Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

                                       AFFAIRE INTÉRESSANT L’OPPOSITION de

                                 Marion Frederiksen à la demande no 801,171 produite

                                 par Featherspring International Corporation en vue de

                                 l’enregistrement de la marque de commerce LUXIS           

 

 

Le 8 janvier 1996, la requérante, Featherspring International Corporation (la requérante), a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce LUXIS en liaison avec des semelles de chaussures fondée sur l’emploi de ladite marque au Canada depuis le 9 mai 1986, et sur son emploi et son enregistrement aux États-Unis, le pays d’origine de la requérante, le 26 août 1986 sous le no 1,406,824 en liaison avec ces marchandises.

 

Cette demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 19 juin 1996 et l’opposante, Marion Frederiksen (l’opposante), a produit une déclaration d’opposition le 16 août 1996, dont copie a été envoyée à la requérante le 30 août 1996. Le 30 décembre 1996, la requérante a produit et signifié une contre‑déclaration en réponse à la déclaration d’opposition. L’opposante a déposé en preuve les affidavits de Wolfgang Frederiksen et de Helga Gallé, et la requérante a produit les affidavits de Peter Guy Rothschild, de Harvey J. Rothschild et de Sabine Barbel Simons. Seule la requérante a présenté une argumentation écrite, et aucune audience n’a été tenue relativement à cette opposition.

 

Les motifs d’opposition invoqués par l’opposante dans sa déclaration d’opposition sont les suivants :

a)      la demande n’est pas conforme aux exigences des alinéas 38(2)a) et 30b) de la Loi sur les marques de commerce en ce que la requérante n’a pas employé la marque de commerce au Canada en liaison avec les marchandises visées par la demande à compter de la date à laquelle elle déclare l’avoir fait pour la première fois;

b)      la demande n’est pas conforme aux exigences des alinéas 38(2)a), 38(2)c) et 30i) de la Loi sur les marques de commerce en ce que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque de commerce au Canada ou de l’enregistrer aux États-Unis en liaison avec les marchandises décrites dans la demande puisqu’elle était au courant de l’adoption et de l’emploi de la marque de commerce LUXIS par l’opposante, qui l’employait et l’avait enregistrée en Allemagne, son pays d’origine, le 2 février 1988 sous le numéro 1117235 en liaison avec des semelles orthopédiques;

c)      la demande n’est pas conforme aux exigences des alinéas 38(2)a), 38(2)c) et 30i) de la Loi sur les marques de commerce en ce que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque de commerce au Canada ou de l’employer et de l’enregistrer aux États-Unis en liaison avec les marchandises décrites dans la demande puisqu’elle était au courant de l’adoption et de l’emploi de la marque de commerce LUXIS par l’opposante, et parce qu’elle avait distribuait les semelles orthopédiques de l’opposante sous la marque de commerce LUXIS de l’opposante dès 1985 et en 1986;

d)     la requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce selon les alinéas 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi sur les marques de commerce parce que, à la date à laquelle la requérante l’a en premier lieu ainsi employée ou révélée au Canada, la marque de commerce créait de la confusion avec la marque de commerce LUXIS qui avait été adoptée et employée au Canada par l’opposante dès 1985 en liaison avec des semelles orthopédiques;

e)      la requérante, en sa qualité d’importateur des produits de l’opposante, un commettant étranger, n’a pas le droit d’enregistrer la marque de commerce de l’opposante, et tout ce qui a été fait par la requérante par rapport à ladite marque de commerce l’a été au profit de l’opposante parce que :

                                                                    i.      la requérante a adopté et tenté d’enregistrer la marque de commerce LUXIS au Canada et l’a enregistrée aux États-Unis dans le but de s’approprier frauduleusement la marque de commerce de l’opposante;

                                                                  ii.      la vente à la requérante constituait un emploi antérieur par l’opposante au sens de l’alinéa 16(1)a);

                                                                iii.      la vente par la requérante ne constituait pas un emploi par celle‑ci au sens de l’alinéa 16(1)a) et de l’article 4;

                                                                iv.      la requérante avait une obligation fiduciaire envers l’opposante par rapport à la marque;

f)       la marque de commerce visée par la demande d’enregistrement ne distingue pas les marchandises de la requérante, mais distingue celles de l’opposante.

