Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION DE The Lamson & Sessions Co. à la demande no 1,094,353 relative à la marque de commerce Junction Box Design (bleu) au nom de Royal Group, Inc.___        

 

 

Le 28 février 2001, Royal Group Technologies Limited, faisant affaire sous le nom de Royal Pipe Company, a déposé une demande en vue de l’enregistrement de la marque de commerce Junction Box Design (bleu) [la « Marque »]. La marque, illustrée par le dessin ci-dessous, consiste en la couleur bleue sur la plaque avant d’une boîte de connexion. La partie hachurée du dessin est de couleur bleue.

 

JUNCTION BOX DESIGN

                       

 

La demande est fondée sur un emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec des boîtes de jonction électriques.

 

La demande est actuellement au nom de Royal Group, Inc., et le terme « Requérante » sera employé pour désigner à la fois Royal Group Technologies Limited faisant affaire sous le nom de Royal Pipe Company et Royal Group, Inc.

 

La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 14 janvier 2004. Le 14 juin 2004, The Lamson & Sessions Co. [« l’Opposante »] a produit une déclaration d’opposition. Les motifs d’opposition sont résumés ci-dessous :

 

1.                       La demande ne satisfait pas aux exigences de l’al. 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 [la « Loi »] en ce que la Requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle a le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec ses marchandises pour tous les motifs énoncés dans la déclaration d’opposition.

 

2.                       La Marque n’est pas enregistrable en raison de l’al. 12(1)d) de la Loi parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce enregistrée Pipe Design, LMC 392,859, de l’Opposante.

 

3.                       La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en raison du par. 16(3) de la Loi parce qu’à la date de dépôt de la demande, la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce enregistrée Pipe Design et la marque de commerce Box Design (bleu) de l’Opposante [collectivement « les marques de commerce de l’Opposante »], lesquelles avaient toutes deux été employées antérieurement au Canada par l’Opposante en liaison avec [traduction] « des tubes en plastique utilisés pour contenir des conducteurs dans des systèmes électriques installés par des entrepreneurs ».

 

4.                       La Marque de la Requérante n’est pas distinctive parce qu’elle ne distingue pas véritablement ni n’est adaptée à distinguer ainsi les marchandises de la Requérante des marchandises et services d’autres propriétaires, y compris les marchandises de l’Opposante parce qu’elle crée de la confusion avec chacune des marques de l’Opposante.

 

 


La marque enregistrée Pipe Design invoquée par l’Opposante est illustrée ci-dessous :

 

PIPE DESIGN

Le dessin est hachuré pour représenter la couleur bleue, et l’enregistrement énonce [traduction] « La représentation des marchandises illustrées en pointillé ne fait pas partie de la marque de commerce ». L’enregistrement a été délivré en 1992 sur le fondement de l’emploi et de l’enregistrement de la marque aux États-Unis d’Amérique en liaison avec des tubes en plastique utilisés pour contenir des conducteurs dans des systèmes électriques installés par des entrepreneurs.

 

Une illustration de la marque Box Design (bleu) de l’Opposante est reproduite plus loin dans mon analyse de l’affidavit de M. Whaley.

 

La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle a nié les allégations de l’Opposante.

 

Au soutien de son opposition, l’Opposante a produit les affidavits de Steven Randall Whaley et Jeffrey Charles Williams. La Requérante a obtenu une ordonnance l’autorisant à contre-interroger M. Whaley, et une copie de la transcription du contre-interrogatoire a été produite.

 

La Requérante a choisi de ne produire aucune preuve.

 

Chaque partie a produit un plaidoyer écrit.

 

La Requérante a d’abord demandé une audience, mais elle a ensuite retiré sa demande.

 

Fardeau de preuve et dates pertinentes

La Requérante a le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi. Cependant, l’Opposante a le fardeau initial de produire une preuve admissible suffisante à partir de laquelle on pourrait raisonnablement conclure que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la p. 298]. 

