Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Spy Optic, Inc.à la demande n° 1,141,196 produite par YM Inc. (Sales) en vue de l’ enregistrement de la marque de commerce SPY-C ________ _            ___

 

Le 17 mai 2002, YM Inc. (Sales) (la « Requérante ») a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce SPY-C (la « Marque »). La demande est fondée :

1.      sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins le 16 mai 2002 en liaison avec des manteaux, des pantalons, des costumes, des vestes, des chemises, des robes, des chemisiers, des jupes, des shorts, des chandails, des t-shirts, des cravates, des gilets, des chapeaux et des gants;

2.      sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec des services de magasins de vente au détail de vêtements.

 

La demande a été publiée aux fins d’opposition dans l’édition du 10 mars 2004 du Journal des marques de commerce. Le 6 août 2004, Spy Optic, Inc. (l’« Opposante ») a produit une déclaration d’opposition. L’Opposante a invoqué des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)a), b), c) et d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la « Loi »).

 

La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante et soutient que l’allégation relative à l’alinéa 38(2)d) est vague et incorrecte en ce qu’elle n’expose pas le motif d’opposition de façon suffisamment détaillée pour permettre à la Requérante d’y répondre.

 

À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Barry Buchholtz et des copies certifiées conformes des enregistrements des marques de commerce canadiennes nos LMC475,429 et LMC449,901. À l’appui de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de Rex M. Shoyama, Sharon Ho et Gay Owens. Il n’y a pas eu de contre‑interrogatoires.

 

Chaque partie a produit un plaidoyer écrit et a été représentée à l’audience.

 

Le fardeau de la preuve et les dates pertinentes

Le fardeau de persuasion incombe à la Requérante, qui doit établir, suivant la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi. Cependant, l’Opposante doit s’acquitter d’un fardeau initial de présentation et présenter suffisamment d’éléments de preuve admissibles pour que l’on puisse raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués au soutien de chaque motif d’opposition [Voir la décision John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée, (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

 

Les dates pertinentes à l’égard des divers motifs d’opposition sont les suivantes :

         pour l’alinéa 38(2)a) et l’article 30 - la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.) à la page 475];

         pour les alinéas 38(2)b) et12(1)d) - la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         pour l’alinéa 38(2)c) et le paragraphe 16(3) - la date de production de la demande [voir le paragraphe 16(3)];

         pour l’alinéa 38(2)d) et le caractère non distinctif - la date de production de l’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)].

 

Les motifs d’opposition fondés sur l’article 30

Je n’ai été saisie d’aucun élément de preuve à partir duquel je pourrais raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui des motifs d’opposition fondés sur l’article 30. Par conséquent, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial de présentation à l’égard de ces motifs d’opposition, qui sont donc rejetés.

 

Les autres motifs d’opposition

Chacun des autres motifs d’opposition repose sur la question de la probabilité de confusion entre la Marque et la marque de l’Opposante, SPY.

 

La marque SPY de l’Opposante a été enregistrée, le 10 novembre 1995, sous le n° 449,901, à l’égard de lunettes et de lunettes de soleil et, le 29 avril 1997, sous le n° 475,429, à l’égard d’articles vestimentaires, nommément tee-shirts, chemises, shorts, pantalons, pulls d’entraînement, pantalons d’entraînement, chapeaux, visières, souliers, sandales et ceintures; lunettes et lunettes de soleil. Toutefois, le 16 mai 2006, l’état déclaratif des marchandises sous l’enregistrement n° 475,429 a été restreint aux articles vestimentaires, nommément tee-shirts, chemises, pulls d’entraînement, chapeaux et ceintures; lunettes et lunettes de soleil, en application de l’article 45.

 

La marque SPY de l’Opposante fait également l’objet de la demande d’enregistrement n° 1,158,145 à l’égard de sacs, nommément des sacs à dos et des sacs de sport. La date de priorité en vertu de la Convention de la demande n° 1,158,145 est le 7 mai 2002.

 

En outre, l’Opposante a allégué dans sa déclaration d’opposition qu’elle emploie la marque SPY depuis une date antérieure à la date de premier emploi revendiquée par la Requérante (le 16 mai 2002) et à la date de production (le 17 mai 2002), en liaison avec des articles vestimentaires, nommément tee-shirts, chemises, shorts, pantalons, pulls d’entraînement, pantalons d’entraînement, chapeaux, visières, souliers, sandales et ceintures; lunettes et lunettes de soleil et lunettes de protection.

