Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2011 COMC 97

Date de la décision : 2011-06-22

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION PRODUITE PAR Ezaki Glico Kabushiki Kaisha qui exerce également ses activités sous le nom commercial Ezaki Glico Co., Ltd. à l’encontre de la demande d’enregistrement n1,137,865 pour la marque de commerce PRET & Design au nom de Pret A Manger (Europe) Limited

 

[1]               Le 18 avril 2002, Pret A Manger (Europe) Limited (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce PRET & Design (la Marque) fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada. La Marque est reproduite ci-dessous :

PRET & Design

 

 

[2]               L’état déclaratif des marchandises et services de la demande se lit actuellement comme suit :

Marchandises :

Viande, poisson, fruits de mer, volaille, gibier et préparations faites des produits susmentionnés, nommément salades préparées, repas et goûters faits de viande, de poisson, de fruits de mer, de volaille et/ou de gibier; fruits et légumes en conserve, cuits et séchés; gelées, confitures, compotes de fruits, conserves; œufs; lait et boissons non alcoolisées à base de lait; huiles et graisses alimentaires; salades de fruits; extraits de viande et de légumes; noix; repas et goûters préparés et cuits, nommément baguettes et baguettes fourrées; yogourts; boissons au yogourt; salades; croustilles; soupes; café; thé; cacao; sucre; céréales; farine, barres aux céréales, crêpes et maïs éclaté; pain; bretzels; pâte à tarte; gâteaux; brioches; biscuits à levure chimique; pâtisseries; biscuits; muffins; croissants; beignes; carrés au chocolat; couscous; riz; tapioca; sagou; confiseries, nommément chocolat et bonbons; glaces et crème glacée; miel, mélasse; sel; moutarde; vinaigre; sauces (condiments); vinaigrettes; épices; mayonnaise; pâtes alimentaires; pâtisseries et tartes; sandwiches; sandwiches roulés; crèmes-desserts; sushi; tartelettes; bière; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcoolisées, nommément jus de légumes sans alcool, laits frappés au yogourt et boissons gazeuses à base de fruits; boissons aux fruits et jus de fruits non alcoolisés; sirops.

 

Services :
Transport, emballage, entreposage et livraison d’aliments et de boissons; transport et livraison d’aliments et de boissons commandés par l’intermédiaire d’un réseau informatique mondial ou par des moyens de télécommunication; fourniture d’aliments et de boissons, nommément restaurants en libre-service, restaurants, cafés, cafétérias, cantines et services de traiteur; fourniture de services de commande de repas de restaurant en ligne et de services de livraison à domicile ou au bureau au moyen d’un réseau informatique mondial; fourniture de services de traiteur en ligne au moyen d’une base de données informatisées ou d’un réseau informatique mondial; fourniture d’information ayant trait à des services de restauration et de traiteur; fourniture de services d’information ayant trait à des services de restauration et de traiteur au moyen d’une base de données informatisées ou d’un réseau informatique mondial; fourniture d’un site virtuel contenant du texte et des images et offrant des services de commerce électronique et de commande dans le domaine des services de restauration et de traiteur.

[3]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 17 décembre 2003.

[4]               Le 4 février 2004, Ezaki Glico Kabushiki Kaisha exerçant également ses activités sous le nom commercial Ezaki Glico Co., Ltd. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition. La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante.

[5]               À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit les affidavits de Kentaro Okabe (directeur général de la division du commerce mondial de l’Opposante) et de Mary E. Talbot (secrétaire au service des agents représentant l’Opposante).

[6]               À l’appui de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de Khadija Mahmood (avocat à l’emploi des agents représentant la Requérante) et de Clive Schlee (présidente-directrice générale de la Requérante).

[7]               En contre-preuve, l’Opposante a produit un deuxième affidavit de Mary E. Talbot. La Requérante a contesté l’admissibilité de cet affidavit, mais je ne vois pas l’utilité de trancher cette contestation étant donné que j’estime que le deuxième affidavit Talbot, s’il était admissible, n’influencerait pas l’issue de l’instance.

