Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

BW v2 Logo

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 88

Date de la décision : 2015-05-25

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DES OPPOSITIONS produites par Metroland Media Group Ltd. à l'encontre des demandes d'enregistrement nos 1,527,871 et 1,540,665 pour les marques de commerce FLYERTOWN et FLYERTOWN & Dessin au nom de Wishabi, Inc.

Introduction

[1]               Wishabi, Inc. (la Requérante) a produit des demandes d’enregistrement pour les marques de commerce FLYERTOWN (la Marque nominale) et FLYERTOWN & Dessin (la Marque figurative) qui est reproduite ci-dessous (collectivement appelées les Marques), sur la base d'un emploi projeté au Canada.

FLYERTOWN & Design

[2]               Metroland Media Group Ltd. (l'Opposante) s'est opposée aux demandes d'enregistrement au motif principal qu'il existe une probabilité raisonnable de confusion entre les Marques et les marques déposées de l'Opposante, FLYERLAND et FLYERLAND.CA & Dessin; cette dernière étant reproduite ci-dessous.

FLYERLAND.CA Design

 

[3]               Les parties offrent toutes deux des services qui comprennent, entre autres choses, la promotion et le marketing de produits et de services de tiers au moyen de circulaires en ligne.

[4]               Pour les raisons exposées ci-dessous, je rejette les oppositions.

Le dossier

[5]               Le 13 mai 2011 et le 22 août 2011 respectivement, la Requérante a produit la demande d'enregistrement no 1,527,871 à l'égard de la Marque et la demande d'enregistrement no 1,540,665 à l'égard de la Marque figurative sur la base, dans les deux cas, d'un emploi projeté au Canada en liaison avec les services suivants :

[traduction]
Annonce des produits et des services de tiers; promotion et marketing des produits et des services de tiers au moyen de sites Web interactifs de magasinage en ligne, de circulaires en ligne, d'annonces, de bons de réduction et d'offres promotionnelles; exploitation d'un site Web de commerce électronique qui met les visiteurs du site en relation avec des marchands et des fabricants par le biais du magasinage en ligne, de circulaires, d'annonces, de bons de réduction et d'offres promotionnelles; fournisseur de logiciels-services offrant des logiciels et des bases de données sur le Web pour créer, stocker, publier et diffuser en ligne des circulaires, des annonces, des bons de réduction et des offres promotionnelles; fournisseurs de logiciels-services offrant des logiciels et des bases de données sur le Web pour le suivi, l'enregistrement et l'analyse des habitudes de recherche et de magasinage en ligne des consommateurs.

Les demandes d'enregistrement ont, toutes deux, été annoncées le 11 janvier 2012. Le 6 juin 2012, l'Opposante a produit des déclarations d'opposition à l'égard de chacune des demandes, fondées sur les motifs d'opposition énoncés à l'article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), à savoir : la non-conformité à l'article 30i), la non-enregistrabilité aux termes de l'article 12(1)d), l'absence de droit à l'enregistrement aux termes des articles 16(3)a) et b), et l'absence de caractère distinctif aux termes des articles 38(2)d) et 2 de la Loi. La plupart de ces motifs requièrent de déterminer la probabilité de confusion entre les Marques et les marques déposées de l'Opposante, FLYERLAND, qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC769,135, et FLYERLAND.CA & Dessin, qui fait l'objet de l'enregistrement no LMC768,681, et qui sont toutes deux enregistrées en liaison avec les services suivants [traduction] : (1) Promotion et marketing des produits et des services de tiers au moyen de circulaires, d'annonces, de bons de réduction, d'offres promotionnelles, de catalogues, de magazines et d'offres spéciales en ligne.

[6]               La Requérante a produit, dans chaque affaire, une contre-déclaration dans laquelle elle conteste les motifs d'opposition, et a demandé une décision interlocutoire afin de faire retrancher divers paragraphes des déclarations d'opposition. Le 17 septembre 2012, l'Opposante a produit, dans chaque affaire, une déclaration d'opposition modifiée. Le 26 septembre 2012, une décision interlocutoire a été rendue dans chaque affaire, accordant à l'Opposante l'autorisation de produire ses déclarations d'opposition telles que modifiées et ordonnant de retrancher des déclarations d'opposition le motif fondé sur l'article 16(3)b).

