Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

Référence : 2010 COMC 2010

Date de la décision : 2010-12-07

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Trainer’s Choice Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement n° 1294542 pour la marque de commerce MIND TO MUSCLE au nom de Vision Tek Inc.

Le dossier

[1]        Le 22 mars 2006, Vision Tek Inc. (Vision Tek) a produit une demande d’enregistrement pour la marque MIND TO MUSCLE, fondée sur l’emploi de la marque au Canada depuis le 1er juin 1999 en liaison avec ce qui suit :

marchandises

vêtements de sport, matériel d’exercice, nommément vélos, matériel d’entraînement en force musculaire, orthèses et supports orthopédiques,

 

services

services d’évaluation, nommément évaluation médicale et de blessures sportives; cliniques, nommément cliniques médicales et de thérapie sportive; services éducatifs dans le domaine de l’évaluation des blessures sportives ainsi que des soins et des exercices connexes; services de soins de santé, nommément évaluation de blessures et rééducation physique; services de massothérapeute autorisé; services médicaux, nommément exploitation d’une clinique de médecine sportive; exploitation d’un centre de bien‑être, nommément services d’acupuncture; clinique de traitement des blessures; services de médecin; enseignement du conditionnement physique; sensibilisation du public à l’importance de l’activité physique et de la bonne condition physique; diffusion d’information médicale; services de rééducation physique et de physiothérapie; thérapie sportive; services d’entraînement, nommément pour une bonne condition physique.

 

[2]        La demande a été publiée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 30 mai 2007, et Elite Sports Performance Inc. (Elite Sports) a déposé une déclaration d’opposition le 29 octobre 2007. Le registraire a fait parvenir une copie de la déclaration d’opposition à la requérante le 11 décembre 2007, ainsi que l’exige le paragraphe 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13. La requérante a répondu en déposant et signifiant une contre-déclaration dans laquelle elle nie en bloc les allégations figurant dans la déclaration d’opposition.

[3]        La preuve de l’opposante se résume à l’affidavit de Rick Schaly, daté du 8 août 2008. M. Schaly a été contre-interrogé sur son affidavit le 8 janvier 2009, et la transcription du contre-interrogatoire fait partie de la preuve versée au dossier. La requérante a décidé de ne pas produire de preuve, mais chaque partie a déposé un plaidoyer écrit. Aucune des parties n’a répondu à l’avis du registraire, daté du 29 octobre 2009, les informant qu’elles pouvaient demander la tenue d’une audience. La présente décision est donc rendue sans que les parties n’aient présenté d’observations orales.

[4]        Au cours de la présente instance, plus précisément le 1er juin 2009, l’opposante initiale, Elite Sports, a fusionné avec une autre société pour former la société Trainer’s Choice Inc., l’actuelle opposante. Par souci de clarté, je désignerai l’opposante sous la dénomination Elite Sports lorsque j’évoquerai des événements antérieurs au 1er juin 2009.

 

La déclaration d’opposition

[5]        La déclaration d’opposition précise que (i) David Wright est l’un des propriétaires de la requérante Vision Tek et un actionnaire fondateur de l’opposante Elite Sports, (ii) conformément à une convention d’achat d’actions ayant pris effet le 11 janvier 2006, David Wright a vendu ses actions dans l’opposante Elite Sports à Rick Schaly, qui est alors devenu l’unique actionnaire de l’opposante, et (iii) l’opposante Elite Sports a employé, depuis sa constitution en 2001, la marque MIND TO MUSCLE en liaison avec la médecine sportive et l’entraînement athlétique.

 

[6]        Il est allégué dans la déclaration d’opposition que la demande d’enregistrement ne respecte pas les exigences de l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce, parce que la requérante ne pouvait pas être convaincue, à la date de la demande (22 mars 2006), qu’elle avait le droit d’employer la marque sollicitée, et cela en raison (i) de la convention d’achat d’actions susmentionnée, et (ii) de l’emploi, par l’opposante, de la marque MIND TO MUSCLE depuis 2001.

