Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Havana Club Holding, Inc. à la demande no 1154259 en vue de l’enregistrement de la marque de commerce THE SPIRIT OF CUBA actuellement la propriété de Ron Mautusalem & Matusa of Matusalem Inc.___________________

 

 

I           Les procédures

 

[1]               Le 4 octobre 2002, 1872 Holdings, V.O.F. a produit la demande d’enregistrement n1154259 pour la marque de commerce THE SPIRIT OF CUBA fondée sur l’emploi projeté en liaison avec « rhum; coquetels sans alcool » (les « Marchandises ») et en liaison avec la « promotion de boissons alcoolisées et non alcoolisées au moyen d’activités promotionnelles sur place dans des magasins de détail, bars, restaurants, boîtes de nuit et lors des activités spéciales parrainées; ventes au détail de boissons alcoolisées » (les « Services »). À la suite d’une décision du Bureau des marques de commerce, la Requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif des mots « SPIRIT » et « CUBA » en dehors de la marque de commerce.

 

[2]               La demande a été publiée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 24 août 2005. 

 

[3]               Le 24 octobre 2005, Havana Club Holding (l’« Opposante ») a produit une déclaration d’opposition qui a été transmise par le registraire à la Requérante le 6 décembre 2005. La Requérante a réfuté tous les motifs d’opposition dans une contre-déclaration produite le 6 avril 2006.

 

[4]               L’Opposante a déposé en preuve l’affidavit de Mme Marlene Musharbash et la Requérante a produit l’affidavit de M. Claudio I. Alvarez Salazar.

 

[5]               Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et étaient représentées à l’audience.

 

[6]               Le 21 mars 2007, le registraire a inscrit au registre une cession par laquelle la présente demande a été transférée de 1872 Holdings, V.O.F. à Ron Matusalem & Matusa of Matusalem Inc. J’emploierai le terme « Requérante » pour désigner l’une ou l’autre de ces sociétés selon le cas.

 

II         Les motifs d’opposition

 

[7]               Les motifs d’opposition sont les suivants :

 

1.      La Marque n’est pas enregistrable en raison des alinéas 38(2)b) et 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), du fait que celle-ci, qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des marchandises;

2.      Suivant l’alinéa 38(2)d), la Marque de la Requérante n’est pas distinctive et, plus particulièrement, elle n’est pas adaptée à distinguer les marchandises et les services de la Requérante de celles de l’Opposante au sens de l’article 2 de la Loi du fait que la Marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des marchandises. 

 

[8]               Après le dépôt des plaidoyers écrits, l’Opposante a demandé l’autorisation de modifier sa déclaration d’opposition dans le but d’ajouter à la fin de chacun des motifs d’opposition le mot « services ». Le 9 octobre 2008, par une décision rendue par écrit, le registraire a rejeté cette demande.

 

III        Le fardeau de preuve dans la procédure d’opposition à une marque de commerce

 

[9]               Le fardeau d’établir que sa demande satisfait aux exigences de la Loi incombe à la Requérante. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau initial, il incombe à la Requérante de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition particuliers ne devraient pas empêcher l’enregistrement de la Marque [voir les décisions Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, aux pages 329 et 330, John Labatt Limitée. c. Les Compagnies Molson Limitée, 30 C.P.R. (3d) 293, et Wrangler Apparel Corp. c. The Timberland Company, 41 C.P.R. (4th) 223].

 

IV        Les dates pertinentes

 

[10]           Les dates pertinentes pour l’examen des motifs d’opposition sont les suivantes :

 

  Enregistrabilité de la Marque suivant l’alinéa 12(1)b) de la Loi : la date de production de la demande d’enregistrement (le 4 octobre 2002) [voir Dic Dac Holdings (Canada) Ltd c. Yao Tsai Co. (1999), 1 C.P.R. (4th) 263, Zorti Investments Inc. c. Party City Corporation (2004), 36 C.P.R. (4th) 90; Havana Club Holdings S.A. c. Bacardi & Company Limited, (2004) 35 C.P.R. (4th) 541];

  Caractère distinctif de la Marque : la date de production de la déclaration d’opposition est généralement acceptée comme la date pertinente (le 24 octobre 2005) [voir l’arrêt Andres Wines Ltd. and E & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 et la décision Metro-Goldwyn-Meyer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317].