[8]               Les deux parties ont déposé un plaidoyer écrit. La Requérante a obtenu par la suite l’autorisation de produire une preuve supplémentaire, à savoir l’affidavit de Cecilia Oliveira (secrétaire à l’emploi des agents représentant la Requérante). L’Opposante a contre-interrogé Mme Oliveira au sujet de son affidavit et une copie de la transcription du contre-interrogatoire a été versée au dossier. L’Opposante a ensuite obtenu l’autorisation de produire une preuve supplémentaire, à savoir l’affidavit de Carla Edwards (secrétaire à l’emploi des agents représentant l’Opposante), ainsi qu'une plaidoirie écrite supplémentaire.

[9]               Les deux parties ont participé à l’audience.

Résumé des motifs d’opposition et dates pertinentes applicables

[10]           Les motifs d’opposition invoqués par l’Opposante aux termes de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), sont résumés ci-dessous :

                                i.                  Contrairement à l’article 30 :

a)      La Requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer et d’enregistrer la Marque compte tenu de l’emploi et de l’enregistrement antérieurs des marques de commerce PRETZ et GIANT PRETZ par l’Opposante;

b)      La demande ne contient pas un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises et services en liaison avec lesquels la Marque sera employée;

c)      La Requérante n’a pas l’intention d’utiliser la Marque en liaison avec l'ensemble des marchandises et services décrits dans la demande;

                              ii.                  contrairement à l’alinéa 12(1)d), la Marque crée de la confusion avec les marques déposées de l’Opposante, à savoir PRETZ enregistrement nLMC301,548 et GIANT PRETZ enregistrement nLMC506,696;

                            iii.                  contrairement à l’article 16, à la date de la production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce déjà employées et révélées au Canada par l’Opposante, à savoir PRETZ qui a déjà été employée ou révélée depuis au moins le 24 avril 1984 en liaison avec des gressins et GIANT PRETZ, marque déjà employée ou révélée depuis au moins le 31 décembre 1998 en liaison avec des biscuits et des gressins;

                            iv.                  contrairement à l’article 2, la Marque ne distingue pas véritablement les marchandises et services de la Requérante des marchandises et services des autres et n’est pas adaptée de façon à les distinguer, en particulier pour les gressins, biscuits et gressins vendus par l’Opposante au Canada en liaison avec les marques PRETZ et GIANT PRETZ.

[11]           Les dates pertinentes à l’égard des motifs d’opposition sont les suivantes :

-    article 30 – la date de la production de la demande [Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la p.  475];

 

-    alinéa 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

 

-    article 16 – la date de la production de la demande [par. 16(3)];

 

-    article 2 – la date de la production de l’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Fardeau de la preuve

[12]           La Requérante doit s’acquitter du fardeau légal d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante doit toutefois s’acquitter du fardeau initial de présenter des preuves admissibles suffisantes à partir desquelles dont on puisse raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la p. 298].

Motifs d’opposition de l’article 30

[13]           L’Opposante n’a pas présenté de preuve ni d’argument à l’appui des motifs d’opposition fondés sur l’article 30. Je les rejette donc pour le motif que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial à l’égard de ces motifs.

Probabilité de confusion

[14]           La principale question en litige dans la présente instance est celle de savoir si la Marque crée de la confusion avec les marques de l’Opposante PRETZ et GIANT PRETZ.

[15]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir vague. Le paragraphe 6(2) de la Loi dispose que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[16]           Pour appliquer le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris de celles qui sont expressément énumérées au par. 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chacune des marques a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer à ces facteurs la même importance. [Voir, en général, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.).]

[17]           J’estime que le plus solide motif d’opposition de l’Opposante est celui qui est fondé sur l’alinéa 12(1)d), selon lequel la Marque crée de la confusion avec la marque déposée PRETZ. Je vais donc commencer par analyser la probabilité de confusion entre PRET & Design et PRETZ. L’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial puisque l’enregistrement de PRETZ, nLMC301,548, est valide. Les marchandises mentionnées dans cet enregistrement sont des « gressins ».

Alinéa 6(5)a) - Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[18]           Les deux marques possèdent un certain caractère distinctif inhérent.

[19]           Cependant, l’élément verbal de la Marque de la Requérante suggère, en français, la restauration rapide. Mme Mahmood a fourni des définitions d’un dictionnaire français-anglais qui montrent que « prêt » se traduit en anglais par « ready », « willing », « prepared », alors que M. Schlee affirme que la Marque dérive d'une autre marque qu’utilise la Requérante, PRET A MANGER, ce qui veut dire, d’après M. Schlee, « ready to eat » en anglais.

