Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

PROCÉDURE PRÉVUE À l’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : Great harvest bread co. & DesSIn

ENREGISTREMENT LMC n° 524,225

 

 

À la demande de Brouillette Kosie Prince (la partie requérante), le registraire a transmis un avis au titre de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce le 25 juin 2003 à la société Great Harvest Franchising, Inc., propriétaire inscrite de la marque de commerce susmentionnée.   

 

La marque GREAT HARVEST BREAD CO. & DESSIN (représentée ci-dessous) est déposée en lien avec les services suivants: « Exploitation et franchisage de boulangeries de détail ».

 

L’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, exige du propriétaire de la marque déposée qu’il indique, à l’égard de chacune des marchandises ou chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis, et dans la négative, la date à laquelle elle a été utilisée en dernier lieu et la raison de sa non-utilisation depuis cette date. Dans la présente affaire, la période pertinente pour établir l’utilisation se situe entre le 25 juin 2000 et le 25 juin 2003.

 

L’usage en lien avec des services est défini au paragraphe 4(2) de la Loi sur les marques de commerce :

Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services. 

 

Je ferais remarquer que la formulation des services comprend à la fois « l’exploitation et le franchisage » de boulangeries de détail. On peut donc supposer que, comme dans l’arrêt John Labatt c. Rainer Brewing Co. et autres, 80 C.P.R. (2d) 228 (C.A.F.), l’énumération des deux services suggère, à défaut de preuve du contraire, qu’il existe un certain degré de différences entre eux. Le fait qu’un service est lié à l’autre n’est pas suffisant en soi pour maintenir l’enregistrement relativement à l’exploitation et au franchisage; il incombe à l’inscrivante de prouver l’emploi en lien avec des services de franchisage et avec l’exploitation de boulangeries de détail. 

 

En réponse à l’avis du registraire, l’inscrivante a fourni la déclaration solennelle de Dawn Eisenzimer, directrice de l’élaboration de nouvelles franchises chez Great Harvest. Les deux parties ont déposé des argumentations écrites et assisté à l’audience. 

 

Mme Eisenzimer déclare que la marque de commerce a été utilisée au Canada le 25 mars 2003 dans le centre commercial Lethbridge, en Alberta, pour l’exploitation de boulangeries. Pour appuyer cette affirmation, la déclarante joint la pièce n° 1, une photo qu’elle a prise de cet événement. La photo montre des paniers de pain posés sur une table provisoire installée dans le centre commercial, et une bannière épinglée autour de la table, qui, bien que partiellement masquée par un client, laisse clairement apparaître la marque de commerce en question. La pièce n° 2 est une autre photo qui montre la table, l’exposition de pain et la bannière, portant ladite marque de commerce, dans son intégralité. De plus, derrière la table, il y a une personne qui semble être un vendeur. La pièce n° 3 est une page tirée d’une brochure d’information qui offre la possibilité de devenir franchisé. Je constate qu’en haut de la page de renseignements figure clairement la marque de commerce en question. Mme Eisenzimer déclare que cette publicité a été envoyée à cent cinquante-sept (157) personnes au moins au Canada au cours des trois (3) années précédant le 25 juin 2003.

 

La partie requérante revendique que les photographies constituant les pièces nos 1 et 2 n’indiquent pas qu’elles ont été prises au Canada, ni d’ailleurs qu’elles ont été prises le 25 mars 2003. J’estime qu’étant donné que la déclarante affirme qu’elle se trouvait elle‑même au centre commercial Lethbridge le 25 mars 2003, et qu’elle a pris les photos, cela est suffisant pour établir que les photos ont été prises au Canada pendant la période concernée. 

