Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION

 

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2013 COMC 10

Date de la décision : 2013-01-15

RELATIVEMENT À UNE OPPOSITION par Couples for Christ Ontario, Inc. à la demande no 1,460,593 concernant la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST FOUNDATION FOR FAMILY AND LIFE au nom de Couples for Christ Foundation for Family and Life (CFCFFL).

Historique du dossier

[1]                     Le 26 novembre 2009, Couples for Christ Foundation for Family and Life (CFCFFL) (le Requérant) a déposé une demande d'enregistrement de la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST FOUNDATION FOR FAMILY AND LIFE (la Marque), fondée sur son emploi au Canada depuis au moins 2007, en lien avec les services suivants :

Services de conseils religieux; services de counseling, nommément conseils spirituels et orientation pour les couples, les enfants, les jeunes, les parents seuls, les personnes divorcées, les personnes séparées offerts lors de séminaires et de réunions; clubs sociaux (les Services).

[2]                     La demande a été annoncée en vue de la procédure d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 22 septembre 2010.

[3]                     Le 12 octobre 2010, Couples for Christ, Ontario Inc. (l'Opposant) a produit une déclaration d'opposition. Le Requérant a produit et signifié une contre-déclaration, dans laquelle il conteste les allégations de l'Opposant. À l'appui de son opposition, l'Opposant a produit l'affidavit d'Artemio Pangilinan. À l'appui de sa demande, le Requérant a produit l'affidavit de Dante Lingatong de Leon. L'Opposant a produit une observation écrite.

Décision rendue lors de l'audience

[4]                     Dans cette affaire, seul le Requérant a demandé une audience, laquelle a été fixée au 12 décembre 2012. Comme l'exige l'énoncé de pratique intitulé Énoncé de pratique concernant la procédure d’opposition en matière de marque de commerce, le Requérant a confirmé sa présence à l'avance. Étant donné que l'Opposant n'a pas demandé d'audience, ni confirmé sa présence, et que le Requérant est arrivé tôt, j'ai décidé de tenir l'audience sans attendre. L'Opposant est arrivé à l'heure initialement prévue de l'audience. L'Opposant a indiqué avoir confirmé auprès du registraire, par lettre ou par téléphone, qu'il serait présent à l'audience. Mon examen du dossier ne révèle pas que l'Opposant a bel et bien confirmé sa présence, mais je n'ai aucune raison de douter de l'allégation de l'Opposant. Compte tenu des circonstances et du fait que la lettre du registraire datée du 29 août 2012 semble indiquer la présence de l'Opposant à l'audience dans le passage indiquant que « [traduction] aucune des parties n'a demandé de service traduction simultanée. Au besoin, un service de traduction simultanée en français ou en anglais peut être offert sur demande par l'une ou l'autre des parties », j'ai autorisé l'Opposant à soumettre ses observations et j'ai indiqué que l'audience reprendra avec le Requérant, qui présentera de nouveau ses observations. Enfin, je note que le registraire a été incapable de confirmer avoir reçu une telle lettre ou un appel de l'Opposant; de plus, aucun un exemplaire d'une telle lettre a subséquemment été fourni, bien que cela soit exigé à l'audience.

Sommaire des motifs d'opposition

[5]                     La déclaration d'opposition de l'Opposant comprend les motifs résumés ci-dessous :

(a)                      contrairement à l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), le Requérant n'a pas employé la Marque au Canada depuis au moins 2007;

(b)                     contrairement à l'alinéa 30i) de la Loi, le Requérant ne peut avoir été convaincu qu’il a le droit d'employer la Marque étant donné qu'il était au courant de l'emploi précédent et de la révélation des marques de commerce de l'Opposant COUPLES FOR CHRIST et COUPLES FOR CHRIST & design.

(c)                      contrairement à l'alinéa 12(1)b) de la Loi, la Marque est clairement descriptive de la nature ou de la qualité des Services;

(d)                     contrairement à l'alinéa 16(1)a) de la Loi, le Requérant n'est pas une personne admise à l'enregistrement, puisqu'à la date de production de la demande d'enregistrement, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST, laquelle avait déjà été employée au Canada en lien avec des services de counseling, nommément conseils spirituels et orientation pour les couples, les enfants, les jeunes, les parents seuls, les personnes divorcées (les Services de l'Opposant);

(e)                      contrairement à l'article 2 de la Loi, la Marque n'est pas distinctive, étant donné qu'elle ne se distingue pas réellement et n'est pas adaptée pour distinguer les services du Requérant de ceux offerts par d'autres, y compris ceux de l'Opposant fournis en lien avec les marques de commerce COUPLES FOR CHRIST et COUPLES FOR CHRIST & Design. 