 

Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         art. 30 – la date du dépôt de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la p. 475];

         al. 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et Le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)]

         par. 16(3) – la date du dépôt de la demande [voir le par. 16(3)];

         absence de caractère distinctif – la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)].

 

Résumé de la preuve
Affidavit de M. Whaley

M. Whaley est le directeur des ventes canadiennes/internationales de la filiale Carlon de l’Opposante. L’Opposante est une société américaine établie de longue date. À l’heure actuelle, elle prétend être [traduction] « un des principaux fabricants en Amérique du Nord de conduits, enveloppes, dispositifs de filage et accessoires en thermoplastique pour les marchés de la construction, de la consommation, de l’électricité et des communications, et de gros tuyaux pour les marchés des eaux usées ». La société compte trois filiales commerciales principales, dont la filiale Carlon est la plus importante. La filiale Carlon [traduction] « fournit des systèmes de canalisation électrique et de télécommunications, des enveloppes non métalliques, des boîtes à prise et de l’équipement électrique aux marchés des infrastructures électriques et de télécommunications ».

 

M. Whaley atteste que l’Opposante [traduction] « a employé une marque de couleur bleue au Canada en liaison avec des tubes électriques non métalliques (ENT), des accessoires ENT, des boîtes ENT et des boîtes Zip (collectivement les “produits bleus”) » et que certains de ces produits bleus ont été offerts pour la première fois au Canada au moins aussi tôt qu’en 1985.

 

M. Whaley cite trois marques de commerce bleues de l’Opposante. La première est la marque Pipe Design (bleu) visée par l’enregistrement no LMC 392,859. La deuxième est la marque Box Design (bleu), dont M. Whaley dit qu’elle a été employée au Canada en liaison avec des boîtes à prise électrique et des pièces depuis au moins 1985. À titre de pièce B, M. Whaley fournit une copie certifiée conforme de la demande de marque de commerce canadienne n1,210,120, dont il dit qu’elle se rapporte à la marque Box Design (bleu). La marque visée par la demande no 1,210,120 est décrite comme la couleur bleue appliquée à toute la surface d’une boîte à prise électrique, conformément à l’illustration ci-dessous :

 

BOX Design

 

M. Whaley cite une troisième marque de commerce bleue de l’Opposante, à savoir la couleur bleue appliquée à toute la surface de tubes en plastique utilisés pour contenir des conducteurs dans des systèmes électriques installés par des entrepreneurs en électricité. Cette marque est visée par la demande no 1,210,120, et elle est illustrée ci-dessous :

 

TUBE Design

 

La déclaration d’opposition mentionnait seulement deux marques de l’Opposante, et je ne parviens pas à discerner de différence entre les première et troisième marques évoquées dans l’affidavit de M. Whaley. J’en conclus donc que, bien que chacune soit l’objet d’une demande ou d’un enregistrement distinct, elles ne constituent qu’une seule et même marque.

 

M. Whaley a fourni des copies des documents suivants :

         Pièce D : échantillons de publicités de Carlon relativement aux produits bleus utilisées par l’Opposante sur le marché canadien;

         Pièce E : une brochure de 1993 relative aux produits Carlon canadiens de l’Opposante qui a été distribuée à tous les clients Carlon de Lamson au Canada;

         Pièce F : une brochure de 1995 relative à des tubes électriques non métalliques Flex‑Plus, équipements et accessoires bleus qui a été distribuée à tous les clients de Carlon au Canada;

         Pièce G : une brochure de 1996 relative à des boîtes d’interrupteur des boîtes de prise bleues non métalliques Zip Box qui a été distribuée à tous les clients de Carlon au Canada;

         Pièce H : un guide des prix canadiens de 1998, qui illustre certains des produits bleus de l’Opposante, notamment ses boîtes à boue (parfois désignées comme des « boîtes de jonction ») de couleur bleue et ses tubes de couleur bleue – le guide des prix a été distribué à tous les clients de Carlon au Canada;

