Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2014 COMC 60

Date de la décision : 2014-03-17

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Marche Lacroix (1986) Inc. visant l'enregistrement nLMC650,697 de la marque de commerce PIRATES BLEND au nom de Half Moon Bay Trading Co.

[1]               À la demande de Marche Lacroix (1986) Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné un avis en vertu de l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13 (la Loi) le 21 mars 2012 à Half Moon Bay Trading Co. (la Propriétaire), propriétaire inscrite de l'enregistrement no LMC650,697 de la marque de commerce PIRATES BLEND (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée en liaison avec les marchandises suivantes : [traduction]
« Sauces poivrade, moutarde et sauce aux condiments à base d’épices ».

[3]               L’avis prévu à l’article 45 exigeait que la Propriétaire présente une preuve indiquant qu’elle avait employé la Marque au Canada en liaison avec chacune des marchandises décrites dans l’enregistrement à l’intérieur de la période s’étendant entre le 21 mars 2009 et le 21 mars 2012.

[4]               La définition pertinente du terme « emploi » est énoncée comme suit à l'article 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu'un avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               Il est bien établi que les simples affirmations d'emploi ne suffisent pas à démontrer l'emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le critère relatif à la preuve d’emploi soit peu exigeant dans le cadre de cette procédure [Woods Canada Ltd c. Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst.)] et qu’il ne soit pas nécessaire de présenter une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co Ltd c. Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst.)], il faut néanmoins produire des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure à un emploi de la marque de commerce en liaison avec les marchandises spécifiées dans l’enregistrement au cours de la période pertinente.

« Affidavit d'emploi continu et actuel » de la Propriétaire

[6]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit l'« Affidavit d'emploi continu et actuel » de Thomas F. Nuijens, vice-président de la Propriétaire. L'affidavit semble avoir été préparé en Floride; le sceau et la signature d'un notaire public de l'État de la Floride, Denise M. Arp, apparaissent au bas de la page. Bien que dix factures soient jointes à l'affidavit, on ne retrouve sur aucune d'elles le sceau ou les initiales de la notaire. Je remarque également que l'affidavit est très court, composé de seulement deux paragraphes, et qu'il n'y a pas de constat d'assermentation clair, comme ce serait généralement le cas dans un affidavit souscrit au Canada. 

[7]               Néanmoins, la Partie requérante n'a produit aucune observation écrite, et n'a pas soulevé d'objection en ce qui a trait à la façon dont la preuve a été produite. La Loi et le Règlement sur les marques de commerce sont muets en ce qui concerne la forme que doivent prendre les affidavits et les déclarations solennelles qui sont présentés devant le registraire dans le cadre d’une procédure de radiation en vertu de l’article 45. Comme l’a déjà mentionné le registraire, bien qu’il soit souhaitable que la preuve soit conforme aux Règles de la Cour fédérale, la conformité n’est pas une obligation [voir Tension 10 Inc c. Tension Clothing Inc (2004), 45 CPR (4th) 136 (COMC)]. En outre, surtout dans le contexte des procédures de radiation en vertu de l’article 45 – qui se veulent sommaires et expéditives –, il est fréquent que le registraire considère comme de simples détails techniques certaines des irrégularités que peuvent présenter les affidavits et les déclarations solennelles [voir, à titre d’exemple, 88766 Canada Inc c. Tootsie Roll Industries Inc (2006), 56 CPR (4th) 76 (COMC)]. En outre, il est bien établi que des objections techniques devraient être soulevées tôt [voir, par exemple, Maximilian Fur Co, Inc c. Maximillian For Men’s Apparel Ltd (1983), 82 CPR (2d) 146 (COMC); Adams c. Société des Produits Nestlé SA (1986), 72 CPR (3d) 100 (COMC)]. 