Lors de l'audience, l'agent de l'Opposant a retiré le motif d'opposition fondé sur l'alinéa 12(1)b). Par conséquent, ce motif ne sera pas considéré. Je note également qu'aucune autorisation n'a été demandée pour modifier la déclaration d'opposition et annuler ce motif.

Dates critiques

[6]                     Les dates critiques qui s'appliquent aux motifs d'opposition sont les suivantes :

- alinéa 38(2)a) et article 30 – 26 novembre 2009 : — la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC) page 475];

- alinéas 38(2)c)/16(1)a) – 2007 : date de premier emploi alléguée dans la demande; 

 

-    alinéa 38(2)d) et article 2 – ‑12 octobre 2010 : la date de soumission de l'opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4e) 317 (CF) paragraphe 8]. 

 

Obligations

[7]                     Il incombe au Requérant de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, il revient a priori à l'Opposant de présenter suffisamment de preuves recevables desquelles on peut raisonnablement conclure que les faits allégués à l'appui de chaque motif d'opposition existent [John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (C.F. 1re inst.)].

Antécédents des parties

[8]                     Tout d'abord, je remarque que les parties ont une histoire commune ayant débuté aux Philippines. Les deux parties trouvent leur origine dans la société Couples for Christ Foundation Inc. (Couples for Christ Foundation (Philippines)), enregistrée aux Philippines (affidavit Pangilinan, paragraphe 5; affidavit de Leon, paragraphes 6 et 7). En mars 1993, Couples for Christ Global Missions Foundation Inc. (CFC-Global) a été constituée en société, se séparant de Couples for Christ Foundation (Philippines) (affidavit Pangilinan, paragraphe 6; affidavit de Leon, paragraphe 9). Il semble que Couples for Christ Foundation (Philippines) n'était pas en règle ou avait cessé ses activités pendant plusieurs années avant de reprendre vie le 5 juin 2008 (affidavit de Leon, paragraphe 7; pièce 5). En 2007, Frank Padilla, fondateur de Couples for Christ Foundation (Philippines), et d'autres ont convenu de prendre une avenue différente de CFC-Global pour créer Couples for Christ Foundation for Family and Life, une association diocésaine (affidavit de Leon, pièce 27). Couples for Christ Foundation a des liens directs avec Couples for Christ Foundation (Philippines) (affidavit de Leon, paragraphe 9). En revanche, l'Opposant a des liens directs avec CFC-Global (affidavit Pangilinan, paragraphe 15). 

Alinéa 30b), motifs d'opposition

[9]                     L'Opposant allègue que le Requérant n'a pas employé la Marque au Canada depuis au moins 2007. La demande d'enregistrement de la Marque allègue une date de premier emploi qui remonte à 2007, à savoir le 31 décembre 2007. L'alinéa 30b) de la Loi exige qu'il y ait emploi continu de la marque de commerce visée dans la demande, dans la pratique normale du commerce, à compter de la date alléguée jusqu'à la date de production de la demande [Benson & Hedges (Canada) Ltd c. Labatt Brewing Co (1996), 67 CPR (3d) 258 (C.F 1re inst.) page 262].

[10]                 Le fardeau initial qui incombe à l'Opposant est peu astreignant concernant la question de la non‑conformité avec l'alinéa 30b), car les faits en rapport avec le premier emploi de la marque par le Requérant relèvent essentiellement des connaissances de celui-ci [Tune Masters c. Mr P’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (COMC) page 89]. L’Opposant peut satisfaire à ce fardeau au moyen non seulement de sa propre preuve, mais aussi de la preuve du Requérant [Labatt Brewing Co c. Molson Breweries, A Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (C.F 1re inst.) page 230]. Lorsqu'un opposant s’appuie sur la preuve du requérant pour s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, il doit démontrer que la preuve du requérant est « manifestement » incompatible avec les prétentions formulées par celui-ci dans sa demande [Ivy Lea Shirt Co c. Muskoka Fine Watercraft & Supply Co (1999), 2 CPR (4e) 562 (COMC) pages 565-566, confirmée (2001) par 11 CPR (4e) 489 (C.F. 1re inst.)].