La partie requérante fait aussi valoir que le document relatif à la franchise est incomplet et qu’aucune preuve n’indique qu’il a été distribué au Canada auprès d’éventuels franchisés au Canada. Je fais remarquer que l’inscrivante n’a aucune obligation de démontrer la présence de franchisés au Canada; en vertu du paragraphe 4(2) de la Loi, il est suffisant que « l’emploi » soit établi dans l’exécution ou l’annonce des services. Il a été statué que l’emploi d’une marque de commerce dans des annonces au Canada pour des services uniquement disponibles aux États-Unis ne satisfaisait pas aux dispositions du paragraphe 4(2) (voir Porter c. Don the Beachcomber (1996), 48 C.P.R. 280); toutefois, lorsque le propriétaire de la marque de commerce offre des services au Canada et est prêt à les fournir, l’emploi de la marque de commerce dans l’annonce de ces services répond aux exigences du paragraphe 4(2) (voir Wenward (Canada) Ltd. c. Dynaturf Co. (1976), 23 C.P.R. (2d) 20). 

 

Bien que le prospectus ne soit pas fourni dans son intégralité, j’estime que la page distribuée aux Canadiens pendant la période concernée, qui contient clairement la marque de commerce en question, sollicite de nouveaux franchisés et offre des services de franchise, satisfait aux exigences du paragraphe 4(2) de la Loi par rapport au « franchisage de boulangeries de détail ».

 

Eu égard à « l’exploitation de boulangeries de détail », j’estime qu’il y a eu exploitation d’une boulangerie temporaire une fois au Canada pendant la période concernée. Le fait que ces activités ont été menées pour susciter un intérêt par rapport à des possibilités de franchise n’en enlève pas moins leur caractère d’activités de vente au détail, étant donné que la présence de pain aux fins d’achat était un avantage distinct pour les consommateurs ce jour-là (Carling O’Keefe Breweries of Canada Ltd. c. Anheuser‑Busch, Inc. (1985),  4 C.P.R. (3d) 216). 

 

Bien qu’il s’agisse d’un cas exceptionnel, et qu’il aurait été préférable d’avoir d’autres renseignements, d’après l’interprétation raisonnable de l’ensemble de l’affidavit, j’estime que la marque de commerce a été employée en liaison avec « l’exploitation et le franchisage de boulangeries de détail ».

 

En conclusion, je tiens compte des énoncés de la Cour dans la décision Steinberg c. Venator Group Canada Inc., 35 C.P.R. (4th) 443, 2004 CF 717 (C.F.), au paragraphe 73, où l’on donne les indications suivantes pour examiner la preuve de l’emploi :

La jurisprudence établit que le fardeau qui incombe au propriétaire d’une marque de commerce dans le cadre d’une procédure intentée en vertu de l’article 45 se limite à fournir une preuve d’emploi suffisante pour éviter la radiation. Elle établit également que la preuve par affidavit n’a pas à être parfaite. Dans Gesco Industries Inc., précité, [Gesco Industries Inc. c. Sim & McBurney (1997), 76 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.)], le juge Weston a affirmé que « la preuve présentée au registraire doit établir les faits à partir desquels on peut déduire logiquement qu’il y a eu “emploi” ou “emploi dans le cours normal du commerce” ».

Dans la décision Brouillette Kosie Prince c. Orange Cove-Sanger Citrus Association, 2007 CF 1229, (non publié), le juge Martineau a déclaré au paragraphe 7 :

[traduction]

« Dans la procédure prévue à l’article 45, la charge de la preuve incombe au propriétaire de la marque de commerce, qui doit en démontrer “l’emploi” afin de maintenir l’enregistrement d’une marque de commerce. Il ressort clairement de la jurisprudence que cette charge n’est pas stricte. Le propriétaire doit seulement établir un cas d’utilisation prima facie dans le sens de l’article 4 de la Loi. »

 

Au vu de tout ce qui précède, je suis satisfaite qu’il y a eu emploi de la marque de commerce en question au sens du paragraphe 4(2) de l’article 45 de la Loi, en lien avec « l’exploitation et le franchisage de boulangeries de détail ». En conséquence, l’enregistrement LMC n° 524,225 pour la marque de commerce GREAT HARVEST BREAD CO. & DESSIN sera maintenu conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13.

 

FAIT À GATINEAU, QUÉBEC, LE 24 JANVIER 2008.

 

P. Heidi Sprung

Membre de la Commission des oppositions des marques de commerce

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