         Pièce I : une brochure de 1999 de tubes électriques, équipements et accessoires non métalliques de Carlon qui a été distribuée à tous les clients de Carlon au Canada;

         Pièce J : un guide des prix canadiens d’accessoires de 2000, qui a été distribué à tous les clients de Carlon au Canada, et qui illustre certains des produits bleus de l’Opposante, notamment ses boîtes à boue de couleur bleue et ses tubes de couleur bleue;

         Pièce K : une brochure de 2001 relative aux Communication Zip Boxes de Carlon qui a été distribuée à tous les clients de Carlon au Canada;

         Pièce L : un manuel d’applications relatives aux tubes électriques non métalliques de Carlon qui a été distribuée à tous les clients de Carlon au Canada;

         Pièce M : une publication de 2004 intitulée « Wiring: Complete Projects for the Home », qui illustre certains des produits bleus non métalliques de Carlon (cependant, il n’est pas prétendu que cette publication aurait été diffusée au Canada);

         Pièce N : des renseignements sur des produits et des brochures de Carlon qui étaient censées être distribuées à ses clients canadiens quelques mois après avril 2005.

 

M. Whaley a produit un tableau exposant des détails relatifs à certaines des annonces des produits bleus de l’Opposante placées dans des publications qui ont été diffusées au Canada en 1999, 2001, 2004 et 2005. Le tableau énumère 5 publications dans lesquelles ont paru des annonces avant le 28 février 2001, au coût total d’environ 20 000 $. Avant le 14 juin 2004, le coût total des annonces était d’environ 137 000 $; en avril 2005, le total était d’environ 195 000 $.

 

M. Whaley a aussi produit un tableau exposant les chiffres de ventes canadiennes de produits bleus de l’Opposante de 1997 au 17 mars 2005, ventilés par mois et par produit. Au 28 février 2001, l’Opposante avait vendu environ 1 721 000 pieds de ses tubes de couleur bleue et 29 095 boîtes de couleur bleue; ces chiffres sont passés respectivement à 4 309 000 et 94 000 au 14 juin 2004, puis à 5 197 736 et 109 356 en mars 2005.

 

 

L’affidavit de M. Williams

M. Williams était stagiaire en droit au cabinet d’avocats qui représente l’Opposante. Il a produit deux livres sur le filage qu’il a achetés à Toronto le 14 mars 2005.

 

Question préliminaire concernant les actes de procédure
Dans son plaidoyer écrit, la Requérante a soutenu qu’étant donné que la déclaration d’opposition ne définit pas la marque Box Design (bleu) de l’Opposante, les motifs d’opposition censés s’appuyer sur une confusion avec quelque marque que ce soit sauf la marque enregistrée Pipe Design (bleu) de l’Opposante devraient être rejetés puisqu’il ne s’agit pas de motifs d’opposition recevables en ce qu’ils ne fournissent pas suffisamment de détails pour permettre à la Requérante d’y répondre.

 

Il m’est difficile d’admettre l’argument de la Requérante, étant donné que, dans les faits, elle a produit une contre-déclaration qui répondait à tous les motifs d’opposition. En outre, la déclaration d’opposition doit être lue conjointement avec la preuve [Novopharm Ltd. c. AstraZeneca AB et al. (2002), 21 C.P.R. (4th) 289 (C.A.F.)], et j’estime qu’il ressort clairement de l’affidavit de M. Whaley que la marque Box Design (bleu) de l’Opposante est la marque illustrée à la pièce B jointe à son affidavit. En conséquence, je ne rejetterai aucun motif pour manque de précision.

