Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 68

Date de la décision : 2015-04-07

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION produite par Jarrow Formulas, Inc. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,428,557 pour la marque de commerce POMx & Dessin au nom de Canada Bread Company, Limited.

[1]               Jarrow Formulas Inc. s'oppose à l'enregistrement de la marque de commerce POMx & Dessin visée par la demande d'enregistrement no 1,428,557 en liaison avec des barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, et des barres-collations à base de fruits et de noix, qui sont détaillées plus loin.

POMx & Design

[2]               La question déterminante en l'espèce est celle de savoir si la marque de commerce POMx & Dessin (la Marque) crée de la confusion avec la marque de commerce POMEGREAT visée par la demande d'enregistrement no 1,277,280 et POMGUARD visée par la demande d'enregistrement no 1,312,430. À la date de l'annonce de la demande d'enregistrement de la Marque, la demande no 1,277,280 était en instance relativement aux compléments alimentaires, alors que la demande no 1,312,430 était en instance relativement aux suppléments et compléments alimentaires (présentés en détail plus loin).

[3]               Pour les motifs qui suivent, j'estime que la demande d'enregistrement doit être repoussée en partie.

Dossier

[4]               La demande a été produite par Pom Wonderful LLC le 20 février 2009, sur la base d'un emploi projeté au Canada, et elle revendique la priorité d'une demande américaine produite le 19 février 2009; elle est actuellement au nom de Canada Bread Company, Limited en tant que cessionnaire. Le terme « Requérante » est employé tout au long de la présente décision pour désigner la propriétaire de la demande au moment pertinente.

[5]               L'état déclaratif complet des produits contenu dans la demande d'enregistrement de la Marque est libellé comme suit :

(1) Barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives pour utilisation comme substitut de repas et barres nutritives pour utilisation comme complément alimentaire; barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives énergisantes et de collation à base de fruits et de noix; barres-collations à base de fruits et de noix.

[6]               La demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce du 9 décembre 2009.

[7]               Une déclaration d'opposition a été produite par Jarrow Formulas Inc. (l'Opposante) le 10 mai 2010 sur le fondement de l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). En résumé, les motifs d'opposition sont fondés sur des allégations selon lesquelles :

(i)            la demande n'est pas conforme aux exigences prévues à l'alinéa 30a) de la Loi, parce qu'elle ne contient pas de déclaration des produits associés à la Marque dans les termes ordinaires du commerce [alinéa 38(2)a) de la Loi];

(ii)          la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en vertu de l'alinéa 16(3)b) de la Loi, étant donné la confusion avec les marques de commerce POMEGREAT et POMGUARD de l'Opposante, pour lesquelles les demandes no 1,277,280 et 1,312,430, respectivement, avaient déjà été produites [alinéa 38(2)c) de la Loi];

(iii)        la Marque ne distingue pas ni n'est adaptée à distinguer les produits de la Requérante des produits et services de tiers [alinéa 38(2)d) de la Loi].

[8]               La Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle conteste chacun des motifs d'opposition.

[9]               La preuve de l’Opposante est constituée de copies certifiées du dossier de la demande no 1,277,280 pour la marque de commerce POMEGREAT et de la demande no 1,312,430 pour la marque de commerce POMGUARD, en date du 29 avril 2011.

[10]           La preuve de la Requérante est constituée de deux affidavits de Jessica Rodrigues-Cerqueira, une technicienne juridique employée par l'agent de marques de commerce de la Requérante, assermentée le 22 novembre 2012 pour ses deux affidavits. Mme Rodrigues-Cequeira, qui n'a pas été contre-interrogée par l'Opposante, a produit en preuve les détails des enregistrements et des demandes qu'elle a obtenus à la suite d'une recherche dans la base de données des marques de commerce canadiennes; il s'agit entre autres des renseignements suivants :

      enregistrements et demandes en vigueur pour les marques de commerce constituées de l'élément « POM » ou contenant celui-ci (les Marques POM) « aux fins d'emploi en liaison avec des fruits, des boissons, des extraits, des suppléments, des produits cosmétiques, des produits pharmaceutiques et des marchandises connexes » qui appartiennent à la Requérante;

      demande no 1,122,704 pour la marque de commerce POM appartenant à la Requérante.

