Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

AFFAIRE INTÉRESSANT L’OP-POSITION de Healthworld B.V. et Healthworld Corporation à la demande n1,041,331 produite par le Dr Matthias Rath en vue de l’enregistrement de la marque de commerce WORLD HEALTH ALLIANCE                                        

 

 

Le 30 décembre 1999, le Dr Matthias Rath (le requérant) a produit une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce WORLD HEALTH ALLIANCE (la marque), par laquelle il revendique la date de priorité conventionnelle du 28 décembre 1999. La demande est fondée sur l’emploi projeté de la marque au Canada en liaison avec les marchandises et services suivants :

Marchandises :

(1) Livres, journaux, dépliants, revues, tous dans les domaines des soins de santé, des suppléments nutritifs, des suppléments diététiques, des suppléments vitaminiques et minéraux; matériel didactique et matériel didactique imprimé, nommément livres, journaux, dépliants, revues dans les domaines des soins de santé, des suppléments nutritifs.

Services :

(1) Éducation, fourniture de formation dans les domaines des soins de santé, des précautions de santé et de la nutrition; consultation dans les domaines des précautions de santé, des soins de santé et de la nutrition; recherche scientifique.

 

Le requérant a renoncé au droit à l’usage exclusif des mots WORLD et HEALTH en dehors de la marque de commerce.

 

La demande a été annoncée à des fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 28 août 2002. Le 10 janvier 2003, Healthworld B.V. et Healthworld Corporation (collectivement appelées l’opposante) ont produit une déclaration d’opposition à l’égard de la demande. Le requérant a produit et signifié une contre‑déclaration.

 

Comme élément de preuve selon l’article 41 du Règlement, l’opposante a déposé l’affidavit de Denis Piquette. Comme élément de preuve selon l’article 42 du Règlement, le requérant a déposé l’affidavit de Lynda Palmer. Il n’y a pas eu de contre‑interrogatoire.

 

Chacune des parties a présenté des observations écrites et était représentée à l’audience.

 

Motifs d’opposition

Les motifs d’opposition peuvent être résumés comme suit :

 

1.         La marque n’est pas enregistrable selon l’al. 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée HEALTHWORLD & Dessin de l’opposante, visée par l’enregistrement nTMA462,229 et reproduite ci‑dessous.

 

                                                HEALTHWORLD & DESIGN 

 

2.         Le requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque selon l’al. 16(3)a) de la Loi parce que la marque crée de la confusion avec les marques de commerce HEALTHWORLD et HEALTHWORLD & Dessin de l’opposante, qui avaient antérieurement été employées au Canada en liaison avec des services d’agence de publicité, des services de renseignements médicaux et d’autres services de communication.

 

3.         La marque n’est pas distinctive au sens de l’art. 2 de la Loi parce qu’elle ne distingue pas véritablement les marchandises et services du requérant de ceux offerts pour la vente et vendus par l’opposante, et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi.

 

Dates pertinentes

La date pertinente à l’égard du premier motif d’opposition est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et The Registrar of Trade Marks, 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)]. La date pertinente en ce qui concerne le deuxième motif d’opposition est la date de priorité conventionnelle revendiquée dans la demande [voir par. 16(3) et art. 34]. La date pertinente quant au troisième motif d’opposition est la date de production de l’opposition [voir Metro-Goldwyn-Meyer Inc. c. Stargate Connections Inc.  (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.), à la p. 324].

 

Résumé de la preuve selon l’article 41 du Règlement

M. Piquette est le président et directeur de l’exploitation de Healthworld (Canada) Ltd., qui, affirme‑t‑il, [traduction] « est une société canadienne qui exploite une agence de publicité et qui constitue, notamment, le principal fournisseur de services de marketing et de communication stratégiques aux entreprises qui font le commerce des soins de santé, offrant des solutions intégrées permettant de créer, de lancer et d’administrer globalement et localement les marques des clients de manière à en optimiser la durée de vie commerciale ».

