Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 Référence : 2011 COMC 87

                                                                                                Date de la décision : 2011-05-25

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Canada Dry Mott’s Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1319184 pour la marque de commerce CRUSSH au nom de Krush Global Limited

[1]               Le 6 octobre 2006, Krush Global Limited (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce CRUSSH (la Marque), fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada. L’état déclaratif des services modifié indique ce qui suit :

Services de restaurant, de traiteur, de casse-croûte et de café; offre de plats cuisinés dans des points de vente au détail d’aliments et de boissons; services de préparation et de présentation d’aliments et de boissons; services de bar; services de traiteur d’aliments et de boissons; préparation de produits alimentaires ou de repas pour la consommation à l’extérieur des lieux; services de bar à sandwichs et à salades; services de bar à vin.

[2]               La demande est également fondée sur l’emploi de la Marque et son enregistrement sous le no 2371661 au Royaume-Uni.   

[3]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 26 novembre 2008.

[4]               Le 26 janvier 2009, Canada Dry Mott’s Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. Les motifs d’opposition sont les suivants : la demande de la Requérante ne satisfait pas aux exigences de l’alinéa 30d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), parce que la marque de commerce n’a pas été employée par la Requérante au Royaume-Uni en liaison avec toutes les marchandises décrites dans la demande; la Marque n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa 12(1)d); la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en raison des paragraphes 16(2) et 16(3); la Marque n’est pas distinctive. Chacun des quatre derniers motifs est fondé sur la confusion avec l’emploi et l’enregistrement, par l’Opposante, des marques CRUSH suivantes : CRUSH, no d’enregistrement : LMCDF042219; CRUSH, no d’enregistrement : LMC229350; CRUSH et Dessin, no d’enregistrement : LMC396076; CRUSH Dessin, no d’enregistrement : LMC531936; CRUSH, no d’enregistrement : LMC586673. Les détails de ces enregistrements figurent à l’annexe A ci‑jointe.

[5]               La Requérante a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle elle a nié les allégations de l’Opposante.

[6]               La preuve de l’Opposante est constituée de l’affidavit de Wayne Delfino, de l’affidavit de Dale Penney et de copies certifiées des enregistrements mentionnés ci‑dessus. La Requérante a choisi de ne produire aucune preuve. Les déposants de l’Opposante n’ont pas été contre‑interrogés.

[7]               Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit. Aucune des parties n’a demandé une audience. 

Le fardeau de preuve et les dates pertinentes

[8]               Le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi incombe à la Requérante. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d’opposition [voir John Labatt Ltd c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la p. 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

[9]               Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         article 30 – la date de production de la demande [voir Georgia‑Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la p. 475];

         alinéa 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         paragraphe 16(2) – la date de production de la demande conforme à l’article 30 [voir le paragraphe 16(2)];

         paragraphe 16(3) – la date de production de la demande [voir le paragraphe 16(3)];

         absence de caractère distinctif – la date de production de l’opposition [voir Metro‑Goldwyn‑Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30d)

[10]           L’Opposante allègue que la Requérante n’a pas employé sa Marque au Royaume-Uni en liaison avec tous les services décrits dans la demande en cause en l’espèce avant la date de production de celle‑ci (soit le 6 octobre 2006).

[11]           Si le requérant a le fardeau ultime de démontrer que sa demande est conforme à l’alinéa 30d) de la Loi, le fardeau de preuve initial incombe à l’opposant en ce qui concerne ce motif d’opposition [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. c. Seagram Real Estate Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.)]. Très peu d’éléments de preuve peuvent être requis pour s’acquitter de ce fardeau [voir Canadian Council of Professional Engineers c. 407736 Ontario Corp. (1987), 15 C.P.R. (3d) 551 (C.O.M.C.)]. 