[11]           Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit. Aucune audience n'a été tenue.

Fardeaux de preuve

[12]           C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande d'enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi invoquées dans la déclaration d'opposition. Cela signifie que si une conclusion déterminante ne peut être tirée une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée en sa défaveur. L'Opposante doit, pour sa part, s'acquitter du fardeau initial de prouver les faits sur lesquels elle appuie ses allégations. Le fait qu'un fardeau de preuve initial soit imposé à l'Opposante signifie qu'un motif d'opposition ne sera pris en considération que s'il existe une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de ce motif d'opposition [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst); Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al. (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF); et Wrangler Apparel Corp c The Timberland Company (2005), 41 CPR (4th) 223 (CF)].

Motifs d'opposition rejetés

[13]           Je rejette sommairement les motifs d'opposition soulevés en vertu des alinéas 38(2)a) et 28(2)i) de la Loi pour les raisons suivantes.

[14]           Le motif d’opposition invoqué en vertu de l'alinéa 38(2)a) de la Loi, lequel est fondé sur une allégation selon laquelle la demande n'est pas conforme aux exigences de l'alinéa 30a) de la Loi, semble un argument « passe-partout », en ce sens qu'il ne fait que reprendre le libellé de la Loi. Quoi qu'il en soit, si l'on suppose que le motif d’opposition a été dûment plaidé, il est rejeté, parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait, soit de démontrer que la demande n'est pas conforme à l'alinéa 30a) de la Loi.

[15]           Le motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif, invoqué en vertu de l'alinéa 38(2)d) de la Loi, semble également être un argument « passe-partout », en ce sens qu'il allègue simplement que la Marque ne distingue pas, ni n'est adaptée à distinguer, les produits de la Requérante des produits et services de tiers.

[16]           Selon l’arrêt Novopharm Limited c AstraZeneca AB (2002), 21 CPR (4th) 289 (CAF), je dois évaluer l'étaiement suffisant des arguments en regard de la preuve soumise. Comme l'Opposante n'a fourni aucune preuve pour établir le caractère distinctif de la Marque, je rejette le motif d’opposition, parce qu'il n'a pas été dûment plaidé.

[17]           En revanche, étant donné que, dans le contexte de la déclaration d'opposition, on peut soutenir que l'argument s'entend d'une allégation selon laquelle la Marque n'est pas distinctive à la lumière des marques de commerce POMEGREAT et POMGUARD de l'Opposante, le motif d’opposition est rejeté, parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait. Plus particulièrement, l'Opposante n'a pas démontré qu'au moins une de ses marques de commerce qu'elle invoquait était devenue suffisamment connue au Canada à la date de production de la déclaration d'opposition, soit le 10 mai 2010, pour faire perdre à la Marque son caractère distinctif [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF); Motel 6 Inc c No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst); et Bojangles’ International LLC c Bojangles Café Ltd (2006) , 48 CPR (4th) 427 (CF)].

Examen des autres motifs d'opposition

[18]           L'autre motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 38(2)c) de la Loi est fondé sur l'article 16(3)b) de la Loi. Il repose sur une allégation de confusion entre la Marque et les marques de commerce POMEGREAT, demande numéro 1,277,280, et POMGUARD, demande numéro 1,312,430 de l'Opposante.