 

Les trois premiers motifs d’opposition sont fondés sur l’article 30 de la Loi. Les quatrième et cinquième motifs d’opposition sont fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement. La date pertinente à laquelle il convient d’apprécier la question de la non-conformité aux exigences de l’article 30 de la Loi est la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R.(3d) 469, à la page 475], alors que la question de l’absence de droit à l’enregistrement fondée sur le paragraphe 16(1) de la Loi doit être considérée à la date de premier emploi alléguée par la requérante (soit le 9 mai 1986) [article 16 de la Loi]. Il est généralement reconnu que la date pertinente pour examiner la question du caractère distinctif est celle de la production de la déclaration d’opposition (soit le 30 avril 1999) [voir Andres Wines Ltd. et E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A F.) et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413, à la page 424 (C.A.F.).

 

La requérante a le fardeau ultime de démontrer que sa demande est conforme aux exigences de l’article 30 de la Loi, mais il incombe d’abord à l’opposante d’établir les faits qu’elle invoque à l’appui de ces motifs d’opposition. Une fois que l’opposante s’est acquittée de ce fardeau initial, le fardeau est transféré à la requérante, qui doit démontrer que les motifs d’opposition invoqués ne devraient pas empêcher l’enregistrement de la marque de commerce visée par la demande [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al. c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, aux pages 329 et 330; et John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd., 30 C.P.R. (3d) 293]. Par conséquent, un examen de la preuve produite par les deux parties s’impose à ce stade-ci.

 

L’opposante a produit l’affidavit de Wolfgang Frederiksen, daté du 13 mai 1998, dont le paragraphe 1 est reproduit ci-dessous :

[traduction] «1.                   Je suis le directeur général de HFS-Vertrieb-Furnturen Schuhbedarfsartikel M.Frederiksen, une société privée appartenant à Marion Frederiksen (ci-après nommée l’« opposante »), et j’occupe le poste de directeur général chez l’opposante depuis janvier 1983. Dans le cadre de mes fonctions, je participe de très près à la promotion et à la vente de la gamme de produits de l’opposante et j’ai accès aux dossiers et aux documents commerciaux de celle-ci. Je connais personnellement les renseignements contenus dans mon affidavit, ou je les ai trouvés dans les documents de l’opposante auxquels j’ai accès. En outre, je suis autorisé à souscrire le présent affidavit pour le compte de l’opposante. »

 

Dans son argumentation écrite, la requérante a contesté l’admissibilité de cet affidavit au motif que, entre autres :

[traduction] « … l’opposante nommée dans la preuve par affidavit est la société privée HFS- Vertrieb Furnituren, et non Marion Frederiksen, la personne physique qui a produit la déclaration d’opposition. Marion Frederiksen, la personne physique, n’a donc produit aucune preuve dans le cadre de l’opposition. La société privée, qui est une entité juridique distincte, n’est pas l’opposante, et son élément de preuve devrait être écarté et ne devrait pas être considéré dans le cadre de la présente opposition. »

 

Il va sans dire que si j’adoptais la position de la requérante sur cette question, l’absence de preuve pourrait être fatale à l’opposante étant donné le fardeau initial qui lui incombe quant aux motifs d’opposition décrits ci-dessus.

 

Le fait que l’affidavit ait été souscrit par Wolfgang Frederiksen n’a pas d’importance. L’opposante peut produire l’affidavit de n’importe qui à l’appui de ses motifs d’opposition. Il y a une certaine ambiguïté quant à l’identité de l’« opposante » aux fins dudit affidavit. Cependant, aucune preuve n’a été fournie quant au statut juridique de HFS- Vertrieb Furnituren. S’agit-il d’une entité juridique distincte en vertu des lois de l’Allemagne ou d’un nom commercial employé par l’opposante? Cette ambiguïté doit être résolue au détriment de l’auteur de l’affidavit (voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1980), 46 C.P.R. (2d) 183).

 

La désignation de Marion Frederiksen ou de HFS- Vertrieb Furnituren comme « opposante » dans l’affidavit de Wolfgang Frederiksen n’opère pas un changement d’opposante dans le cadre de la présente procédure d’opposition. Il convient toujours, cependant, d’examiner cet affidavit pour vérifier s’il contient une preuve admissible à l’appui des motifs d’opposition invoqués par l’opposante dans sa déclaration d’opposition.