 

M. Piquette explique que Healthworld B.V., le propriétaire mondial de la marque de commerce HEALTHWORLD, a octroyé à Healthworld Corporation, une société du Delaware, une licence exclusive lui permettant d’employer la marque de commerce HEALTHWORLD dans le monde entier, et d’accorder des sous‑licences autorisant un tel emploi. M. Piquette affirme que Healthworld B.V. contrôle en tout temps la nature et la qualité des services utilisés en liaison avec la marque de commerce HEALTHWORLD, et ce, au moyen des contrats de licence. M. Piquette affirme également que, depuis 1995, Healthworld (Canada) Ltd. et ses prédécesseures n’ont cessé d’être le titulaire, au Canada, de la licence permettant d’employer la marque de commerce HEALTHWORLD & Dessin visée par l’enregistrement nTMA462,229.

 

Au paragraphe 5, M. Piquette affirme ceci :

[traduction] « En 1995, une prédécesseure de Healthworld (Canada) Ltd., Rubel & Schwab, une association commerciale formée par Phil Rubel et Gord Schwab, est devenue la titulaire canadienne de la licence relative à la marque de commerce HEALTHWORLD et a commencé à employer ladite marque au Canada. En 1997, Denis Piquette a acheté les parts de Phil Rubel dans Rubel & Schwab, et la raison sociale a été changée pour Schwab & Piquette/Healthworld. Le 23 mai 2001 ou vers cette date, les actifs de Schwab & Piquette/Healthworld ont été achetés par Bates Canada Inc., faisant affaires sous le nom de Bates Healthworld. Puis, en janvier 2003 ou vers cette date, Bates Healthworld a changé son nom pour Healthworld (Canada) Ltd. Depuis 1995, Healthworld (Canada) Ltd. et ses prédécesseures ont toujours employé et continuent d’employer, dans le cours normal des affaires, la marque de commerce HEALTHWORLD au Canada, et ce, en vertu de la licence susmentionnée ».

 

La dernière phrase du paragraphe 5 constitue, évidemment, une simple allégation d’emploi, et les pièces fournies par M. Piquette seront examinées plus tard afin de déterminer si elles étayent cette allégation.

 

M. Piquette affirme que les ventes de services d’agence de publicité suivantes ont été réalisées au Canada en liaison avec la marque de commerce HEALTHWORLD : de juin à décembre 2001 – 3,5 millions de dollars; en 2002 – 6,2 millions de dollars; du 1er janvier 2003 à octobre 2003 – 4,3 millions de dollars; de novembre à décembre 2003 – 1,3 millions de dollars (approximativement).

 

Résumé de la preuve selon l’article 42 du Règlement

Mme Palmer, une recherchiste en marques de commerce, a effectué, en juillet 2004, des recherches dans les registres du Bureau canadien des marques de commerce concernant les marques contenant :

1)      les mots HEALTH et WORLD en liaison avec n’importe quels marchandises ou services;

2)      le mot WORLD en liaison avec des services de publicité;

3)      le mot WORLD en liaison avec des services de soins de santé et suppléments.

 

Les résultats de ses recherches seront analysés plus loin.

 

Probabilité de confusion

Chacun des motifs d’opposition soulève la question de la probabilité de confusion.

 

Le critère applicable à la confusion en est un de première impression et de souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque crée de la confusion avec une autre marque lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. En appliquant le critère relatif à la confusion énoncé au par. 6(2) de la Loi, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles spécifiquement énumérées au par. 6(5) de la Loi. Les éléments d’appréciation précisément énumérés à ce paragraphe sont les suivants : le caractère distinctif inhérent des marques ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; la période pendant laquelle les marques ou noms commerciaux ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques ou noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Le poids qu’il convient d’accorder à chacun des éléments pertinents peut varier selon les circonstances [Clorox Co. c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.); Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et The Registrar of Trade Marks (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.)].