[7]               Le 18 décembre 2012, au soutien de ses deux oppositions, l'Opposante a produit l'affidavit de Callie Hirsche, ainsi que des copies certifiées de ses enregistrements nos LMC768,681 et LMC769,135, correspondant respectivement aux marques FLYERLAND.CA & Dessin et FLYERLAND. Le 1er mai 2013, l'Opposante a obtenu, dans chaque affaire, l'autorisation, en vertu du paragraphe 44(1) du Règlement sur les marques de commerce DORS/96-195 (le Règlement) de produire l'affidavit de Terry Kukle en remplacement de l'affidavit de Callie Hirsche, cette dernière n'étant plus employée par l'Opposante et n'ayant plus, par conséquent, à se rendre disponible pour un contre-interrogatoire. Le 29 octobre 2013, à la suite du défaut de M. Kukle de se présenter au contre-interrogatoire, l'affidavit de ce dernier a été exclu de la preuve de l'Opposante dans les deux affaires, conformément aux dispositions du paragraphe 44(5) du Règlement.

[8]               Comme preuve dans chaque affaire, la Requérante a produit l'affidavit de Matthew Cheung, et deux affidavits de Jane Buckingham. Aucun des déposants de la Requérante n'a été contre-interrogé.

[9]               Dans chaque affaire, seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit. La Requérante a également demandé la tenue d'une audience dans chaque affaire, pour ensuite annuler ses demandes d'audience.

Fardeau de preuve

[10]           C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L'Opposante a, toutefois, le fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), p. 298; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Motifs d'opposition rejetés sommairement

Article 30i) – Non-conformité

[11]           L'Opposante allègue que les demandes ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 30 en ce que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer les Marques au Canada en liaison avec les services visés par la demande connaissait, ou devait forcément connaître, l'existence des marques de commerce FLYERLAND et FLYERLAND.CA & Dessin de l'Opposante, lesquelles avaient été antérieurement employées au Canada en liaison avec les services de l'Opposante.

[12]           L'article 30i) de la Loi exige simplement que le requérant se déclare convaincu, dans sa demande, d'avoir droit à l'enregistrement de sa marque de commerce. Lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée, un motif d'opposition fondé sur l'article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu'il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), p. 155]. Le simple fait que le requérant puisse connaître l'existence de la marque de commerce ou du nom commercial de l'opposant n'est pas suffisant en soi pour servir de fondement à une allégation selon laquelle le requérant ne pouvait pas être convaincu d'avoir droit à l'emploi de sa marque de commerce [Woot, Inc c WootRestaurants Inc Les Restaurants Woot Inc 2012 COMC 197 (CanLII)].

[13]           En l'espèce, il n'y a pas la moindre preuve que la Requérante pouvait ne pas être convaincue qu'elle avait droit d'employer les Marques au Canada. En conséquence, ce motif d'opposition est rejeté.

Article 16(3)a) - Absence de droit à l'enregistrement

[14]           L'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement des Marques compte tenu de la révélation et de l'emploi antérieurs des marques de commerce FLYERLAND et FLYERLAND.CA & Dessin de l'Opposante. Bien que l'Opposante invoque l'article 16(1)a) dans chacune de ses déclarations d'opposition, je suis disposée à inférer que l'Opposante entendait, en réalité, invoquer l'article 16(3)a), puisque les demandes sont toutes deux fondées sur un emploi projeté.

[15]           À l'égard de ce motif d'opposition, l'Opposante a le fardeau initial de démontrer que ses marques avaient déjà été employées ou révélées aux dates de production des demandes de la Requérante, et qu'elles n'avaient pas été abandonnées à la date d'annonce des demandes pour les Marques [article 16(5)].

[16]           L'unique preuve de l'Opposante en l'espèce consiste en des copies certifiées de ces deux enregistrements. Or, il a été statué antérieurement que la simple production d'une copie certifiée d'un enregistrement n'est pas suffisante pour permettre à un opposant de s'acquitter de son fardeau de preuve à l'égard d'un motif d'opposition fondé sur une allégation d'absence de droit à l'enregistrement [Entre Computer Centers, Inc v Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (TMOB)].