 

J’analyserai d’abord la probabilité de confusion au motif que la Marque n’est pas enregistrable aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi en raison de la probabilité de confusion avec la marque de l’Opposante enregistrée sous le n° 475,429. Je note que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial de présentation à l’égard de ce motif du fait que l’enregistrement n° 475,429 existe.

 

Le test en matière de confusion

Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

En appliquant le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment de celles qui sont énumérées expressément au paragraphe 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chacune a été en usage; c) le genre des marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Tous les facteurs énumérés ne doivent pas nécessairement recevoir le même poids. [Voir, de manière générale, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.)]

 

L’alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle chacune est devenue connue

SPY et SPY-C sont toutes les deux des marques dotées d’un caractère distinctif inhérent quand on les applique aux marchandises et services respectifs des parties.

 

La Requérante n’a produit aucune preuve sur la mesure dans laquelle sa Marque avait pu devenir connue.

 

Le chef de la direction de l’Opposante, Barry Buchholtz, a fourni les pièces suivantes qui ont trait à la question de la mesure dans laquelle la marque SPY est devenue connue au Canada :

1.      Pièces D1 à D8 : huit catalogues datés de 2002 à 2006 qui ont été distribués à des détaillants au Canada

         Comme peut tendre à indiquer la dénomination sociale de l’Opposante, la majorité de ces catalogues ne présentent que des articles de lunetterie; cependant, les catalogues de 2002 et de l’automne 2003 font effectivement la publicité de sacs et de vêtements en liaison avec la marque SPY.

         Il n’a pas été fourni de détails sur les quantités distribuées ni sur l’emplacement ou l’identité des détaillants canadiens.

2.      Pièce E : des sorties sur imprimante du site Web de l’Opposante, spyoptic.com, datées du 08/02/2005

         Ces documents indiquent des chapeaux, des tee-shirts, des molletons et des articles de lunetterie, mais aucune preuve n’établit que des Canadiens ont eu accès au site Internet.

3.      Pièce F : un échantillon de factures liées à des ventes de marchandises SPY à des clients canadiens

         Bien que le paragraphe 8 de l’affidavit indique que ces factures sont datées de la période allant du 15 janvier 2001 au 15 juin 2005, elles ne sont datées que du 31 octobre  2003 au 15 juin 2005.

         La majorité des marchandises facturées sont des articles de lunetterie, mais on trouve aussi des factures de tee-shirts, de pulls d’entraînement et de chapeaux.

         Un grand nombre des factures n’indiquent qu’un article seulement de chaque marchandise commandée.

         En général, la marque SPY ne figure pas dans le corps des factures; elle apparaît au coin supérieur gauche de la facture, à la gauche de la dénomination sociale et de l’adresse de l’Opposante.

         L’auteur de l’affidavit a établi comment les marchandises énumérées sur les factures peuvent être reliées par le code du style aux catalogues pour visualiser comment la marque SPY est affichée sur les marchandises.

         Les clients mentionnés sur les factures comprennent notamment La Source, Freewheelin Skateboards & Snowboards, HTO Sun Surf & Swim, Threesixty Board Shop, Westing’s Cycle & Mount, Gravity Sports, Nelms Opticians et Random Clothing.

 

Il est noté que M. Buchholtz n’a pas fourni de chiffres de ventes ou de publicité; il atteste seulement de manière vague que les dépenses afférentes aux ventes et à la publicité au Canada ont été [traduction] « importantes au cours des dernières années ». Toutefois, en se rapportant aux factures produites, on peut se faire une idée des chiffres de ventes.

 

Compte tenu de ce qui précède, j’accepte que la marque de l’Opposante est devenue connue au Canada dans une plus large mesure que la Marque de la Requérante.

 

L’alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle chaque marque a été en usage

L’enregistrement de l’Opposante a été accordé sur la foi d’une déclaration attestant l’usage déposée le 24 mars 1997. La vente la plus ancienne établie par M. Buchholtz a été facturée le 31 octobre 2003.

 

Le demande de la Requérante revendique un emploi remontant au 16 mai 2002, mais la Requérante n’a produit aucune preuve de cet emploi.