 

Motif d’opposition fondé sur le caractère non distinctif eu égard à la marque Box Design (bleu) de l’Opposante

Bien que chacun des motifs se fonde sur la probabilité de confusion entre les marques des parties, je considère que le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif constitue le moyen le plus convaincant de l’Opposante, et j’en traiterai donc en premier lieu. En outre, puisque je considère que la position de l’Opposante est la plus convaincante en ce qui a trait sa marque Box Design (bleu), je concentrerai mon analyse sur la probabilité de confusion entre la Marque de la Requérante et la marque Box Design (bleu) de l’Opposante.

 

Afin de s’acquitter de son fardeau initial relativement à ce motif, l’Opposante n’a qu’à démontrer que sa marque Box Design (bleu) était « connue au moins jusqu’à un certain point » le 14 juin 2004. [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), à la p. 58] J’estime que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial compte tenu de la preuve de promotion de la marque et de vente du produit portant la marque avant la date pertinente. [Voir par exemple le paragraphe 11 de l’affidavit de M. Whaley et la pièce E y jointe.]

 

Le test en matière de confusion

Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi énonce que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

Pour appliquer le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées expressément au par. 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenus connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Une importance égale n’a pas à être attribuée à chacun de ces facteurs énumérés. [Voir, de manière générale, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.).]

 

Al. 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

Les marques composées uniquement de couleurs n’ont pas un caractère distinctif inhérent [voir AstraZeneca AB c. Novopharm Ltd. (2003), 24 C.P.R. (4th) 326 (C.A.F.), au paragraphe 18]. Cependant, toute marque peut acquérir un caractère distinctif par l’emploi et la promotion.

 

Le caractère distinctif inhérent de la Marque de la Requérante est faible, et il n’y a aucun élément de preuve démontrant que cette Marque était devenue connue à la date pertinente du 14 juin 2004.

 

Le caractère distinctif inhérent de la marque de l’Opposante est également faible, mais il y a des éléments de preuve qui démontrent qu’elle avait fait l’objet d’un emploi et de promotion à la date pertinente.

 

Ainsi, le critère de la mesure dans laquelle chacune des marques est devenue connue favorise l’Opposante.

 

Al. 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

Ce facteur favorise clairement l’Opposante puisqu’elle revendique un emploi de sa marque au Canada depuis au moins 1985 et qu’elle a produit des chiffres de ventes de boîtes en liaison avec sa marque depuis 1997. Par contraste, la Requérante a déposé sa demande en 2001 sur le fondement d’un emploi projeté.

 

Al. 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

Dans son affidavit, M. Whaley a attesté que les principaux clients de la filiale Carlon de l’Opposante comprenaient des entrepreneurs en électricité, des distributeurs d’électricité, des fabricants d’équipement original, des services publics d’électricité et des sociétés de câblodistribution, de téléphonie et de télécommunications. Lors de son contre-interrogatoire, M. Whaley a attesté qu’au Canada, l’Opposante et la Requérante se faisaient concurrence en matière de fabrication de boîtes de sol (question 77, contre-interrogatoire de M. Whaley). À la page 20 des documents promotionnels fournis comme pièce N de l’affidavit de M. Whaley, la Marque de la Requérante apparaît dans un tableau intitulé « Competitive Cross Reference ENT Mud Box Assemblies ». M. Whaley a aussi attesté que les boîtes de boue de couleur bleue de l’Opposante était parfois désignées « boîtes de jonction » (paragraphe 20, affidavit de M. Whaley), que les boîtes de sol sont des « boîtes de jonction » (question 32, contre‑interrogatoire de M. Whaley), qu’une boîte de sol ou une boîte à boue est destinée à un usage dans la construction d’un plancher dalle (question 180, contre-interrogatoire de M. Whaley), que les mêmes câbles de filage vont dans une boîte de jonction et une boîte de sol (question 185, contre-interrogatoire de M. Whaley), et qu’une boîte de jonction peut être utilisée dans du béton (question 189, contre-interrogatoire de M. Whaley).