 

Selon l’auteur de l’affidavit, l’« opposante » est propriétaire, en Allemagne, de la marque de commerce LUXIS en liaison avec des semelles orthopédiques et non orthopédiques et des produits d’entretien de chaussures depuis au moins 1983. L’auteur de l’affidavit a déposé comme pièce A une copie de ce qui est censé être le certificat d’enregistrement allemand no 1117235 de la marque de commerce LUXIS. L’auteure de l’autre affidavit, Helga Gallé, qui est traductrice et qui affirme comprendre tant l’anglais que l’allemand, a fourni une traduction anglaise de ce document. Les compétences de traductrice de cette dernière n’ont pas été contestées par la requérante. Il semblerait que Marion Frederiksen, l’opposante, et non HFS- Vertrieb Furnituren, soit désignée comme propriétaire de ladite marque de commerce, ce qui ajoute à la confusion entourant l’identité de l’« opposante » dans l’affidavit de Wolfgang Frederiksen. Cet élément de preuve n’aide pas l’opposante pour des raisons qui deviendront évidentes lorsque nous examinerons l’élément de preuve non contredit suivant produit par la requérante relativement au certificat d’enregistrement allemand no 1117235.

 

Une copie du certificat d’enregistrement allemand no 1131227 de la marque de commerce LUXIS en liaison avec des produits d’entretien de chaussures, à l’exclusion des huiles et des graisses, a été jointe comme pièce B à l’affidavit de Wolfgang Frederiksen. Une traduction anglaise de ce document a également été jointe à l’affidavit d’Helga Gallé.

 

Wolfgang Frederiksen affirme dans son affidavit que l’« opposante » est propriétaire de la marque de commerce LUXIS au Canada en raison du fait que la requérante distribue les semelles de chaussures de l’« opposante » aux États-Unis et au Canada sous la marque de commerce LUXIS depuis au moins 1985. Le 19 septembre 1983, il a rencontré, pour le compte de l’« opposante », M. Harvey Rothschild et Mme Ulla Rothschild, représentants de la requérante, dans un restaurant de Wiesbaden, en Allemagne. Lors de cette réunion, il a appris que la requérante désirait utiliser un certain type de semelle dans le cadre de son entreprise de vente par correspondance aux États‑Unis. Il a alors été convenu que l’« opposante » fournirait des semelles à la requérante à des fins de vente sous la marque de commerce LUXIS, et que la requérante détiendrait le droit exclusif de distribuer les semelles LUXIS aux États‑Unis. La requérante commanderait les semelles orthopédiques à l’« opposante », qui exécuterait la commande par l’intermédiaire d’un fabricant local qui apposerait la marque de commerce LUXIS sur les produits à l’aide d’un tampon fourni par l’« opposante ». Après avoir reçu les produits du fabricant, l’« opposante » procéderait à l’emballage des produits et les expédierait à la requérante avec une facture adressée par l’« opposante » à la requérante.

 

Par ces allégations, l’auteur de l’affidavit tente d’établir l’existence d’une entente de distribution entre la requérante et l’« opposante », telle qu’elle est désignée dans ledit affidavit, à l’égard de la vente, au Canada et aux États‑Unis, de semelles orthopédiques en liaison avec la marque de commerce LUXIS. Comme il a été mentionné précédemment, la soi-disant « opposante » nommée dans l’affidavit de Wolfgang Frederiksen est une tierce partie à la présente procédure d’opposition et lesdites allégations, par conséquent, n’étayent aucun des motifs d’opposition énumérés dans la déclaration d’opposition de l’opposante. Quand bien même ces déclarations établiraient l’existence d’une entente de distribution entre la requérante et l’opposante à l’égard de la vente, au Canada et aux États‑Unis, de semelles orthopédiques en liaison avec la marque de commerce LUXIS, la requérante conteste ces faits dans sa preuve par affidavit; je trancherai donc cette question lors de l’examen de la preuve de la requérante auquel je procéderai plus loin.

 

Une lettre en date du 21 juin 1985, adressée par la requérante à HFS- Vertrieb Furnituren, a été jointe comme pièce C à l’affidavit de Wolfgang Frederiksen, et une traduction de cette lettre en anglais a été jointe comme pièce C à l’affidavit de Helga Gallé. Cette lettre avait pour but de confirmer une commande de 17 800 semelles LUXIS passée par la requérante en août 1985. Il n’existe toutefois aucune preuve valable concernant la relation entre l’opposante et HFS- Vertrieb Furnituren, et cet élément de preuve ne peut donc servir à étayer l’un quelconque des motifs d’opposition invoqués dans le cadre de la présente procédure, y compris la date de premier emploi de la marque LUXIS au Canada alléguée par l’opposante.

 

La dernière pièce jointe à l’affidavit de Wolfgang Frederiksen est une copie d’une facture datée du 27 août 1985 adressée par HFS- Vertrieb Furnituren à la requérante concernant des semelles LUXIS expédiées le 27 août 1985. Une traduction anglaise de cette facture est également jointe à l’affidavit de Helga Gallé.