[19]           Même s'il est fastidieux de le faire, j'estime qu'il est utile d'amorcer mon analyse de ce motif d’opposition par une reproduction des extraits suivants du plaidoyer écrit de la Requérante, car ils reflètent essentiellement sa position :

[traduction]
16.       À la lumière des enregistrements précédents de la Requérante et des demandes déjà produites pour les Marques POM, y compris la demande d'enregistrement de la marque de commerce de la Requérante précédemment produite (numéro 1,122,704) qui couvre les mêmes marchandises que celles énumérées dans la demande d'enregistrement des marques de commerce POMGRUARD et POMEGREAT de l'Opposante, la Requérante détient des droits supérieurs relativement à la marque de commerce POM pour son emploi en liaison avec les marchandises énumérées dans la demande en objet. De plus, la marque de commerce POM se distingue de Requérante et non de l'Opposante. Par conséquent, la présente opposition à l'encontre [de la demande d'enregistrement de la Marque] doit être rejetée.

[…]

22.       [...] comme le démontre clairement la preuve de la Requérante, cette dernière détient des droits supérieurs relativement à la marque de commerce POM, y compris toutes les variantes de celle-ci (qui comprend [la Marque]), eu égard aux enregistrements précédents de la Requérante et aux demandes d'enregistrement des Marques POM au Canada, y compris la demande portant le numéro 1,122,707 qui couvre les mêmes produits que ceux énumérés dans les demandes POMGUARD et POMEGREAT de l'Opposante.

23.       Ces droits que détient la Requérante relativement aux Marques POM, ses enregistrements précédents et les demandes déjà produites pour les Marques POM, y compris la demande 1,122,704 produite antérieurement, existaient bien avant les dates de priorité alléguées concernant les deux demandes d'enregistrement de marque de commerce de l'Opposante pour POMGUARD et POMEGREAT, soit le 3 mars 2006 et le 23 mai 2005.

24.       Cela dit, à la lumière des propres allégations de l'Opposante dans sa déclaration d'opposition, selon lesquelles la [Marque] crée de la confusion avec les demandes d'enregistrement des marques POMGUARD et POMEGREAT de l'Opposante, les propres demandes de l'Opposante doivent être considérées comme créant de la confusion avec les Marques POM de la Requérante, les enregistrements précédents de la Requérante et les demandes produites antérieurement pour les Marques POM, y compris la demande 1,122,704 déjà produite pour la marque POM, qui couvre les mêmes marchandises.

25.       Il a respectueusement été souligné qu'il s'agissait de la décision de la Commission des oppositions, lorsque celle-ci a rejeté la demande de l'Opposante concernant la marque de commerce POMEGREAT. En outre, on fait valoir qu'une décision semblable aurait été rendue relativement à la demande de l'Opposante pour POMGUARD, mais que cette demande a été retirée après que la Requérante a produit sa déclaration d'opposition à l'encontre de la demande.

26.       Quoi qu'il en soit, les propos ci-dessus ne sont pas pertinents, puisque l'Opposante n'a produit aucune preuve permettant de conclure à un cas de confusion.

[20]           Sans vouloir offenser la Requérante, la question qui découle du motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(3)b) ne concerne pas le droit de l'Opposante à l'enregistrement de la marque de commerce POMEGREAT en date du 23 mai 2005, ni son droit à l'enregistrement de la marque de commerce POMGUARD en date du 3 mars 2006, mais plutôt la question de savoir si la Requérante est la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque au 19 février 2009. En outre, c'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer qu'elle a droit à l'enregistrement de la Marque.

[21]           Il est vrai que le registraire a rejeté la demande no 1,277,280 de l'Opposante pour la marque de commerce POMEGREAT en vertu des alinéas 16(3)b) et12(1)d) de la Loi, à la suite de l'opposition de la Requérante. J'ai rendu la décision au nom du registraire puisque j'ai conclu à la présence de confusion entre la marque de commerce POMEGREAT de l'Opposante et la marque de commerce POM WONDERFUL et Dessin de la demande no 1,176,267 et de l'enregistrement no LMC832,083. La décision rendue le 18 juin 2013, indexée sous le nom Canada Bread Company, Limited c Jarrow Formulas Inc, 2013 COMC 108 (CanLII), fait actuellement l'objet d'un appel devant la Cour fédérale [dossier no T‑1539‑13]. En outre, j'ai exercé le pourvoir discrétionnaire du registraire d'examiner le registre des marques de commerce afin d'analyser la demande no 1,312,430 pour la marque de commerce POMGUARD et j'ai confirmé qu'elle avait volontairement été abandonnée le 19 février 2013 [voir Royal Appliance Mfg Co c Iona Appliance Inc (1990), 32 CPR (3d) 525 (COMC) à la page 529].

