Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

   BW v2 Logo

 

 

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 218

Date de la décision : 2015-12-07
[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION

 

 

Carollyne Yardley, faisant affaire sous le nom Carollyne Yardley Omnimedia

Opposante

et

 

American Girl, LLC

Requérante

 

 

 



 

1,530,071 pour la marque de commerce CAROLINE

 

Demande

Sommaire

[1]               Mme Yardley allègue que la marque de commerce CAROLINE qui fait l'objet d'une demande d'enregistrement pour emploi en liaison avec des livres pour enfants, des poupées en papier, des poupées et des vêtements et accessoires de poupée crée de la confusion avec sa marque de commerce CAROLLYNE qui est enregistrée pour emploi en liaison avec la vente au détail d'objets d'art et de produits comprenant des peintures, des livres, des cartes de souhaits, des vêtements pour enfants, des poupées et des jouets en peluche. Bien qu'elle ait formulé cette allégation, Mme Yardley n'a produit aucune preuve autre que les détails de son enregistrement de la marque de commerce CAROLLYNE et n'a présenté aucune observation au soutien des motifs d'opposition.

[2]               En l’espèce, le fait que les marques de commerce en cause soient des prénoms et ne possèdent aucun caractère distinctif inhérent a une incidence sur l'analyse de la confusion. Lorsque des marques de commerce sont faibles, les consommateurs sont censés être plus attentifs aux différences entre les marques et les propriétaires sont réputés accepter un certain risque de confusion. Dans ce contexte et compte tenu des circonstances décrites ci-dessous, j'estime que la Requérante a démontré qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la marque de commerce CAROLLYNE de l’Opposante et la marque de commerce CAROLINE employée en liaison avec les produits visés par la demande. Par conséquent, l'opposition est rejetée.

Dossier

[3]               Le 1er juin 2011, Mattel, Inc. a produit une demande pour faire enregistrer la marque de commerce CAROLINE (la Marque) en liaison avec des livres pour enfants, des poupées en papier, des poupées, des vêtements de poupée et des accessoires de poupée (les Produits dans leur version modifiée) sur la base de son emploi projeté au Canada. La demande a subséquemment été cédée à American Girl, LLC (la Requérante).

[4]               La demande a été annoncée aux fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 10 juillet 2013.

[5]               Le 10 décembre 2013, Carollyne Yardley, faisant affaire sous le nom Carollyne Omnimedia (l'Opposante), a produit une déclaration d'opposition dans laquelle elle soulève les motifs d'opposition qui sont résumés ci-dessous : 

(a)     la demande n'est pas conforme à l'article 30e) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T‑13 (la Loi), car la Requérante n'a jamais eu l'intention d'employer la Marque au Canada en liaison avec l'ensemble des Produits;

(b)   la demande n'est pas conforme à l'article 30i) de la Loi, car la Requérante ne pouvait pas être convaincue qu'elle a droit d'employer la Marque au Canada;

(c)    la Marque n'est pas enregistrable selon l’article 12(1)d) de la Loi, car elle crée de la confusion avec la marque de commerce CAROLLYNE qui fait l'objet de l’enregistrement no LMC746,515;

(d)   la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement selon l’article 16(3)a) de la Loi, car la Marque crée de la confusion avec les marques de commerce CARROLYNE et CAROLLYNE Dessin de l'Opposante, antérieurement employées et révélées au Canada;

(e)    la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement selon l'article 16(3)c) de la Loi, car la Marque crée de la confusion avec un ou plusieurs des noms commerciaux de l'Opposante, dont Carollyne Yardley et Carollyne Yardley Omnimedia, lesquels avaient été antérieurement employés au Canada; et

(f)    la Marque n'est pas distinctive et n'est pas adaptée à l'être, eu égard aux dispositions des articles 38(2)d) et 2 de la Loi, parce que :

1.      elle n'est pas adaptée à distinguer les Produits des produits et services de tiers, en particulier les produits et services de l'Opposante vendus ou exécutés en liaison avec les marques de commerce et les noms commerciaux de l'Opposante.

2.      en raison du transfert des droits sur la Marque, deux ou plus de deux entités ont droit d'employer la Marque et ces droits ont été exercés, en contravention de l'article 48(2) de la Loi; et

3.      la Marque n'a pas été et ne sera pas employée par la Requérante dans le but de distinguer les Produits des produits et services de tiers sur le marché.

[6]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l'Opposante.

