Contenu de la décision
TRADUCTION/TRANSLATION
RELATIVEMENT À L’OPPOSITION
de BRASSERIES MOLSON, SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF
à la demande no 686,180 produite par ANHEUSER‑BUSCH, INCORPORATED en vue d’obtenir l’enregistrement de la marque de commerce
MICHELOB GOLDEN DRAFT
Le 18 juillet 1991, la société ANHEUSER‑BUSCH, INCORPORATED, requérante en la présente instance, a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT fondée sur l’emploi projeté de cette marque au Canada, ainsi que sur l’emploi et l’enregistrement de cette marque aux États-Unis d’Amérique en liaison avec la « bière ». La requérante a réclamé et obtenu la date de priorité de production du 15 avril 1991, en fonction de la demande produite aux États‑Unis d’Amérique sous le no de série 74/184,554 pour l’enregistrement la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT. La requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif du mot DRAFT en dehors de la marque de commerce.
La présente demande a été annoncée en vue de la procédure d’opposition dans le numéro du 4 août 1993 du Journal des marques de commerce et les BRASSERIES MOLSON, société en nom collectif, opposante en la présente instance, a produit une déclaration d’opposition le 29 novembre 1993, dont copie a été transmise à la requérante le 2 février 1994. Le 31 mai 1994, la requérante a signifié et produit une contre‑déclaration en réponse à la déclaration d’opposition. La preuve fournie par l’opposante consiste en les affidavits de Katherine Davie et de Blair Shier, alors que la preuve fournie par la requérante consiste en les affidavits de L. Jane Sargeant, de Todd D. Bailey, de Cynthia L. Martens, de Robert W. White, de William S. Campbell, et les deux affidavits de Isis E. Caulder, signés le 28 février 1996 et le 4 mars 1996. William S. Campbell, L. Jane Sargeant, Todd D. Bailey, Cynthia L. Martens et Isis E. Caulder ont été contre‑interrogés sur le contenu de leurs affidavits, et la transcription des contre‑interrogatoires ainsi que les réponses aux engagements pris lors de ces contre‑interrogatoires font partie du dossier d’opposition. En vertu du paragraphe 44 du Règlement sur les marques de commerce, l’opposante a demandé et obtenu l’autorisation de déposer l’affidavit de Hui Ming Zheng à titre de preuve complémentaire dans la présente opposition.
En plus de l’autorisation mentionnée précédemment, l’opposante a demandé et obtenu l’autorisation de modifier sa déclaration d’opposition en vertu de l’article 40 du Règlement sur les marques de commerce, après quoi la requérante a demandé et obtenu l’autorisation de modifier sa contre‑déclaration. Les deux parties ont produit une argumentation écrite et elles étaient représentées à l’audience. Par ailleurs, au cours de la procédure d’opposition, la requérante a déposé une demande modifiée, que la Commission des oppositions a acceptée, dans laquelle elle s’est désistée du droit à l’usage exclusif du mot GOLDEN en dehors de sa marque de commerce.
L’opposante a fait valoir les motifs d’opposition suivants dans sa déclaration d’opposition modifiée :
[TRADUCTION]
a) La présente déclaration n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce en ce que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer ou d’enregistrer sa marque de commerce, compte tenu des enregistrements obtenus par l’opposante pour ses marques de commerces reproduites ci-dessous.
b) La présente déclaration n’est pas conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce en ce que la requérante n’avait pas l’intention d’employer la marque de commerce pour laquelle l’enregistrement est demandé, contrairement aux allégations contenues à sa demande ou d’aucune autre façon. De plus, contrairement à ce qu’elle a allégué, la requérante n’a pas employé aux États‑Unis la marque de commerce visée par la demande.