[22]           Néanmoins, tout ce que doit faire l'Opposante pour s'acquitter du fardeau de preuve initial qui lui incombe au titre de l'alinéa 16(3)b) est de démontrer que les demandes invoquées ont été produites avant la date de priorité de la demande pour la Marque, soit le 19 février 2009, et qu'elles étaient en instance à la date de l'annonce de la demande de la Requérante, soit le 9 décembre 2009 [paragraphe 16(4) de la Loi]. Autrement dit, même si la Cour fédérale rejette l'appel dans le dossier Canada Bread Company, Limited, supra, le refus de la demande alléguée no 1,277,280 de l'Opposante après la date pertinente est sans conséquence dans l'analyse du motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(3)b). Il en est de même concernant l'abandon volontaire de la demande alléguée de l'Opposante no 1,312,430 pour la marque de commerce POMGUARD [voir la décision ConAgra Inc c McCain Foods Ltd (2001), 14 CPR (4th) 228 (CF 1re inst), dans laquelle l'abandon de la demande de la partie opposante survenu après la date pertinente a été considéré comme une circonstance pertinente dans l'analyse de la probabilité de confusion au titre de l'alinéa 16(3)b) de la Loi].

[23]           En l'espèce, l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait relativement à chacune de ses demandes alléguées. En effet, la demande no 1,277,280 a été produite le 27 octobre 2005 revendiquant une date de priorité du 23 mai 2005 et la demande no 1,312,430 a été produite le 10 août 2006 revendiquant une date de priorité du 3 mars 2006; chaque demande était en instance à la date de l'annonce de la demande d'enregistrement de la Marque.

[24]           Il reste donc à déterminer si la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime d'établir que, en date du 19 février 2009, la Marque n'était pas susceptible de créer de la confusion avec les marques de commerce POMEGREAT (demande no 1,277,280) et POMGUARD (demande no 1,312,430).

[25]           Les copies certifiées des demandes datées du 29 avril 2011, qui ont été fournies par l'Opposante, reflètent les états déclaratifs de produits suivants :

No 1,277,280 (POMEGREAT) : [traduction] « compléments alimentaires, nommément concentrés de jus de fruits contenant de la grenade et suppléments vitaminiques et suppléments à base d'extraits de fruits contenant de la grenade sous forme liquide, vendus par des détaillants qui se spécialisent dans les aliments santé, les aliments naturels, les vitamines ou les suppléments alimentaires ».

No 1,312,430 (POMEGUARD) : [traduction] « compléments et suppléments alimentaires, nommément vitamines contenant de la grenade, suppléments à base d'extraits de fruits et suppléments de minéraux sous forme de comprimés, de capsules, de gélules, et en poudre, vendus par des détaillants qui se spécialisent dans les aliments santé, les aliments naturels, les vitamines ou les suppléments alimentaires ».

[26]           Comme il a été indiqué précédemment, la loi exige qu'une demande alléguée à l'appui d'un motif d'opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(3)b), fondé sur l'absence de droit à l’enregistrement, soit en instance à la date de l'annonce de la demande visée par l'opposition. Par conséquent, dans mon évaluation de la probabilité de confusion, en date du 19 février 2009, je crois que l'analyse de l'état déclaratif des produits contenu dans chacune des demandes de l'Opposante, tel qu'il existait à la date de l'annonce de la demande pour la Marque, respecte l'intention du législateur. Après avoir exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire de consulter le registre des marques de commerce, j'ai déterminé que l'état déclaratif des produits de chaque demande, en date du 9 décembre 2009, se lit comme suit :

No 1,277,280 (POMEGREAT) : [traduction] « compléments alimentaires, nommément concentrés de jus de fruits et suppléments vitaminiques et suppléments à base d'extraits de fruits sous forme liquide », suivant une modification volontaire apportée le 12 novembre 2009.

