Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 75

Date de la décision : 2014-03-28

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Clark Wilson LLP visant l'enregistrement no LMC712,361 de la marque de commerce KINDLE PARK au nom de ThinkBox LLC

[1]               À la demande de Clark Wilson LLP, le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à ThinkBox Media, LLC, la propriétaire au dossier au moment de l'enregistrement nLMC712,361 pour la marque de commerce KINDLE PARK (la Marque).

[2]               À titre préliminaire, subséquemment à la production de la preuve en réponse à l'avis, le registraire a accepté la preuve de la propriétaire inscrite indiquant que la Marque avait été enregistrée par inadvertance au nom de ThinkBox Media, LLC et aurait dû être enregistrée au nom de ThinkBox Inc (la Propriétaire). De plus, la Marque a subséquemment été cédée à ThinkBox LLC en février 2012. Cependant, ces modifications à l'enregistrement ne sont pas en cause dans la présente procédure.

[3]               La Marque est enregistrée en liaison avec les services de [traduction] « production d’émissions vidéo éducatives et de divertissement pour la distribution en ligne au moyen d’un réseau informatique mondial » et les marchandises suivantes :

[traduction]
(1) Disques compacts préenregistrés contenant de la musique, des activités et des contes; logiciels multimédias dans le domaine du divertissement et de l’éducation enregistrés sur CD; programmes informatiques didactiques pour utilisation dans le domaine de l’apprentissage de lecture et de l’écriture, du raisonnement et de l’acquisition de connaissances, des arts, de la musique, des sciences sociales, des mathématiques, des sciences et des sciences humaines et manuels vendus comme un tout dans le domaine du divertissement et éducation; ludiciel sous forme de disques.

(2) Publications pour enfants, nommément matériel pédagogique et didactique imprimé dans les domaines des compétences en lecture et en écriture, de la capacité de raisonnement et de l’aptitude à l’apprentissage, des langues, de l’art, de la musique, des sciences sociales, de la science, des mathématiques et des sciences humaines; livres d’images, livres et magazines, tous les articles précités dans les domaines de l’éducation et du divertissement; bandes dessinées à colorier dans les journaux et les magazines.

[4]               En vertu de l'article 45 de la Loi, le propriétaire inscrit de la marque de commerce doit, à l'égard de chacune des marchandises et de chacun des services que spécifie l'enregistrement, indiquer si la marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l'avis et, dans la négative, la date à laquelle elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date. En l'espèce, la période pertinente pour établir l'emploi s'étend du 20 juillet 2008 au 20 juillet 2011.

[5]               La définition pertinente du terme « emploi » est énoncée comme suit aux articles 4(1) et 4(2) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’un avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

[6]               Il est bien établi que de simples assertions d'emploi ne suffisent pas à établir l'emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le critère relatif à la preuve d’emploi soit peu exigeant dans le cadre de cette procédure [Woods Canada Ltd. c. Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst.)] et qu’il ne soit pas nécessaire de présenter une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co c. Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst.)], il faut néanmoins produire des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure à un emploi de la marque de commerce en liaison avec les marchandises spécifiées dans l’enregistrement au cours de la période pertinente.

[7]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit de Brian Napack, président et directeur général de la Propriétaire, souscrit le 20 janvier 2012 à New York dans l'État de New York. Aucune des parties n'a produit de représentations écrites; seule la Propriétaire a été représentée à l'audience.

[8]               Dans son affidavit, M. Napack déclare que la Propriétaire est une entreprise qui fabrique et vend une variété de produits éducatifs numériques et imprimés pour les enfants. Il explique que ces produits sont principalement vendus à des établissements d'enseignement comme des écoles élémentaires et sont achetés soit par l’entremise du distributeur canadien de la Propriétaire ou du site Web de la Propriétaire. Il explique également que la Propriétaire a conclu un contrat de licence et une entente de distribution avec un distributeur en 2002 octroyant au distributeur le droit de vendre les marchandises visées par l'enregistrement en liaison avec la Marque partout aux États-Unis et au Canada.