c) La marque de commerce visée par la demande n’est pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce parce qu’elle crée de la confusion avec les marques de commerce déposées portant sur les « bières alcoolisées » ou les « boissons alcoolisées obtenues par brassage » ci-après énumérées :
Marque de commerce No d’enregistrement
MOLSON'S GOLDEN ALE & Dessin 100,941
GOLDEN ALE & Dessin 114,145
MOLSON GOLDEN ALE & Dessin 161,252
MOLSON GOLDEN & Dessin 290,098
MOLSON GOLDEN 292,103
GOLDEN ALE & Dessin 293,246
MOLSON GOLDEN & Dessin 309,841
GOLDEN 498,157
L’opposante a également fait valoir sa marque de certification MOLSON GOLDEN & Dessin, enregistrée sous le no 471,067, dans son motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d). L’enregistrement de la marque de certification porte sur les marchandises suivantes :
« Trophées; plaques; plateaux de liège; plateaux de présentation en argent et en laiton; plateaux de service en argent et en laiton; plateaux en plastique; verres; verres en plastique; verres à bière; service de verres à pied pour les entreprises; chopes; chopes en plastique; chope en étain; étui pour cartes d’affaires; étuis pour cartes à jouer; médaillons en or, en argent et en bronze; coffrets; porte‑crayons; ensembles de papier avec stylo; stylos et recharges; ensembles de sous-verres; horloges murales; horloge à pendule; horloges galaxy (réveils); ensembles horloge et stylo; plateaux à fromage; breloques porte‑clés; chaînes porte‑clés; sacs de sport; sacs à bandoulière; sacs fourre‑tout; sacs de golf; sacs isothermes; housses de raquette; sacs à vêtements; sacs de hockey; coussins et matelas de stade; sacs à dos; balles de golf; serviettes de golf; parapluies de golf; paquets de tés pour le golf; étiquettes personnalisées pour sacs de golf; chemises contenant de l’information sur le golf; feuilles de pointage pour le golf; housses pour fixations de ski; courroies pour transporter les chaussures de ski; planchettes de cribbage; cartes à jouer; chandails de base‑ball; feuilles de pointage pour le baseball avec étui en vinyle; armoires pour fléchettes; feuilles de pointage pour le curling; ouvre-boîtes; ouvre-bouteilles; ouvre-lettres; nécessaires de voyage pour hommes; trousses à maquillage pour dames; briquets; allumettes; téléphones; vestes; chandails; bonnets; serviettes de plage; t-shirts; chemises; t-shirts pour dames; pulls d’entraînement; pantalons de rugby; tabliers pour barbecue; cravates; bandeaux antisudoripares et serre‑poignets; dossards; tables de jardin; embase de table à jardin; parasols; porte-documents; pochettes de présentation; chemises destinées à la presse; feuilles de communiqué; lampes de poche de format stylo; casquettes d’ouvrier; casquettes; visières; casquettes avec logo; casquettes américaines; glacières; drapeaux; enseignes de bière pression en bois; enseignes de bière pression sur glace étamée; affiches; bannières; manettes de tireuse à bière; manettes de tireuse à bière en bois; insignes nominatifs d’identification; insignes destinés aux membres de la presse; insignes destinés aux officiels; épinglettes; brochures; montres; objets gonflables en forme de canette de bière; pantalons de survêtement; shorts; sacs à skis. »
d) La requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce visée par la demande car, à la date de production de la présente demande et à tout autre moment, la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT créait de la confusion avec les marques de commerce de l’opposante, énumérées précédemment, déjà employées au Canada.
e) Compte tenu de ce qui précède, la marque de commerce pour laquelle l’enregistrement est demandé n’est pas distinctive. L’opposante a réalisé des ventes considérables de boissons alcoolisées obtenues par brassage au Canada et en a fait la publicité en liaison ses marques de commerce énumérées précédemment, lesquelles contiennent toutes le mot GOLDEN.
