Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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                                                                                                                        TRADUCTION

 

Citation: 2010 COMC 003

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

de Classical Remedia Ltd. à la demande

n1299303 produite par 1404568 Ontario Limited en vue de l’enregistrement de la marque de commerce TOCHA TEA

 

 

[1           Le 26 avril 2006, 1404568 Ontario Limited (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce TOCHA TEA (la Marque).  La demande d’enregistrement est fondée sur un emploi projeté au Canada en liaison avec les marchandises suivantes, telles que révisées : « thés, tisanes et boissons non alcoolisées au thé ».  Le droit à l’usage exclusif du mot TEA, en dehors de la maque de commerce a fait l’objet d’un désistement. 

 

[2      La demande d’enregistrement a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 15 août 2007. Le 15 octobre 2007 Classical Remedia Ltd. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition, dans laquelle elle invoque des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)a), b), c) et d) de la Loi.  La Requérante a déposé et signifié une contre-déclaration.

 

[3      À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit une copie certifiée de l’enregistrement no LMC490988 pour la marque de commerce THÉ TUOCHA TEA et Dessin (reproduite ci-dessous).  À l’appui de sa demande d’enregistrement, la Requérante a produit l’affidavit de

M. Richard  Ottenhoff. 

                                               
THÉ TUOCHA TEA & DESIGN
 

[4      Monsieur Ottenhoff est le président de la Requérante, qui fait affaire sous le nom de Multatuli Coffee Merchants.  Sa société a commencé à vendre du TOCHA TEA vers

le 9 février 2007, et les ventes ont dépassé les 23 000 $ depuis cette date.  Des factures ont été produites comme preuve des ventes réalisées par la Requérante auprès de ses clients.  Les marchandises TOCHA TEA de la Requérante sont vendues au Canada dans divers magasins de vente au détail comme les épiceries, les grands magasins, les boulangeries et les salons de thé,  ainsi que par les écoles pour recueillir des fonds. 

 

[5      Une enveloppe illustrant la façon dont la Marque est apposée sur le produit au Canada est jointe à l’affidavit de M. Ottenhoff comme pièce A.  Une autre enveloppe est jointe comme pièce B à son affidavit, laquelle contient des échantillons d’articles promotionnels, dont des cartes postales, qui ont été donnés à des clients et à des détaillants potentiels depuis le mois

de février 2007. Monsieur Ottenhoff souligne que plus de 250 cartes postales ont été transmises par la poste à plus de 250 clients potentiels depuis le mois de février 2007.  Une publicité annonçant le TOCHA TEA de la Requérante publiée dans www.IndependentVoice.ca, un journal distribué dans la région de Kingston, est également jointe à l’affidavit de M. Ottenhoff comme pièce E

 

[6      Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit.  Il n’a pas été tenu d’audience.

 

Le fardeau de la preuve et les dates pertinentes

[7      Il incombe à la Requérante d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985,

ch. T-13 (la Loi). Toutefois, l'Opposante a le fardeau initial de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun de ses motifs d'opposition [voir la décision John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

 

[8           Voici les dates pertinentes s’appliquant aux motifs d’opposition :

         art. 30 – la date de dépôt de la demande d’enregistrement [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), p. 475];

         al. 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         par. 16(3) – la date de dépôt de la demande d’enregistrement [voir par. 16(3)];

         absence de caractère distinctif – la date de dépôt de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)].

 

Motif fondé sur l’alinéa 30e)

[9           L’Opposante a fait valoir que la Requérante n’a pas l’intention d’employer la Marque, ni d’en permettre l’usage, en liaison avec les marchandises décrites dans la demande d’enregistrement.  L’Opposante n’a produit aucune preuve ni formulé aucun argument établissant que la Requérante n’avait pas l’intention, à la date de dépôt de la présente demande, d’employer la Marque en liaison avec les marchandises énumérées dans la demande.  De plus, rien dans la preuve produite par la Requérante ne contredit clairement la prétention suivant laquelle elle entend employer la Marque en liaison avec les marchandises visées par la demande d’enregistrement.  Par conséquent, le motif d'opposition fondé sur l'alinéa 30e) est rejeté. 

 

Motif fondé sur l’alinéa30i)

[10       L'alinéa 30i) de la Loi exige que la demande d'enregistrement renferme une déclaration portant que la Requérante est convaincue qu'elle a le droit d'employer la marque au Canada en liaison avec les marchandises.  La Requérante a produit cette déclaration dans la demande d’enregistrement. Si la Requérante fournit la déclaration exigée à l'alinéa 30i), le motif d'opposition fondé sur cette disposition ne peut être retenu que dans des cas exceptionnels, par exemple, lorsque la mauvaise foi de la Requérante a été établie (Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155). Puisque ce n'est pas le cas en l'espèce, je rejette ce motif d'opposition.  