[17]           En conséquence, ce motif d'opposition est rejeté dans les deux affaires.

Article 2 – Absence de caractère distinctif

[18]           L'Opposante allègue que les Marques ne distinguent pas et ne sont pas adaptées à distinguer les services de la Requérante des services de l'Opposante, en liaison avec lesquels elle a employé ses marques de commerce FLYERLAND et FLYERLAND.CA & Dessin.

[19]           Pour s'acquitter de son fardeau initial à l'égard d'un motif fondé sur l'absence de caractère distinctif, l'Opposante doit démontrer qu'au moins une de ses marques de commerce était devenue suffisamment connue au moment où la procédure d'opposition a été engagée pour faire perdre aux marques de commerce visées par les demandes leur caractère distinctif [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections In. (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF) et Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44, p. 58 (CF 1re inst)].

[20]           En l'espèce, l'Opposante n'a produit aucune preuve de l'emploi ou de la révélation de ses marques. Elle ne s'est donc pas acquittée de son fardeau initial.

[21]           En conséquence, ce motif d'opposition est rejeté dans les deux affaires.

Motifs d'opposition restants

Article 12(1)d) – Non-enregistrabilité

[22]           L'Opposante allègue que les Marques ne sont pas enregistrables eu égard aux dispositions de l'article 12(1)d) de la Loi parce qu'elles créent de la confusion avec ses marques de commerce FLYERLAND, enregistrée sous le no LMC769,135, et FLYERLAND.CA & Dessin, enregistrée sous le no LMC768,681.

[23]           La date pertinente qui s'applique à ce motif d'opposition est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registarire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[24]           Les marques déposées de l'Opposante sont toutes deux en règle. L'Opposante s'étant acquittée de son fardeau de preuve dans chaque affaire, il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'y a aucune probabilité raisonnable que l'une ou l'autre des Marques crée de la confusion avec les marques de commerce de l'Opposante.

Le test en matière de confusion

[25]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi porte que l'emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent.

[26]           Ces facteurs ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu'il convient d'accorder à chacun d'eux n'est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC)]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC), la Cour suprême du Canada a indiqué que le facteur le plus important parmi ceux énoncés à l'article 6(5) de la Loi est souvent le degré de ressemblance entre les marques.

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[27]           Aucune des marques n’est intrinsèquement forte. À cet égard, les marques nominales et figuratives des deux parties sont toutes constituées du mot du dictionnaire d'usage courant FLYER suivi d'un mot ayant une signification géographique (c.-à-d. town et land). En outre, les marques en cause sont toutes, dans une certaine mesure, descriptives des services publicitaires et promotionnels qui sont offerts par les deux parties.

[28]           La marque figurative de l'Opposante comprend également le dessin d'un panier d'achats qui fait partie intégrante de la lettre F, ainsi que l'extension de nom de domaine « .ca ». La Marque figurative de la Requérante comprend un dessin stylisé représentant deux maisons. J'estime que ni l'un ni l'autre de ces éléments supplémentaires ne contribue vraiment à accroître le caractère distinctif inhérent des marques figuratives des parties.

[29]           L'étendue de la protection qui est accordée à une marque augmente si la marque possède un caractère distinctif acquis. La preuve de M. Cheung, déposant de la Requérante et chef du développement des produits chez la Requérante, indique que les Marques sont employées à grande échelle et de façon continue au Canada depuis le 11 octobre 2011. À cet égard, je souligne que les partenaires commerciaux des services FLYERTOWN de la Requérante comprennent des détaillants d'envergure nationale tels que The Bay, Future Shop, Sears, Wal-Mart et Home Depot [para. 7]. Le réseau de diffusion FLYERTOWN comprend le National Post, le Vancouver Sun, le Ottawa Sun, Bell Media, MSN Canada et CTV [para. 8]. En décembre 2013, environ 800 000 Canadiens ont consulté les sites Web hébergés par MSN, Winnipeg Free Press et flyertown.ca, sur lesquels la marque de commerce FLYERTOWN est affichée [para. 16]. Également en 2013, les ventes des services FLYERTOWN ont généré des revenus de près de 1 000 000 $ [para. 19]. À la lumière de cette preuve, je suis convaincue que les Marques sont devenues connues dans une certaine mesure au Canada.