[20]           Le mot PRETZ n’est pas un mot français ni anglais, bien qu'il puisse être considéré comme la première partie du mot « pretzel » lorsqu’on l'examine en liaison avec les marchandises de l’Opposante. Les marchandises de l’Opposante, comme le montrent les pièces jointes à l’affidavit de M. Okabe, semblent être visées par la définition de « pretzel », à savoir un biscuit salé croustillant en forme de nœud ou de bâtonnet [Oxford Canadian Dictionary]. Je note également que l’Opposante énonce au paragraphe 7.15 de son plaidoyer écrit que ses [traduction] « marques de commerce suggèrent un produit ‘semblable à un pretzel. »

[21]           Il n’existe pas de preuve indiquant que la Marque de la Requérante ait été utilisée ou promue au Canada jusqu’ici. Par contre, il existe des preuves montrant que la marque PRETZ de l’Opposante a été employée au Canada depuis au moins le 24 avril 1984. M. Okabe a fourni des chiffres d’affaires annuels canadiens pour les gressins PRETZ de 1995 à 2004; le total s’élève à plus de quatre millions de dollars. M. Okabe énonce également que la marque PRETZ a fait l’objet d’une promotion de façon continue au Canada depuis 1984, mais les seules promotions auxquelles il ait fait expressément référence sont celles qui se trouvent sur les sites Web de l’Opposante et de quatre distributeurs en ligne (pièces A1-A4 et B).

[22]           Dans l’ensemble, l’alinéa 6(5)a) est favorable à l’Opposante.

Alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle chacune des marques de commerce a été en usage

[23]           Ce facteur favorise également manifestement l’Opposante.

Alinéas 6(5)c) et d) – La nature des marchandises, des services et du commerce

[24]           Lorsqu’on examine les marchandises, les services et le commerce des parties, c’est l’état déclaratif des marchandises et des services figurant dans la demande ou l’enregistrement de la marque de commerce des parties qui s’applique à la question de la confusion susceptible d'être soulevée aux termes de l’alinéa 12(1)d) [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc. (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (C.A.F.); Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.); Miss Universe Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.)]. Il convient toutefois d’examiner ces états déclaratifs dans le but de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce que les parties ont l’intention d’exploiter plutôt que tous les commerces possibles que pourrait recouvrir la formulation choisie. Sur ce point, les preuves concernant les véritables activités commerciales des parties sont utiles, en particulier lorsqu’il existe une ambigüité au sujet des marchandises ou des services visés par la demande ou l’enregistrement en cause [McDonald's Corp. c. Coffee Hut Stores Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.); Procter & Gamble Inc. c. Hunter Packaging Ltd. (1999), 2 C.P.R. (4th) 266 (C.O.M.C.); American Optical Corp. c. Alcon Pharmaceuticals Ltd. (2000), 5 C.P.R. (4th) 110 (C.O.M.C.)].

[25]           M. Okabe déclare que l’Opposante est un fabricant et grossiste de confiserie, glaces, aliments transformés, boissons gazeuses et collations (paragraphe 10). L’emploi de la marque PRETZ semble toutefois être limitée aux gressins et petits pains, qui sont vendus préemballés dans des boîtes de deux grandeurs, 70 g et 248 g. Les gressins PRETZ sont vendus au Canada dans les gros supermarchés comme Loblaws, Sobeys et IGA, ainsi que dans un grand nombre d’épiceries asiatiques. Les gressins PRETZ peuvent également être achetés en ligne. Les emballages et les documents de promotion fournis montrent que les gressins sont vendus en diverses saveurs, y compris sirop d’érable, pizza, gâteau au miel, fromage et pommes de terre, salade, moutarde au miel, œufs de morue, et tomates et salade. Les marchandises sont qualifiées sur un site Web de « collations japonaises » (pièce A1).