Dans les deux premiers motifs, l’opposante a allégué que la présente demande n’est pas conforme à l’article 30 de la Loi sur les marques de commerce. Bien qu’il incombe à la requérante d’établir que sa demande est conforme à l’article 30 de la Loi, l’opposante a le fardeau initial de présenter suffisamment d’éléments de preuve admissibles, dont le caractère probant permettrait d’établir que les allégations concernant les motifs fondés sur l’article 30 sont vraies [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al v. Seagram Real Estate Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.), aux pages 329 et 330]. De plus, s’agissant de l’examen des circonstances entourant le non‑respect de l’article 30 de la Loi, le moment pertinent correspond à la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. v. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475].
Le premier motif dans le cadre de l’article 30 est fondé sur l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce. Toutefois, les allégations de fait, que l’opposante invoque au soutien de sa déclaration d’opposition modifiée, ne parviennent pas à étayer un motif de non‑conformité à l’alinéa 30i) de la Loi. La simple existence des enregistrements de l’opposante n’empêche pas la requérante d’être convaincue qu’elle a le droit d’employer sa marque de commerce au Canada. L’opposante n’a même pas allégué que la requérante savait que les marques de l’opposante existaient. Qui plus est, même en considérant que la requérante ait eu une connaissance présumée des enregistrements de l’opposante, leur simple existence n’aurait pas empêché la requérante d’être convaincue qu’elle avait le droit d’employer sa marque de commerce au Canada compte tenu, entre autres, qu’elle n’était pas d’avis que sa marque MICHELOB GOLDEN DRAFT créait de la confusion avec aucune des marques de l’opposante. Par ailleurs, le fait que la requérante ait initialement produit la présente demande sans fournir de désistement pour le mot GOLDEN, en dehors de la marque de commerce, n’est pas à mon avis une quelconque indication que la requérante avait l’intention d’obtenir, au moment de la production de la présente demande, des droits de monopole sur les mots GOLDEN DRAFT en dehors de sa marque MICHELOB. Quoi qu’il en soit, dans sa déclaration d’opposition modifiée, l’opposante n’a pas fourni d’allégation semblable au soutien de l’un quelconque des motifs fondés sur l’article 30. J’ai donc rejeté le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i).
Le deuxième motif d’opposition dans le cadre de l’article 30 est fondé sur les alinéas 30d) et e) de la Loi sur les marques de commerce, ainsi libellés :
30. Quiconque sollicite l’enregistrement d’une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :
d) dans le cas d’une marque de commerce qui est, dans un autre pays de l’Union, l’objet, de la part du requérant ou de son prédécesseur en titre désigné, d’un enregistrement ou d’une demande d’enregistrement sur quoi le requérant fonde son droit à l’enregistrement, les détails de cette demande ou de cet enregistrement et, si la marque n’a été ni employée ni révélée au Canada, le nom d’un pays où le requérant ou son prédécesseur en titre désigné, le cas échéant, l’a employé en liaison avec chacune des catégories générales de marchandises ou services décrites dans la demande;
e) dans le cas d’une marque de commerce projetée, lorsque la demande n’est pas accompagnée d’une demande d’enregistrement de la part de toute personne en qualité d’usager inscrit, une déclaration portant que le requérant a l’intention d’employer cette marque de commerce au Canada.
En ce qui concerne le volet du deuxième motif d’opposition portant sur l’alinéa 30e), le fardeau de preuve qui incombe à l’opposante, en ce qui a trait à la question de non‑conformité à l’alinéa 30e) de la Loi, est relativement moins exigeant [voir, à ce sujet, Canadian National Railway Co. v. Schwauss, 35 C.P.R. (3d) 90, aux pages 94 et 95]. De plus, l’opposante peut s’acquitter de son fardeau en s’appuyant non seulement sur sa preuve et sur les transcriptions de tout contre‑interrogatoire, mais également sur la preuve de la requérante [voir La compagnie de brassage Labatt c. Brasseries Molson, société en nom collectif, 68 C.P.R. (3d) 216, à la page 230]. Toutefois, même si l’opposante peut s’appuyer sur la preuve de la requérante pour s’acquitter du fardeau qui lui incombe eu égard à ce motif, elle doit également établir que la preuve de la requérante est « manifestement » incompatible avec les allégations énoncées dans la présente demande.
