Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

TRADUCTION

 

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 233

Date de la décision : 2012-12-03

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 demandée par BCF S.E.N.C.R.L./BCF LLP visant l’enregistrement no LCM478311 de la marque de commerce GB SELECT au nom de DSM IP Assets B.V.

[1]               Le 16 mars 2010, à la demande de BCF S.E.N.C.R.L. / BCF LLP (le Requérant), le Registraire a émis un avis en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi) à DSM IP Assets B.V., le propriétaire inscrit (le Déposant) de l’enregistrement no LCM478311 de la marque de commerce GB SELECT (parfois ci-après appelée la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée en liaison avec les marchandises « extraits de levure pour usage industriel ».

[3]               L’article 45 de la Loi requiert que le propriétaire inscrit de la marque de commerce démontre, à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services visés par l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi commence le 16 mars 2007 et se termine le 16 mars 2010 (la Période pertinente).

[4]               La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec les marchandises est énoncée au paragraphe 4(1) de la Loi :

4 (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               En réponse à l'avis du Registraire, le Déposant a fourni un affidavit de Ralph Leon Marie Oscar Thomas, avec les pièces A à D, souscrit le 12 octobre 2010. Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et ont assisté à une audience.

[6]               Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet et portée d’offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour éliminer « le bois mort » du registre et que le critère auquel le propriétaire inscrit doit satisfaire est donc peu exigeant. Comme l’a affirmé le juge Russel dans la décision Uvex Toko Canada Ltd c. Performance Apparel Corp (2004), 31 C.P.R. (4th) 270] :

68. […] Nous savons que l’objet de l’article 45 est de débarrasser le registre du « bois mort ». Nous savons que la simple affirmation par le propriétaire de l’emploi de sa marque de commerce ne suffit pas et que le propriétaire doit « indiquer » quand et où la marque a été employée. Il nous faut des éléments de preuve suffisants pour être en mesure de nous former une opinion en vertu de l’article 45 et d’appliquer cette disposition. Également, nous devons maintenir le sens des proportions et éviter la preuve surabondante. Nous savons également que le genre de preuve exigée varie d’une affaire à l’autre, en fonction d’une gamme de facteurs tels que la nature du commerce et les pratiques commerciales du propriétaire de la marque de commerce.

[7]               Je vais maintenant examiner la preuve présentée par le Déposant.

[8]               M. Thomas se présente comme un avocat spécialisé dans les marques de commerce au service du Déposant, dont le bureau principal et l’établissement commercial sont situés aux Pays-Bas. M. Thomas affirme qu’il occupe ce poste depuis octobre 2002. À cet effet, il affirme avoir une connaissance personnelle des faits contenus dans son affidavit [paragraphe 1 de son affidavit].

[9]               M. Thomas affirme qu’en tant qu’avocat spécialisé dans les marques de commerce, il est responsable de la gestion d’une partie du portefeuille de marques de commerce du Déposant, qui comprend la Marque. Il explique que le Déposant est une filiale à 100 % de Royal DSM N.V. (ci-après DSM). Le rôle du Déposant est de gérer le portefeuille de marques de commerce de DSM et des autres filiales de DSM, comme DSM Food Specialties B.V. (ci-après DSM Food Specialties). Il affirme également que, en tant que tel, il a accès et il est familier avec les données historiques, de marketing et de ventes de DSM Food Specialties concernant les produits d’extraits de levure, dont ceux vendus en liaison avec la Marque [paragraphe 2 de son affidavit].

[10]           En ce qui concerne plus particulièrement la Marque, M. Thomas affirme que, en vertu d’un contrat verbal d’utilisation entre le Déposant et DSM Food Specialties, DSM Food Specialties est autorisé à employer les marques de commerce du Déposant, y compris la Marque, en liaison avec la fabrication et la vente d’une variété de produits. M. Thomas affirme qu’en vertu de ce contrat d’utilisation, le Déposant exerce un « contrôle direct et indirect » sur la nature et la qualité des produits fabriqués et vendus par DSM Food Specialties sous licence. Il affirme également que le contrat donne aussi à DSM Food Specialties le droit d’octroyer des sous-licences à des tiers et que DSM Food Specialties avait octroyé en sous-licence ses droits à son distributeur canadien Dempsey Corporation (ci-après Dempsey), selon les mêmes conditions que celle du contrat entre le Déposant et DSM Food Specialties [paragraphes 3 et 4 de son affidavit].