[8]               Compte tenu de ce qui précède, malgré les lacunes possibles de l'affidavit produit par la Propriétaire en l'espèce, je procéderai sur la prémisse selon laquelle l'affidavit est valide en vertu des lois de la Floride et admissible dans le cadre de cette procédure. À cet effet, en l'absence d'objections de la part de la Partie requérante, je reconnais que la Propriétaire n'avait aucune raison de produire des observations relatives à la validité de l'affidavit.

[9]               Cependant, comme susmentionné, l'affidavit est plutôt court. La première phrase de l'affidavit est essentiellement une simple allégation d'emploi de la Marque par la Propriétaire. La deuxième phrase se lit comme suit :

[traduction]
« En pièces jointes, les factures de vente, qui couvrent une grande diversité de dates, à des clients canadiens, à la fois des distributeurs commerciaux et des clients de vente directe servis par [la Propriétaire] appuient cet affidavit d'emploi continu de... [la Marque]. »

[10]           La Propriétaire ne produit aucune preuve de l'affichage de la Marque sur les Marchandises, comme des étiquettes ou des photographies de ses sauces PIRATES BLEND. Comme susmentionné, les seules pièces jointes à l'affidavit sont dix factures, toutes émises par la Propriétaire et à divers clients canadiens. Les factures indiquent la vente de divers produits, dont « Pirates Blend Caribbean Condiment » [condiment des Caraïbes Pirates Blend] et des condiments d'autres marques comme « Iguana Red Pepper Sauce » [sauce poivrade Iguana] et « Tamarindo Bay Steak Sauce » [sauce pour bifteck de Tamarindo Bay]. Je remarque que des dix factures, seulement quatre datent de la période pertinente et indiquent une adresse de destinataire canadienne. 

[11]           Je remarque également que rien n'indique que les factures étaient jointes aux marchandises lors de l'expédition. En effet, certaines des factures produites en preuve comprennent des renseignements suggérant que les factures ont été produites par le système après l'expédition. Par exemple, la facture du 16 octobre 2007 comprend une remarque dans le champ de description du produit datant du 1er septembre 2010 qui indique que la facture était [traduction] « irrécouvrable ». Une autre facture comprend une remarque sans date qui indique que le client n'a pas reçu certains articles. Toutes les factures, y compris celle qui est « irrécouvrable », comprennent un timbre électronique indiquant que la facture a été payée avec une date postérieure à la période pertinente et à la date d'expédition.

[12]           À ce titre, à défaut de déclarations par M. Nuijens à l'égard de la pratique normale du commerce de la Propriétaire, je ne peux conclure que les factures produites en preuve auraient été jointes à l'expédition des marchandises de la Propriétaire vers le Canada au cours de la période pertinente.

[13]           En outre, je remarque une dernière lacune de la preuve. Comme susmentionné, la seule référence pertinente des factures est « Pirates Blend Caribbean Condiment ». Cependant, M. Nuijen ne fait aucune déclaration claire dans son affidavit à savoir si cela fait référence aux marchandises enregistrées de la Propriétaire [traduction] « sauces poivrade » ou « moutarde et sauce aux condiments à base d’épices ». Là encore, M. Nuijens ne fait aucune déclaration claire dans son affidavit concernant le genre des marchandises de la Propriétaire et, en l'absence d'observations de la part de la Propriétaire, je ne peux conclure que les factures représentent des ventes dans la pratique normale du commerce de l'une ou l'autre des marchandises enregistrées. Il s’agit d’une de ces situations où l'ambiguïté inhérente de la preuve doit être interprétée à l'encontre des intérêts de la Propriétaire [voir Plough, précité]. À ce titre, je ne peux conclure que les factures constituent une preuve de présentation de la Marque en liaison avec aucune des marchandises enregistrées lors du transfert.

[14]           Compte tenu de tout ce qui précède, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a démontré l'emploi de la Marque en liaison avec les marchandises enregistrées au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Décision

[15]           Par conséquent, conformément aux pouvoirs qui me sont délégués en vertu de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera radié en conformité avec les dispositions de l'article 45 de la Loi.

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Andrew Bene

Agent d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


 

 

 


Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay

 

 

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