Puisque la présente demande respecte les exigences de forme énoncées aux alinéas 30d) et e) de la Loi, il reste à savoir si la requérante a respecté les exigences de fond prévues à ces alinéas 30d) et e), c’est‑à‑dire si les déclarations de la requérante portant qu’elle a employé et enregistré sa marque de commerce aux États-Unis d’Amérique, et qu’elle a l’intention d’employer la marque de commerce visée par la demande, sont exactes. L’opposante n’a présenté aucune preuve pour étayer la question soulevée eu égard à l’alinéa 30e), et la preuve de la requérante n’est pas incompatible avec le fait qu’elle allègue avoir l’intention d’employer la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT au Canada. Toutefois, l’opposante soutient que si la requérante avait eu l’intention d’employer sa marque au Canada, elle aurait commencé à l’employer chez nous au moins depuis la date du contre‑interrogatoire de M. Campbell [1er mars 1996]. Or, on peut penser que l’opposition à la présente demande est l’une des raisons pour laquelle la requérante n’a pas encore commencé à employer sa marque de commerce au Canada. Quoi qu’il en soit, il n’est pas nécessaire que le requérant commence à employer au Canada sa marque de commerce projetée avant que sa demande soit admise. Par conséquent, je conclus au rejet du volet alinéa 30e) du deuxième motif d’opposition.
S’agissant de la question soulevée eu égard à l’alinéa 30d), l’opposante a observé que les catalogues annexés à l’affidavit de M. Campbell sous la cote « F », lesquels couvrent une période de quatre ans, ne font aucune référence à des marchandises visant à faire connaître la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante. En conséquence, l’opposante soutient que cet élément de preuve vient étayer la conclusion voulant que la requérante n’ait pas employé sa marque de commerce aux États‑Unis d’Amérique en liaison avec de la bière. Toutefois, l’opposante a contre‑interrogé M. Campbell sur le contenu de son affidavit et ne lui a posé aucune question au sujet de l’emploi de la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT fait par la requérante aux États‑Unis d’Amérique en liaison avec la bière. Or, j’estime que le fait de ne pas trouver d’articles promotionnels affichant la marque de commerce de la requérante à l’intérieur de ses catalogues n’est pas « manifestement » incompatible avec le fait qu’elle allègue avoir employé la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT aux États‑Unis d’Amérique. De plus, il est indiqué à la page 3 de la transcription du contre‑interrogatoire de M. Campbell que la requérante a employé la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT aux États‑Unis d’Amérique. J’ai donc rejeté ce volet du deuxième motif d’opposition.
Les autres motifs d’opposition mettent tous en cause la question de la confusion entre la marque de commerce MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante, applicable à la « bière », et les marques de commerce de l’opposante, même si le moment pertinent est différent dans chacun des autres motifs. Le motif le plus solide de l’opposante est celui fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce à l’égard de la marque déposée GOLDEN de l’opposante, enregistrée sous le no 498,157. En appliquant le critère énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce pour apprécier la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi. En outre, il incombe à la requérante de démontrer qu’il n’existerait pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce en cause à la date de ma décision, laquelle constitue le moment pertinent pour l’examen du motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le registraire des marques de commerce, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].
S’agissant tout d’abord de l’examen du caractère distinctif inhérent des marques de commerce en cause [al. 6(5)a)], la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante applicable à la « bière » possède un caractère distinctif inhérent lorsqu’elle est considérée dans son ensemble, en dépit du fait que les mots GOLDEN et DRAFT sont descriptifs lorsque applicables à la « bière » et qu’ils ont fait l’objet d’un désistement de la part de la requérante en dehors de sa marque de commerce. Quant à la marque GOLDEN de la requérante, marque déposée, elle donne une description claire des boissons alcoolisées obtenues par brassage [voir John Labatt Ltd. c. Brasseries Molson, 19 C.P.R. (3d) 88, à la page 89 (C.A.F.); et Brasseries Molson c. John Labatt Ltd., 58 C.P.R. (3d) 527, à la page 529 (C.A.F.)], et est donc peu distinctive.
En ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues [al. 6(5)a)] et la période pendant laquelle les marques ont été en usage [al. 6(5)b)], on peut présumer que la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT n’est pas devenue connue chez nous dans une quelconque mesure puisque la requérante n’a pas encore commencé à l’employer au Canada. L’affidavit de M. Shier établit que la marque déposée GOLDEN de l’opposante, est devenue particulièrement connue au Canada en combinaison avec sa marque maison MOLSON ou MOLSON'S applicable aux boissons alcoolisées obtenues par brassage. Plus particulièrement, M. Shier atteste que, de 1970 à 1990 inclusivement, l’opposante a réalisé des ventes de bière, sur lesquelles des étiquettes affichant la marque GOLDEN étaient apposées, supérieures à 1 000 000 000 $, alors que les dépenses de publicité qu’elle a engagées au cours de la même période se chiffraient à plus de 46 000 000 $. Par conséquent, autant la mesure dans laquelle les marques en cause sont devenues connues, que la période pendant laquelle les marques ont été en usage, sont favorables à l’opposante relativement à sa marque de commerce GOLDEN.
En ce qui concerne le genre de marchandises des parties [al. 6(5)c)] et la nature du commerce en liaison avec leurs marchandises respectives [al. 6(5)d)], la « bière » de la requérante est semblable aux boissons alcoolisées que l’opposante obtient par brassage, visées par l’enregistrement no 498,157, et les voies commerciales en liaison avec ces marchandises seraient semblables.
S’agissant ensuite du degré de ressemblance entre les marques en cause [al. 6(5)e)], la marque MICHELOB GOLDEN DRAFT de la requérante, considérée dans son ensemble, et la marque déposée GOLDEN de l’opposante démontrent une certaine ressemblance dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elle suggèrent, du fait que la marque de la requérante contient la totalité de la marque de commerce déposée de l’opposante.
Pour ajouter à l’ensemble des circonstances entrant dans l’appréciation de la probabilité de confusion entre les marques en cause, la requérante a présenté une preuve de l’état du registre au moyen de l’affidavit de Mme L. Jane Sargeant. Toutefois, la preuve de l’état du registre n’est pertinente que lorsqu’elle permet de tirer des conclusions sur l’état du marché [voir Ports International Ltd. v. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432, et Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.)]. Il importe également de noter la décision Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd., 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.), qui appuie la thèse selon laquelle on ne peut, à partir de l’état du registre, tirer de conclusions concernant l’état du marché que s’il y figure un grand nombre d’enregistrements pertinents.
Mme Sargeant indique avoir effectué une recherche dans les dossiers du Bureau canadien des marques de commerce, le ou vers le 1er février 1996, portant sur les demandes ou les enregistrements de marques contenant le mot GOLD ou GOLDEN pour des boissons alcoolisées obtenues par brassage, dont l’opposante n’est pas la propriétaire. Mme Sargeant indique que, pour obtenir cette information, elle a effectué une recherche à partir de la base de données CD‑NAMESEARCH sur CD‑ROM, et elle a annexé à son affidavit les pages d’information imprimées à la suite de la recherche, dans lesquelles figuraient l’ensemble de tous les renseignements contenus à ce sujet dans cette base. Toutefois, elle a révélé en contre‑interrogatoire que les résultats de la recherche comprenaient également des enregistrements radiés, des demandes abandonnées ou des demandes visées par une instance en opposition. Il en résulte que la grande majorité des marques révélées par Mme Sargeant ne sont d’aucune pertinence eu égard à l’une quelconque des questions en litige dans la présente opposition. En fait, comme l’a observé l’agent de marques de commerce de l’opposante pendant l’audience, pas un seul des enregistrements actifs signalés par Mme Sargeant dans son affidavit, ne comprend le mot GOLDEN applicable à des boissons alcoolisées obtenues par brassage. En conséquence, je n’ai accordé aucun poids à cette preuve.