No 1,312,430 (POMEGUARD) : [traduction] « compléments et suppléments alimentaires, nommément vitamines, suppléments à base d'extraits de fruits et suppléments de minéraux sous forme de comprimés, liquides, de capsules, de gélules, et en poudre, préparations en poudre pour boissons; préparations en poudre pour substituts de repas; jus de fruits et concentrés de jus de fruits », suivant une modification apportée le 15 juin 2007.

[27]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi porte que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce, lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits ou les services liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont impartis ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[28]           En appliquant le critère relatif à la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles précisément énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Le poids qu'il convient d'attribuer à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même. [Voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée et al (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC); et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC) pour consulter une discussion exhaustive sur les principes généraux qui régissent le critère relatif à la confusion.]

[29]           À mon avis, la marque de commerce POMGUARD constitue l'argument le plus solide de l'Opposante, car j'estime qu'elle ressemble plus à la Marque que la marque de commerce POMEGREAT, si on se limite à l'identité de leurs éléments « pom » respectifs. Autrement dit, si le motif d’opposition invoqué en vertu du paragraphe 16(3), fondé sur la confusion avec la marque POMGUARD, n'est pas accueilli, le résultat ne sera pas plus favorable avec la marque de commerce POMEGREAT.

[30]           Par conséquent, je vais centrer mon évaluation sur les circonstances de l'espèce, dans la comparaison de la Marque avec la marque de commerce POMGUARD de l'Opposante visée par la demande no 1,312,430.

[31]           Dans la décision Masterpiece, supra, la Cour suprême du Canada a déclaré que le degré de ressemblance entre les marques, bien qu'il s'agisse du dernier facteur énoncé au paragraphe 6(5) de la Loi, est souvent susceptible d'avoir la plus grande incidence sur l'examen de la confusion; la Cour a donc décidé de commencer son analyse en examinant ce facteur. Par conséquent, je passe à l'examen des facteurs énoncés au paragraphe 6(5), en commençant par le degré de ressemblance entre les marques de commerce.

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[32]           Il est bien établi en droit que, lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance entre des marques, il faille considérer les marques dans leur ensemble, et éviter de placer les marques côte à côte dans le but de les comparer et de relever des similitudes ou des différences entre leurs éléments constitutifs.

[33]           La première partie d'une marque de commerce est généralement considérée comme la plus importante au moment d'évaluer la probabilité de confusion [Conde Nast Publications Inc c Union Des Editions Modernes (1979), 46 CPR (2d) 183, p. 188 (CF 1re inst)]. Au paragraphe 64 de la décision Masterpiece, la Cour écrit que pour mesurer le degré de ressemblance, il est préférable de d'abord considérer s'il y a un aspect de la marque de commerce qui est particulièrement frappant ou unique.

[34]           Comme j'estime que la marque de commerce de l'Opposante est composée de deux éléments tout aussi dominant l'un que l'autre, c'est-à-dire « pom » et « guard », je conclus que son préfixe « pom » est un peu plus important aux fins de la distinction. La Marque est également composée de deux éléments, c'est-à-dire « pom », avec le « o » en forme de cœur, et la lettre « x » en indice. Comme les lettres de l'alphabet ne sont pas particulièrement distinctives, je conclus que le premier élément de la Marque est un peu plus important aux fins de la distinction. Dans la mesure où le « o » en forme de cœur est inhérent au préfixe « pom » de la Marque, j'estime qu'il est tout aussi important.

[35]           Sur le plan des idées suggérées, j'estime que les marques de commerce sont aussi semblables que différentes, et ce, pour les raisons suivantes.