 

La loi impose au requérant d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande d’enregistrement satisfait aux exigences de la Loi. Toutefois, l’opposante doit s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible qui permette de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, à la p. 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

 

Fardeau de preuve initial concernant le motif d’opposition fondé sur l’article 16

Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial concernant le motif d’opposition fondé sur l’article 16, l’opposante doit démontrer qu’elle a employé les marques HEALTHWORLD ou HEALTHWORLD & Dessin au Canada en liaison avec des services d’agence de publicité, des services de renseignements médicaux et d’autres services de communication, et ce, antérieurement au 28 décembre 1999. Elle doit en outre établir que ses marques n’avaient pas été abandonnées au 28 août 2002 [voir par. 16(5)].

 

Le requérant fait valoir que la preuve d’emploi des deux marques revendiquées par l’opposante est faible, et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, il affirme que la plupart des pièces établissent l’emploi d’autres marques, à savoir des marques qui contiennent le mot HEALTHWORLD. Deuxièmement, il soutient que plusieurs des documents (par exemple, les prospectus et la correspondance avec les fournisseurs) n’établissent pas un emploi, conformément à l’art. 4 de la Loi, en liaison avec les services revendiqués. Il prétend également que le mot HEALTHWORLD est parfois employé comme nom commercial, plutôt que comme marque de commerce, c.‑à‑d. qu’il sert à identifier une entité, plutôt qu’une source. En ne perdant pas de vue ces questions, je résumerai ci‑dessous les pièces jointes à l’affidavit de M. Piquette qui me semblent étayer le mieux l’allégation d’emploi, au Canada, de l’opposante antérieurement au 28 décembre 1999 :

  1. pièce 7 : [traduction] « une copie du papier à en‑tête utilisé et distribué […] au Canada de 1997 à 2001 » – Ce papier à en‑tête montre bien la marque de commerce HEALTHWORLD et une adresse canadienne, mais il est en blanc, et on n’indique pas comment il a été utilisé au Canada. De plus, la phrase « de 1997 à 2001 » est ambiguë;
  2. pièce 8 : copies des cartes d’affaires montrant la marque de commerce HEALTHWORLD utilisées et distribuées au Canada de 1997 à 2001;
  3. pièce 9 : imprimé d’un exposé qui a été présenté au Canada en 1998 et 1999 pour donner aux clients éventuels un aperçu des services d’agence de publicité offerts par la société, lequel imprimé contient, à certains endroits, le mot HEALTHWORLD.

 

Je suis d’accord avec le requérant pour dire que cette preuve est faible, mais elle permet tout juste à l’opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve initial, mais seulement quant au mot servant de marque HEALTHWORLD.

 

De plus, j’estime que l’opposante s’est acquittée de son fardeau d’établir le non‑abandon de sa marque HEALTHWORLD au 28 août 2002, et ce, au moyen des factures datées de 2002 contenues dans la pièce 3 fournie par M. Piquette, dont nous traiterons plus loin.

 

Fardeau de preuve initial concernant le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif

Selon la décision que vient de rendre le juge Noël dans l’affaire Bojangles’ International, LLC and Bojangles Restaurants, Inc. c. Bojangles Café Ltd., 2006 CF 657, le fardeau de preuve initial qui incombe à l’opposante en ce qui concerne son motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif consiste à établir que l’une de ses marques avait acquis, au Canada, une renommée substantielle, importante ou suffisante au 10 janvier 2003. Je résumerai donc les parties de l’affidavit de M. Piquette qui me semblent étayer une telle prétention, en plus de celles déjà exposées ci‑dessus en liaison avec l’art. 16 :

  1. paragraphe 6 : ventes de 9,7 millions de dollars réalisées avant 2003;
  2. pièce 3 : copies de 3 factures représentatives datées de 2002 – Bien que ces factures montrent, dans le haut, le mot HEALTHWORLD précédé du mot BATES, j’estime qu’il s’agit d’un emploi de la marque HEALTHWORLD en soi (plutôt que de la marque composée BATES HEALTHWORLD) parce que le mot BATES est mis à part du fait qu’il s’agit des seules lettres imprimées en caractère gras. [voir le principe no 1 dans Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535, aux p. 538-539].
  3. pièce 6 : copie d’une carte d’affaires utilisée et distribuée au Canada en 2001 et 2002, et montrant la marque d’une manière similaire à la pièce 3;
  4. paragraphe 17: dépenses publicitaires de 18 000 $ engagées avant 2003 en liaison avec la marque HEALTHWORLD;
  5. pièce 13 : publicité parue en 2001 dans 2 magazines canadiens qui montre la marque HEALTHWORLD d’une façon similaire à la pièce 3.