 

 

 

Autres motifs d’opposition

[11       Chacun des autres motifs d’opposition repose sur l’allégation que la Marque est susceptible de créer de la confusion avec la marque THÉ TUOCHA TEA et Dessin de l’Opposante, enregistrée en liaison avec du « thé ». Quant au motif fondé sur l’al. 12(1)d), l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial en prouvant l’existence de l’enregistrement dont elle se réclame. 

 

[12       En ce qui concerne le motif fondé sur le droit à l’enregistrement, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau initial de prouver l’emploi de sa marque de commerce au Canada avant la date de production de la demande d’enregistrement.  Quant au motif fondé sur le caractère distinctif, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau initial de démontrer qu’à la date de dépôt de sa déclaration d’opposition, sa marque de commerce était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la marque visée par la demande [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.), p. 58].  Dans les cas où l’opposant se borne à produire une copie certifiée de l’enregistrement de sa marque, le registraire tiendra pour acquis qu’il n’a fait qu’un usage minime de sa marque de commerce [voir Entre Computer Centers, Inc. c. Global Upholstery Co. (1991), 40 C.P.R. (3d) 427 (C.O.M.C.)].  Par conséquent, dans les cas où l’Opposante soutient que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement et que la marque n’est pas distinctive, il ne suffit pas qu’elle dépose une copie certifiée de l’enregistrement de sa marque pour s’acquitter du fardeau de preuve qui lui incombe à ce titre.  En conséquence, les motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif sont rejetés.

 

[13       Il suffit donc que je détermine, pour trancher la question de l’enregistrabilité de la marque, s’il existe un risque de confusion. 

 

Le test en matière de confusion

 

[14       Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Dans l'application du test de la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, dont celles qui sont expressément mentionnées au paragraphe 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou des noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent. Les facteurs énumérés ne reçoivent pas nécessairement le même poids.

 

[15       Dans les arrêts Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401, la Cour suprême du Canada a indiqué la procédure à appliquer dans l'appréciation des circonstances afin d'établir s'il y a confusion entre deux marques de commerce. C'est donc à la lumière de ces principes généraux que j'apprécierai l'ensemble des circonstances de l'espèce.

 

[16       Bien que la marque de l’Opposante et la Marque possèdent un certain degré de caractère distinctif inhérent, ni l'une ni l'autre des marques ne revêt un caractère particulièrement distinctif étant donné que les deux décrivent les marchandises en liaison avec lesquelles elles sont employées.

 

[17       La mesure dans laquelle chacune des marques est devenue connue au Canada favorise légèrement la Requérante.  À cet égard, il appert du certificat d’enregistrement de l’Opposante que cette dernière a déposé une déclaration d’emploi concernant sa marque de commerce le 20 février 1998, mais rien ne prouve que l’emploi de cette marque a continué depuis cette date.  Par contre, la Requérante a démontré un certain emploi de la Marque ainsi que de la publicité à son égard depuis le 9 février 2007. 

 

[18       Quant au genre des marchandises, la marque de commerce de l’Opposante est déposée en liaison avec du thé, et les marchandises visées par la demande d’enregistrement sont les thés, tisanes et boissons non alcoolisées au thé. La Marque est donc destinée à être employée en liaison avec des marchandises identiques à celles de l’Opposante. Les voies commerciales seraient donc aussi les mêmes. 

 

[19       Sur le plan de la présentation et des idées qu’elles suggèrent, les marques se ressemblent beaucoup. À cet égard, la première composante de la Marque est TOCHA, qui est presque identique à la composante principale de la marque de l’Opposante, soit le mot TOUCHA.  Comme les marques des deux parties comprennent également le mot « tea » ou son équivalent « thé », en français, les deux marques suggèrent un type de thé.  

 

[20       La question qui se pose est celle de savoir si un consommateur qui a un souvenir général et imparfait de la marque de l'Opposante pourrait vraisemblablement croire, en voyant la marque de la Requérante, que les marchandises se rapportant à ces marques ont la même origine.  Après l’examen de toutes les circonstances de l’espèce, je ne suis pas convaincue que la Requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer l'absence de probabilité raisonnable de confusion entre les marques en date des présentes.  J’en viens à cette conclusion en m’appuyant sur le fait que les marchandises sont identiques et que les marques sont très semblables.  Le motif d’opposition fondé sur l’al. 12(1)d) est donc accueilli. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dispositif

 

[21       En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués conformément au paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément aux dispositions du paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

 

FAIT À Gatineau (Québec), LE 28 JANVIER 2010.

 

 

 

 

C.R. Folz

Membre,

Commission des oppositions des marques de commerce  

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-Jacques Goulet, LL.L.

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