[30]           En revanche, il n'y a au dossier aucune preuve de l'emploi ou de la révélation de l'une ou l'autre des marques de l'Opposante.

[31]           Compte tenu de l'information qui précède, je conclus que, dans l'ensemble, ce facteur favorise la Requérante.

Article 6(5)b) – la période pendant laquelle chacune des marques de commerce a été en usage

[32]            La Requérante a démontré que les Marques sont employées depuis le 11 octobre 2011. Bien que les enregistrements de l'Opposante soient fondés sur des déclarations d'emploi produites le 17 mai 2010, comme je l'ai indiqué précédemment, ces enregistrements établissent tout au plus un emploi minimal [Entre Computer Centers, Inc, précité]. Par conséquent, ce facteur ne favorise de manière significative aucune des parties.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[33]           Pour évaluer ce facteur, je dois comparer l'état déclaratif des services qui figure dans la demande de la Requérante avec les services spécifiés dans l'enregistrement de l'Opposante [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); Miss Universe Inc c Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF)].

[34]           Par souci de commodité, je reproduis ci-dessous les états déclaratifs des services respectifs des parties :

Services de la Requérante

Annonce des produits et des services de tiers; promotion et marketing des produits et des services de tiers au moyen de sites Web interactifs de magasinage en ligne, de circulaires en ligne, d'annonces, de bons de réduction et d'offres promotionnelles; exploitation d'un site Web de commerce électronique qui met les visiteurs du site en relation avec des marchands et des fabricants par le biais du magasinage en ligne, de circulaires, d'annonces, de bons de réduction et d'offres promotionnelles; fournisseur de logiciels-services offrant des logiciels et des bases de données sur le Web pour créer, stocker, publier et diffuser en ligne des circulaires, des annonces, des bons de réduction et des offres promotionnelles; fournisseurs de logiciels-services offrant des logiciels et des bases de données sur le Web pour le suivi, l'enregistrement et l'analyse des habitudes de recherche et de magasinage en ligne des consommateurs.

Services de l'Opposante

(1) Promotion et marketing des produits et des services de tiers au moyen de circulaires, d'annonces, de bons de réduction, d'offres promotionnelles, de catalogues, de magazines et d'offres spéciales en ligne.

[35]           Dans son affidavit, M. Cheung affirme que la plateforme de circulaires numériques de la Requérante est différente des autres plateformes de circulaires numériques en ce qu'elle offre une expérience de navigation et de magasinage dynamique et interactive. À cet égard, il affirme ce qui suit au para. 6 de son affidavit :

[traduction]
La plateforme FLYERTOWN permet aux consommateurs de voir les meilleures offres dans leur région, de visualiser des circulaires haute résolution en mode panoramique, et de zoomer sur des produits précis. Les utilisateurs ont également la possibilité d'appliquer des filtres de manière à cibler ou à trier des articles par pourcentage de rabais (p. ex. 40 %), par détaillant et par catégorie, ainsi que d'effectuer une recherche dans plusieurs circulaires à la fois afin de dénicher la meilleure offre sur un produit en particulier. L'expérience FLYERTOWN interactive comprend des descriptions d'articles, des « reviews », des indicateurs de niveau de stock, des recettes, des vidéos et des liens permettant de faire des achats en ligne. Les utilisateurs peuvent également partager l'information qu'ils ont trouvée par l'entremise des médias sociaux, par exemple, sur Facebook ou sur Twitter. Aucune autre plateforme de circulaires numériques n'offre un aussi large éventail de possibilités.

[36]           Comme il est indiqué précédemment, la preuve démontre que les services de la Requérante sont commercialisés aussi bien auprès des détaillants commerciaux que du grand public. Les détaillants partenaires de la Requérante comprennent Target, The Bay, Best Buy, The Future Shop et Sears, pour n'en nommer que quelques-uns. La Requérante travaille directement avec les détaillants pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies de circulaires en ligne. De plus, la Requérante offre à la fois des services hébergés de circulaires numériques, c.-à-d. l'hébergement de la circulaire numérique du détaillant sur le site Web du détaillant, et des services de diffusion. Les services de diffusion concernent la diffusion de la circulaire numérique du détaillant par l’entremise du réseau de diffusion de la Requérante, lequel comprend www.flyertown.ca, le Postmedia Network (p. ex., National Post, Vancouver Sun, Ottawa Sun), Bell Media, MSN Canada, CTV, Shaw et Winnipeg Free Press.