 

[7]        La marque visée par la demande MIND TO MUSCLE ne distingue pas les marchandises et services de la requérante des services de l’opposante qui sont fournis sous la marque MIND TO MUSCLE de l’opposante.

 

La preuve de l’opposante

Rick Schaly

[8]        M. Schaly atteste qu’il est président de l’opposante Elite Sports. L’opposante exploite un centre de mise en forme à Barrie, en Ontario, où elle offre des services de conditionnement physique et de bien-être aux athlètes, quel que soit leur âge, leur niveau ou le sport qu’ils pratiquent. Au moment de sa constitution, en août 2001, l’opposante Elite Sports avait alors trois actionnaires, à savoir Schaly Holdings Inc. (dont l’unique actionnaire est M. Schaly), Vision Tek Inc. (la requérante en l’espèce), et enfin Dan Marouelli, dont les actions ont été rachetées en janvier 2003, après quoi M. Marouelli n’avait plus aucun droit dans Elite Sports.

 

[9]        De août 2001 jusqu’à la date de l’affidavit de M. Schaly, Elite Sports a fourni les services de l’opposante en liaison avec la marque verbale MIND TO MUSCLE et avec la marque MIND TO MUSCLE & Dessin, laquelle consiste dans la marque verbale, entourée d’une bordure ovale partiellement ouverte.

[10]      Conformément à une convention d’achat d’actions et de prise en charge des prêts aux actionnaires, en date du 11 janvier 2006, (i) la requérante Vision Tek Inc. a transféré toutes ses actions dans Elite Sports à Schaly Holdings Inc., et (ii) David William Wright, l’âme dirigeante de Vision Tek Inc., a abandonné ses fonctions d’administrateur et de dirigeant de Elite Sports. Puis, en marge de la convention, Vision Tek Inc. et Elite Sports sont convenues qu’Élite Sports continuerait d’employer les marques de Elite Sports de la même manière qu’Élite Sports avait employé ses marques depuis 2001.

[11]      Depuis 2001, l’opposante a fourni ses services en liaison avec ses marques à plus de 2 000 personnes chaque année, pour un chiffre d’affaires annuel dépassant 600 000 $. L’opposante dépense annuellement plus de 30 000 $ pour faire connaître ses services sous ses marques, notamment en distribuant des milliers de prospectus chaque année depuis janvier 2002. En outre, les marques de l’opposante apparaissent sur des panonceaux, dans ses installations de Barrie, ainsi que sur des vêtements distribués à ses clients. Les pièces annexées à l’affidavit de M. Schaly confirment son témoignage.

La transcription du contre-interrogatoire

[12]      La transcription du contre-interrogatoire de M. Schaly révèle que, avant que la société Elite Sports ne soit constituée, (i) M. Schaly et David Wright étaient amis, (ii) la requérante Vision Tek Inc. exploitait un centre de mise en forme en liaison avec la marque MIND TO MUSCLE, et (iii) M. Schaly exploitait une entreprise qui vendait des orthèses adaptées à la pratique du sport et de l’équipement semblable à la requérante. Par ailleurs, M. Schaly savait que la requérante Vision Tek employait la marque MIND TO MUSCLE avant la formation de la société Elite Sports, et il savait que la requérante avait continué d’employer la marque MIND TO MUSCLE après s’être séparée d’Élite Sports.

[13]      M. Schaly reconnaît aussi que la convention d’achat d’actions du 11 janvier 2006, mentionnée plus haut, ne portait pas explicitement cession de droits de marque de Vision Tek à Elite Sports. Toutefois, comme l’a précisé M. Schaly durant le contre-interrogatoire :

à la page 12 de la transcription

[traduction]

          [...] nous avions exercé nos activités sous le nom MIND TO MUSCLE depuis 2002 [...] les clients se présentaient, ils achetaient des programmes à MIND TO MUSCLE; nous exploitions l’entreprise sous le nom MIND TO MUSCLE.