[9]               En particulier, M. Napack fait une assertion d'emploi de la Marque en liaison avec les marchandises en 2008 et 2009, ce qui correspond à la première moitié de la période pertinente. Il atteste que les marchandises de la Propriétaire n'étaient pas vendues au Canada à partir de 2010 jusqu'à la fin de la période pertinente en raison de la « détérioration » de la relation entre la Propriétaire et son distributeur à cette époque.

[10]           Néanmoins, à l'appui de son assertion d'emploi, M. Napack joint les pièces suivantes à son affidavit :

         La pièce A est composée de photocopies en couleur de deux disques compacts et de leur étiquette de boîtier respectif. M. Napack atteste que la première copie papier montre [traduction] « un échantillon représentatif de disque compact de musique » et que l'autre montre [traduction] « disque compact comprenant le logiciel du programme KINDLE PARK ». Je remarque que la Marque est affichée sur les disques et leur emballage. M. Napack atteste que, au cours de la période pertinente, [traduction] « des emballages et des produits de ce genre, affichant la marque de commerce KINDLE PARK, étaient employés au Canada par [la Propriétaire], directement ou par l'entremise de son licencié ».

         La pièce B est composée de trois copies papier de captures d'écran des sites Web de la Propriétaire à www.thinkbox.com et www.kindlepark.com, qui étaient tous les deux, selon les attestations de M. Napack, accessibles aux Canadiens au cours de la période pertinente. Je remarque que la Marque est affichée sur les pages. L'image d'un disque compact semblable à celui présenté en pièce A est affichée sur l'une des captures d'écran. Le texte sous l'image indique qu'il s'agit d'un CD de musique produit par la Propriétaire intitulé « I'm Ready! Music From Kindle Park » [Je suis prêt! Musique de Kindle Park]. Bien que M. Napack atteste que les Canadiens pouvaient commander les marchandises de la Propriétaire par l'entremise des sites Web au cours de la période pertinente, il n'est pas évident, selon les copies papier, qu'un client ait pu, en effet, le faire. Comme l'a reconnu la Propriétaire lors de l'audience, il n'y a aucun lien direct affiché sur les sites Web pour l'achat de CD ou de tout autre produit. L'une des pages indique simplement que [traduction] « pour de plus amples renseignements sur Kindle Park et autres produits ThinkBox, écrivez-nous à info@ThinkBox.com ».

[11]           M. Napack déclare que la Propriétaire a engagé 10 000 $ annuellement en frais de publicité en 2008 et 2009 pour la promotion de la vente de marchandises arborant la Marque. Je remarque qu'il ne déclare pas clairement si de tels frais visaient les Canadiens. Néanmoins, en pièce C de son affidavit sont joints ce qui semble être deux dépliants qui, selon M. Napack, sont représentatifs du matériel promotionnel distribué aux clients et clients potentiels de la Propriétaire au cours de la période pertinente. Les dépliants affichent la Marque et donnent des renseignements au sujet de divers produits éducatifs de la Propriétaire et d'outils connexes en ligne. Une illustration de trois livres est affichée sur un des dépliants, quoiqu'il ne soit pas évident si la Marque apparaît sur les livres.

[12]           En ce qui a trait aux ventes, M. Napack atteste que [traduction] « les recettes annuelles estimatives de la vente de marchandises visées par l'enregistrement arborant la Marque au Canada au cours des années 2008 et 2009 étaient de 25 000 $ CA annuellement ». Cependant, il ne fournit aucun renseignement ni aucune preuve documentaire de telles ventes sous la forme de factures, de bons de commande ou de quelque chose du genre. Il explique que des copies de factures montrant des ventes des marchandises n'ont pas pu être produites en raison de la fin du contrat de licence susmentionné avec le distributeur de la Propriétaire. Cependant, en l'absence de factures, M. Napack produit des renseignements insuffisants pour me permettre d'accepter son assertion que les marchandises de la Propriétaire étaient, en effet, vendues au Canada. À cet égard, je remarque que M. Napack n'identifie pas son licencié/distributeur ou du moins l'emplacement dudit distributeur au cours de la période pertinente. Pas plus qu'il n'identifie aucun consommateur final situé au Canada. Compte tenu de la détérioration de la relation avec le distributeur et de l'absence de toute documentation à l'appui, les fondements de l'assertion de M. Napack que les produits de la Propriétaire étaient vendus au Canada dans la pratique normale du commerce ne sont pas clairs.