Pour encore ajouter à l’ensemble des circonstances qu’il faut examiner pour apprécier la probabilité de confusion entre les marques de commerce en cause, la requérante a trouvé appui dans l’affidavit de Todd D. Bailey, étudiant en droit au moment où il a signé l’affidavit. M. Bailey y indique qu’entre le 31 mai 1994 et le 26 septembre 1995, il s’est présenté à quatre points de vente de la Régie des alcools de l’Ontario, au Rotterdam Pub, et à l’un des Brewers’ Retail Beer Store, tous situés à Toronto, et qu’il a acheté entre autres une canette de bière TUBORG GOLD LABEL, une bouteille de GOLDEN PROMISE ORGANIC BEER, une bouteille de bière FULLER’S GOLDEN PRIDE, six canettes de bière SCHLITZ GENUINE GOLD, une bouteille de GOLDEN PROMISE ALE, et douze bouteilles de DAVE’S DOPPELGOLD BEER. L’affidavit de M. Bailey contient en annexe des photographies prises par lui de ses différents achats. À prime abord, je ferais observer que, selon moi, la preuve de marques de tiers où figurent le mot GOLD applicable à la bière, est d’une pertinence minime eu égard aux questions en litige dans la présente opposition. Par contre, l’affidavit de M. Bailey atteste que, outre l’opposante, deux brasseurs emploient au Canada le mot GOLDEN sur les étiquettes apposées à leurs bouteilles de bière. Cette preuve ne révèle pas dans quelle mesure les marques de bière GOLDEN PROMISE ORGANIC BEER, FULLER’S GOLDEN PRIDE et GOLDEN PROMISE ALE sont employées au Canada, mais la preuve de l’emploi de ces marques constitue une circonstance pertinente dans l’appréciation de la probabilité de confusion entre les marques de commerce en cause.
M. Bailey indique également avoir consulté certains ouvrages, notamment le STEPHEN BEAUMONT’S GREAT CANADIAN BEER GUIDE de Stephen Beaumont, et le THE FIELD GUIDE TO NORTH AMERICA’S BREWERIES AND MICROBREWERIES de Bill Yenne, en vue de repérer d’autres marques de bière dont le nom comprend le mot GOLD ou GOLDEN, vendues au Canada. Son affidavit contient en annexe des photocopies d’extraits tirés de ces ouvrages, dans lesquels on fait référence à GOLD PALE ALE, GREAT WESTERN GOLD, ENGLISH GOLD LAGER, GOLDEN GRAIN WHEAT, GOLDEN GRAIN LAGER, CELTIC GOLD, GOLDEN ALE et GOLDEN SPRING ALE. Or, M. Bailey a indiqué, en contre‑interrogatoire, ne pas se rappeler avoir vu l’une quelconque de ces marques de bière pendant qu’il a mené ses enquêtes. Par conséquent, sans tenir compte du fait que le contenu des ouvrages constitue une preuve par ouï‑dire pour M. Bailey, le simple fait qu’on fasse référence à différentes bières dans ces ouvrages n’est pas d’un grand secours à la requérante, pour ce qui est de démontrer que ces bières sont en vente au Canada ou l’ont déjà été.
