Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

 

PROCÉDURE PRÉVUE À L’ARTICLE 45

MARQUE DE COMMERCE : ENTRE NOUS

NO D’ENREGISTREMENT : TMA 436,267

 

 

 

Le 15 février 2005, à la demande de Lang Michener LLP, le registraire a donné l’avis prévu à l’art. 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la « Loi »), à 3362426 Canada Inc., faisant affaire sous le nom de Primus Telecommunications Canada, qui était à l’époque la propriétaire inscrite de l’enregistrement no TMA 436,267 relatif à la marque de commerce ENTRE NOUS (la « marque »). La marque est enregistrée en liaison avec des [traduction] « services de télécommunications, nommément des services de téléphonie interurbaine ».

 

L’article 45 exige que le propriétaire inscrit d'une marque de commerce indique, à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis, en l’espèce entre le 15 février 2002 et le 15 février 2005. Si la marque n’a pas été employée au cours de cette période, le propriétaire de l’enregistrement est tenu d’indiquer la date à laquelle la marque a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date.

 

Le par. 4(2) de la Loi, reproduit ci-dessous, définit ce qui constitue un emploi en liaison avec des services :

4. (2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

 

En réponse à l’avis donné en vertu de l’article 45, un affidavit de Rob Warden, daté du 15 septembre 2005, a été produit. La partie requérante a produit une argumentation écrite. La propriétaire de l’enregistrement a demandé une prorogation de délai rétroactive pour produire un affidavit modifié de Rob Warden daté du 28 août 2006 (la demande comportait aussi les observations écrites de la propriétaire de l’enregistrement). La partie requérante s’est objectée à l’octroi d’une prorogation de délai rétroactive. Le registraire a demandé à la propriétaire de l’enregistrement de produire un affidavit  de M. Warden expliquant l’[traduction]« erreur d’écriture commise par inadvertance » que la propriétaire de l’enregistrement invoquait au soutien de sa demande de prorogation de délai rétroactive, afin que le registraire puisse déterminer si une prorogation de délai rétroactive devrait être accordée. Aucun affidavit semblable n’a été produit. Par conséquent, la prorogation de délai rétroactive n’a pas été accordée et, le 28 août 2006, l’affidavit de M. Warden a été renvoyé à la propriétaire de l’enregistrement.

 

Aucune des deux parties n’a demandé d’audience.

 

Dans son affidavit du 15 septembre 2005, M. Warden affirme qu’il est vice-président, marketing résidentiel de Primus Telecommunications Canada Inc., une filiale à 100 p. 100 de 3082833 Nova Scotia Company, qui était auparavant 3362426 Canada Inc. M. Warden fournit comme pièce A des documents confirmant la relation entre les différentes sociétés. Il atteste ensuite que Primus Telecommunications Canada Inc. est la propriétaire inscrite de l’enregistrement no 436,237, mais il fournit un enregistrement qui désigne 3362426 Canada Inc. comme la propriétaire. D’après le contenu de la pièce A, il appert que la propriétaire de la marque ENTRE NOUS à l’époque était 3082833 Nova Scotia Company. Je conclus donc que l’affirmation de M. Warden selon laquelle Primus Telecommunications Canada Inc. (qu’il appelle « Primus ») était la propriétaire est inexacte.

 

M. Warden décrit Primus comme un fournisseur de services de télécommunications, dont des services d’interurbain au Canada. Il affirme en outre que Primus et ses prédécesseurs en droit (qui ne sont pas nommés) ont employé la marque de commerce ENTRE NOUS en liaison avec la fourniture de services de téléphonie interurbaine à des clients résidentiels depuis au moins aussi tôt que le 5 octobre 1994 et continuent de le faire à ce jour. Comme pièce C, M. Warden fournit des [traduction] « copies conformes de factures émises par Primus relativement à des services de téléphonie interurbaine fournis à des clients par Primus, sur lesquelles apparaît la marque de commerce ENTRE NOUS […] ». Il affirme : [traduction] « Ces factures sont représentatives des factures émises à des clients entre les dates pertinentes du 15 février 2002 et du 15 février 2005, soit le 3 décembre 2004 et le 10 janvier 2005. » Les deux factures produites portent des dates comprises dans la période pertinente de trois ans et mentionnent la marque de commerce ENTRE NOUS dans la partie de la facture qui fournit les détails de la facturation relative à un service fourni en vertu duquel les clients abonnés bénéficient de taux d’interurbain réduits lorsqu’ils appellent des clients qui sont inscrits à leur plan ENTRE NOUS (voir le paragraphe 6 de l’affidavit Warden pour les détails concernant le service ENTRE NOUS).

 

La partie requérante a soulevé différentes questions au soutien de sa position selon laquelle cet enregistrement relatif à ENTRE NOUS devrait être radié. À mon avis, la principale question est celle de savoir qui a employé la marque ENTRE NOUS.

 

La propriétaire de l’enregistrement est tenue de démontrer un emploi par elle-même ou par une partie dont l’emploi lui profite conformément à l’art. 50 de la Loi, qui énonce :

50. (1) Pour l’application de la présente loi, si une licence d’emploi d’une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l’emploi, la publicité ou l’exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial — ou partie de ceux-ci — ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s’il s’agissait de ceux du propriétaire.


(2) Pour l’application de la présente loi, dans la mesure où un avis public a été donné quant à l’identité du propriétaire et au fait que l’emploi d’une marque de commerce fait l’objet d’une licence, cet emploi est réputé, sauf preuve contraire, avoir fait l’objet d’une licence du propriétaire, et le contrôle des caractéristiques ou de la qualité des marchandises et services est réputé, sauf preuve contraire, être celui du propriétaire.