 

Les marchandises des parties sont similaires sinon identiques, étant donné qu’elles sont un type de boîte électrique. Puisque les parties sont en concurrence, à défaut de preuve du contraire, il est raisonnable de présumer que la nature de leur entreprise respective et les circuits de distribution qu’elles empruntent se chevauchent.

 

Dans l’ensemble, les facteurs à prendre en compte au titre des al. 6(5)c) et d) favorisent l’Opposante.

 

Al. 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

Étant donné que les marques des deux parties consistent en la couleur bleue appliquée à un produit, je conclus que ce facteur favorise aussi l’Opposante.

 

Lors du contre-interrogatoire de M. Whaley et dans plaidoyer écrit, la Requérante a mentionné que ses marchandises avaient deux tons. Cependant, je conviens avec l’Opposante que la demande en cause ne vise pas une marque à deux tons. Elle vise simplement la couleur bleue.

 

Autres circonstances – absence de preuve de confusion

À la page 16 de son plaidoyer écrit, la Requérante affirme : [traduction] « La Requérante a commencé à vendre les marchandises en cause en liaison avec les marques en cause, et elle détient une “part importante” du marché des boîtes de sol, et pourtant, aucun cas de confusion réelle n’a été cité en preuve. » Elle se fonde sur les questions 96 à 112 du contre-interrogatoire de M. Whaley à cet égard. Pour les motifs suivants, je ne considère pas que l’absence de preuve de confusion soit un facteur important :

         la vente de marchandises de la Requérante est postérieure à la date pertinente;

         le volume des ventes de marchandises de la Requérante en liaison avec la marque demandée est inconnu;

         bien que M. Whaley ait affirmé que la Requérante détenait une part importante du marché des boîtes de sol, il n’a pas dit que la Requérante employait la marque demandée en liaison avec ces boîtes.

 

La jurisprudence indique qu’il n’est pas nécessaire qu’une Opposante fasse la preuve d’une confusion pour obtenir gain de cause au titre d’un motif d’opposition qui allègue la confusion, mais qu’une conclusion défavorable peut être tirée de l’absence d’une telle preuve dans certaines circonstances. Cependant, une telle conclusion défavorable n’est habituellement tirée que lorsqu’il y a eu un emploi concurrent important ou de longue durée. [Voir Christian Dior S.A. c. Dion Neckwear Ltd. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.).] En l’espèce, la preuve n’étaye pas une telle conclusion défavorable.

 

Conclusion concernant la probabilité de confusion

Compte tenu de l’ensemble des circonstances, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau de démontrer selon la prépondérance des probabilités qu’il n’y avait pas de probabilité raisonnable de confusion entre sa marque et la Marque Box Design (bleu) de l’Opposante au 14 juin 2004. En conséquence, je conclus que le motif fondé sur le caractère distinctif est accueilli sur cette base.

 

Je note que l’Opposante a affirmé dans son plaidoyer écrit que la Marque n’était pas distinctive parce que les marques composées uniquement d’une couleur ne sont pas considérées comme ayant un caractère distinctif inhérent et il n’y a aucun élément de preuve indiquant que la marque avait acquis un caractère distinctif à la date pertinente. Cependant, j’interprète le motif fondé sur le caractère distinctif tel qu’il a été plaidé comme concernant uniquement la question de la confusion. 

 

Motif d’opposition fondé sur le paragraphe 16(3)

Pour s’acquitter de son fardeau initial en vertu du par. 16, l’Opposante doit établir l’emploi de ses marques au Canada avant le 28 février 2001 ainsi que l’absence d’abandon de ses marques au 14 janvier 2004.

