu’elles sont similaires à celles visées par les enregistrements de l’Opposant.

[46]           Pour ce qui est des services de l’Opposant, la demande est fondée sur un usage projeté. La date pertinente est la date de production de la présente demande, soit le 30 juin 2010. Il n’y a aucune preuve de l’usage de la marque de commerce NADA de l’Opposant en liaison avec ces services avant la date pertinente. Finalement, en ce qui a trait à la nature des services de l’Opposant par rapport aux Marchandises, je ne vois pas pourquoi je tirerais une conclusion différente de celle que j’ai déjà énoncée dans le motif relatif à l’enregistrabilité. Les mêmes conclusions s’appliquent aux voies de commercialisation des parties.

Règlement

[47]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en application du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

 

_____________________________

Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Catherine Dussault, trad. A.

 

 

 

 

 

Annexe A

 

Les parties pertinentes de la déclaration d’opposition de l’Opposant vont comme suit [TRADUCTION] :

1.

 

(i)                 L’opposant est le propriétaire des marques de commerce suivantes (et des survaleurs afférentes), dont les enregistrements respectifs sont en règle :

[NADA, enregistrement LMC565840 visant des bijoux

NADA NUFF, enregistrement LMC478859 pour une gamme de vêtements pour femmes]

(…)

(ii) L’opposant a également déposé une demande pour la marque de commerce NADA, laquelle est présentement en instance (demande no 1363611), pour laquelle la date de premier emploi est mars 2002 et la date de production, le 10 septembre 2007…

(…)

(v) L’opposant fonde son opposition sur les motifs énumérés à l’alinéa 38(2)a) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T -13 (ci-après, la Loi), plus précisément sur le fait que la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’article 30 de la Loi. Plus particulièrement, la demande n’est pas conforme aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi, car la requérante ne peut pas avoir été convaincue d’avoir le droit d’utiliser la marque de commerce au Canada en liaison avec les marchandises décrites dans la demande, en raison de l’existence des marques déposées, des marques non déposées et des noms commerciaux de l’opposant, les détails étant indiqués aux paragraphes 1(i), 1(ii) et 1(iii), respectivement, de la présente déclaration d’opposition.

 

(vi) L’opposant fonde son opposition sur les motifs énumérés à l’alinéa 38(2)b) de la Loi, étant donné que la marque de commerce de la Requérante n’est pas enregistrable aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi, car elle crée, et créait à la date pertinente, de la confusion avec les marques déposées de l’opposant, les détails étant indiqués au paragraphe 1(i) de la présente déclaration d’opposition.

 

 (vii) L’opposant fonde son opposition sur les motifs indiqués à l’alinéa 38(2)c) de la Loi, étant donné que la requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce énoncée dans la demande. Plus précisément :

a)            contrairement aux dispositions de l’alinéa 16(3)a) de la Loi, à la date de production de la demande et à tous les moments importants, la marque créait de la confusion avec les marques déposées de l’opposant, dont les détails sont donnés au paragraphe 1(i) de la présente déclaration d’opposition, et les marques non déposées de l’opposant, dont les détails sont donnés au paragraphe 1(ii) de la présente déclaration d’opposition, qui ont toutes été utilisées et révélées antérieurement au Canada par l’opposant et par son prédécesseur en droit;

b)            contrairement aux dispositions de l’alinéa 16(3)b) de la Loi, à la date de production de la demande et à tous les moments importants, la marque créait de la confusion avec les marques déposées de l’Opposant, dont les détails sont indiqués au paragraphe 1(i) de la présente déclaration d’opposition, pour lesquelles les demandes d’enregistrement avaient été déposées antérieurement au Canada par le prédécesseur en droit de l’Opposant;

c)            contrairement aux dispositions de l’alinéa 16(3)c) de la Loi, à la date de production de la demande et à tous les moments importants, la marque créait de la confusion avec les marques de commerce de l’opposant, Nada Fashion Designs Inc. et NADA, lesquelles ont été utilisées antérieurement au Canada par l’opposant ou par le prédécesseur en droit de l’opposant.

 

(viii) L’opposant base son opposition sur les motifs établis à l’alinéa 38(2)d) de la Loi, étant donné que la marque de commerce de la requérante n’a pas et n’a jamais eu de caractère distinctif; contrairement à l’article 2 de la Loi, elle ne distingue pas, n’a jamais distingué, n'est pas adaptée à distinguer et n'a jamais été adaptée à distinguer les marchandises de la requérante des marchandises et services d’autres propriétaires, notamment les marchandises et services de l’opposant ou du prédécesseur en droit de l’opposant pour lesquels les marques de commerce de l’opposant indiquées aux paragraphes 1(i) et 1(ii) de la présente déclaration d’opposition sont et ont été utilisées.

 

 

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