 

Les alinéas  6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

Lorsque l’on examine les marchandises, les services et les commerces des parties, c’est l’état déclaratif des marchandises ou des services figurant dans la demande d’enregistrement ou l’enregistrement de la marque de commerce des parties qui est déterminant quant à la question de la confusion soulevée en application de l’alinéa 12(1)d) [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c. Super Dragon Import Export Inc. (1986), 12 C.P.R. (3d) 110 (C.A.F.); Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.A.F.); Miss Universe Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.); voir McDonald's Corp. c. Coffee Hut Stores Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.); Procter & Gamble Inc. c. Hunter Packaging Ltd. (1999), 2 C.P.R. (4th) 266 (C.O.M.C.)].

 

Il y a manifestement du chevauchement entre les articles vestimentaires des parties.

 

Aucun renseignement n’a été fourni sur l’entreprise de la Requérante. Bien que le témoignage de l’Opposante semble indiquer qu’elle vise un grand nombre de magasins d’articles de sport, rien n’empêche ses marchandises d’être vendues par d’autres types de détaillants. En d’autres termes, il n’y pas de raison de présumer que les voies commerciales des parties ne se chevauchent pas.

 

L’alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

C’est un principe bien établi que la première partie d’une marque de commerce est la plus pertinente pour la distinction entre les marques [Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.) à la page 188]. En l’espèce, le début de chaque marque est identique. De plus, la Requérante s’est approprié la totalité de la marque de l’Opposante comme première composante de sa Marque. Les marques doivent être appréciées dans leur ensemble, mais il est tout de même possible « d’en faire ressortir des caractéristiques particulières susceptibles de jouer un rôle déterminant dans la perception du public » [United Artists Corp. c. Pink Panther Beauty Corp. (1998), 80 C.P.R. (3d) 247 (C.A.F.) à la page 263].

 

Le mot « spy » ne possède aucun sens applicable à l’habillement. La marque de l’Opposante n’évoque donc aucun sens particulier. Toutefois, l’ajout de -C à SPY permet de prononcer la Marque de la Requérante comme le mot anglais « spicy », ce qui donnerait à entendre que les vêtements associés à la Marque de la Requérante [traduction] « font sensation ou sont inconvenants » [Oxford Canadian Dictionary].

 

Je note que la ressemblance entre les marques est toutefois moindre dans le son que dans la présentation visuelle, la transformation de SPY-C en « spicy »” semblant plus susceptible de se produire dans le son; lorsqu’on voit la marque SPY-C, le mot SPY y est très prédominant.

 

Les autres circonstances de l’espèce

i) L’état du registre et du marché

Tous les éléments de preuve de la Requérante portent sur ces circonstances. Mme Owens, recherchiste en marques de commerce employée par le cabinet d’avocats de la Requérante, fournit des résultats de recherches menées en février 2006 dans le registre canadien des marques de commerce. Mme Ho, stagiaire en droit au cabinet d’avocats de la Requérante, fournit un élément de preuve provenant d’un magasin SPY LAB auquel elle a rendu visite à Toronto en février 2006. M. Shoyama, avocat au cabinet d’avocats de la Requérante, fournit des renseignements, obtenus en février 2006, provenant du registre des marques de commerce, d’une recherche dans un bottin téléphonique et de l’Internet.

 

Certains renseignements produits par la Requérante concernent un emploi de SPICE par un tiers. J’estime que cette preuve n’est pas pertinente étant donné que la marque de l’Opposante ne comporte pas ce morphème lié. À l’audience, l’agent de la Requérante a exprimé l’opinion que les marques SPICE sont pertinentes, car elles font voir que la marque de l’Opposante a coexisté pacifiquement avec des marques ayant une similitude phonétique avec la Marque de la Requérante. Toutefois, comme l’a souligné l’agent de l’Opposante, les marques SPICE de tiers se distinguent de manière significative de la Marque de la Requérante en ce qu’elles ne comportent pas la totalité de la marque SPY de l’Opposante; en d’autres termes, les marques SPICE de tiers ne sont pas pertinentes sur le point de savoir si des membres du public au Canada seraient en mesure de distinguer les sources des marchandises lorsqu’ils voient les marques SPY et SPY‑C. De même, je ne considère pas que des marques telles que SPYKE ou SPYDER soient particulièrement pertinentes en l’espèce; bien qu’elles comportent SPY comme première syllabe, il est évident qu’elles sont seulement une épellation fautive des mots ordinaires du dictionnaire SPIKE et SPIDER (ce qui est différent de SPY‑C, qui peut être considéré comme un modèle ou une variation de SPY, par exemple, SPY‑A, SPY‑B, SPY‑C, la connotation SPICY étant plus apparente seulement à la prononciation du mot). Enfin, j’estime que les entreprises qui ne sont pas dans le domaine du vêtement ne sont d’aucune pertinence.