[37]           La Requérante soutient qu'il ressort de la preuve produite qu'au moins certains des services des parties sont d'un genre différent. À cet égard, la Requérante affirme ce qui suit :

[Traduction]
Bien qu'il y ait un certain recoupement entre les services de l'Opposante et ceux de la Requérante, les services FLYERTOWN vont bien au-delà de la simple annonce de produits et services de tiers dans des circulaires numériques. Le logiciel sur lequel repose la plateforme de circulaires numériques FLYERTOWN procure une expérience novatrice et interactive unique. C'est grâce à ce logiciel en attente de brevet et au modèle de service à la clientèle original sur lesquels ils sont fondés que les services FLYERTOWN se distinguent de ceux offerts par des tiers tels que l'Opposante.

[38]           Je suis d'avis qu'il y a effectivement un certain recoupement entre les services des parties dans la mesure où toutes deux font la publicité et la promotion de produits et de services de tiers au moyen de circulaires numériques. On peut donc présumer que les voies de commercialisation utilisées par les parties pour vendre ces services se recouperaient également.

[39]           J'estime, cependant, ainsi qu'il est expliqué dans la preuve de la Requérante, que les services de [traduction] « fournisseurs de logiciels-services offrant des logiciels et des bases de données sur le Web pour le suivi, l'enregistrement et l'analyse des habitudes de recherche et de magasinage en ligne des consommateurs » de la Requérante sont différents des services fournis par l'Opposante. Compte tenu de la nature spécialisée de ces services précis, je ne pense pas que les voies de commercialisation de ces services recouperaient celles de l'Opposante.

Article 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent

[40]           Il est généralement admis que le premier élément d'une marque est souvent le plus important lorsqu'il s'agit de distinguer des marques entre elles; or, l'importance de ce facteur diminue lorsque cl premier élément est suggestif ou descriptif [Reno-Dépôt c Homer TLC Inc (2009), 84 CPR (4th) 58 (COMC), para. 58; Conde Nast Publications Inc c Union des Editions Modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst); Park Avenue Furniture Corp c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF); Phantom Industries Inc c Sara Lee Corp (2000), 8 CPR (4th) 109 (COMC)]. Il est également bien établi en droit que lorsqu'il s'agit d'apprécier la probabilité de confusion, il faut éviter de décomposer les marques de commerce en leurs éléments constitutifs; les marques doivent plutôt être considérées dans leur ensemble [British Drug Houses Ltd c Battle Pharmaceuticals, [1944] RC de l'É 239, p. 251, conf. par [1946] RCS 50 et United States Polo Assn c Polo Ralph Lauren Corp (2000), 9 CPR (4th) 51, para. 88, conf. par [2000] ACF No 1472 (CA)].

[41]           Dans son plaidoyer écrit, la Requérante a attiré mon attention sur la décision Consumers Distributing Limited/La Compagnie Distribution Aux Consommateurs Limitee c Toy World Limited (1990), 30 CPR (3d) 191 (COMC) dans laquelle l'ancien membre Martin a formulé les observations suivantes quant au degré de ressemblance entre la marque TOY WORLD visée par la demande et la marque TOYVILLE de l'opposant, aux para. 17 et 18 :

[traduction]
S'agissant du facteur énoncé à l'article 6(5)e) de la Loi, je considère qu'il existe une certaine ressemblance entre les marques des parties. Toutefois, cette ressemblance est due principalement (voire exclusivement) à la présence du mot « toy » dans les deux marques. Or, le mot « toy » n'est pas distinctif par rapport aux services des parties. Conséquemment, les consommateurs auraient tendance à porter leur attention sur les autres éléments des marques. Ces autres éléments, en l'espèce, sont, à mon sens, différents. Qui plus est, la marque du requérant est formée de deux mots, alors que la marque du requérant est constituée d'un seul mot. Cela contribue à accroître la différence entre les marques des parties sur le plan visuel.