[12]           L’alinéa 30d) prévoit :

30. Quiconque sollicite l’enregistrement d’une marque de commerce produit au bureau du registraire une demande renfermant :

d) dans le cas d’une marque de commerce qui est, dans un autre pays de l’Union, ou pour un autre pays de l’Union, l’objet, de la part du requérant ou de son prédécesseur en titre désigné, d’un enregistrement ou d’une demande d’enregistrement sur quoi le requérant fonde son droit à l’enregistrement, les détails de cette demande ou de cet enregistrement et, si la marque n’a été ni employée ni révélée au Canada, le nom d’un pays où le requérant ou son prédécesseur en titre désigné, le cas échéant, l’a employée en liaison avec chacune des catégories générales de marchandises ou services décrites dans la demande;

 

[13]           L’affidavit de M. Penney, une personne qui effectuait des recherches pour l’agent de l’Opposante, renferme des imprimés du site Web www.crush.com de la Requérante faits le 7 août 2009. Ces imprimés décrivent certains des produits et des services de la Requérante et donnent de l’information sur l’emplacement des « bars à boissons fouettées » de la Requérante au Royaume‑Uni.

[14]           S’appuyant sur la preuve de M. Penney, l’Opposante soutient que, si certains des services de la Requérante étaient annoncés sur le site de celle‑ci à la date à laquelle M. Penney l’a consulté (soit le 7 août 2009), ce site ne faisait aucune mention de service de bar ou de services de bar à vin. L’Opposante estime que cette preuve est suffisante pour s’acquitter de son fardeau relativement à l’alinéa 30d) de la Loi.

[15]           Je ne suis pas convaincue que l’Opposante en l’espèce a produit une preuve suffisante pour étayer une allégation selon laquelle la Requérante n’employait pas la Marque en liaison avec les services mentionnés ci‑dessus au Royaume-Uni à la date pertinente. À cet égard, le fait que la Requérante n’annonçait pas certains de ses services sur son site Web en 2009 n’est pas, en soi, clairement incompatible avec sa prétention voulant qu’elle emploie la Marque au Royaume‑Uni en liaison avec tous les services visés par la demande depuis la date de production de celle‑ci au Canada (soit le 6 octobre 2006). Je rejette donc ce motif d’opposition.

[16]           Je souligne que, même si l’Opposante s’était acquittée de son fardeau de preuve au regard de ce motif, la demande aurait pu être fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada, selon l’issue des autres motifs d’opposition [voir A.B. Dick Company c. Platsch GmbH & Co. (15 juin 2007) C.O.M.C. (décision inédite), no de demande : 1053781].

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[17]           Lorsqu’un requérant a produit la déclaration visée à l’alinéa 30i), un motif d’opposition fondé sur cette disposition ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, par exemple quand il est établi que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol‑Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la p. 155]. La présente affaire n’étant pas exceptionnelle, je rejette ce motif d’opposition.

L’alinéa 12(1)d)

[18]           Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) porte sur la question de la probabilité de confusion entre la Marque et chacune des marques de l’Opposante.

[19]           Je souligne que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial relativement au motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) puisque chacun de ses enregistrements est en règle.

[20]           J’estime que les arguments de l’Opposante concernant le motif selon lequel la Marque n’est pas enregistrable en raison de l’alinéa 12(1)d) de la Loi à cause d’une probabilité de confusion avec sa marque CRUSH, nos d’enregistrement : LMCDF042219 et LMC229350, sont les plus solides. 

Le test en matière de confusion

[21]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce si l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Lorsqu’il applique le test, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, dont celles qui sont expressément mentionnées au paragraphe 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le même poids ne sera pas nécessairement attribué à tous ces critères.

[22]           Dans Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321, et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401, la Cour suprême du Canada a examiné la méthode qui devrait être employée pour apprécier toutes les circonstances de l’espèce dont il faut tenir compte pour décider si deux marques de commerce créent de la confusion. C’est en ayant ces principes généraux à l’esprit que j’apprécierai maintenant les circonstances de l’espèce.

Alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle chaque marque est devenue connue

[23]           J’estime que chacune des marques de l’Opposante possède un caractère distinctif inhérent prononcé parce que le mot CRUSH, bien qu’il soit dans le dictionnaire, ne suggère pas les marchandises qui lui sont associées. La Marque a un caractère distinctif inhérent un peu plus prononcé que les marques de l’Opposante en raison de son orthographe particulière.

[24]           La force d’une marque de commerce peut être accrue si elle devient connue par sa promotion ou son emploi. Le déposant de l’Opposante, M. Delfino, donne les renseignements suivants dans son affidavit :

         l’Opposante, ses prédécesseurs, ses sociétés affiliées et les titulaires de ses licences emploient et annoncent abondamment les marques CRUSH au Canada en liaison avec des boissons gazeuses, des sirops, des concentrés et des marchandises connexes depuis plus de 80 ans;

         les marques CRUSH sont employées sur une variété de boissons vendues dans des restaurants, des dépanneurs, des stations‑service, des épiceries, des pharmacies et d’autres détaillants nationaux partout au Canada;

         les marques CRUSH sont également employées en liaison avec des sirops et des concentrés servant à faire des boissons de distributeur et des boissons gazeuses glacées connues sous le nom de « barbotines » de marque CRUSH, vendus à des détaillants et à des fournisseurs de services alimentaires, notamment des restaurants comme Poulet Frit Kentucky, Dairy Queen, Pizza Delight, Boston Pizza, Red Robin, Golden Griddle, Applebee’s, Kelsey’s, Fire Pit, Taco Time, les restaurants IKEA, New York Fries, Taco Bell et Pizza Pizza; 

         l’Opposante a accordé des licences d’emploi des marques CRUSH au Canada relativement à différents produits, comme des bâtonnets glacés, des desserts, des sauces, des garnitures, des bonbons et des vêtements;

         les ventes annuelles de produits CRUSH au Canada ont dépassé un montant entre 18,7 et 23,4 millions de dollars entre 2005 et 2008 et entre 15 et 18 millions de dollars pour les années 2001 à 2005;

         l’Opposante a dépensé plus de 7,4 millions de dollars en frais de publicité au Canada pour les produits CRUSH entre 2005 et 2008 et environ deux millions de dollars par année entre 2001 et 2004;

         les marques CRUSH font l’objet d’une publicité et d’une promotion abondantes au Canada depuis des décennies dans différents médias comme Internet, au moyen de promotions en magasin, d’affichettes d’étagère, de coupons, d’étalages en magasin, de publicités imprimées, de concours et de commandites ainsi que grâce aux embouteilleurs et aux distributeurs titulaires d’une licence;

         la promotion des produits CRUSH est faite par les embouteilleurs et les distributeurs de l’Opposante, qui ont investi plus de 80 millions de dollars pour faire cette promotion auprès de détaillants et de fournisseurs de services alimentaires;

         les produits CRUSH de l’Opposante sont au premier rang des boissons aromatisées au Canada et au quatrième rang des boissons autres que le cola au Canada.

[25]           Pour sa part, la Requérante n’a produit aucune preuve de l’emploi de la Marque.

[26]           Sur la foi de l’information ci‑dessus, je conclus que les marques de l’Opposante sont devenues bien connues dans une large mesure au Canada, alors que la Marque n’est pas du tout devenue connue.

Alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque de commerce a été en usage

[27]           La période pendant laquelle chaque marque a été en usage favorise l’Opposante.