 

V         Enregistrabilité de la Marque suivant l’alinéa 12(1)b)

 

[11]           Marlene Musharbash travaille depuis le 1er août 2006 pour le groupe Pernod Ricard comme administrateur principal de la propriété intellectuelle. Elle déclare que Pernod Ricard est le deuxième groupe mondial dans le domaine des vins et spiritueux. L’Opposante fait partie du groupe Pernod Ricard et s’occupe principalement de la production de rhum. Je voudrais souligner que le « groupe Pernod Ricard » n’est pas défini dans son affidavit. Toute ambiguïté découlant de l’utilisation d’un tel terme doit être interprétée contre l’Opposante.

 

[12]           Le 18 octobre 2006, elle a reçu instruction du service juridique de la propriété intellectuelle de Pernod Ricard de procéder à une enquête sur la Marque pour tenter de savoir si les produits de la Requérante vendus en liaison avec la Marque provenaient de Cuba ou d’un autre pays. 

 

[13]           Le 30 octobre 2006, elle a visité un site Web (www.matusalem.com) sur la Marque de la Requérante. Elle a présenté des extraits du site Web où la Marque et la marque de commerce MATUSALEM sont apposées sur des bouteilles de rhum. Il y est mentionné que le rhum portant la marque MATUSALEM provient de la République dominicaine. 

 

[14]           Le même jour, elle a visité le site Web de la Régie des alcools de l’Ontario (www.lcbo.com) et a effectué une recherche en utilisant le mot-clé MATUSALEM. Elle a présenté l’extrait des résultats. Il y est précisé que le rhum portant la marque MATUSALEM provient de la République dominicaine. 

 

[15]           Elle a visité, le 1er novembre 2006, un magasin de la Régie situé à Windsor, en Ontario, et a acheté une bouteille de rhum portant la marque MATUSALEM. Elle a présenté une photo de la bouteille. La Marque est inscrite en relief sur la bouteille. Il est bien indiqué sur un autocollant apposé sur la bouteille que le rhum en question est distillé, vieilli et mélangé en République dominicaine.

 

[16]           À ce stade, il est important de souligner que la Requérante a reconnu à l’audience, et on peut aussi renvoyer aux paragraphes 4 et 5 de l’affidavit de M. Salazar, que le rhum vendu en liaison avec la Marque n’est pas fabriqué à Cuba. Par conséquent, la Marque peut être considérée comme donnant une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des Marchandises. Il incombe donc à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne donne pas une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des Marchandises.

 

[17]           La Requérante fait valoir que, malgré le fait que la preuve, particulièrement l’affidavit de M. Salazar, établit effectivement que Cuba était connue pour son rhum avant 1959, elle ne démontre pas que c’était encore le cas à la date de production de la présente demande. Je suis d’accord avec la Requérante pour dire qu’il n’y a rien dans la preuve qui me permet de conclure que Cuba était toujours à la date pertinente susmentionnée une productrice de rhum. Toutefois, je peux consulter des encyclopédies et des dictionnaires pour prendre connaissance d’office du fait que Cuba est une productrice de rhum [voir Scottish Cashmere Assn. Ltd. c. V. Frass Manufacturing Inc. (1988), 22 C.P.R. (3d) 185].

 

[18]           L’encyclopédie Britannica en ligne définit le rhum comme suit :

 

[traduction] boisson alcoolisée fabriquée à base de produits de canne à sucre, généralement obtenue comme un sous-produit résultant de la fabrication du sucre. Elle comprend tant le rhum très fluide comme celui provenant de Cuba et de Puerto Rico, que le rhum plus dense et aromatisé provenant de Jamaïque.

 

[19]           Je prends par conséquent connaissance d’office du fait que Cuba est une productrice de rhum. La Requérante fait valoir que, même si Cuba était connue comme lieu d’origine du rhum, la Marque doit être appréciée de façon globale. Elle prétend que la Marque [traduction] « transmet la disposition d’esprit, le tempérament, la nature et le caractère du peuple cubain. Elle parle de “l’âme” ou de “l’essence” de l’histoire de la Requérante à Cuba renfermée dans ses produits à base de rhum ». Pour arriver à cette conclusion, M. Salazar a présenté au moyen de son affidavit l’histoire de la Requérante et les origines de son rhum MATUSALEM ainsi qu’un bref historique de la production de rhum à Cuba entre 1872 et 1959, année où Fidel Castro s’est emparé du gouvernement cubain. M. Salazar explique que la Requérante et ses prédécesseurs en titre ont quitté Cuba en 1959 et ont poursuivi la production de rhum en Floride, à Puerto Rico, puis aux Bahamas, et enfin en République dominicaine; ils ont toujours utilisé la recette originale transmise de génération en génération dans leur famille. Par conséquent, la Marque servirait à informer les consommateurs de l’héritage cubain du rhum vendu en liaison avec la Marque. La Requérante affirme donc que la Marque n’est pas employée pour indiquer un endroit précis mais pour parler de l’histoire de la Requérante à Cuba.