 

Compte tenu de ce qui précède, je conclus qu’au 10 janvier 2003, l’opposante avait acquis en liaison avec sa marque HEALTHWORLD une renommée suffisante pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de preuve initial concernant le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif.

 

Fardeau de preuve initial concernant le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

L’opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial concernant ce motif en fournissant une copie de son enregistrement de la marque HEALTHWORLD & Dessin. L’enregistrement de ce dessin‑marque concerne des services d’agence de publicité et se fonde, notamment, sur son emploi au Canada depuis au moins octobre 1993.

 

Analyse des éléments d’appréciation énumérés à l’article 6

Bien qu’il se rapporte à la date pertinente la plus éloignée, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) constitue néanmoins le motif le moins convaincant de l’opposante parce qu’il n’y a presque aucune preuve que la marque déposée de celle‑ci a été employée ou annoncée. [Le seul endroit où je peux voir cette marque précise dans la preuve est dans une note de service interne datée du 23 mars 1998 (pièce 17, affidavit Piquette).]

 

Aussi, comme je l’ai indiqué précédemment, il y a très peu de preuve que le dessin‑marque de l’opposante a été employé ou annoncé à la date pertinente quant au motif fondé sur l’art. 16.

 

Pour ces motifs, je considère que le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif représente la meilleure preuve de l’opposante, et l’analyse qui suit porte sur ce motif.

 

Alinéa 6(5)a) : le caractère distinctif inhérent des marques, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

Les marques WORLD HEALTH ALLIANCE et HEALTHWORLD ont toutes deux un faible caractère distinctif inhérent puisqu’elles se composent toutes deux de mots qui évoquent les marchandises ou services auxquels elles sont liées.

 

Seule la marque de l’opposante avait acquis un certain caractère distinctif, par l’emploi et la promotion, au 10 janvier 2003.

 

L’examen de cet élément d’appréciation favorise donc l’opposante.

 

Alinéa 6(5)b) : la période pendant laquelle chacun des marques ou noms commerciaux a été en usage

Cet élément favorise clairement l’opposante puisqu’il n’y a aucune preuve que le requérant a commencé à employer sa marque.

 

Alinéas 6(5)c) et d) : le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

Les parties semblent exploiter des entreprises très différentes. L’opposante exploite une agence de publicité qui sert les entreprises faisant le commerce des soins de santé, comme les sociétés pharmaceutiques. Selon la preuve, sa marque ne serait connue que de ces entreprises; je n’ai connaissance d’aucun élément de preuve établissant que la marque de l’opposante fait l’objet d’une promotion ciblant le public en général. L’entreprise du requérant, par contre, semble consister principalement à fournir des renseignements et de la formation dans les domaines des soins de santé et de la nutrition; il semble assez peu probable que la clientèle du requérant et celle de l’opposante se chevauchent.

 

À l’audience, le mandataire de l’opposante a fait observer que celle‑ci distribue un bulletin d’information et fournit des services de consultation. Toutefois, je ne crois pas que ces faits permettent de conclure à l’existence d’un chevauchement ou d’un lien notables entre les marchandises et services des parties. D’abord, le bulletin d’information en question (pièce 18, affidavit Piquette) constitue manifestement un document interne. Ensuite, l’état déclaratif des services du requérant indique clairement que ses services de consultation sont dans les domaines des précautions de santé, des soins de santé et de la nutrition. Ces services sont donc différents des services de consultation pouvant être inclus dans les services fournis par une agence de publicité aux sociétés pharmaceutiques et autres sociétés semblables en vue de faire le promotion des marques de ces sociétés.