[36]           Ma propre connaissance de ma langue maternelle me mène à la conclusion que l'élément « pom » se prononce comme le mot français pomme (en anglais apple). Par conséquent, les deux marques de commerce évoqueraient une pomme pour un consommateur francophone, d'autant plus que la Marque est associée à des « barres nutritives énergisantes et de collation à base de fruits et de noix » et à des « barres-collations à base de fruits et de noix » et que la marque de commerce POMGUARD est associée à des « compléments et suppléments alimentaires, nommément [...] extraits de fruits [...] jus de fruits et concentrés de jus de fruits » (soulignement ajouté). Il convient de rappeler qu'une marque de commerce ne peut pas être enregistrée s'il y a risque de confusion pour le consommateur anglophone moyen, le consommateur francophone moyen ou le consommateur bilingue moyen [voir Pierre Fabre Medicament c SmithKline Beecham Corporation c (2001), 11 CPR (4th) 1 (CAF)].

[37]           Cela dit, le « o » en forme de cœur dans la Marque évoque l'idée que ces produits sont sains et procurent des avantages pour la santé. On peut soutenir que cette idée est renforcée par le « x » placé en indice, car j'estime que cela rappelle le « x » que l'on voit dans l'abréviation utilisée pour désigner une prescription, « Rx » [voir le dictionnaire en ligne Canadian Oxford Dictionary (2 ed)]. En revanche, le suffixe « guard » fait en sorte que la marque de commerce POMGUARD, prise globalement, évoque des produits qui protègent ou qui défendent.

[38]           Finalement, si j'analyse les marques de commerce sur le plan de la première impression sans les examiner en détail, j'estime qu'il existe un certain degré de ressemblance entre les marques de commerce sur le plan du son quant à leur premier élément « pom ». J'estime également qu'elles se ressemblent sur le plan de la présentation, mais dans une moindre mesure. À cet égard, l'élément de dessin de la Marque, à savoir le « o » en forme de cœur, et le « x » en indice, ne peuvent être ignorés. Sur le plan des idées suggérées, j'estime que les marques de commerce sont aussi semblables que différentes l'une de l'autre.

Alinéa 6(5)a) Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[39]           Je considère que les deux marques de commerce possèdent un certain caractère distinctif inhérent, que j'évalue être à peu près le même. En outre, aucune des parties n'a produit de preuve pour établir que sa marque de commerce avait acquis un caractère distinctif par la promotion ou l'emploi au Canada.

Alinéa 6(5)b) – La période d'emploi des marques de commerce

[40]           Ce facteur n'a aucune importance. Les marques de commerce des parties sont visées par une demande d'enregistrement fondée sur un emploi projeté et aucune des parties n'a produit de preuve d'emploi au Canada.

Alinéas 6(5)c) et d) – le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[41]           Comme je l'ai mentionné précédemment, j'estime qu'il convient de tenir compte de l'état déclaratif des produits contenu dans la demande no 1,312,430 de l'Opposante, tel qu'il était libellé à la date de l'annonce de la demande d'enregistrement de la Marque, à savoir « compléments et suppléments alimentaires, nommément vitamines, suppléments à base d'extraits de fruits et suppléments de minéraux sous forme de comprimés, liquide, de gélules, de capsule, et en poudre, préparations en poudre pour boissons; préparations en poudre pour substituts de repas; jus de fruits et concentrés de jus de fruits » (compléments et suppléments alimentaires de l'Opposante).

[42]           Je reconnais que les compléments et les suppléments alimentaires de l'Opposante sont différents des produits décrits dans la demande d'enregistrement de la Marque. Cependant, dans la mesure où les produits associés à la Marque sont conçus pour être utilisés en tant que substituts de repas ou comme compléments alimentaires, j'estime qu'il est raisonnable de conclure à un chevauchement de ces produits et des compléments et suppléments alimentaires de l'Opposante.