[11]           M. Thomas donne ensuite quelques renseignements généraux sur DSM et DSM Food Specialties. Il explique, entre autres, que DSM Food Specialties est un important fabricant mondial d’enzymes alimentaires, de cultures, d’extraits de levure et d’autres ingrédients de spécialité pour l’industrie alimentaire et l’industrie des boissons [paragraphes 5 à 7 de son affidavit].

[12]           En ce qui concerne plus particulièrement les extraits de levure de DSM Food Specialties, M. Thomas explique que les extraits de levure sont reconnus comme un moyen naturel et efficace de rehausser la saveur de divers aliments, et sont l’un des ingrédients-clés des produits de DSM Food Specialties. Il joint en pièce A une liste des clients de DSM Food Specialties qui ont acheté les extraits de levure GB SELECT. Il explique également que les extraits de levure développés, fabriqués et vendus par DSM Food Specialties en liaison avec la Marque sont adaptés aux exigences de saveur particulières de leurs clients. Par conséquent, il affirme que les extraits de levure de DSM Food Specialties se retrouvent dans une vaste gamme de produits comme des sauces, des soupes, des collations et des viandes assaisonnées comme le bœuf, le poulet et le porc, et que des options de saveur rôtie ou bouillie sont également disponibles [paragraphes 7 et 9 de son affidavit].

[13]           M. Thomas explique que les extraits de levure, qui ont été développés et fabriqués par DSM Food Specialties pour être employés par ses clients dans leurs processus de fabrication d’aliments, sont ensuite vendus en quantité sous différentes formes. Les extraits de levure en poudre sont vendus en sacs ou en caisses-outres de 44 à 55 lb (20 à 25 kg), selon la densité du produit, tandis que les extraits de levure en pâte ou liquides sont vendus en seaux. M. Thomas explique également que chaque unité d’emballage porte une étiquette arborant la marque de commerce du produit, dont la Marque [paragraphes 10 et 11 de son affidavit].

[14]           M. Thomas explique que les distributeurs autorisés de DSM Food Specialties sont responsables de s’assurer que les besoins en approvisionnement des clients sont comblés. Ils sont également responsables de l’inventaire, de répondre aux appels des clients et d’une partie du marketing local des produits de DSM Food Specialties. M. Thomas explique que bien que certains produits alimentaires soient fabriqués toute l’année, d’autres sont produits occasionnellement et pour de courtes périodes selon la demande des clients sur le marché. Par conséquent, il est courant que des sélections d’ingrédients adaptés de DSM Food Specialties comme les extraits de levure soient vendues à ses clients sur de courtes périodes avec un intervalle de plusieurs mois ou d’années entre les commandes. Par conséquent, il n’est pas rare que des ventes ponctuelles soient enregistrées au cours d’une ou de plusieurs années [paragraphe 12 de son affidavit].

[15]           M. Thomas aborde ensuite l’exploitation et les ventes de DSM Food Specialties au Canada. Il affirme que les clients canadiens de DSM Food Specialties comprennent Baxters Canada Inc. Il affirme également que DMS Food Specialties utilise Dempsey comme distributeur. Il explique que Dempsey est situé à Toronto et qu’il s’agit d’une entreprise mondiale de vente, de logistique et de soutien aux clients dans le domaine des produits industriels et alimentaires. Il joint en pièce B un connaissement maritime du 15 février 2010 démontrant qu’un envoi de 55 lb (25 kg) d’extraits de levure a été livré à Baxters Canada en liaison avec la Marque. Il fournit ensuite une évaluation des ventes au Canada d’extraits de levure de DSM Food Specialties pour usage industriel pour la Période pertinente, ce qui correspond à environ 600 000 $ CAN dont 108 000 $ CAN correspondent à des produits GB SELECT [paragraphes 13 à 15 de son affidavit].

[16]           M. Thomas se tourne ensuite vers le marketing et la publicité en liaison avec les produits GB SELECT. Il explique que les produits DSM Food Specialties sont mis en marché et annoncés partout au Canada par DSM Food Specialties et Dempsey dans des publications de l’industrie et du matériel promotionnel comme des dépliants. Il joint en pièces C et D des dépliants représentatifs du matériel distribué au Canada par DSM Food Specialties à ses clients canadiens au cours de la Période pertinente [paragraphe 16 de son affidavit].

[17]           M. Thomas explique également qu’en 2009, DSM Food Specialties, avec Dempsey, a offert une formation aux clients canadiens de DSM Food Specialties, où des conseils techniques en ce qui concerne l’emploi des produits de DSM Food Specialties, y compris les extraits de levure GB SELECT, ont été prodigués. De plus, au cours de la Période pertinente, des représentants de DSM Food Specialties ont participé aux Salons des fournisseurs de l’Institut canadien de science et technologie alimentaires (ICSTA) à Vancouver, Toronto et Montréal pour faire la promotion des produits de DSM Food Specialties, y compris les extraits de levure GB SELECT [paragraphes 17 et 18 de son affidavit].