 

Alinéa 6(5)e) : le degré de ressemblance entre les marques ou noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent

Comme le résume l’arrêt Polo Ralph Lauren Corp. c. United States Polo Association et al., [2000] A.C.F. no 1472 (QL), (2000), 9 C.P.R. (4th) 51 (C.A.F.), aux p. 58‑59 :

S’agissant du degré de ressemblance dans la présentation, le son ou l’idée dont il est question à l’alinéa 6(5)e), les marques de commerce en cause doivent être examinées comme un tout. De la même façon, puisque c’est la combinaison des éléments qui constitue la marque de commerce et lui confère son caractère distinctif, il n’est pas correct, pour l’application du critère de la confusion, de placer les marques l’une en regard de l’autre et de comparer ou observer les ressemblances ou les différences des éléments ou des composantes de ces marques. En outre, les marques de commerce ne doivent pas être considérées séparément des marchandises ou services avec lesquels elles sont associées, mais en liaison avec ces marchandises ou services.

 

En outre, comme il a été affirmé dans Conde Nast Publications Inc. c. Union des éditions modernes, [1979] A.C.F. no 801 (QL), (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.), à la p. 188 : « Il est évident que le premier mot ou la première syllabe d’une marque de commerce est celui ou celle qui sert le plus à établir son caractère distinctif ».

 

Lorsqu’on les examine comme un tout, j’estime que les marques WORLD HEALTH ALLIANCE et HEALTHWORLD ne présentent pas une grande ressemblance tant dans la présentation ou le son que dans les idées qu’elles suggèrent. Il est certes manifeste qu’elles contiennent toutes deux les mots « health » et « world », mais il existe d’importantes différences entre elles, à savoir : la première a quatre syllabes, la deuxième en a deux; la première commence par WORLD, la deuxième par HEALTH; la première évoque une entité qui travaille à améliorer la santé dans le monde, la deuxième donne à penser que les services d’agence de publicité auxquels elle est liée sont spécialisés dans le domaine des soins de santé.

 

Autres circonstances de l’espèce

Comme autre circonstance de l’espèce, il y a l’état du registre ou du marché.

 

La preuve de l’état du registre n’est pertinente que si on peut en tirer des inférences au sujet de l’état du marché, et de telles inférences ne peuvent être tirées qu’en présence d’un nombre élevé d’enregistrements pertinents [Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432 (C.O.M.C.); Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)].

 

Mme Palmer a déposé en preuve les enregistrements de 15 marques de commerce contenant le mot « world » en liaison avec des services d’agence de publicité et autres services semblables. Le requérant s’appuie sur la preuve soumise par Mme Palmer pour conclure que le mot « world » constitue un élément de peu de valeur dans le domaine de l’opposante. Je ne vois cependant pas la nécessité de recourir à la preuve de l’état du registre à cet égard puisque j’ai déjà conclu que la marque de commerce de l’opposante ne présente pas un fort caractère distinctif inhérent compte tenu du sens ordinaire des composantes de sa marque. Je n’ai donc pas à m’attarder davantage à cette preuve.

 

Conclusion

Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, j’arrive à la conclusion que le requérant s’est acquitté de son fardeau de prouver qu’il n’existait aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques WORLD HEALTH ALLIANCE et HEALTHWORLD au 10 janvier 2003. Autrement dit, je suis convaincue que la marque du requérant était, à ce moment‑là, adaptée à distinguer les marchandises et services du requérant de ceux de l’opposante. Ma conclusion se fonde sur les différences qui existent entre les marques et les domaines d’activités des parties.

 

La position de l’opposante à l’égard des deux autres motifs d’opposition étant plus faible, les trois motifs d’opposition sont rejetés.

 

Décision

Conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu du par. 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition en application du par. 38(8).

 

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), CE 10 JUILLET 2006.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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