Alinéas 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

[28]           En ce qui concerne les marchandises, les services et les commerces des parties, c’est l’état déclaratif des marchandises et des services figurant dans la demande d’enregistrement de la marque de commerce du requérant et ceux figurant dans les enregistrements de l’opposant qui sont pertinents pour apprécier la question de la confusion au sens de l’alinéa 12(1)d) [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc. (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (C.A.F.); Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.); Miss Universe Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.)]. Je souligne en outre que la jurisprudence indique qu’une marque employée en liaison avec des marchandises alimentaires peut créer de la confusion avec une marque employée en liaison avec des services de restaurant [voir, par exemple, Daniel E. Akroyd and Judith Belushi Pisano, a Partnership c. Brews Brothers Coffee Corp. (1997), 83 C.P.R. (3d) 230 (C.O.M.C.); Beachcombers Restaurant Ltd. c. Vita‑Pakt Citrus Products Co. (1976), 26 C.P.R. (2d) 282 (registraire des M.C.), et Canadian Swiss Hotels Ltd. c. Wylie Marketing Services Ltd. (1979), 49 C.P.R. (2d) 139 (C.O.M.C.)].

[29]           En l’espèce, la demande vise notamment des services de restaurant, de traiteur, de casse‑croute et de café et les marchandises de l’Opposante incluent notamment des boissons, des sirops pour faire des boissons et des desserts. À mon avis, ces marchandises et services sont connexes dans la mesure où ils sont liés de manière générale à l’industrie alimentaire et des boissons. Je ne conclus pas toutefois que les services de bar à vin de la Requérante et les marchandises de l’Opposante se recoupent.

[30]           En ce qui concerne les voies de commercialisation des parties, la preuve de l’Opposante montre que ses produits sont vendus à des grossistes et à des détaillants et directement aux consommateurs partout au Canada, notamment dans des dépanneurs, des stations‑service, des épiceries, des pharmacies, des restaurants et d’autres détaillants nationaux. Les marques CRUSH de l’Opposante sont également employées en liaison avec des sirops et des concentrés, lesquels sont vendus à des détaillants et à de nombreux restaurants et fournisseurs de services alimentaires et servent à faire les boissons de distributeur et les boissons gazeuses glacées (barbotines) de marque CRUSH.  

[31]           Étant donné que les marchandises de l’Opposante sont de la nature de celles qui pourraient être vendues dans les restaurants, casse‑croûte, bars, cafés et points de vente de la Requérante, il semble que les commerces des deux parties pourraient être liés. La seule exception serait les services de bar à vin de la Requérante, car il s’agit à mon avis de services spécialisés qui seraient probablement offerts dans des établissements différents de ceux mentionnés ci‑dessus.

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[32]           Pour évaluer leur degré de ressemblance, les marques doivent être considérées dans leur ensemble; il est inexact de les placer côte à côte et de comparer et observer les similitudes ou les différences de leurs éléments ou de leurs composantes [voir Chamberlain Group, Inc. c. Lynx Industries Inc. (2010), 9 C.P.R. (4th) 122, infirmant 79 C.P.R. (4th) 465]. En outre, le facteur prédominant dans l’appréciation de la question de la confusion est celui du degré de ressemblance entre les marques [voir Beverley Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstering Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.), à la p. 149, confirmé par 60 C.P.R. (2d) 70], et le passage suivant tiré de la page 188 de Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.) s’applique bien en l’espèce :

[La requérante] a utilisé la totalité de la marque de commerce de [l’opposante] et y a ajouté les mots […] Il est évident que le premier mot ou la première syllabe d’une marque de commerce est celui ou celle qui sert le plus à établir son caractère distinctif. En l’espèce, le premier mot et l’élément le plus important de la marque dont [la requérante] veut obtenir l’enregistrement est identique à la marque que [l’opposante] a fait enregistrer. Si l’on craint que l’enregistrement d’une marque de commerce puisse créer la confusion entre elle et une marque plus ancienne, cette dernière doit tirer le bénéfice de ce doute. En l’instance, le doute doit servir à [l’opposante].