[43]           Par conséquent, en l'absence d'observations de la part de la Requérante pour me convaincre du contraire, j'estime que je peux raisonnablement conclure à un chevauchement des produits suivants figurant dans la demande d'enregistrement de la Marque et des compléments et suppléments alimentaires de l'Opposante :

(1) Barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives pour utilisation comme substitut de repas et barres nutritives pour utilisation comme complément alimentaire; [...] (substituts de repas et compléments alimentaires de la Requérante).

[44]           Cependant, en l'absence d'observations de la part de l'Opposante pour me convaincre du contraire, je conclus que les produits suivants figurant dans la demande d'enregistrement de la Marque se distinguent des compléments et suppléments alimentaires de l'Opposante :

(1) [...] barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives énergisantes et de collation à base de fruits et de noix; barres-collations à base de fruits et de noix (les barres à base de fruits et de noix de la Requérante).

[45]           En effet, non seulement les barres à base de fruits et de noix de la Requérante ne figurent pas dans la demande comme étant employés en tant que substituts de repas ou compléments alimentaires, ils sont aussi énoncés séparément des suppléments de repas et compléments alimentaires de la Requérante.

[46]           Enfin, dans la mesure où je conclus qu'il y a chevauchement des substituts de repas et des compléments alimentaires de la Requérante et des compléments et suppléments alimentaires de l'Opposante, pour les besoins de l'évaluation de la probabilité de confusion et sans preuve pour me convaincre du contraire, je peux également conclure à un éventuel chevauchement des voies de commercialisation des parties pour ces produits.

[47]           Par conséquent, je conclus que l'examen global des facteurs énoncés aux alinéas 6(5)c) et d) s'applique en faveur de l'Opposante seulement en ce qui concerne les substituts de repas et les compléments alimentaires de la Requérante.

Autres circonstances de l'espèce

[48]           On peut soutenir que la preuve et les observations de la Requérante présentent son statut de propriétaire de ses enregistrements des marques de commerce constituées du terme « POM », ou contenant celui-ci, comme une autre circonstance de l'espèce.

[49]           Cependant, aucune des Marques POM divulguées dans la preuve de la Requérante n'était enregistrée à la date pertinente du 19 février 2009. Quoi qu'il en soit, il est établi en droit que le fait d'être propriétaire d’un enregistrement ne confère pas le droit d’obtenir automatiquement l’enregistrement d’autres marques, quelque ressemblantes qu’elles soient avec la marque initialement enregistrée [voir Groupe Lavo Inc c Procter & Gamble Inc (1990), 32 CPR (3d) 533 (CMOC) à la page 538].

[50]           Enfin, bien qu'elles ne s'appliquent pas à l'évaluation de la question dont je suis saisie, on peut soutenir que les observations de la Requérante relativement à l'absence de droit à l’enregistrement de l'Opposante pour la marque de commerce POMEGUARD font état du fait que la demande d'enregistrement de la Marque a été approuvée par la section de l'examen de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada, malgré la demande précédemment produite par l'Opposante. Je tiens à souligner que le fardeau de preuve qui incombe à une partie requérante est différent selon que la demande en soit à l'étape de l'examen ou à l'étape de l'opposition. Plus particulièrement, à l'étape de l'examen, le registraire est tenu d'annoncer une demande, sauf s'il est convaincu que la partie requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce [article 37 de la Loi]. À l'étape de l'opposition, il revient à la partie requérante de convaincre le registraire qu'elle est la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[51]           En appliquant le test en matière de confusion, j'ai considéré qu'il s'agissait d'une question de première impression et de souvenir imparfait. Dans mon appréciation de l'ensemble des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi et de leur importance relative, je ne suis pas convaincue que la Requérante s'est acquittée du fardeau ultime qui lui incombait, à savoir de démontrer qu'il n'existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque, en liaison avec les substituts de repas et compléments alimentaires de la Requérante, et la marque de commerce POMEGUARD de l'Opposante, visée par la demande no 1 ,312,430, pour le consommateur francophone moyen, au 19 février 2009.