[7]               Comme preuve, l'Opposante a produit l'affidavit de Karen Matson, auquel sont annexés les détails de l'enregistrement no LMC746,515 de la marque de commerce CAROLLYNE. Comme preuve, la Requérante a produit les affidavits de Matthew Boyd, Paul Girard, James Haggerty et Laura Morrison.

[8]               Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit et était présente à l’audience qui a été tenue le 1er décembre 2015.

Dates pertinentes et fardeau de preuve

[9]                     Les dates pertinentes qui s'appliquent aux motifs d'opposition sont les suivantes :

- articles 38(2)a)/30 de la Loi – la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), p 475];

 

- articles 38(2)b)/12(1)d) de la Loi – la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

 

- articles 38(2)c)/16(3) de la Loi – la date de production de la demande; et

 

-    articles 38(2)d) de la Loi – la date de production de la déclaration d'opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

[10]           Avant d'examiner les motifs d'opposition, j'estime nécessaire de rappeler certaines exigences techniques en ce qui concerne i) le fardeau de preuve dont doit s'acquitter un opposant, soit celui d'étayer les allégations contenues dans sa déclaration d'opposition et ii) le fardeau ultime qui incombe au requérant, soit celui de prouver sa cause. 

[11]           S'agissant du point i) susmentionné, l'opposant doit s'acquitter du fardeau de preuve d'établir les faits sur lesquels il appuie les allégations qu'il formule dans sa déclaration d'opposition : John Labatt Limited c Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.), p 298. Le fait qu'un fardeau de preuve soit imposé à l'opposant à l'égard d'une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit y avoir au dossier une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de cette question. S'agissant du point ii) susmentionné, le requérant doit s'acquitter du fardeau ultime de démontrer que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi ainsi que l'allègue l'opposant (mais uniquement à l'égard des allégations relativement auxquelles l'opposant s'est acquitté de son fardeau de preuve initial). Le fait que le fardeau ultime incombe au requérant signifie que s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l’encontre du requérant. 

Motifs d'opposition

Motifs fondés sur les articles 30e) et 30i)

[12]           L'Opposante allègue que la demande contrevient aux dispositions des articles 30e) et 30i) de la Loi.

[13]           Aucune preuve n'a été produite à l'appui du motif d'opposition fondé sur l'article 30e) de la Loi. Par conséquent, ce motif d'opposition est rejeté, parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

[14]           Aucune preuve n'a été produite à l'appui du motif d'opposition fondé sur l'article 30i) de la Loi. Lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée par l'article 30i), un motif d'opposition fondé sur l'article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu'il existe une preuve de mauvaise foi [voir Sapodilla Co c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), p 155]. Étant donné que la demande contient la déclaration exigée et qu'il n'y a en l'espèce ni allégation ni preuve de mauvaise foi ou d'autres circonstances exceptionnelles, le motif d'opposition fondé sur l'article 30i) est rejeté.

Motifs d’opposition fondés sur les articles 16(3)a), 16(3)c) et 2

[15]           Les motifs d’opposition fondés sur les articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi sont rejetés parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve initial. L'Opposante n'a pas démontré que, à la date pertinente, ses marques de commerce ou ses noms commerciaux étaient employés ou avaient été révélés au Canada. Bien que l’enregistrement de la marque de commerce de l’Opposante comporte des revendications d’emploi, ces dernières ne sont pas suffisantes pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard de ces motifs d’opposition [Rooxs, Inc c Edit-SRL (2002), 23 CPR (4th) 265 (COMC), p 268]. Les motifs d'opposition fondés sur l'article 2 de la Loi sont également rejetés parce que l'Opposante ne s'est pas acquittée de son fardeau de preuve initial; il n'y a, en effet, aucune preuve pour étayer les allégations comprises dans le motif d'opposition se rapportant au caractère distinctif.

Motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d)

[16]           L’Opposante allègue que la Marque n’est pas enregistrable selon l’article 12(1)d) de la Loi parce qu'elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée de l'Opposante dont les détails sont reproduits ci-dessous.

No d'enregistrement

Marque de commerce


Produits et services

LMC746,515

CAROLLYNE

PRODUITS : [traduction]
(1) Peintures, illustrations, reproductions et caricatures; imprimés, nommément livres, cartes de souhaits, signets et cartes postales; décorations de Noël; vêtements, nommément vêtements pour enfants; jouets, nommément poupées, jouets en peluche; tasses à café; oreillers; casse-têtes.