[26]           M. Schlee affirme que la Requérante est établie à Londres en Angleterre, aux fins de fournir au public des sandwiches préparées de très haute qualité et confectionnées uniquement à partir de produits naturels sans, ou avec très peu, d’agents de conservation. » La Requérante possède des magasins aux États-Unis, à New York et à Hong Kong et M. Schlee affirme que ces magasins visent principalement le commerce des repas du midi dans les villes. La majorité des sandwiches sont achetés pour emporter, même si, en général, les propriétaires des magasins autorisent les clients à consommer leur nourriture sur place. Les documents présentés montrent que les magasins que la Requérante exploite à l’étranger ne vendent pas uniquement des sandwiches, et qu’ils vendent également, par exemple, des sushis, des salades, des pâtes alimentaires, des gâteaux et du café.

[27]           M. Okabe affirme également que les services de la Requérante se sont étendus au-delà des sandwicheries, et qu’ils comprennent des services de livraison dans les sociétés et à domicile, et qu’ils prennent également des commandes de livraison en ligne.

[28]           Il existe manifestement un chevauchement entre les marchandises des parties. Je note toutefois l’observation suivante que formule la Requérante au paragraphe 36 de son plaidoyer écrit :

[traduction]
Les marchandises et services essentiels de la Requérante sont les sandwiches et l’exploitation de magasins de détail et en ligne où l'on vend des sandwiches et des boissons. Ces marchandises et services – ainsi que les marchandises figurant dans la demande, à l’exception des produits de boulangerie – diffèrent sensiblement des gressins, biscuits et bâtonnets. Habituellement, les sandwiches sont consommés comme un repas plutôt que comme collation. Ils sont préparés à la main et ne sont pas cuits au four. Les sandwiches sont préparés en combinant différents types d’aliments (p. ex., pain, viande, légumes et tartinades).

[29]           Je ne souscris pas nécessairement à tout ce que contient l’observation précédente, mais il me semble que la Requérante a admis que les produits de boulangerie figurant dans sa demande ne sont pas très différents des marchandises de l’Opposante. J’estime que les produits de boulangerie mentionnés dans la demande sont assez semblables aux marchandises de l’Opposante : baguettes; pain; pretzels; petits pains; biscuits; gâteaux secs.

[30]           Pour ce qui est des autres marchandises, je note les commentaires suivants du membre Flewelling dans Level Ground Trading Ltd. c. San Miguel Corporation 2011 COMC 39, au par. 31 :

Même si l’on devait conclure que les marchandises de l’Opposante sont des « produits alimentaires », le simple fait que les marchandises et services des parties puissent tous appartenir à la catégorie générale des « produits alimentaires » ne permettrait pas d’affirmer que les marchandises des parties sont semblables [voir par exemple Clorox Co. c. Sears Canada Inc. (1992), 41 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.), et Tradition Fine Foods Ltd. c. Groupe Tradition'l Inc., 2006 CF 858 (C.F.)].

[31]           L’alinéa 6(5)c) est donc favorable à l’Opposante pour ce qui est d’une partie des marchandises.

[32]           Il existe également un risque de chevauchement entre les voies de commercialisation des marchandises des parties. Même si la Requérante ne semble pas vendre ses marchandises dans les épiceries, l’état déclaratif des marchandises figurant dans sa demande n’exclut pas que ses marchandises soient vendues par le biais de ces voies de commercialisation. [Voir Cartier Men's Shops Ltd. c. Cartier Inc. (1981), 58 C.P.R. (2d) 68 (C.F. 1re inst.) à la p. 73; Eminence S.A. c. Registraire des marques de commerce (1977), 39 C.P.R. (2d) 40 (C.F. 1re inst.), à la p. 43.]

[33]           L’alinéa 6(5)d) avantage donc l’Opposante.

Alinéa 6(5)e) – Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[34]           « Même s’il est vrai que les marques ne doivent pas être scindées lorsqu’il s’agit de se prononcer sur des questions de confusion, il a été jugé que la première partie d’une marque de commerce est celle qui est la plus pertinente lorsqu’il s’agit de se prononcer sur son caractère distinctif. » [K-Tel International Ltd. c. Interwood Marketing Ltd. (1997), 77 C.P.R. (3d) 523 (C.F. 1re inst.), à la p. 527]

[35]           L’aspect dessin de la Marque de la Requérante peut la distinguer des autres marques sur le plan de la présentation. Il existe toutefois un fort degré de ressemblance entre PRET & Design et PRETZ dans le son. Lorsque le mot est prononcé, un anglophone pourrait penser que PRETZ est le pluriel de PRET. Pour ce qui est des idées suggérées, le degré de ressemblance entre les marques varie selon la langue utilisée par le consommateur ciblé; un francophone sait que PRET est un mot qui figure dans le dictionnaire, alors qu’un anglophone pourrait penser que les mots PRET et PRETZ sont inventés.