[11]                 Les exigences en matière d'emploi sont énoncées à l'article 4 de la Loi. En ce qui a trait aux services, une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services. Il n’est pas nécessaire que les services aient été exécutés ou vendus pour qu’ils soient réputés employés, pour autant qu’ils soient offerts à d’éventuels clients en liaison avec la marque et qu’ils soient à même d’être exécutés [Modis Inc c. Modis Communications Inc; 2004 CarswellNat 4627 (COMC) paragraphe 24].

[12]                 M. de Leon, président et représentant national pour le Requérant, déclare ceci dans son affidavit :

13

Depuis au moins la première semaine de décembre 2007, le Requérant a employé la Marque au Canada en lien avec les [Services], à tout le moins comme suit :

a)

À compter du 29 février 2008, le Requérant a offert une série de séminaires sur la vie chrétienne à l'église St. Andrew d'Etobicoke en Ontario. Ces séminaires englobaient divers services de conseils religieux et services de counseling, nommément conseils spirituels et orientation pour les couples, les enfants, les jeunes, les parents seuls, les personnes divorcées, les personnes séparées offerts lors de séminaires et de réunions; clubs sociaux. Un exemplaire du dépliant annonçant la tenue du séminaire a été diffusé aux alentours de la première semaine de décembre 2007 dans diverses églises de la région d'Etobicoke en Ontario. Un exemplaire du dépliant et des fiches d'information qu'auraient utilisés les participants au séminaire sont joints en tant que pièce 12.

[13]                 À la lumière de ce qui précède, la preuve du Requérant est « manifestement » incompatible avec l'alinéa 30b) de la Loi, et l'Opposant s'est acquitté du fardeau qui lui incombait. Bien que M. de Leon affirme qu'un dépliant a été distribué en 2007, il ne semble pas que les Services aient été à même d'être exécutés avant février 2008, moment où les séminaires ont débuté. Contrairement à l'affaire Bedwell Management Systems Inc c. Mayflower Transit, Inc (1999), 2 CPR (4e) 543 (COMC), il n'existe aucune preuve documentaire ni déclaration de M. de Leon susceptible de faire conclure que les Services étaient offerts depuis au moins le 31 décembre 2007. Donc, la preuve de M. de Leon est manifestement incompatible avec la date de premier emploi alléguée par le Requérant, à savoir 2007. Par conséquent, il revient au Requérant de démontrer l'emploi de la Marque en lien avec les Services, du 31 décembre 2007 au 26 novembre 2009. Le Requérant ne s'est pas acquitté du fardeau qui lui incombait, puisqu'il n'existe aucune preuve démontrant l'emploi en date du 31 décembre 2007. Ce motif d’opposition est donc accueilli.

Motifs et décision : Changement de nom exigé du Requérant

[14]                 Le Requérant a constitué en société Couples for Christ Foundation for Family and Life (CFCFFL) le 17 septembre 2007 (affidavit de Leon, pièce 2). Le Requérant a subséquemment changé son nom pour Community for Christ Foundation for Family and Life, après avoir reçu une ordonnance du ministère du Procureur général de l'Ontario, fondée sur la décision voulant qu'il existe une forte probabilité de confusion entre le nom du Requérant, Couples for Christ Foundation for Family and Life (CFCFFL) et celui de l'Opposant, Couples for Christ, Ontario Inc. (affidavit de Leon, pièce 1; affidavit Pangilinan, pièce A).

[15]                 Dans son observation écrite, l'Opposant indique que :

il s'oppose à la demande, en expliquant que, depuis le début des activités du Requérant, celui-ci a perdu tout droit d'employer la dénomination sociale « Couples for Christ Foundation for Family and Life » en vertu d'une décision de la Direction des services juridiques du ministère des Services gouvernementaux de l'Ontario, datée du 3 février 2011, aux termes du paragraphe 13(2) de la Loi sur les personnes morales de l’Ontario de l'Ontario.