 

L’Opposante a démontré un emploi antérieur et l’absence d’abandon au Canada des deux marques qu’elle a plaidées. Cependant, elle a plaidé l’emploi antérieur des deux marques seulement en liaison avec des « tubes en plastique utilisés pour contenir des conducteurs dans des systèmes électriques installés par des entrepreneurs », et les éléments de preuve indiquent que seule la marque Pipe Design (bleu) de l’Opposante a été employée en liaison avec ces marchandises. Par conséquent, je conclus que l’Opposante s’est seulement acquittée de son fardeau initial en vertu du par. 16(3) relativement à sa marque Pipe Design (bleu), et je limiterai donc mon analyse au regard du par. 6(5) à cette marque.

 

Bien que je traite d’une marque différente de l’Opposante dans cette analyse, une bonne part de mon analyse relative au caractère distinctif fondé sur la marque Box Design (bleu) s’applique mutatis mutandis. J’ajouterai donc des commentaires uniquement là où les circonstances diffèrent sensiblement par rapport à celles auxquelles se rapporte mon analyse antérieure.

 

Al. 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

Ce facteur favorise l’Opposante pour les motifs exposés plus haut.

 

Al. 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

Ce facteur favorise clairement l’Opposante puisqu’elle revendique un usage de sa marque au Canada depuis au moins aussi tôt que 1990 et qu’elle a produit des chiffres de ventes de tubes en liaison avec sa marque depuis 1997. Par contraste, la Requérante a déposé sa demande en 2001 sur le fondement d’un emploi projeté.

 

Al. 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

Les marchandises des parties sont reliées en ce que les deux marchandises sont utilisées dans des systèmes électriques et qu’elles seraient installées ensemble. À défaut de preuve du contraire, il est raisonnable de présumer que la nature de leur entreprise respective et les circuits de distribution qu’elles empruntent se chevauchent.

 

Dans l’ensemble, les facteurs à prendre en compte au titre des al. 6(5)c) et d) favorisent l’Opposante.

 

Al. 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

Ce facteur favorise l’Opposante pour les motifs exposés plus haut.

 

Autres circonstances – Absence de preuve de confusion

Pour les motifs exposés plus haut, je ne considère pas que l’absence de preuve de confusion soit un facteur important, et la preuve n’étaye pas une conclusion défavorable.

 

Conclusion concernant la probabilité de confusion

Bien que les marchandises en cause au regard de ce motif ne soient pas aussi semblables qu’au regard du motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif, compte tenu que le fardeau de preuve incombe à la Requérante, je ne suis pas convaincue qu’au 28 février 2001, il n’y avait pas de probabilité raisonnable de confusion quant à la source des tubes en plastique Pipe Design (bleu) utilisés pour contenir des conducteurs dans des systèmes électriques installés par des entrepreneurs en électricité et les boîtes de jonction Junction Box Design (bleu). Après tout, chacun des facteurs énoncés au par. 6(5) favorise l’Opposante et il n’y a aucun élément de preuve démontrant que qui que ce soit d’autre dans le secteur de l’électrique vend des marchandises de couleur bleue. Le motif d’opposition fondé sur le par. 16(3) est donc accueilli sur le fondement d’un emploi antérieur de la marque Pipe Design (bleu) de l’Opposante.

 

Motif fondé sur l’absence de caractère distinctif eu égard à la marque Pipe Design (bleu) de l’Opposante

Pour des motifs analogues à ceux exposés dans mon analyse du motif d’opposition fondé sur le par. 16(3), je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée non plus de son fardeau de preuve relativement au motif d’opposition relié au caractère distinctif fondé sur la marque Pipe Design (bleu). En conséquence, le motif fondé sur le caractère distinctif est également accueilli sur cette base.

 

Autres motifs d’opposition

Puisque j’ai déjà accueilli plus d’un des motifs d’opposition de l’Opposante, je ne traiterai pas des autres motifs d’opposition.

 

 


Décision

En vertu des pouvoirs que m’a délégués le registraire des marques de commerce sous le régime du par. 63(3) de la Loi, je repousse la demande en vertu du par. 38(8) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 21 JUILLET 2008.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre,

Commission des oppositions des marques de commerce

 

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