 

L'opposant soutient qu'il existe une forte ressemblance entre les marques du fait que les dernières parties des marques ont toutes deux une connotation géographique. J'estime que cette possible parenté est plutôt lointaine, compte tenu, en particulier, du fait que le test à appliquer en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. En outre, je ne peux accorder à l'opposant un monopole sur toutes les marques comprenant le préfixe TOY et ayant une connotation géographique.

[42]           J'estime que le raisonnement de mon ancien collègue peut également être appliqué à la présente espèce. En effet, il existe, en l'espèce, une certaine ressemblance entre les marques des parties dans la présentation et dans le son du fait, principalement, de la présence du mot « FLYER » dans chacune d'elles. Or, le mot FLYER n'est pas distinctif dans le contexte des services des parties. Les consommateurs auraient donc tendance à porter leur attention sur les autres éléments des marques (c.-à-d. town et land) que j'estime être différents, même s'ils ont tous deux une connotation géographique. En outre, à l'instar de l'opposant dans la décision TOY WORLD, l'Opposante en l'espèce ne peut pas se voir accorder un monopole sur toutes les marques qui comprennent le préfixe FLYER et ont une connotation géographique.

[43]           En ce qui concerne les idées suggérées par les marques des parties, j'estime que les idées suggérées par les marques nominales des parties se ressemblent dans une certaine mesure. Je suis cependant d'avis que les marques figuratives des parties suggèrent des idées différentes. À cet égard, j'estime que le dessin stylisé représentant deux maisons qui fait partie de la Marque figurative accentue l'idée d'une ville ou d'une cité, tandis que le dessin de panier d'achats compris dans la marque figurative de l'Opposante suggère un endroit ou une région où magasiner.

Autres circonstances de l'espèce

Preuve de l'état du registre et de l'état du marché

[44]           À titre de circonstance additionnelle, la Requérante a produit une preuve de l'état du registre par la voie de deux affidavits de Jane Buckingham, recherchiste en marque de commerce employée par l'agent de la Requérante. La preuve de l'état du registre a pour but de démontrer le caractère commun ou le caractère distinctif d'une marque ou d'une partie d'une marque par rapport à l'ensemble des marques inscrites au registre. Des conclusions quant à l’état du marché ne peuvent être tirées de la preuve de l’état du registre que si un nombre important d'enregistrements pertinents a été repéré [Kellogg Salada Canada Inc c Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[45]           Le premier affidavit de Mme Buckingham met en preuve qu'il y avait au registre 15 enregistrements actifs de marques de commerce de tiers formées du mot « flyer » ou comprenant le mot « flyer » pour emploi en liaison avec des services de publicité ou des services apparentés. Le second affidavit de Mme Buckingham met en preuve 16 ensembles de 34 marques de commerce actives comprenant un préfixe identique ou substantiellement similaire et un suffixe ayant une signification géographique (town, world, city, etc.). La Requérante insiste, en particulier, sur le fait que les marques FLYERLAND et FLYERLAND.CA & Dessin coexistent avec les marques FLYERWORLD et FLYERWORLD.COM. Qui plus est, M. Cheung a également fourni la preuve qu'à l'heure actuelle, les fournisseurs de circulaires numériques suivants coexistent sur le marché : www.flyercity.ca, www.flyerworld.com, www.eflyers.com, www.saveland.ca, et www.smartflyercanada.com.

[46]           En l'espèce, le point commun aux marques en cause est l'emploi du mot FLYER en conjugaison avec un mot qui revêt une signification géographique. Je considère que le nombre de marques déposées que Mme Buckingham répertorie dans son premier affidavit est suffisant pour me permettre de conclure qu'il est fréquent au sein du marché que des marques qui comprennent l'élément FLYER soient adoptées dans le même secteur d'activité que celui des parties. Je suis également disposée à inférer de la preuve de la Requérante dans son ensemble que les consommateurs ont l'habitude de distinguer entre elles des marques qui comprennent le mot FLYER employé en conjugaison avec un mot ayant une signification géographique, c.-à-d. city, world ou land. Compte tenu de cette preuve, j'estime qu'il serait inapproprié d'accorder une protection étendue aux marques de commerce de l'Opposante, car il s'agit de marques faibles.