[16]                 Si l'Opposant avait souhaité s'opposer à la demande sur le fondement de cette décision, il aurait fallu qu'il demande et que lui soit accordée une autorisation de modifier sa déclaration d'opposition. Comme cette demande n'a pas été faite, l'allégation de l'Opposant ne peut pas être considérée comme un motif d'opposition distinct [Massif Inc c. Station Touristique Massif du Sud (1993) Inc (2011), 95 CPR (4e) 249 (CF)]. Je souligne également que je ne considère pas la décision du 3 février 2011 comme s'appliquant aux motifs d'opposition allégués par l'Opposant, puisqu'elle a été rendue à une date ultérieure à la date critique de chaque motif. Enfin, je note que la prise de cette décision est fondée sur la dénomination sociale de l'Opposant et que, dans le cadre de l'opposition en l'espèce, l'Opposant ne peut que s'appuyer sur l'emploi de ses marques de commerce, puisqu'il n'a pas inclus l'emploi de son nom commercial dans la déclaration d'opposition

 

Alinéa 30i), motifs d'opposition

[17]                 L'Opposant allègue que le Requérant ne pouvait pas affirmer qu'il avait le droit d'employer la Marque parce qu'il savait que les marques de commerce de l'Opposant avaient déjà été employées au Canada. L'alinéa 30i) de la Loi exige que tout requérant se déclare convaincu d’avoir le droit d’employer la marque visée par la demande au Canada. D’après la jurisprudence, il peut y avoir non-conformité à l’alinéa 30i) lorsque des circonstances exceptionnelles, telle la mauvaise foi, rendent la déclaration du requérant invraisemblable [Sapodilla Co c. Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC) page 155; Cerverceria Modelo, SA de CV c. Marcon (2008), 70 CPR (4e) 355 (COMC), page 369]. À la lumière de l'histoire commune des parties, je ne crois pas que la preuve permette de conclure qu'il y a eu mauvaise foi de la part du Requérant à l'égard de cette déclaration. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté, puisque l'Opposant ne s'est pas acquitté du fardeau qui lui incombait.

Alinéa 16(1)a), motif

[18]                 L'Opposant a également plaidé que le Requérant n'est pas une personne admise à l'enregistrement, puisque la Marque crée de la confusion avec la « marque de commerce COUPLES FOR CHRIST laquelle avait déjà été employée au Canada et dont l'emploi est maintenu au Canada par l'Opposant » en lien avec les Services de l'Opposant. Il revient a priori à l'Opposant de prouver qu'il a employé ou révélé la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST au Canada en lien avec les Services de l'Opposant avant 2007, date de premier emploi alléguée dans la demande en l'espèce. L'Opposant doit aussi démontrer qu'il n'a pas abandonné sa marque de commerce à la date de l'annonce de la Marque, le 22 septembre 2010. En outre, l'article 17 de la Loi déclare qu'aucune demande d’enregistrement d’une marque de commerce ne peut être refusée, du fait qu’une personne autre que l’auteur de la demande d’enregistrement ou son prédécesseur en titre a antérieurement employé ou révélé une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion, sauf à la demande de cette autre personne ou de son successeur en titre. Par conséquent, un opposant peut exclusivement s'appuyer sur un emploi antérieur ou une révélation de ses propres marques de commerce ou noms commerciaux.

[19]                 La preuve produite par M. Pangilinan, directeur pour l'Opposant, comprend ceci :

                           M. Pangilinan explique de la façon suivante la relation entre les diverses organisations et divisions de Couples for Christ (paragraphe 14) :

J'entends par « Couples for Christ » l'organisation Couples for Christ qui comprend les divisions internationale, canadienne, provinciale et locale de Couples for Christ, sauf lorsque je précise la division, par exemple « Couples for Christ (Canada) », auquel cas je ne fais référence qu'à la division canadienne. Enfin, lorsque je fais référence à l'Opposant, je fais allusion à la personne morale qui gère les affaires de Couples for Christ au Canada et emploie la marque de commerce Couples for Christ au Canada.

               Je peux donc en déduire que Couples for Christ (Canada) est la division canadienne de l'organisation Couples for Christ et que cette entité n'est pas la même que celle de l'Opposant.

                           M. Pangilinan déclare au paragraphe 25 que « Couples for Christ a été employée de façon continue en tant que marque de commerce par Couples for Christ (Canada) et l'Opposant depuis au moins depuis 1997 ».