[36]           Dans l’ensemble, l’alinéa 6(5)e) favorise l’Opposante.

Les circonstances de l’espèce

i) L’état de l’enregistrement / du marché

[37]           Les preuves relatives à l’état du registre ne sont pertinentes que dans la mesure où l’on peut en tirer des inférences au sujet de l’état du marché, et les inférences au sujet de l’état du marché ne peuvent être tirées que lorsqu’on y retrouve un grand nombre d’enregistrements pertinents. [Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)]

[38]           Mme Mahmood, une avocate à l’emploi des agents de la Requérante, a fourni des données sur les marques actives du registre contenant le mot « PRET » en liaison avec des produits alimentaires. Étant donné qu’elle n’a trouvé que deux marques enregistrées par des tiers (BIEN LAVE ET TOTALEMENT PRET A MANGER et PRETZELMAKER & Design), les résultats de sa recherche ne permettent pas de faire des déductions au sujet de l’état du marché.

[39]           Mme Oliveira et Mme Edwards ont fourni des preuves supplémentaires sur l’état du registre. L’Opposante soutient que le témoignage de Mme Oliveira contient des lacunes, mais il n’est pas nécessaire d’examiner ces objections parce que l’Opposante a, par l’intermédiaire de Mme Edwards, présenté une version mise à jour des preuves jointes initialement à l’affidavit de Mme Oliveira.

[40]           L’affidavit d’Edwards fournit des données sur les 20 enregistrements de marque de commerce existant. Chacune de ces marques comprend le mot PRET, mais dans 15 d’entre elles, PRET apparaît comme une partie du mot PRETZEL, ce qui a pour effet de rendre ces marques très différentes de celles qui sont en litige ici. Les cinq dernières marques sont PRET POUR LA COURSE, PRETZIES, TIC PRETESTED, PRET A CREER et MULTI-PRETS. Même si je regroupe les marques présentées par Mme Edwards et Mme Mahmood, il n’existe pas suffisamment de marques déposées pertinentes pour pouvoir faire des déductions utiles au sujet de l’état du marché.

ii) Coexistence à l’étranger

[41]           Les deux parties ont enregistré leurs marques dans divers pays étrangers, mais il n’y a pas lieu d’accorder une grande force probante au fait que les marques de commerce coexistent dans des registres étrangers [Quantum Instruments, Inc. c. Elinca S.A. (1995), 60 C.P.R. (3d) 264 (C.O.M.C.), aux p. 268 et 269]. « […] il y a peu à tirer du fait que les marques de commerce en question coexistent dans d’autres juridictions, puisque la décision du registraire doit se fonder sur les normes canadiennes et eu égard à la situation au Canada. » [Vivat Holdings Ltd. c. Levi Strauss & Co. (2005), 41 C.P.R. (4th) 8 (C.F.), au par. 65]

iii) Erreur de frappe

[42]           Mme Mahmood soutient au paragraphe 6 :

            [traduction] 6. Sur le clavier standard QWERTY, les lettres « P », « R », « E »,             « T »,   sont réparties sur la première rangée des lettres. La lettre « Z » est la première lettre       située à l’extrême gauche de la troisième rangée, ce qui réduit la possibilité qu’une   personne commette une erreur de frappe, soit en omettant, soit en ajoutant la lettre « Z »        lorsqu’elle tape le mot « PRET ».

 

[43]           Il est évident que l’argument précédent n’a aucune influence sur l’issue de la présente instance, à savoir si l’utilisation des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises ou les services liés à ces marques sont fabriqués, vendus ou donnés à bail ou loués ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne.