 

Je considère comme les plus pertinents les éléments de preuve suivants.

         Le registre des marques de commerce

1.      CSPI enregistré pour des vêtements

2.      ESPY CANADA & Dessin enregistré pour des sous-vêtements (le mot SPY prédomine dans cette marque figurative)

3.      EYE SPY enregistré pour des sacs

4.      SPI & Dessin enregistré pour des vêtements de tennis

5.      SPY RECORDS & Dessin enregistré pour des tee-shirts

         La recherche dans un bottin téléphonique

1.      House of Spy, vêtements haute couture à Toronto

2.      Spy Lab Clothing, vêtements pour dames au détail à Toronto

3.      Spy Pre‑a‑Porter, vêtements et accessoires pour hommes au détail, vêtements pour dames au détail à Westmount, Québec (inscrit à la même adresse que Spy Prêt A Porter, vêtements pour dames au détail)

         L’Internet

1.      www.spylab.ca fait la promotion de diverses marques de vêtements offerts à son magasin de Toronto, mais n’offrait pas de commande en ligne à la date de la recherche (la machine Wayback indiquait que le site Internet avait existé de 2001 à 2004).

2.      www.houseofspy.com dresse la liste des vêtements disponibles dans des magasins en Ontario, en Saskatchewan, en Alberta, au Manitoba, en Colombie-Britannique, à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse (la machine Wayback indiquait que le site Internet avait existé de 2001 à 2005).

3.      www.eyespy-acc.com affiche divers bagages et sacs

4.      www.chatelaine.com renvoie à des produits de mode féminine disponibles chez des détaillants SPI 25 établis au Canada.

         Le marché

1.      Des photographies de la signalisation, des étiquettes de marchandises et des sacs publicitaires du magasin de vêtements SPY LAB à Toronto, qui portent tous l’inscription SPY LAB.

 

En me fondant sur ce qui précède, je suis incapable de conclure que les Canadiens ont l’habitude de distinguer entre elles les marques de vêtements qui comportent le mot SPY ou qui commencent par le mot SPY. Pour les motifs qui suivent, la preuve est simplement insuffisante pour que je puisse parvenir à une telle conclusion.

 

La preuve extraite de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en tirer des conclusions sur l’état du marché et ces conclusions ne peuvent se déduire que si l’on trouve un grand nombre d’enregistrements pertinents. [Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)] Cinq enregistrements ne suffisent pas pour tirer des conclusions sur l’état du marché.

 

Les renseignements extraits du bottin téléphonique ont une valeur limitée car, d’après la preuve, l’une seulement des trois entreprises mentionnées est en activité.

 

La preuve tirée de l’Internet aide peu la Requérante parce que rien n’établit que des Canadiens aient jamais vu ces sites Internet et que leur contenu constitue une preuve par ouï-dire.

 

La meilleure preuve de fond est celle du magasin SPY LAB de Toronto, mais elle est insuffisante en elle-même pour établir que les Canadiens ont l’habitude de distinguer entre elles des marques de vêtements SPY.

 

Je confirme que dans l’appréciation de la preuve sur l’état du marché, j’ai pris en considération l’ensemble cumulatif des éléments de preuve et que j’ai conclu que la preuve n’est pas suffisante pour constituer des circonstances significatives en l’espèce.

 

ii) L’emploi de la marque figurative par l’Opposante

La Requérante a soutenu que le fait que la preuve établit que l’Opposante emploie SPY en liaison étroite avec une [traduction] « croix suisse » revêt de l’importance. Si je comprends bien l’argumentation, elle fait observer que le dessin caractéristique sert à distinguer la marque de l’Opposante de la Marque de la Requérante. Je ne m’attarderai pas plus longuement à cette observation qui n’est pas pertinente à l’égard du motif fondé sur l’alinéa 12(1)d), étant donné que l’enregistrement de l’Opposante vise la marque verbale SPY et ne concerne pas la marque figurative.