[52]           En effet, comme je conclus qu'il existe des points de similitude et des points de différences entre les marques de commerce dans leur ensemble, lorsque j'ai pris en compte le chevauchement de la nature des substituts de repas et compléments alimentaires de la Requérante et la possibilité de chevauchement de la nature du commerce, j'estime que la prépondérance des probabilités penche autant en faveur d'une conclusion de confusion que d'une conclusion d'absence de confusion. Comme il revient à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne crée pas de confusion avec la marque de commerce POMEGUARD visée par la demande no 1,312,430 au 19 février 2009, je dois trancher en défaveur de la Requérante.

[53]           Cependant, je suis convaincue que la Requérante s'est acquittée du fardeau ultime qui lui incombait, à savoir d'établir qu'il n'existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque en liaison avec les barres à base de fruits et de noix de la Requérante et la marque de commerce POMEGUARD de l'Opposante visée par la demande no 1,312,430 au 19 février 2009. En effet, si je tiens compte du fait que la marque de commerce POMEGREAT ne jouit pas d'un caractère distinctif acquis et de ma conclusion selon laquelle les barres à base de fruits et de noix distinguent des compléments et suppléments alimentaires de l'Opposante, j'estime que la prépondérance des probabilités penche en faveur de la Requérante.

[54]           Comme j'ai déjà indiqué précédemment que la marque de commerce POMGUARD constitue l'argument le plus solide de l'Opposante, je conclus aussi que la Requérante s'est acquittée du fardeau ultime qui lui incombait, à savoir d'établir qu'il n'existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque en liaison avec les barres à base de fruits et de noix de la Requérante et la marque de commerce POMEGREAT de l'Opposante visée par la demande no 1,277,280 au 19 février 2009.

[55]           Enfin, comme j'accepte le motif d’opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(3)b) relativement aux substituts de repas et compléments alimentaires de la Requérante à la lumière de la demande d'enregistrement de la marque POMGUARD déjà produite par l'Opposante, je ne me pencherai pas sur le motif d'opposition fondé sur la demande précédemment produite par l'Opposante pour POMEGREAT relativement à la Marque en liaison avec les substituts de repas et compléments alimentaires de la Requérante.

[56]           Par conséquent, dans la mesure où le motif d’opposition invoqué en vertu de l'alinéa 16(3)b) est fondé sur la demande no 1,312,430 précédemment produite par l'Opposante pour la marque de commerce POMGUARD, ce motif d'opposition est accueilli seulement en ce qui a trait aux produits suivants :

(1) Barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives pour utilisation comme substitut de repas et barres nutritives pour utilisation comme complément alimentaire; [...]

[57]           Je souhaite ajouter que si la Requérante avait produit une preuve pour démontrer que ses Marques POM ont été employées ou sont devenues connues dans une certaine mesure au Canada à la date pertinente, j'aurais peut-être conclus que l'analyse globale des facteurs énoncés au paragraphe 6(5) de la Loi penchait en sa faveur, relativement aux substituts de repas et compléments alimentaires de la Requérante. Toutefois, la conclusion d'une opposition est fondée sur la preuve et les plaidoyers des parties et non pas sur des observations non étayées des parties.

La décision

[58]           Conformément aux pouvoirs qui me sont délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette la demande aux termes du paragraphe 38(8) de la Loi relativement aux produits suivants :

(1) Barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives pour utilisation comme substitut de repas et barres nutritives pour utilisation comme complément alimentaire; [...]

[59]           Cependant, je rejette l'opposition en vertu du paragraphe 38(8) de la Loi concernant les produits suivants :

(1) [...] barres nutritives pour utilisation comme nutraceutique afin de fournir des bienfaits sur la santé, nommément barres nutritives énergisantes et de collation à base de fruits et de noix; barres-collations à base de fruits et de noix.

[voir Produits Menagers Coronet Inc c Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 CPR (3d) 492 (CF 1re inst) à titre d’autorité jurisprudentielle permettant de rendre une décision donnant en partie gain de cause].

______________________________

Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad. a.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.