 

Or, il n’y a aucun élément de preuve indiquant que 3362426 Canada Inc., faisant affaire sous le nom de Primus Telecommunications Canada, ou 3082833 Nova Scotia Company ont employé la marque ENTRE NOUS. Selon la déclaration sous serment de M. Warden, Primus Telecommunications Canada Inc. et ses prédécesseurs en droit non nommés ont employé la marque. Les factures fournies, dont M. Warden dit qu’elles ont été émises par Primus Telecommunications Inc., mentionnent simplement Primus Canada.

 

En outre, il n’y a aucun élément de preuve qui permette à la propriétaire de l’enregistrement d’invoquer à son avantage l’art. 50. M. Warden n’affirme pas que Primus Telecommunications Inc. a obtenu de la propriétaire de l’enregistrement une licence l’autorisant à employer la marque ENTRE NOUS ou que la propriétaire de l’enregistrement exerce, en vertu d’une licence, un contrôle direct ou indirect sur les caractéristiques ou la qualité des services. Il n’y a pas non plus d’élément de preuve indiquant que l’avis visé au par. 50(2) aurait été donné. 

 

M. Warden atteste, par contre, que Primus Telecommunications Canada Inc. est une filiale à 100 p. 100 de 308233 Nova Scotia Company, qui était auparavant 3362426 Canada Inc., mais cela est insuffisant pour donner droit au bénéfice de l’art. 50. Les liens entre des sociétés n’établissent pas l’existence d’un accord de licence; il faut prouver que la propriétaire de l’enregistrement contrôle l’emploi de sa marque de commerce par sa filiale et prend des mesures pour assurer les caractéristiques et la qualité des services fournis. [Voir MCI Communications Corp. c. MCI Multinet Communications Inc. (1995), 61 C.P.R. (3d) 245 (C.O.M.C.), à la p. 254, et Cheung Kong (Holdings) Ltd. c. Living Realty Inc. (1999), 4 C.P.R. (4th) 71 (C.F. 1re inst.), à la p. 83.] Je constate que la partie requérante a invoqué la décision dans Automobility Distribution c. Jiangsu Electronics Industries Ltd. (2005), 43 C.P.R. (4th) 157, où l’agent principal d’audience Savard a statué que le fait que le propriétaire de l’enregistrement soit l’unique actionnaire de l’utilisateur de la marque de commerce n’est pas suffisant pour justifier l’application de l’art. 50; si un propriétaire d’enregistrement, en tant qu’unique actionnaire, exercer un contrôle sur les caractéristiques et la qualité des services fournis, la preuve devrait l’indiquer clairement.  

 

Pour les motifs qui précèdent, je conclus que la propriétaire de l’enregistrement n’a pas répondu adéquatement à l’avis donné en vertu de l’art. 45, et l’enregistrement devrait donc être radié.

 

La partie requérante a soulevé plusieurs autres motifs sur lesquels elle s’appuie pour soutenir que l’enregistrement devrait être radié, dont les suivants :

  1. la marque n’a pas fait l’objet d’un « emploi » en liaison avec les services visés par l’enregistrement au sens du par. 4(2) au cours de la période pertinente;
  2. la marque n’a pas été employée en tant que « marque de commerce » au sens de l’art. 2;
  3. l’émission de factures est exceptionnelle, et n’est pas survenue dans la pratique normale du commerce;
  4. il n’y a aucun élément de preuve qui justifie le défaut d’emploi de la marque par la propriétaire pendant la période pertinente.

 

Je suis d’accord avec le quatrième motif, mais non avec les autres.

 

Concernant le premier motif, j’estime qu’eu égard à la nature des services fournis en liaison avec la marque ENTRE NOUS, ces services sont inclus dans la description [traduction] « services de télécommunication, nommément des services de téléphonie interurbaine ». Deuxièmement, je ne me préoccupe pas du fait que les factures fournies ne montrent aucune activités au compte ENTRE NOUS du destinataire au cours de la période pertinente; il est clair que ces services étaient offerts, et cela est suffisant  [Wenward (Canada) Ltd. c. Dynaturf Co., 28 C.P.R. (2d) 20].   

 

Concernant le deuxième motif, le fait que la marque ENTRE NOUS soit écrite en lettres majuscules de manière à la faire ressortir du reste du texte suffit à la rendre reconnaissable en tant que marque de commerce. En outre, l’emploi d’ENTRE-NOUS, au lieu d’ENTRE NOUS, est sans conséquence [voir le 2e principe dans Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535 (C.O.M.C.)].

 

Concernant le troisième motif, une seule facture au cours de la période pertinente peut suffire, à condition qu’elle s’inscrive dans le cadre de la pratique normale du commerce [Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. (1986), 13 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.), et Quarry Corp. c. Bacardi & Co. (1996), 72 C.P.R. (3d) 25 (C.F. 1re inst.), conf. par (1999), 86 C.P.R. (3d) 127 (C.A.F.)]. En l’espèce, il n’y a aucune raison de conclure que les transactions n’étaient pas authentiques, et je suis convaincue que la pratique normale du commerce a été démontrée.

 

Décision

L’enregistrement no TMA 436,267 sera radié, en conformité avec le par. 45(5) de la Loi.

 

 

FAIT À TORONTO, EN ONTARIO, LE 21 FÉVRIER 2008.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

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