[13]           De plus, bien qu'il atteste que les produits de la Propriétaire sont achetés, par l'entremise de son distributeur, directement du site Web de la Propriétaire, il ne produit aucune facture ou preuve de ventes directes de la Propriétaire aux clients au Canada et ne donne pas la raison de cette omission.

[14]           Quoi qu'il en soit, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a produit une preuve suffisante à l'égard de chacune des marchandises visées par l'enregistrement. Comme il a été mentionné dans Saks & Co c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1989), 24 CPR (3d) 49 (CF 1re inst.), il n'est pas nécessaire d'établir l'emploi pour l'ensemble des marchandises visées par l'enregistrement lorsque l'affidavit énonce clairement que la marque de commerce est employée sur l'ensemble des marchandises et que des exemples pertinents de l'emploi dans chaque catégorie de marchandises sont présentés.

[15]           En l'espèce, M. Napack présente des exemples de la Marque affichée sur la catégorie générale de marchandises figurant dans l'enregistrement comme les marchandises (1), qui sont des disques compacts et des logiciels enregistrés sur CD. Cependant, il n'a produit aucune preuve semblable en ce qui a trait aux marchandises (2) qui sont des publications, nommément des livres d’images, des magazines ou des bandes dessinées. De plus, je remarque qu'aucune publication n'est affichée sur les sites Web produits en pièce B et que les livres du matériel promotionnel produit en pièce C ne semblent pas afficher la Marque. Même si je devais accepter que les 25 000 $ de revenus ont, en fait, été générés par des ventes au Canada dans la pratique normale du commerce, M. Napack produit des renseignements insuffisants pour permettre de déterminer, au moins, par quelle catégorie de marchandises de telles ventes ont été générées. Considérant qu'il n'y a aucune preuve que la Marque était affichée sur l'une des catégories de marchandises, faute d'autres renseignements, je ne peux conclure que les 25 000 $ ont été générés par la vente de marchandises arborant la Marque.

[16]           En ce qui a trait aux services visés par l'enregistrement, M. Napack atteste que la Propriétaire n'a pas offert de tels services au Canada en liaison avec la Marque au cours de la période pertinente en raison de la résiliation du contrat de licence susmentionné avec le distributeur de la Propriétaire.

[17]           Compte tenu de tout ce qui précède, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque en liaison avec aucune des marchandises et aucun des services visés par l'enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Circonstances spéciales

[18]           Quant à savoir s’il existait des circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque, M. Napack ne fournit aucun détail en ce qui a trait aux circonstances de la résiliation du contrat et/ou de la « détérioration » de la relation de la Propriétaire avec son licencié au cours de la période pertinente. Quoiqu'il déclare que la Propriétaire [traduction] « conclura un nouveau contrat de licence et une nouvelle entente de distribution de la [Marque] portant sur la commercialisation et la vente des marchandises visées par l'enregistrement de même que des services en liaison avec la [Marque] partout au Canada », faute d'autres renseignements, cette déclaration est vague et n'appuie pas l'existence d'une intention sérieuse de reprendre l'emploi à court terme. Par conséquent, je ne peux conclure que les critères énoncés dans Registraire des marques de commerce c. Harris Knitting Mills Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF) ont été respectés en l’espèce.

[19]           À cet égard, je remarque le commentaire suivant de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Plough, précité, à 66 :

[traduction]
Il n’est pas permis à un propriétaire inscrit de garder sa marque s’il ne l’emploie pas, c’est-à-dire s’il ne l’emploie pas du tout ou s’il ne l’emploie pas à l’égard de certaines des marchandises pour lesquelles cette marque a été enregistrée.

[20]           Considérant que la Propriétaire n’a produit aucune preuve démontrant que le défaut d’emploi de la Marque est dû à des raisons indépendantes de sa volonté ou qu'elle a une intention sérieuse de reprendre l'emploi à court terme, je dois également conclure que la Propriétaire n’a pas démontré l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque au cours de la période pertinente au sens de l’article 45(3) de la Loi.

Décision

[21]           Par conséquent, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Andrew Bene

Agent d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


 

 

 


Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay

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