La requérante a également fourni l’affidavit de Cynthia Martens, dans lequel celle‑ci dit s’être présentée à trois magasins d’alcools, un magasin de bières, et un pub à Edmonton et à Calgary, où elle a fait l’achat d’une canette de bière CELTIC GOLD, d’une chopine de bière pression KOKANEE GOLD, d’une canette de bière TUBORG GOLD LABEL BEER, et d’une bouteille de bière belge BRUSSELS GOLD. Des photographies de ces produits sont produites comme pièces en annexe à l’affidavit. Toutefois, comme je l’ai mentionné précédemment au sujet de l’affidavit de M. Bailey, la preuve de marques de tiers, où figurent le mot GOLD applicable à la bière, est d’une pertinence minime eu égard aux questions en litige dans la présente opposition. Mme Martens indique également s’être présentée au Royal Liquor Merchants à Calgary et avoir pris connaissance d’un document intitulé « Liquor Wholesale pricelist, October 30, 1995 » (Tarif des alcools pour la vente en gros, le 30 octobre 1995), dont photocopie de la page couverture et des pages 1 à 3 sont fournies en annexe à son affidavit. Toutefois, ces documents constituent une preuve par ouï‑dire pour Mme Martens et, en conséquence, je ne leur ai accordé qu’un poids minime.
Dans son premier affidavit, Isis E. Caulder, stagiaire en droit chez les agents de marques de commerce de la requérante, indique qu’elle s’est présentée au Metro Toronto Reference Library (Bibliothèque de consultation du Grand Toronto) et a examiné les exemplaires de journaux canadiens, soit dans leur forme originale soit sur microfilm, dans le but de repérer des articles [TRADUCTION] « dans lesquels on mentionnait que des événements sportifs en Amérique du Nord était commandités par le fabricant de bière MICHELOB. » L’affidavit contient en annexe les photocopies reproduisant les 11 articles que Mme Caulder a repérés, lesquels vont du 3 janvier 1981 au 29 avril 1995. Toutefois, deux de ces articles mentionnent la bière MICHELOB, un troisième définit MICHELOB comme étant le commanditaire le plus important en matière de golf, alors que les autres font notamment référence à des tournois de golf, comme par exemple la Michelob Summer Classic (Classique d’été), la 1983 Lady Michelob (Classique féminine de 1983) et la Lady Michelob (Classique féminine). Étant donné que Mme Caulder n’a repéré qu’un nombre limité d’articles dans un intervalle de quatorze ans, j’estime qu’il s’agit d’une preuve peu pertinente pour établir que la marque MICHELOB a acquis un quelconque degré de renommée au Canada relativement à la bière ou à titre de commanditaire de tournois de golf.
Dans son deuxième affidavit, Isis Caulder indique qu’elle s’est présentée au Metro Toronto Reference Library (Bibliothèque de consultation du Grand Toronto) et a recherché, dans des livres, des encyclopédies et d’autres publications, l’emploi du mot « gold » ou « golden » dans des descriptions de bière ou des références à des marques de bière dont le nom comprend les mots « gold » ou « golden ». Dans trois de ces références, la couleur or (gold) fait partie de la description des bières. Mme Caulder y indique également avoir accédé à deux sites web dans Internet, dans lesquels des documents comprenaient des descriptions de bière de couleur or (gold), dont copies sont fournies en annexe à son affidavit. Cette preuve tend à confirmer l’argument de la requérante selon lequel le mot « golden » prend un sens descriptif lorsqu’il est appliqué à certaines boissons alcoolisées obtenues par brassage. Mme Caulder fait également référence à un livre intitulé THE GOURMET GUIDE TO BEER, de Howard Hillman, dans lequel on fait référence à des bières dont le nom comprend les mots « gold » ou « golden ». Toutefois, en contre‑interrogatoire, Mme Caulder ne semblait pas savoir si l’une quelconque de ces bières étaient offertes en vente au Canada. En conséquence, je n’ai accordé aucun poids à cet aspect de la preuve de Mme Caulder.