 

Conclusion sur la probabilité de confusion

« À toutes fins pratiques, le facteur le plus important dans la plupart des cas, et celui qui est décisif, est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent, les autres facteurs jouant un rôle secondaire. » [Beverley Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstery Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.) à la page 149, conf. par 60 C.P.R. (2d) 70] Visuellement, les marques en cause en l’espèce sont très semblables. Les marchandises en liaison avec les marques se chevauchent et la Requérante n’a pas établi en preuve qu’elle a acquis une notoriété en lien avec sa Marque. Je conclus donc que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau de persuasion qui lui incombait d’établir qu’il n’est pas vraisemblable qu’une personne possédant un souvenir imparfait de la marque SPY de l’Opposante appliquée à des vêtements ne conclurait pas dès la première impression que les vêtements ou les magasins de vêtements au détail SPY‑C ont une source commune avec sa Marque. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) est accueilli à l’égard de l’enregistrement n° 475,429.

 

Le motif d’opposition fondé sur le caractère non distinctif

Ce motif est libellé comme suit. [traduction] « En outre, l’opposante fonde son opposition sur les motifs prévus à l’alinéa 38(2)d) et fait valoir que la marque de commerce SPY‑C revendiquée dans la demande n° 1,141,196 n’est pas distinctive au sens de l’article 2, car elle ne distingue pas les marchandises en liaison avec lesquelles on prétend qu’elle a été employée et n’est pas adaptée à distinguer les services avec lesquels on projette de l’employer. » Bien que la Requérante ait contesté la caractère suffisant de cette argumentation dans sa contre-déclaration, elle n’a pas poussé plus loin son opposition. Dans son plaidoyer écrit, elle considère au contraire l’argumentation fondée sur l’alinéa 38(2)d) comme étant définie par le reste du plaidoyer, c.‑à‑d. qu’elle considère que la question est de savoir si la Marque n’est pas distinctive parce qu’elle crée de la confusion avec la marque SPY de l’Opposante. Par conséquent, je n’estime pas nécessaire d’examiner l’objection antérieure de la Requérante.

 

Pour s’acquitter du fardeau initial de présentation relatif à ce motif d’opposition, l’Opposante doit seulement établir que sa marque était « connue au moins jusqu’à un certain point » le 6 août 2004. [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.) à la page 58] Elle l’a fait. La Requérante doit donc, pour s’acquitter de son fardeau de persuasion, établir que sa marque est adaptée à distinguer ou distingue véritablement ses marchandises et services des marchandises de l’Opposante au Canada [Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.)].

 

La preuve relative à ce motif d’opposition est différente de celle relative au motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) à deux égards. Premièrement, la majorité des éléments de preuve de la Requérante touchant les marques ou les noms des tiers n’est pas antérieure à la date qui est pertinente à l’égard des motifs d’opposition fondés sur le caractère distinctif. Deuxièmement, l’argument de la Requérante selon lequel l’Opposante emploie SPY en liaison avec un dessin caractéristique est plus approprié à l’égard de ce motif. Cependant, après avoir examiné les diverses façons dont l’Opposante affiche sa marque SPY, j’arrive à la conclusion que le mot SPY prédomine généralement et se qualifie comme un emploi de SPY simpliciter, ce qui fait que je ne suis pas d’accord pour dire que les caractéristiques du dessin qu’emploie l’Opposante ont pour effet de rendre la Marque de la Requérante distinctive.

 

Me fondant sur une analyse semblable à celle que j’ai faite au sujet du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d), je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve touchant le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif. Ce motif d’opposition est donc accueilli.

 

Les motifs d’opposition relatifs au droit à l’enregistrement

Le motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement, qui repose sur l’emploi antérieur de la marque de l’Opposante, est rejeté parce que l’Opposante n’a pas établi l’emploi de sa marque conformément à l’article 4 de la Loi avant la date pertinente. Bien que l’enregistrement n° 475,429 de l’Opposante fasse référence à une date de premier emploi antérieure aux dates pertinentes, la simple production d’une copie certifiée conforme de son enregistrement ne permet pas à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de présentation à l’égard de ce motif [voir Entre Computer Centers, Inc. c. Global Upholstery Co. (1991), 40 C.P.R. (3d) 427 (C.O.M.C.)]. En outre, si l’Opposante a distribué ses catalogues au Canada avant la date pertinente, cela ne lui permettrait pas de s’acquitter de son fardeau initial du fait que la distribution de catalogues n’est pas considérée comme un emploi de la marque selon l’article 4 de la Loi.

 

En ce qui a trait au droit à l’enregistrement fondé sur la production antérieure de la demande par l’Opposante, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial. Toutefois, je ne traiterai pas ce motif plus amplement parce que j’ai déjà repoussé la demande sur le fondement de deux autres motifs.

 

Dispositif

En vertu des pouvoirs qui me sont délégués par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 3 JUILLET 2008

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

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