 

[20]           Le test à appliquer pour déterminer si une marque de commerce donne en son entier une description fausse ou trompeuse est le suivant : Le public canadien serait-il induit en erreur sur l’origine du produit associé à la marque de commerce et croirait-il que ce produit provient de l’endroit désigné par le nom géographique utilisé [voir Promotions Atlantiques Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1984), 2 C.P.R. (3d) 183, et Institut National des Appellations d’Origine v. Pepperidge Farm Inc., 84 C.P.R. (3d) 540]?

 

[21]           Je dois me mettre à la place d’un consommateur de rhum moyen au Canada et déterminer s’il associerait la Marque à Cuba comme lieu d’origine du rhum ou, comme l’a fait valoir la Requérante, à l’âme ou à l’essence de l’histoire de celle-ci à Cuba. Je suis convaincu que dans l’esprit de M. Salazar c’est la deuxième option qui l’emporte. Toutefois, M. Salazar ne représente pas le consommateur de rhum moyen au Canada.

 

[22]           Appliquant le fardeau de preuve de la prépondérance des probabilités, j’opine en faveur de la première interprétation. Rien dans le dossier ne prouve que le consommateur de rhum moyen au Canada connaît l’origine cubaine de la Requérante ou de ses prédécesseurs en titre. Le mot « SPIRITUEUX » est défini comme suit dans le Webster Ninth New Collegiate Dictionary : [traduction] « […] Boisson contenant de l’alcool et de l’eau, obtenue par la distillation de l’alcool ou des fruits; toute boisson volatile obtenue par la distillation ou par le craquage […]; boisson alcoolisée volatile ». Par conséquent, nous avons une marque de commerce renfermant deux mots : l’un qui signifie boisson alcoolisée et l’autre qui désigne le nom d’un pays reconnu pour son rhum. Je suis d’avis que le consommateur de rhum moyen au Canada qui prend connaissance de la Marque employée en liaison avec du rhum, selon toute vraisemblance, aurait comme première impression que ce rhum provient de Cuba. Puisque ce n’est pas le cas, la Marque donne une description fausse ou trompeuse du lieu d’origine du rhum. J’examinerai plus loin la question de savoir si cette conclusion s’applique à toutes les Marchandises. Pour l’instant, je voudrais examiner certains des arguments soulevés par la Requérante dans son plaidoyer écrit ou à l’audience, à l’appui de son allégation selon laquelle la Marque ne donne pas une description fausse et trompeuse du lieu d’origine de son rhum.

 

[23]           La Requérante voudrait  faire référence à la preuve de l’état du registre jointe à l’affidavit de M. Salazar, faisant état d’autres marques de commerce inscrites au registre qui contiennent les mots « THE SPIRIT OF… ». L’Opposante s’est opposée à l’admissibilité de cette preuve, au motif qu’il s’agit d’une preuve par ouï-dire inadmissible. La pièce en question est la pièce 4, jointe à l’affidavit de M. Salazar, et il y est fait référence au paragraphe 5(d)(3) de son affidavit. M. Salazar n’indique pas qu’il a effectué la recherche. Il ne fournit pas les paramètres de la recherche et le document semble, à première vue, provenir d’un tiers. Chaque page du document porte la mention suivante :  « trade-mark Search Results…Abelman, Frayne & Schwab ». Pour ces motifs, je suis d’accord avec l’Opposante et je conclus que la pièce 4 de l’affidavit de M. Salazar constitue une preuve par ouï-dire inadmissible. De toute manière, parmi les neuf références énumérées, seulement quatre semblent pertinentes : THE SPIRIT OF ST.-LOUIS, THE SPIRIT OF GREECE, THE SPIRIT OF RIO et THE SPIRIT OF SHANGHAI. Les autres sont trop vagues pour préciser un lieu d’origine (par exemple : the Rockies, the North etc.). Quatre références ne permettent pas de tirer des conclusions concernant l’état du marché [voir Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432, et Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349].