[18]           M. Thomas termine ensuite son affidavit en affirmant que la Marque demeure une marque de commerce importante des activités relatives aux ingrédients alimentaires de DSM Food Specialties. Il affirme que les extraits de levure vendus en liaison avec la Marque sont des éléments-clés de la réussite à la fois de DSM Food Specialties et de ses clients [paragraphe 19 de son affidavit].

[19]           Le Requérant soutient que le Déposant n’a pas démontré l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec les marchandises visées par l’enregistrement au cours de la Période pertinente pour trois raisons principales, qui seront abordées à tour de rôle ci-dessous.

Contrat d’utilisation de la Marque au Canada

[20]           Le Requérant affirme que l’emploi de la Marque au Canada par le licencié du Déposant, DSM Food Specialties, et son sous-licencié et distributeur Dempsey n’est pas en faveur du Déposant en vertu du paragraphe 50(1) de la Loi. Je suis en désaccord pour les raisons suivantes.

[21]           Premièrement, j’abonde dans le sens du Déposant voulant que M. Thomas soit qualifié pour traiter de l’emploi de la Marque du Déposant au Canada. Comme susmentionné, M. Thomas a clairement démontré dans les paragraphes d’introduction de son affidavit qu’à titre d’avocat spécialisé dans les marques de commerce au service du Déposant, il est responsable de la gestion d’une partie du portefeuille de marques de commerce du Déposant, qui comprend la Marque, et qu’il a une connaissance personnelle des faits contenus dans son affidavit. Plus précisément, M. Thomas a expliqué que le rôle du Déposant est de gérer le portefeuille de marques de commerce de DSM et des autres filiales de DSM, dont DSM Food Specialties, et que, à ce titre, il a accès et il est familier avec les données historiques, de marketing et de ventes de DSM Food Specialties concernant les produits d’extraits de levure, dont ceux vendus en liaison avec la Marque. M. Thomas a clairement indiqué qu’en vertu d’un contrat verbal d’utilisation entre le Déposant et DSM Food Specialties, DSM Food Specialties est autorisé à employer les marques de commerce du Déposant, y compris la Marque, en liaison avec la fabrication et la vente d’une variété de produits et qu’en vertu de ce contrat d’utilisation, le Déposant exerce un contrôle direct et indirect sur la nature et la qualité des produits fabriqués et vendus par DSM Food Specialties sous licence. Le fait que ce contrat soit verbal plutôt qu’écrit et que M. Thomas ne précise pas s’il était personnellement présent ou non lorsque ce contrat a été conclu n’empêche pas M. Thomas d’attester de l’existence d’un tel contrat, particulièrement en raison de son rôle et de ses responsabilités au sein de l’entreprise du Déposant. Comme l’a souligné le juge en chef Lutfy dans Eva Gabor International Ltd c. 1459243 Ontario Inc, 2011  (C.F.) 18, exiger que les déposants fournissent des affidavits de plusieurs employés impliqués dans l’emploi d’une marque de commerce, en plus de celui du propriétaire, ne serait pas dans l’intérêt public en vertu de l’article 45, ni conforme aux exigences peu élevées en matière de preuve d’emploi, sans compter que le Requérant a décidé de ne pas contre-interroger M. Thomas au sujet de son affidavit. Transposant les commentaires de l’agente d’audience principale Savard dans Pitblado Buchwald Asper c. Hockey Ventures Inc (2002), 25 C.P.R. (4th) 71 (CMOC), je n’ai aucune raison de douter de la connaissance personnelle des faits de M. Thomas comme énoncés dans son affidavit ou de son examen des dossiers d’entreprise du Déposant.