                           M. Pangilinan mentionne le site Web www.couplesforchristcanada.org, lequel affiche à la fois les deux marques COUPLES FOR CHRIST et COUPLES FOR CHRIST Design sur la page d'accueil de Couples for Christ (Canada) (paragraphes 10 et 22; pièces D et M).

                             M. Pangilinan indique que Couples of Christ (Canada) est l'organisateur des Christian Life Programs, lesquels ont eu lieu dans plus de 145 paroisses (paragraphe 26).

                           M. Pangilinan désigne l'Opposant comme étant l'organisateur de conférences périodiques régionales, nationales et internationales (paragraphe 27, pièces P et Q). Le dépliant de la conférence 2000 joint à son affidavit ne semble pas faire référence à l'Opposant (pièce Q). 

                           Mr. Pangilinan joint en tant que pièce K à son affidavit le document intitulé « International Statutes of Couples for Christ ». Ce document stipule ceci :

5.1

COUPLES FOR CHRIST, dans un territoire donné, est divisé en chapitres, unités et maisons.

5.5

... un conseil national peut être mis sur pied. Il revient au conseil national de superviser et de promouvoir la vie et la mission de CFC dans un pays donné.

5.7

Les groupes de CFC dans un pays ou une région en particulier peuvent établir COUPLES FOR CHRIST en tant que fondation ou personne morale d'une association officielle, conformément avec les lois locales et nationales, afin de mener des transactions en tant que personne morale.

7.221

Concrètement, on s'attend à ce que les groupes CFC fassent ceci :

-                            porter le nom « Couples for Christ »; une traduction locale de ce nom peut aussi être utilisée;

-                            adopter le même logo.

7.262

Le conseil de CFC accrédite les groupes CFC comme faisant officiellement partie de la communauté internationale de CFC et peut retirer cette accréditation pour toute raison ou tout motif valable.

[20]                 En outre, la pièce 7 de l'affidavit de M. de Leon comprend un certificat du secrétaire de CFC-Global autorisant Couples in Christ à utiliser son nom commercial et à afficher, imprimer et reproduire ses logos.

[21]                 L'Opposant ne s'est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de prouver qu'il est propriétaire de la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST ou de la marque de commerce COUPLE FOR CHRIST Design et qu'il a employé l'une ou l'autre avant le 31 décembre 2007. M. Pangilinan décrit l'Opposant comme l'administrateur des affaires de Couples for Christ au Canada, employant la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST. Toutefois, il n'indique pas à quelle entité la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST appartient. D'après la preuve, il semble que ce soit l'un des groupes des Philippines qui soit propriétaire de cette marque de commerce au Canada. Enfin, on ne sait pas si c'est l'Opposant, l'entité du nom de Couples for Christ (Canada) ou encore l'une ou l'autre des diverses divisions locales mentionnées dans l'affidavit de M. Pangilinan qui fournit les services de counseling énoncés dans la déclaration d'opposition. Comme nous ne disposons d'aucune preuve qu'il existe une entente de licence entre l'Opposant et l'une ou l'autre des divisions mentionnées dans l'affidavit de M. Pangilinan, la preuve d'emploi par d'autres entités ne s'applique pas au bénéfice de l'Opposant. Comme l'Opposant ne s'est pas acquitté du fardeau qui lui incombait, ce motif d'opposition est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur le caractère distinctif

[22]                 L'Opposant a allégué que la Marque n'est pas distinctive des Services, en ce sens que la Marque ne se distingue pas réellement et n'est pas adaptée pour distinguer les services du Requérant de ceux offert par d'autres, y compris ceux de l'Opposant fournis en lien avec les marques de commerce COUPLES FOR CHRIST et COUPLES FOR CHRIST & Design. 