SERVICES : [traduction]
(1) Vente au détail d'objets d'art.

 

[17]           J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et je confirme que cet enregistrement existe bel et bien. L'Opposante s'est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l'égard de ce motif. 

[18]           Des marques de commerce créent de la confusion lorsqu’il existe une probabilité raisonnable de confusion au sens de l'article 6(2) de la Loi :  

    L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits ou les services liés à ces marques de commerce sont fabriqués. . . ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[19]           Ainsi, la question de la confusion ne concerne pas la confusion entre les marques elles-mêmes, mais la confusion portant à croire que des produits et services provenant d’une source proviennent d’une autre source. En l’espèce, la question que soulève l’article 6(2) de la Loi est celle de savoir si les acheteurs des Produits vendus en liaison avec la marque de commerce CAROLINE croiraient que ces articles ont été fabriqués ou autorisés par l'Opposante, ou qu'ils font l'objet d'une licence concédée par cette dernière.

[20]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Les facteurs à prendre en considération pour déterminer si deux marques créent de la confusion sont « toutes les circonstances de l’espèce, y compris » celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chaque marque a été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces critères ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie en fonction du contexte propre à chaque affaire [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, [2006] 1 SCR 772 (CSC), para 54]. 

Caractère distinctif inhérent

[21]           Dans le cadre de sa preuve, la Requérante a produit l'affidavit de Paul Girard, un stagiaire en droit à l'emploi de son agent. M. Girard a consulté le site Web de l'Opposante à l'adresse www.carollyne.com et a réalisé des copies de deux entretiens que l'Opposante a accordés à la radio et qu'elle a publiés sur son site Web. Ces entretiens radiophoniques sont admissibles même s'ils relèvent du ouï-dire, d'une part parce qu'il était nécessaire pour la Requérante de les produire à l'appui de sa demande et d'autre part parce qu'ils sont fiables étant donné que l'Opposante a la possibilité de réfuter la preuve puisqu'elle est partie à la présente affaire [Reliant Web Hostings Inc c Tensing Holding BV; 2012 COMC 48, para 35]. Dans les entretiens radiophoniques, il semble être généralement admis que CAROLINE et CAROLLYNE sont des prénoms. Bien que je n'accorde que peu de poids à ces entretiens radiophoniques du fait des problèmes de fiabilité potentiels que posent les sites Web de tiers, la preuve de Matthew Boyd, un stagiaire en droit à l'emploi de l'agent de la Requérante, qui a joint à son affidavit divers imprimés tirés de divers sites Web indiquant que Caroline et Carollyne sont des prénoms et des variantes l'un de l'autre, concorde avec l'information qui est fournie dans les entretiens radiophoniques.

[22]           Étant donné que les marques de commerce des parties sont toutes deux constituées d’un prénom, elles ne possèdent qu'un très faible caractère distinctif, voire aucun [Glaskoch B. Koch Jr GmbH & Co KG c Anglo Canadian Mercantile Co (2006), CanLii 80333 (COMC)].

Degré de ressemblance entre les marques de commerce

[23]           En ce qui concerne le degré de ressemblance entre les marques de commerce en cause, j'estime que les marques sont très similaires dans la présentation et dans le son; leurs finales différentes n'engendrant que de petites différences sur les plans visuel et sonore (j'entends par là qu'au moins certains consommateurs percevraient la forme sonore de CAROLINE comme rimant avec le mot anglais « pine » [pin], et celle de CAROLLYNE comme rimant avec le mot anglais « pin » [broche], comme c'est le cas dans l'entretien que l'Opposante a accordé à CFAX1070). En outre, les marques de commerce suggèrent des idées similaires, c'est-à-dire un prénom de fille ou de femme.   

Mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et période pendant laquelle elles ont été en usage

[24]           Bien que l'enregistrement de l'Opposante soit fondé sur l'emploi, cela me permet uniquement de présumer d'un emploi minimal [Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC), p 430]. Un emploi minimal ne permet pas de conclure que la marque de commerce est devenue connue dans une quelconque mesure significative ni qu'elle a été employée de façon continue. En outre, bien que Mme Yardley parle de l'emploi de sa marque de commerce dans les entretiens qu'elle a accordés à la radio, l'information qu'elle fournit ne me permet pas de déterminer si sa marque est devenue connue dans une quelconque mesure significative ni de tirer de conclusion quant à la durée de son emploi. 