 

[24]           La Requérante fait valoir que les images de la bouteille de rhum achetée par Mme Musharbash et l’échantillon d’emballage présenté par M. Salazar, tous portant la Marque, montrent clairement que le pays d’origine du rhum y est indiqué. Par conséquent, la Marque ne peut pas donner une description fausse et trompeuse du lieu d’origine du rhum vendu en liaison avec la Marque, vu que le consommateur qui achète le rhum portant la Marque est informé que le rhum ne provient pas de Cuba. Cette conclusion est fondée sur une présomption erronée selon laquelle le consommateur lit toujours les renseignements imprimés sur l’emballage avant d’acheter le produit.

 

[25]           La Requérante soutient qu’elle s’est désistée du droit à l’usage exclusif, en dehors de la marque de commerce considérée dans son ensemble, de ce qu’elle considère comme étant la partie qui n’est pas enregistrable de la Marque, nommément CUBA. Vu que c’est la Marque dans son ensemble qu’il faut examiner, le désistement serait suffisant pour l’emporter sur toute opposition concernant l’enregistrabilité de la Marque fondée sur l’alinéa 12(1)b) de la Loi. Je souligne que la Requérante s’est également désistée du droit à l’usage exclusif du mot « SPIRIT ». Pour trancher cet argument, je me rapporte à la décision T.G. Bright & Co. c. Institut National des Appellations d’Origine, [1986] A.C.F. no 220, où le juge McNair a dit ce qui suit :

                       [traduction]

L’appelante a prétendu également que son désistement à l’égard du mot « French » était très important dans la mesure où il pouvait rendre la marque de commerce enregistrable. En vertu de l’article 34, un requérant peut se désister du droit à l’usage exclusif, en dehors de la marque de commerce, de telle partie de la marque qui n’est pas indépendamment enregistrable. Toutefois, il ne peut se désister ainsi à l’égard d’une marque de commerce qui constitue une description fausse et trompeuse de façon à rendre cette marque enregistrable dans son ensemble, alors que la partie non enregistrable est la caractéristique dominante de la marque de commerce composée : voir Lake Ontario Cement Ltd. c. Registraire des marques de commerce, (1976) 31 C.P.R. (2d) 103 (C.F. 1re inst.). Compte tenu de la conclusion du président selon laquelle BRIGHTS FRENCH HOUSE est, dans son ensemble, une description fausse et trompeuse, je dois confirmer sa décision, c’est‑à‑dire que le désistement de la requérante à l’égard du mot « French » ne rend pas la marque de commerce enregistrable. [Non souligné dans l’original.]

 

[26]           La Requérante se fonde sur la décision Syndicat National de la Parfumerie Française c. Andrew Jergens Co. Ltd. (1970), 64 C.P.R. 286 (C.O.M.C.), où le registraire a conclu que la marque MEMORIES OF PARIS, en liaison avec parfums et eaux de toilette, ne donnait pas une description claire ou une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des marchandises. Cette décision est plutôt laconique et on a souligné le désistement à l’égard du mot « PARIS » en dehors de la marque dans son ensemble. Mis à part l’effet du désistement sur l’enregistrabilité de la marque de commerce, aucun motif n’était avancé pour conclure que la marque de commerce ne donnait pas une description claire ou une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des marchandises. Cette décision est antérieure à la décision de la Cour fédérale Institut National des Appellations d’Origine, précitée.

 

[27]           Ayant conclu que la Marque donne une description fausse et trompeuse à l’égard du rhum, je dois déterminer si la même conclusion peut s’appliquer aux coquetels sans alcool. Avant d’examiner cette question, je voudrais souligner que le premier motif d’opposition, tel qu’il est formulé, ne vise que les Marchandises. L’Opposante fait valoir qu’en raison de la liaison entre les Marchandises et les Services, la même conclusion devrait s’appliquer à l’égard des Services. Je ne suis pas d’accord. L’Opposante tente d’obtenir de manière indirecte ce qu’il lui a été impossible d’obtenir de manière directe, lorsqu’elle s’est vu refuser l’autorisation de modifier sa déclaration d’opposition dans le but d’ajouter à la fin de chacun des motifs d’opposition le mot « services ». De plus, si ma décision portait sur les Services, ce serait statuer ultra petita par rapport à ce que vise à obtenir l’Opposante à l’égard du premier motif d’opposition. 