M. Wolfgang Frederiksen allègue que plus de 800 000 paires de semelles portant la marque de commerce LUXIS ont été vendues par l’« opposante » à la requérante entre le 27 août 1985 et le 19 mai 1995, et que ces produits ont été revendus par la requérante aux États‑Unis et au Canada. Si le terme « opposante » désigne Marion Frederiksen, une telle déclaration constitue une preuve par ouï-dire. Par contre, si ce terme désigne HFS- Vertrieb Furnituren, alors rien ne prouve que l’opposante a accordé une licence à cette entité à l’égard de la marque de commerce LUXIS. Ces allégations n’aident donc pas l’opposante à étayer l’un quelconque de ses motifs d’opposition.

 

M. Wolfgang Frederiksen allègue que Harvey et Ulla Rothschild ont pris leur retraite au début de 1996, que Peter Rothschild a pris en charge toutes les activités commerciales de l’entreprise de la requérante et que les ententes commerciales décrites ci-dessus, conclues entre la requérante et l’« opposante », ont pris fin en 1996. Enfin, M. Wolfgang Frederiksen affirme que l’« opposante » a l’intention d’employer la marque de commerce LUXIS au Canada en liaison avec des semelles orthopédiques, et que cette dernière est le propriétaire légitime de la marque au Canada. L’auteur de l’affidavit admet que la requérante a bel et bien employé la marque de commerce au Canada et aux États‑Unis, mais qu’elle l’a fait en vertu de l’entente de distribution dont les modalités ont été exposées ci-dessus, et donc au profit de l’opposante.

 

La retraite de Harvey et de Ulla Rothschild n’est pas pertinente en l’espèce. Ici encore, si le terme « opposante » désigne Marion Frederiksen, la seule personne désignée comme opposante en l’espèce, les allégations concernant les intentions de celle-ci à l’égard de l’emploi au Canada de la marque de commerce constituent une preuve par ouï-dire. Si, par contre, le terme désigne HFS- Vertrieb Furnituren, ces allégations ne sont pas pertinentes parce qu’elles représentent l’intention d’une tierce partie à la présente procédure.

 

L’analyse de la preuve produite pour le compte de l’opposante ne nous laisse aucun autre choix que de conclure que l’opposante n’a pas réussi à s’acquitter de son fardeau initial en ce qui a trait à : son emploi antérieur de la marque de commerce LUXIS au Canada, l’absence d’emploi au Canada de la marque de commerce LUXIS par la requérante en liaison avec les marchandises visées par la demande à compter de la date de premier emploi alléguée ou l’existence d’une relation entre la requérante et l’opposante selon laquelle la première agirait comme distributrice des produits LUXIS de la dernière au Canada. Vu cette conclusion, la question du caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement est demandé ne doit pas être examinée. Je rejette donc le premier motif et les motifs trois à six invoqués par l’opposante dans sa déclaration d’opposition. Je devrai ensuite me pencher sur le deuxième motif d’opposition.

 

Je dois néanmoins examiner une partie de la preuve de la requérante, particulièrement celle qui se rapporte à la propriété du certificat d’enregistrement allemand no 1117235 de la marque de commerce LUXIS et à la relation existant entre la requérante et l’opposante, en supposant que la preuve de l’opposante soit suffisante pour la décharger de son fardeau initial, puisque ces questions sont à la base des motifs d’opposition invoqués par l’opposante.

 

Dans son affidavit, Peter Guy Rothschild (Peter) déclare qu’il est le président de la requérante depuis le 15 janvier 1988, et qu’il a d’abord été son vice-président à compter du 7 octobre 1975. Il explique que la requérante a commencé à développer des produits de soutien pour les pieds en 1972. En 1982-1983, la requérante a voulu mettre sur le marché un produit de soutien pour les pieds à prix abordable. En 1983 ou vers le milieu de 1983, la requérante s’est mise à chercher, en Allemagne, un fabricant d’un tel produit. Des discussions ont eu lieu avec HFS-Vertrieb, (HFS) par l’intermédiaire de M. Frederiksen. Après que M. Frederiksen eût affirmé avoir trouvé le fabricant que la requérante cherchait, une entente a été conclue avec M. Frederiksen, selon laquelle une commission de DM 0.50 allait lui être versée pour chaque unité produite par le fabricant pendant qu’il agissait comme agent manufacturier. À l’appui de cette allégation, la requérante a joint comme pièce E à l’affidavit de Peter la copie d’une lettre de HFS à la requérante datée du 5 juin 1995, dans laquelle il est écrit ce qui suit : [traduction] « … j’accepte vos excuses! Mais un agent doit savoir ce qui se passe! ». En outre, on peut lire dans cette lettre que : [traduction] « Ce serait bien de pouvoir travailler avec vous en vertu d’un mandat, et faites-moi savoir ce que nous devons faire pour vous. » Enfin, la requérante se fonde également sur l’extrait suivant : [traduction] « Vous m’avez offert une commission de DM 0.15 pour Luxis et de DM 0.23. »