[23]                 Il revient a priori à l'Opposant d'établir qu'en date du 12 octobre 2010, la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST était connue au moins jusqu’à un certain point pour annuler le caractère distinctif de la Marque. Dans la décision Bojangles’ International, LLC c. Bojangles Café Ltd (2006), 48 CPR (4e) 427 (CF), au paragraphe 33, la Cour fédérale a déclaré qu’une marque pourrait annuler le caractère distinctif d’une autre si elle est connue au Canada au moins jusqu’à un certain point, ou si elle est bien connue dans une région précise du Canada. Enfin, une opposition fondée sur l’absence de caractère distinctif ne se limite pas à la publicité, la prestation de services ou la vente de biens au Canada, mais aussi sur une preuve de la connaissance ou de la réputation de sa marque de commerce [Motel 6, Inc c. No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (C.F. 1re inst.) pages 58-59]. Comme l'Opposant n'a pas limité ce motif d'opposition à l'emploi seulement, rien n'exige qu'il prouve que l'emploi de la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST s'applique en sa faveur. Cette situation peut se distinguer de l'affaire Ecosmart Foundation Inc c. SJ Electro Systems Inc (2012), 102 CPR (4e) 401 (COMC) au paragraphe 6, où la déclaration d'opposition est décrite comme ne faisant référence qu'à l'emploi par l'opposant de ses marques.

[24]                 La preuve s'appliquant au fardeau initial de l'Opposant peut être résumée comme suit : 

                            M. Pangilinan déclare que COUPLES FOR CHRIST a été employée en tant que marque de commerce par Couples for Christ (Canada) et l'Opposant depuis au moins depuis 1997 (paragraphe 25).

                            L'Opposant a organisé 14 conférences Couples for Christ différentes au Canada depuis 1999, y compris une à Markham en juillet 2010 (pièce P).

                           Le programme de la 2e CFC Canada and Family Ministries Conference (du 30 juin au 2 juillet 2000, Toronto, Canada) comprend l'emploi de la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST ainsi que des félicitations et meilleurs vœux exprimés par différents responsables d'église et maisons religieuses (pièce Q); il s'agit là d'un exemple type d'une trousse de conférence (paragraphe 28);

                           Des lettres de témoignage adressées à Couples for Christ, ou y faisant référence, les premières remontant au 11 juin 1997, provenant du clergé de Toronto ou des environs (pièce R).

                           Un bulletin du Couples for Christ Manitoba daté du 6 juin 2009 (pièce S).

                           L'annonce de Couples for Christ dans le « Catholic Directory for British Columbia and the Yukon » de 2005 (pièce T).

[25]                 Étant donné l'envergure de la réputation démontrée dans les pièces Q et R, je suis d'avis que l'Opposant s'est acquitté du fardeau de prouver que la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST était suffisamment connue dans la région de Toronto depuis la date critique. Ainsi, il incombe au Requérant de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque n'était pas susceptible de créer de la confusion avec la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST, si bien que, à la date pertinente, elle était adaptée à distinguer ou distinguait véritablement, partout au Canada, les Services de ceux des autres [Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd (1985), 4 CPR (3d) 272].

[26]                 Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[27]                 Le critère relatif à la confusion concerne le principe de la première impression et du souvenir imparfait. En appliquant le critère relatif à la confusion, le Registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles précisément énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids équivalent à chacun des facteurs énumérés ci‑dessus. [Voir, de façon générale, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4e) 321 (CSC), Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 CPR (4e) 401 (CSC) et Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4e) 361 (SCS)].

Caractère distinctif inhérent des marques

[28]                 Ni la Marque ni la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST ne sont fortes, parce qu'elles sont toutes deux composées de mots du dictionnaire appartenant à la langue courante, qui évoquent les services qui y sont associés. La preuve soumise par le Requérant, à savoir que « FOR CHRIST » apparaît dans différentes marques de commerce ou sur différents sites Web, corrobore cette conclusion (affidavit de M. de Leon, pièces 22 et 23). Toutefois, cette preuve ne va pas jusqu'à démontrer que COUPLES FOR CHRIST ne présente aucun caractère distinctif inhérent. 

Période d'emploi; mesure dans laquelle la marque est devenue connue

[29]                 La période d'emploi et la mesure dans laquelle la marque est devenue connue semblent pencher légèrement en faveur de l'Opposant, puisque la preuve présente des témoignages datant de 1997 et faisant référence à Couples for Christ (pièce R). Par opposition, l'emploi de la Marque n'a commencé que dix ans plus tard.

Nature des services et du commerce

[30]                 Les services et la nature du commerce du Requérant et des utilisateurs de la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST sont identiques. Ces entités sont des organisations caritatives qui font la promotion du catholicisme et de la famille, et qui offrent des services dans le cadre de rencontres, de séminaires et de conférences. 