[22]           Deuxièmement, je suis d’accord avec le Déposant que dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45, le Déposant a simplement besoin de produire une déclaration sous serment en ce qui a trait au contrôle exercé dans le cadre du contrat d’utilisation; les détails quant à la façon dont ce contrôle est exercé ne sont pas nécessaires. L’article 50 de la Loi prévoit que « le propriétaire, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services ». En l’espèce, aucun élément de preuve ne démontre que le Déposant n’a pas exercé, directement ou indirectement, le contrôle de la nature et de la qualité des marchandises. Au contraire, M. Thomas a expressément affirmé que le Déposant avait le contrôle direct et indirect de la nature et de la qualité des marchandises fabriquées et vendues sous licence par DSM Food Specialties. Ce témoignage n’a pas été mis en doute en contre-interrogatoire. Encore, je n’ai aucune raison de ne pas accepter les déclarations de M. Thomas telles quelles. Par conséquent, je suis disposée à conclure que l’emploi de la Marque par DSM Food Specialties est en faveur du Déposant en vertu du paragraphe 50(1) de la Loi. Un parallèle peut être tracé entre l’affaire en cause et la décision rendue dans Quarry Corp Ltd c. Bacardi & Co Ltd (1996), 72 C.P.R. (3d) 25 (C.F. 1re inst.) au paragr. 29, dans laquelle il a été avancé que :

[TRADUCTION]

La preuve du demandeur en ce qui concerne son licencié est courte, mais, à mon avis, fiable. Il n’y a pas de contestation sur le fait que l’emploi par le licencié est en faveur du propriétaire de la marque de commerce. L’affidavit de Cantu affirme que le demandeur « a contracté une licence avec Casa Cuervo, S.A. de C.V. » et que les produits fabriqués par le licencié « sont sujets aux normes de qualité » du demandeur. Cette déclaration est une preuve plus qu’une simple allégation.

[soulignement ajouté]

 

de même qu’avec les décisions rendues dans Pitblado, supra, p. 8; Bereskin & Parr c. Movenpick-Holding (2008), 69 C.P.R. (4th) 243 (COMC) aux p. 249 et 250; et Smart & Biggar c. Vincenzo Greco & Giuseppina Greco a Partnership, (2010) COMC 116 au paragr. 15; entre autres, dans lesquelles il a été avancé que, dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45, s’il est fait mention d’une licence et qu’il y a une déclaration dans l’affidavit voulant que le propriétaire ait le contrôle sur la nature et la qualité des marchandises, alors l’emploi est considéré comme conforme aux dispositions du paragraphe 50(1) de la Loi.

[23]           Troisièmement, je suis d’accord avec le Déposant qu’en ce qui concerne l’emploi de la Marque par Dempsey, le distributeur canadien de DSM Food Specialties, il est bien établi en droit que l’emploi d’une marque de commerce par un distributeur peut être attribué au déposant indépendamment de tout contrat de licence avec le distributeur [voir Manhattan Industries Inc. c. Princeton Manufacturing Ltd. (1971), 4 C.P.R. (2d) 6 (C.F. 1re inst.) à 16-17 et Osler, Hoskin & Hartcourt c. US Tobacco Co (1997), 77 C.P.R. (3d) 475 (C.F. 1re inst.) aux 484-485].

Connaissement maritime en pièce B

[24]           Le Requérant affirme que le connaissement maritime en pièce B de l’affidavit de M. Thomas consiste en une preuve par ouï-dire inadmissible puisque le souscripteur d’affidavit est un employé du Déposant, et qu’à ce titre, il ne peut attester de l’existence ou de l’authenticité du connaissement maritime de Dempsey, le distributeur canadien du Déposant. Le Requérant affirme que, par ailleurs, si le connaissement maritime est admissible, il ne démontre pas l’emploi de la Marque en liaison avec les marchandises visées par l’enregistrement puisque le connaissement maritime fait référence à « GB SELECT CHICKEN BROTH » (bouillon de poulet GB SELECT). Le Requérant affirme également que le connaissement maritime n’est pas en soi une preuve de vente des marchandises visées par l’enregistrement, mais simplement qu’un envoi a été fait de Dempsey à Baxters Canada. Le Requérant affirme également qu’il y a une ambiguïté dans l’utilisation des termes « produits GB SELECT » au paragraphe 15 de l’affidavit de M. Thomas. Je suis en désaccord avec les arguments du Requérant pour les raisons suivantes.

[25]           Premièrement, le connaissement maritime a été produit par M. Thomas à l’appui de sa déclaration de connaissance personnelle en ce qui concerne les ventes au Canada des marchandises visées par l’enregistrement et arborant la Marque au cours de la Période pertinente. Je suis d’accord avec le Déposant qu’un parallèle peut être tracé entre l’affaire en cause et celle de Quarry Corp, supra, alors qu’un défendeur, dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45, a affirmé qu’une facture produite en pièce jointe de l’affidavit du souscripteur du déposant constituait une preuve par ouï-dire inadmissible parce qu’elle avait été produite par le souscripteur d’affidavit du déposant et non pas par le distributeur ou l’acquéreur. La cour, toutefois, a considéré que la preuve était admissible parce que la facture avait été produite à l’appui de la déclaration du souscripteur de l’affidavit en ce qui concernait sa connaissance personnelle des marchandises arborant la marque de commerce au Canada. Pareillement, dans Eva Gabor, supra, la cour a jugé que le souscripteur d’affidavit du déposant était en mesure d’attester de l’existence et de la nature des dépliants promotionnels du déposant afin de démontrer l’emploi, malgré le fait que le souscripteur n’ait pas été personnellement impliqué dans l’insertion de ces dépliants dans l’emballage du déposant.