La position de l’opposante, soutenue par l’affidavit de M. Shier, veut que le public ne considère pas que le mot « golden » prend un sens descriptif en ce qui concerne les boissons alcoolisées obtenues par brassage. Aux paragraphes 27 et 29 de son affidavit, M. Shier indique ce qui suit :
[TRADUCTION]
27. En octobre 1982, la maison Canadian Gallup Poll Ltd. a effectué une étude d’associations libres concernant le mot « GOLDEN » sur tout le territoire de la province de l’Ontario, en vue de déterminer quels étaient les mots associés avec le mot « GOLDEN » en matière de bière ou d’ale. M. Daniel G. Herlihy, vice‑président responsable de la section Recherche pour la clientèle chez Canadian Gallup Poll Ltd. à cette époque, a supervisé et analysé la recherche d’associations libres. La recherche était limitée aux résidents de l’Ontario âgés de 19 ans et plus. La copie de l’affidavit de Daniel G. Herlihy est produite en annexe au présent affidavit sous la cote N. M. Andrew K. Jarzyna, avocat représentant les Brasseries Molson, m’a informé, et j’ai tous les motifs de le croire, que l’original de cet affidavit a été déposé en Cour fédérale du Canada, greffe no T3832‑82, relativement à la demande no 385,655 pour l’enregistrement de la marque de commerce « GOLDEN ».
28. Les résultats du sondage gallup confirment mon opinion personnelle, fruit de plusieurs années d’expérience au sein de l’industrie brassicole au Canada, à savoir que le public canadien n’associe pas le mot « golden » avec la couleur de la bière. Les résultats confirment également mon opinion selon laquelle le public canadien associe, dans une large mesure, le mot « GOLDEN » avec la bière ou l’ale brassée par les Brasseries Molson, et non par un autre fabricant.
29. Les résultats de ce sondage sont compatibles avec les différentes études, effectuées au fil des ans par les Brasseries Molson, démontrant que les amateurs de bière au Canada reconnaissent que « GOLDEN » est une marque de bière et qu’une bonne portion de ces consommateurs associent cette marque de bière aux Brasseries Molson.
La requérante a soutenu que l’affidavit de M. Herlihy est une preuve par ouï-dire inadmissible puisque l’opposante aurait pu produire en preuve un affidavit de M. Herlihy dans la présente opposition. Toutefois, il me semble que l’opinion de M. Shier à titre de témoin expert, selon laquelle le public canadien associe le mot « golden » à l’opposante en ce qui concerne la bière, au lieu de l’associer à la couleur de la bière, est fondée sur l’affidavit de M. Herlihy. Cependant, même si un expert peut fonder son opinion sur du ouï‑dire, la qualité d’expert de M. Shier n’a pas été établie en l’espèce pour qu’il donne son avis au sujet de la perception du public canadien ou même du consommateur moyen de bière. En outre, M. Shier n’est pas un témoin indépendant en l’espèce. Par conséquent, je n’ai accordé aucun poids à l’opinion du souscripteur d’affidavit concernant la perception du public canadien.
En appliquant le critère pour apprécier la confusion, j’ai tenu compte qu’il s’agit d’une question de première impression et de vague souvenir. Même en considérant que les marchandises et la nature du commerce des parties sont semblables, j’estime tout de même qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la marque de commerce de la requérante et l’une quelconque des marques déposées de l’opposante, y compris la marque déposée GOLDEN, puisqu’il n’y a que quelques similarités dans la présentation, le son ou les idées que suggèrent les marques en cause. Par ailleurs, la marque GOLDEN de l’opposante est peu distinctive et il n’a pas été établi qu’elle est devenue particulièrement connue au Canada, sauf en combinaison avec sa marque maison MOLSON ou MOLSON’S. De plus, la preuve établit que des tiers emploient à un certain degré les marques contenant le mot « golden » applicables à des bières en vente sur le marché canadien. En conséquence, je rejette les autres motifs d’opposition de l’opposante.
À titre de personne déléguée par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette l’opposition de l’opposante en application du paragraphe 38(8) de la Loi sur les marques de commerce.
FAIT À HULL (QUÉBEC), LE 16e FÉVRIER 2001.
G.W. Partington,
président,
Commission des oppositions des marques de commerce.