[33]           En l’espèce, la Requérante a utilisé les marques nominales de l’Opposante dans leur totalité et leur a ajouté la lettre « s ». Il existe donc un fort degré de ressemblance entre toutes les marques sur le plan de la présentation. Sur le plan du son, les marques sont quasiment identiques, bien que la Marque puisse être prononcée avec le son « s » allongé. J’estime en outre que les marques suggèrent les mêmes idées.

La conclusion concernant la probabilité de confusion

[34]           Comme je l’ai indiqué précédemment, l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce si l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées ou vendues, ou que les services liés à ces marques sont exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. En l’espèce, les marques sont quasiment identiques. En outre, l’Opposante a démontré que ses marques CRUSH sont très réputées, et je suis préoccupée par le fait que la Requérante n’a pas choisi une marque suffisamment différente des marques bien connues de l’Opposante pour qu’il n’y ait aucun risque de confusion entre elles, malgré le fait que certaines de ses marchandises et certains de ses services puissent être différents des marchandises de l’Opposante.

[35]           En appliquant le test en matière de confusion, j’ai tenu compte de la première impression et du vague souvenir. En l’espèce, on doit tenir compte de l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé qui voit la marque CRUSSH et Dessin employée en liaison avec les services de la Requérante, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce CRUSH de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner les marques de près [voir Veuve Clicquot]. 

[36]           Je conclus au mieux que la prépondérance des probabilités penche autant en faveur d’une conclusion de confusion entre les marques en cause qu’en faveur d’une conclusion d’absence de confusion. Comme la Requérante a le fardeau de démontrer, suivant la prépondérance des probabilités, que la Marque ne crée pas de confusion avec les marques de l’Opposante, je dois rendre une décision qui lui est défavorable.

[37]           Compte tenu de ce qui précède, j’accueille le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d).

Les autres motifs d’opposition

[38]           Les dates pertinentes pour apprécier la probabilité de confusion en ce qui concerne les motifs fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif sont, respectivement, la date de production de la demande de la Requérante et la date de l’opposition. À mon avis, les différences entre les dates pertinentes n’ont pas une incidence importante sur la conclusion quant à la confusion entre les marques de commerce des parties. Par conséquent, ma conclusion formulée précédemment, selon laquelle les marques de commerce sont susceptibles d’être confondues, s’applique à ces motifs d’opposition, lesquels sont également accueillis.

Décision

[39]           En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

______________________________

Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.


ANNEXE A

Marque de commerce

No d’enregistrement

Marchandises

CRUSH

LMCDF042219

Boissons, arômes et composés pour faire des boissons, arômes pour aliments.

Concentrés, sirops et autres ingrédients pour faire des boissons gazeuses et non gazeuses sans alcool; distributeurs automatiques; boissons sans alcool en conserve, boissons sans alcool en vrac et boissons sans alcool en bouteille;

Boissons sans alcool en vrac pour distributeur et en bouteille; (2) Sirops pour distributeur, sirops, pré‑mélanges et préparations de boissons pour distributeurs de sodas.

 

CRUSH

LMC229350

Sirops, concentrés, préparations aromatisantes et autres préparations et ingrédients pour la fabrication de friandises glacées; friandises glacées, en particulier crème glacée, lait glacé, sorbets, glaces à l’eau.

Collations constituées de fruits déshydratés.

CRUSH et Dessin

CRUSH DESIGN

 

LMC531936

Boissons, sodas et crème sodas gazéifiés et non gazéifiés, boissons aux fruits ou aromatisées aux fruits non alcoolisées (gazéifiées et non gazéifiées), concentrés d’arômes, essences et sirops pour la fabrication de boissons gazeuses.


 

CRUSH et Dessin

CRUSH & DESIGN

LMC396076

Sodas, nommément boissons gazéifiées et non gazéifiées, jus ou boissons non alcoolisées à saveur de fruits, concentrés d’arôme, essences et sirops pour la fabrication de sodas.

CRUSH

LMC586673

Bonbons et friandises au sucre.

 

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