Fusion-absorption de flyerland.ca par www.save.ca

[47]           Au paragraphe 26 de son affidavit, M. Cheung affirme que, le 27 août 2013, flyerland.ca a été absorbée par la marque www.save.ca. Comme pièce E, il a joint à son affidavit une copie d'un article paru sur le site Web Mississauga.com sous la rubrique Business Times annonçant la fusion-absorption de flyerland.ca par www.save.ca.

[48]           Étant donné que cette preuve tient du ouï-dire, elle ne peut pas être considérée comme une preuve de la véracité du contenu [Candrug Health Solutions Inc c Thorkelson (2007), 60 CPR (4th) 35 (CF), infirmée par 64 CPR (4th) 431 (CAF), (Candrug)]. Toutefois, même si cette preuve avait été admissible, je n'en aurais pas tenu compte, car je considère qu'elle se rapporte à la validité de l'enregistrement de la marque FLYERLAND.CA & Design de l'Opposante, laquelle n'est pas en cause dans la présente procédure.

Jurisprudence concernant les marques faibles

[49]           Récemment, dans Breville Pty Limited c Keuring Green Mountain, Inc, 2014 COMC 248 (CanLII), la membre de la Commission DePaulsen a passé en revue la jurisprudence se rapportant aux marques faibles et a formulé les observations suivantes [traduction] :

Il est bien établi que des différences relativement petites suffiront à distinguer des marques faibles [Boston Pizza International Inc c Boston Chicken Inc (2001), 15 CPR (4th) 345 (CF 1re inst), para. 66]. Dans l'affaire Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL (2005), 46 CPR (4th) 112, para. 31 (CF 1re inst), le juge de Montigny a expliqué que :

[traduction]
Les deux marques étant intrinsèquement faibles, il est juste de dire que même de petites différences suffiront à les distinguer. S'il en était autrement, on permettrait au premier utilisateur des mots d'usage courant de monopoliser injustement ces mots. Un autre motif invoqué par les tribunaux pour en arriver à cette conclusion est que le public est censé être davantage sur ses gardes lorsque de tels faibles noms commerciaux sont employés …

Il a été établi qu'une partie qui adopte une marque de commerce faible accepte un certain risque de confusion [General Motors c Bellows (1949), 10 CPR 101, pp. 115-116 (SCC)]. S'il est possible d'accroître le caractère distinctif d'une marque de commerce faible par un emploi à grande échelle [Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238, para. 6 (CF 1re inst.)], l'Opposante n'a pas réussi à démontrer un tel emploi à grande échelle, puisque sa marque de commerce YOUBREW n'est employée que depuis février 2012 et qu'il n'y a eu qu'environ 13 000 cafetières YOUBREW vendues.

[50]           De façon similaire, en l'espèce, l'Opposante n'a pas démontré que l'une ou l'autre de ces marques avait acquis un caractère distinctif. J'estime, par conséquent, que la jurisprudence susmentionnée appuie la position de la Requérante voulant que, puisque les marques des deux parties sont des marques faibles, de petites différences suffisent à les distinguer.

Conclusion

[51]           Après examen des facteurs énoncés à l'article 6(5) et compte tenu, en particulier, du fait que les marques de commerce FLYERTOWN et FLYERTOWN.CA & Dessin de l'Opposante sont des marques faibles, et qu'il est fréquent au sein du marché que des marques comprenant l'élément FLYER soient adoptées dans le même secteur d'activité que celui des parties, je conclus que la prépondérance des probabilités entre la conclusion qu'il n'existe pas de probabilité de confusion, et la conclusion qu'il existe une probabilité de confusion, penche légèrement en faveur de la Requérante. Par conséquent, je conclus que, selon la prépondérance des probabilités, il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre l'une ou l'autre des marques de commerce de l'Opposante et l'une ou l'autre des Marques, du fait de leurs différences. En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté dans les deux affaires.

Décision

[52]            Compte tenu de ce qui précède, et conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu de l'article 63(3) de la Loi, je rejette les oppositions, conformément aux dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.