Conclusion au sujet du motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) pour l’enregistrement nLMC301,548

[44]           Après examen de l'ensemble des circonstances de l’espèce, j’estime que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime pour certains produits de boulangerie qui se chevauchent, à savoir les baguettes, le pain, les pretzels, les petits pains, les biscuits, les gâteaux secs. J’arrive à cette conclusion en raison des similitudes entre les marques, du chevauchement de ces marchandises et des voies de commercialisation potentielles et du fait que seule la marque de l’Opposante a acquis un caractère distinctif au Canada. Toutefois, pour ce qui est des autres marchandises et services mentionnés dans la demande, j’ai conclu qu’il n’y a pas de probabilité de confusion, parce que la marque de l’Opposante n’a pas acquis une réputation au-delà de ses gressins et bâtonnets, qui diffèrent de façon significative des services ainsi que des marchandises suivantes de la Requérante :

Viande, poisson, fruits de mer, volaille, gibier et préparations faites des produits susmentionnés, nommément salades préparées, repas et goûters faits de viande, de poisson, de fruits de mer, de volaille et/ou de gibier; fruits et légumes en conserve, cuits et séchés; gelées, confitures, compotes de fruits, conserves; œufs; lait et boissons non alcoolisées à base de lait; huiles et graisses alimentaires; salades de fruits; extraits de viande et de légumes; noix; repas et goûters préparés et cuits, nommément baguettes et baguettes fourrées; yogourts; boissons au yogourt; salades; croustilles; soupes; café; thé; cacao; sucre; céréales; farine, barres aux céréales, crêpes et maïs éclaté; pain; bretzels; pâte à tarte; gâteaux; brioches; biscuits à levure chimique; pâtisseries; biscuits; muffins; croissants; beignes; carrés au chocolat; couscous; riz; tapioca; sagou; confiseries, nommément chocolat et bonbons; glaces et crème glacée; miel, mélasse; sel; moutarde; vinaigre; sauces (condiments); vinaigrettes; épices; mayonnaise; pâtes alimentaires; pâtisseries et tartes; sandwiches; sandwiches roulés; crèmes-desserts; sushi; tartelettes; bière; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcoolisées, nommément jus de légumes sans alcool, laits frappés au yogourt et boissons gazeuses à base de fruits; boissons aux fruits et jus de fruits non alcoolisés; sirops.

[45]           Les preuves de l’Opposante n’ont pas démontré que sa marque avait droit à une protection qui s’étende largement au-delà du type de marchandises particulier pour lequel elle a été employée. Le motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) n’est retenu que dans la mesure décrite ci‑dessus.

Le motif d’opposition de l’article 16 fondé sur l’emploi antérieur de PRETZ

[46]           L’Opposante a également soutenu que PRET & Design crée de la confusion avec PRETZ aux termes de l’alinéa 16(3)a) de la Loi. L’appréciation de ce motif d’opposition diffère du motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) dans la mesure où la date pertinente aux termes du par. 16(3) est la date de la production de la demande de la Requérante. Même si cette date est antérieure de près de huit ans à la date d’aujourd’hui, la différence de date n’entraîne pas un résultat différent. Après tout, le seul changement intervenu dans les circonstances de l’espèce à cette date est le montant des ventes canadiennes de marchandises PRETZ; même si le chiffre d’affaires total de l’Opposante était d’environ un million de dollars il y a moins de huit ans, l’alinéa 6(5)a) favorise tout de même l’Opposante.

[47]           Par conséquent, dans la mesure où elle est fondée sur l’emploi antérieur de PRETZ par l’Opposante, le motif fondé sur l’alinéa 16(3)a) entraîne le même résultat favorable que celui qui est fondé sur l’alinéa 12(1)d).

Autres motifs d’opposition

[48]           Je ne vais pas analyser les autres motifs d’opposition en détail, parce qu’ils ne favorisent pas l’Opposante davantage que les deux motifs pour lesquels elle a déjà obtenu en partie gain de cause. En particulier, la position de l’Opposante fondée sur sa marque de commerce GIANT PRETZ est moins solide que sa position fondée sur la marque de commerce PRETZ, en raison du fait que PRET & Design ressemble davantage à PRETZ qu’à GIANT PRETZ.

Décision

[49]           En vertu de l’autorité que me confère le par. 63(3) de la Loi, je repousse la demande pour ce qui est des marchandises « baguettes, pain, pretzels, petits pains, biscuits, gâteaux secs », et je rejette l’opposition pour ce qui est des autres marchandises et services aux termes du par. 38(8) de la Loi [voir Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 C.P.R. (3d) 482 (C.F. 1re inst.), autorité jurisprudentielle en matière de décision accordant gain de cause en partie seulement].

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Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

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