          Ainsi, lorsqu’ils [Vision Tek Inc.] ont quitté l’entreprise [Elite Sports] [...] j’ai présumé que, puisque je prenais en charge leur dette – la seule valeur réelle pour l’entreprise était la marque MIND TO MUSCLE, qui était présente sur le marché depuis 2002 [...] il y avait très peu en fait d’actifs, et puis, en vérité, c’était tout simplement une marque que je prenais en charge [...] nous achetions l’entreprise qui avait exercé ses activités sous le nom MIND TO MUSCLE depuis 2002,

 

à la page 14 :

[traduction]

          Dave [David Wright] m’a téléphoné environ deux mois après [la signature de la convention] et m’a dit « nous ne voulons pas que vous employiez la marque (sic), » mais cette question n’avait jamais été abordée au moment de la convention d’achat-vente,

 

à la page 16 :

[traduction]

          [...] lorsque Dave [David Wright] m’a téléphoné pour me dire « nous ne voulons pas que vous employiez le nom MIND TO MUSCLE », il a ajouté « mais vous pouvez l’employer durant un an ou deux, puis nous en reparlerons à ce moment-là »

 

à la page 46 :

[traduction]

          Et puis, comme j’ai dit, [...] je lui ai envoyé un courriel pour lui dire « réglons cet aspect parce que cela semble assez ennuyeux ».

 

[14]      M. Schaly n’a jamais reconnu devant M. Wright qu’il devait avoir l’autorisation de Vision Tek pour employer la marque MIND TO MUSCLE, ce qui s’accorde avec l’impression de M. Schaly pour qui Elite Sports avait conservé les droits sur la marque MIND TO MUSCLE lorsque Vision Tek avait renoncé à son intérêt dans Elite Sports. Bien sûr, un écrit n’est pas nécessaire pour constater ou attester un transfert valide des droits sur une marque.

 

Examen des motifs d’opposition

[15]      S’agissant du premier motif d’opposition, la date pertinente est la date de production de la demande, c’est-à-dire le 22 mars 2006. Dans le cadre d’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i), l’opposant doit faire valoir que le requérant a commis une fraude, qu’il était de mauvaise foi ou qu’il a enfreint une loi fédérale : voir par exemple la décision Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol‑Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155; Société canadienne des postes c. Registraire des marques de commerce (1991), 40 C.P.R. (3d) 221. En l’espèce, les actes de procédure eux-mêmes ne permettent pas un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i), et il n’a pas été prouvé non plus que la requérante a commis un acte illégal. Au reste, la preuve atteste que la requérante croyait véritablement avoir le droit d’employer la marque visée par la demande. Le premier motif d’opposition est donc rejeté.

[16]      Toutefois, j’aimerais ajouter qu’il me semble que la preuve confirme également que l’opposante croyait véritablement avoir le droit d’employer la marque visée par la demande, même sans le consentement de la requérante, si l’on considère l’historique des relations d’affaires entre les parties.

[17]      S’agissant du deuxième motif d’opposition, la date pertinente est la date de la déclaration d’opposition, c’est-à-dire le 29 octobre 2007. Pour les besoins de la présente instance, il ne m’est pas nécessaire de dire si la requérante a ou non cédé des droits sur la marque MIND TO MUSCLE à l’opposante au cours de leurs relations d’affaires. Il me suffit plutôt de dire si l’emploi par l’opposante de la marque MIND TO MUSCLE lui a ou non profité à elle. Au vu de la preuve produite, je suis d’avis que l’emploi par l’opposante de la marque MIND TO MUSCLE a constamment profité à l’opposante. Je suis donc d’avis que, à la date pertinente du 29 octobre 2007, et à défaut d’une preuve par la requérante de la mesure dans laquelle elle a employé sa marque MIND TO MUSCLE, la marque de l’opposante était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la marque visée par la demande. L’opposante obtient donc gain de cause sur le deuxième motif d’opposition : voir la décision Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, à la page 58 (C.F. 1re inst.)

 

Décision

[18]      Au vu de ce qui précède, la demande d’enregistrement est refusée. La présente décision a été rendue conformément à une délégation de pouvoirs aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

 

___________________

Myer Herzig

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

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