 

[28]           En ce qui concerne les coquetels sans alcool, rien dans le dossier n’établit le lieu d’origine de ces marchandises. Il n’y a aucune preuve établissant que Cuba est reconnue pour ses coquetels sans alcool. Par conséquent, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial relativement à ces marchandises. Le motif d’opposition fondé sur le fait que la Marque donnerait une description claire ou une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des coquetels sans alcool est donc rejeté.

 

[29]           Par conséquent, j’accueille le premier motif d’opposition seulement quant au rhum.

 

VI        Le caractère distinctif

 

[30]           La différence des dates pertinentes entre ce motif d’opposition et celui concernant l’enregistrabilité au sens de l’alinéa 12(1)b) de la Loi n’a aucune incidence sur l’issue de la présente affaire. De plus, dans leurs plaidoyers écrits respectifs, dans la mesure où il s’agit du caractère distinctif, les parties ont renvoyé aux arguments exposés au sujet de l’enregistrabilité de la Marque pour justifier leurs positions respectives. Par conséquent, on pourrait présumer que la même conclusion tirée au sujet de l’enregistrabilité s’appliquerait au motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif de la Marque. Toutefois, la formulation du motif d’opposition dans la déclaration d’opposition soulève certaines difficultés. Par souci de commodité, le motif d’opposition en question est énoncé ci-après :

 

[traduction] Suivant l’alinéa 38(2)d), la Marque de la Requérante n’est pas distinctive et, plus particulièrement, elle n’est pas adaptée à distinguer les marchandises et les services de la requérante de celles de l’Opposante au sens de l’article 2 de la Loi du fait que la Marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse du lieu d’origine des marchandises. [Non souligné dans l’original.]

 

[31]           À l’audience, j’ai soulevé la question de savoir si ce motif d’opposition vise les Services. De toute évidence, les parties n’étaient pas d’accord sur l’interprétation de la formulation utilisée. Il reste l’ambiguïté suivante : le motif d’opposition en question vise-t-il seulement les Marchandises ou englobe-t-il également les Services? Comme je l’ai indiqué précédemment, l’Opposante a tenté de rendre la formulation plus claire en demandant l’autorisation d’ajouter le mot « Services » à la fin du paragraphe. Un tel ajout aurait dissipé clairement toute ambiguïté en ce sens. Toutefois, l’autorisation lui a été refusée.

 

[32]           Les ambiguïtés dans l’enregistrement ont été retenues contre le propriétaire inscrit de l’enregistrement [voir Panzani Milliat Frères c. Vago’s Importers & Distributors Ltd., (1988) 19 C.P.R. (3d) 46]. Les ambiguïtés dans la preuve d’une partie ont été interprétées contre celle-ci [voir GWG Ltd. c. Jack Spratt Mfg. Inc., (1982), 72 C.P.R. (2d) 93]. Je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas conclure par analogie que l’ambiguïté découlant de la formulation du deuxième motif d’opposition doit être interprétée contre l’Opposante. Une situation semblable est survenue dans Omega S.A. c. Omega Engineering Inc. (2006), 51 C.P.R. (4th) 205, où l’ambiguïté dans la déclaration d’opposition a été interprétée contre l’opposante. Je conclus que le motif d’opposition vise seulement les Marchandises.

 

[33]           Par conséquent, le motif d’opposition est accueilli seulement quant au rhum, pour les mêmes raisons que celles exposées dans l’analyse du premier motif d’opposition.

 

VII      Conclusion

 

[34]           En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, et appliquant les principes énoncés dans Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet Werke Heinrich Scherf GmbH, 10 C.P.R. (3d) 482, je rejette, en vertu du paragraphe 38(8) de la Loi, la demande de la Requérante en vue d’enregistrer la Marque en liaison avec du rhum, ainsi que l’opposition quant aux coquetels sans alcool et à la promotion de boissons alcoolisées et non alcoolisées au moyen d’activités promotionnelles sur place dans des magasins de détail, bars, restaurants, boîtes de nuit et lors des activités spéciales parrainées; ventes au détail de boissons alcoolisées.

 

 

 

 

FAIT À BOUCHERVILLE (QUÉBEC), LE 2 OCTOBRE 2009.

 

 

 

Jean Carrière,

Membre, Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

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