Degré de ressemblance

[31]           Le Requérant soutient que l'annulation de la marque FOUNDATION FOR FAMILY AND LIFE vient distinguer ses Services de ceux de l'Opposant et des autres. Bien que FOUNDATION FOR FAMILY AND LIFE puisse aider certains consommateurs à distinguer les Services du Requérant de ceux des autres, il n'en est peut-être pas ainsi pour bon nombre d'autres personnes. La conclusion est corroborée par le propre site Web du Requérant, lequel explique que Couples for Christ Foundation for Family and Life a été fondée le 30 juillet 2007 à Manille aux Philippines par Frank Padilla, que bon nombre de personnes considèrent le fondateur de Couples for Christ Foundation (Philippines).    

[32]                       Dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada déclare qu'une probabilité de confusion ne peut être diminuée, même lorsqu'une recherche subséquente pourrait remédier à la confusion (paragraphe 71-74). Ladite confusion doit plutôt être évaluée; il faut donc se demander ce qu'un consommateur pourrait vraisemblablement penser, lorsqu'il voit la deuxième marque de commerce avec en mémoire un souvenir imparfait de la première marque de commerce. Même si un consommateur, au courant ou s'informant de l'histoire du Requérant, de l'Opposant et des entités connexes, était capable de faire la distinction entre COUPLES FOR CHRIST et la Marque, mes doutes subsistent quant à savoir si un consommateur, lorsqu'il voit la Marque pour la première fois, serait capable de faire la distinction entre la Marque et la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST sans qu'il ait à se poser d'autres questions ou à demander des précisions.

Absence de confusion

[33]                       Une inférence négative quant à la probabilité de confusion peut être tirée lorsque la preuve démontre que l’utilisation simultanée des deux marques est significative et que l’opposant n’a soumis aucun élément de preuve tendant à démontrer l’existence d’une confusion [Christian Dior S.A. c. Dion Neckwear Ltd. (2002), 20 CPR (4e) 155 (C.A.F.), paragraphe 19]. Bien que l'emploi simultané ait été prouvé, du fait que le Requérant et Couples for Christ ont donné des cours dans une école aux mêmes dates en lien avec leurs marques respectives, rien ne prouve qu'il y a eu confusion. À noter que je n'accepte pas le permis de construction émis affichant le nom de l'Opposant plutôt que celui du Requérant (affidavit Pangilinan, pièce Z) comme preuve d'une source de confusion, plutôt qu'une erreur de transcription [385229 Ontario Ltd c. ServiceMaster Co (2012), 101 CPR (4e) 380 (TMOB) paragraphe 44]. L'absence de preuve démontrant la présence de confusion ne me suffit pas pour conclure que la Marque est distinctive, puis que je ne suis pas indubitablement convaincue que les consommateurs exposés à l'emploi simultané de la Marque et de la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST n'ont pas éliminé la confusion en obtenant d'autres renseignements quant à la source. Un exemple du type de recherche réalisée par les consommateurs figure dans un courriel de Bernardo Consul à Sonny Bautista, en pièce AA de l'affidavit Pangilinan.

Conclusion

[34]                        En l'espèce, j'estime que la question prépondérante est de savoir s'il y a lieu d'accorder au Requérant le monopole de l'emploi de la Marque, y compris de légères variations de celle‑ci, dans tout le Canada en lien avec les Services. Bien que je sois d'accord avec le Requérant, sur le fait que diverses entités utilisent COUPLES FOR CHRIST depuis la date critique et qu'aucune partie ne semble avoir le monopole d'emploi concernant cette phrase, l'emploi de COUPLES FOR CHRIST n'était pas suffisamment répondu pour que l'on puisse dire que la Marque permet d'établir une distinction entre les Services du Requérant de ceux des autres [Petro-Canada c. Air Miles International Holdings NV (1998), 83 CPR (3d) 111 (COMC) 119-120]. À la lumière de toutes les circonstances d'ensemble, y compris le fait que le Requérant et diverses entités employant la marque de commerce COUPLES FOR CHRIST semblent informer les consommateurs de la source précise de leurs services respectifs, je conclus que le Requérant ne s'est pas acquitté du fardeau ultime de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque permettait d'établir une distinction par rapport aux Services du Requérant à la date critique. Ce motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est donc accueilli.

Décision

[35]           Conformément aux pouvoirs qui me sont délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande 1,460,593 au titre du paragraphe 38(8) de la Loi.

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Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

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