 

La requérante a également joint comme pièce F à l’affidavit de Peter la copie d’une lettre datée du 27 mars 1995 de HFS/Wolfgang Frederiksen à la requérante dans laquelle on peut lire ce qui suit :

 

[traduction] « Depuis qu’elle travaille avec Featherspring, HFS agit à titre d’agent indépendant, avec toutes les responsabilités que cela comporte. Ces responsabilités comprennent notamment le risque financier complet lié au fabricant… Assumer des responsabilités et partager le risque financier font partie du rôle joué par un agent en Allemagne… Par conséquent, je ne peux comprendre votre raisonnement selon lequel je devrais toucher une commission de 6 % seulement! Nous recevons nos produits du fabricant au prix du fabricant, et nous percevons une commission appropriée pour tout bon agent ici en Allemagne. »

 

Il est évident que la requérante compte sur ces extraits pour établir le fait que HFS agissait à titre d’agent manufacturier local en Allemagne à l’égard de la production dans ce pays des semelles achetées par elle. Même si cette correspondance date de 1995, on constate en la lisant que HFS essayait de renégocier les modalités financières du mandat conclu dans le passé avec la requérante.

 

Pour établir davantage le fait que la requérante était la personne ayant droit à l’enregistrement de la marque de commerce LUXIS en liaison avec des semelles de chaussures, on a joint comme pièce 1 à l’affidavit de Sabine Barbel Simons (Sabine), une traductrice de l’allemand vers l’anglais, une copie de la traduction anglaise d’une décision rendue le 4 mars 1999 dans l’affaire Featherspring International Corporation v. Marion Frederiksen and Wolfgang Frederiksen par un tribunal local allemand, qui a statué que la requérante avait droit à la propriété de la marque de commerce allemande LUXIS, visée par le certificat d’enregistrement no 1117235, et qui a ordonné à M. et Mme Frederiksen de transférer ladite propriété à la requérante. On a également joint comme pièce 2 à l’affidavit de Sabine la décision rendue le 19 octobre 1999 par un tribunal local allemand de juridiction supérieure, qui a confirmé la décision du tribunal de juridiction inférieure. Enfin, on a joint comme pièce 3 à l’affidavit de Sabine la traduction anglaise d’un document émis par le bureau des brevets et des marques de commerce allemand, daté du 28 février 2000, confirmant le transfert du certificat d’enregistrement no 1117235 à la requérante.

 

La requérante semble être propriétaire du certificat d’enregistrement allemand no 1117235, tel qu’il appert de la pièce 3 jointe à l’affidavit de Sabine. Par conséquent, l’opposante ne peut plus compter sur ce document pour étayer son deuxième motif d’opposition. De plus, les admissions contenues dans la correspondance produite par la requérante, et montrées ci-dessus, contredisent la position adoptée par l’opposante dans ses troisième et cinquième motifs d’opposition mentionnés ci-dessus. Aucun emploi par la requérante de la marque de commerce LUXIS au Canada n’a pu profiter à l’opposante vu ma conclusion que la preuve produite par la requérante établit clairement que l’opposante et/ou HFS agissaient à titre d’agent manufacturier local pour la requérante en Allemagne (voir National Brands Ltd. c. Tropika Canada Inc, 87 C.P.R. (3d) 150 (C.O.M.C.). S’il y a eu un quelconque emploi de la marque de commerce LUXIS au Canada par l’opposante, cet emploi ne saurait constituer un emploi légitime permettant à celle-ci d’avoir priorité sur la requérante (voir McCabe c. Yamamoto & Co.(America) Inc. et al,. 23 C.P.R. (3d) 498). Par conséquent, les premier, deuxième, troisième et cinquième motifs d’opposition sont rejetés. Vu ces conclusions, il n’est plus nécessaire d’examiner les questions de la confusion ou du caractère distinctif, telles qu’elles ont été énoncées dans les motifs quatre et six de la déclaration d’opposition de l’opposante, qui sont également rejetés.

 

Par le pouvoir que m’a délégué le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette l’opposition de l’opposante en application du paragraphe 38(8) de ladite Loi.

 

FAIT À MONTRÉAL (QUÉBEC), CE 4e JOUR DE JUILLET 2003.

 

 

Jean Carrière

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

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