[26]           Deuxièmement, je suis d’accord avec le Déposant que l’on peut raisonnablement déduire que la référence à « GB SELECT CHICKEN BROTH 55LB » (soulignement ajouté) sur le connaissement maritime se rapporte à une saveur spécifique d’extrait de levure vendu en poudre par le Déposant en liaison avec la Marque. En effet, M. Thomas a clairement attesté que les extraits de levure GB SELECT du Déposant sont adaptés aux exigences de saveur particulières de leurs clients, dont le bœuf, le poulet et le porc. Il a également expliqué que la plupart des produits d’extrait de levure de DSM Food Specialties sont vendus en poudre en sacs ou en caisses-outres de 44 à 55 lb (20 à 25 kg), selon la densité du produit.

[27]           Troisièmement, bien que j’accorde une certaine valeur à la déclaration du Requérant voulant que le connaissement maritime en pièce B ne démontre pas en soi la vente des marchandises visées par l’enregistrement, mais simplement qu’un envoi a été fait de Dempsey à Baxters Canada, situé à Saint-Hyacinthe dans la province de Québec, je peux raisonnablement déduire, selon une juste lecture de l’affidavit de M. Thomas dans son ensemble, qu’un tel envoi a été fait à la suite d’une vente des marchandises visées par l’enregistrement à la date du connaissement maritime, soit le 15 février 2010, ou avant cette date, mais toujours au cours de la Période pertinente. En effet, M. Thomas a clairement attesté que les ventes au Canada des extraits de levure de DSM Food Specialties pour usage industriel au cours de la Période pertinente représentaient environ 600 000 $ CAN, dont 108 000 $ CAN correspondent à des produits GB SELECT. M. Thomas a également expliqué le cours normal du commerce de DSM Food Specialties, ainsi que le rôle et les responsabilités des distributeurs de DSM Food Specialties. Je remarque également que des connaissements maritimes ont été acceptés comme un élément de preuve par cette Commission dans NutraGenics Inc c. Laurentian Laboratories Inc (1997), 75 C.P.R. (3d) 525 (COMC), pour démontrer les ventes et les envois de marchandises.

[28]           Quatrièmement, je suis d’accord avec le Déposant que l’emploi des termes « produits GB SELECT » au paragraphe 15 de l’affidavit de M. Thomas peut aisément être compris comme une référence aux marchandises visées par l’enregistrement. Encore, l’affidavit de M. Thomas doit être pris en considération dans son ensemble. De plus, le paragraphe 15 de l’affidavit de M. Thomas affirme que les « produits » vendus en liaison avec la Marque représentaient un sous-ensemble des 600 000 $ CAN d’extraits de levure vendus par le Déposant au cours de la Période pertinente.

Matériel publicitaire et promotionnel

[29]           Le Requérant affirme que l’emploi des dépliants promotionnels déposés en pièces C et D de l’affidavit de M. Thomas ne constitue pas en soi une preuve d’emploi de la Marque en vertu de l’article 4 de la Loi. C’est exact. Toutefois, j’estime qu’ils appuient effectivement, dans une certaine mesure, les déclarations de M. Thomas en ce qui concerne l’emploi de la Marque en liaison avec les marchandises visées par l’enregistrement au Canada au cours de la Période pertinente. En effet, les dépliants arborent une date de copyright de 2009 et décrivent les produits d’extraits de levure de DSM Food Specialties, dont les produits vendus sous la Marque.

Disposition

[30]           Considérant la preuve dans son ensemble, et tenant compte de l’objet et de la portée de l’article 45 de la Loi, je suis d’avis que le Déposant a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les marchandises visées par l’enregistrement au cours de la Période pertinente. Les déclarations de M. Thomas dépassent la simple assertion d’emploi, laquelle constitue « une question de droit » [voir Mantha & Associés/Associates c. Central Transport, Inc.(1995), 64 C.P.R. (3d) 354 (C.A.F.)], et suffisent à établir que la Marque n’est pas du « bois mort » au Canada.

[31]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu en conformité avec les dispositions de l’article 45 de la Loi.

______________________________

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.