[25]           La Requérante a produit l'affidavit de Laura Morrison, une stagiaire en droit à l'emploi de l'agent de la Requérante, qui s'est rendue au magasin spécialisé d'American Girl à Ottawa et qui a fait imprimer certaines parties du site Web d'American Girl. Lors de sa visite au magasin, elle a repéré et photographié des poupées de marque CAROLINE.   En l'absence d'information au sujet des ventes ou de la durée de l'emploi, il m'est toutefois impossible de déterminer dans quelle mesure, le cas échéant, ce facteur favorise la Requérante.  

Le genre de produits et services, et la nature du commerce

[26]           En l'absence d'une preuve de la part de l’Opposante, ce facteur favorise la Requérante. Bien que je reconnaisse que l'enregistrement de l'Opposante et la demande d'enregistrement ne comportent aucune restriction quant à un type de poupées ou quant à une voie de commercialisation en particulier, je dispose de certains éléments de preuve de la part de la Requérante indiquant que les produits de l'Opposante ne semblent pas être identiques ni vendus par les mêmes voies de commercialisation.

[27]            Les produits semblent être d'un genre différent. Les entretiens radiophoniques accordés par Mme Yardley établissent que cette dernière est une artiste qui vend diverses marchandises, telles que des poupées, des cartes et des signets, comme moyen de financer ses peintures et son travail artistique. En tant qu'artiste, Mme Yardley se spécialise dans un type de « pop surréalisme » qu'elle a baptisé le « squirrealism » et qui se caractérise par des personnages humains pourvus de masques et de figures d'écureuils. En comparaison, la preuve jointe à l'affidavit de Mme Morrison montre que la Marque est employée en liaison avec une poupée destinée aux fillettes de huit ans et plus qui prend les traits d'un personnage historique du nom de Caroline Abbott, [traduction] « une jeune héroïne qui doit mettre à profit sa bravoure et son intelligence pour aider sa famille pendant la Guerre de 1812 », ainsi qu'avec des produits connexes, dont des vêtements, des accessoires et du mobilier de poupée, et des livres sur le personnage.

[28]           De même, les voies de commercialisation pourraient bien être différentes. L'affidavit de Mme Morrison indique que les Produits vendus en liaison avec la Marque sont vendus par l'intermédiaire du site Web de la Requérante et d'un magasin spécialisé d'American Girl. 

Circonstance de l'espèce : jurisprudence relative aux marques de commerce faibles

[29]           La jurisprudence relative aux marques de commerce faibles appuie la position de la Requérante. Il est bien établi que des marques de commerce constituées de prénoms et de noms de famille ne peuvent bénéficier d'une protection très étendue [Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst.), p 240; Joseph Ltd c XES-NY Ltd (2005), 44 CPR (4th) 314 (COMC)] et que des différences relativement ténues peuvent suffire à distinguer entre elles des marques faibles [Prince Edward Island Mutual Insurance Co. c. Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 86 CPR (3d) 342 (CF 1re inst.), para 32 à 34]. Dans Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL (2005), 46 CPR (4th) 112, para 31 (CF 1re inst), le juge de Montigny a donné l'explication suivante :

[traduction]
Les deux marques étant intrinsèquement faibles, il est juste de dire que même de petites différences suffiront à les distinguer. S'il en était autrement, on permettrait injustement à la première personne qui emploie des mots d'usage courant de monopoliser ces mots. Un autre motif invoqué par les tribunaux pour en arriver à cette conclusion est que le public est censé être plus vigilant lorsque des noms commerciaux aussi faibles sont employés…

[30]           Une partie qui adopte une marque de commerce faible est réputée accepter un certain risque de confusion [General Motors c Bellows (1949), 10 CPR 101, pp 115 et 116 (SCC)]. Il est certes possible d’accroître le caractère distinctif d’une marque de commerce faible par un emploi à grande échelle [Sarah Coventry Inc c Abrahamian, précitée], mais il n'y a en l'espèce aucune preuve que la marque de commerce CAROLLYNE de l'Opposante a été employée au Canada dans une telle mesure.

Circonstance de l'espèce : preuve de l'état du registre

[31]           Comme preuve de l’état du registre, la Requérante a produit l'affidavit de James Haggerty, un recherchiste en marques de commerce à l'emploi de l'agent de la Requérante. Ce dernier a effectué une recherche dans le but de repérer les demandes et enregistrements actifs de marques de commerce constituées de prénoms et destinées à être employées en liaison avec des poupées. La recherche de M. Haggerty a révélé plus de 90 marques de commerce. À l'audience, l'Opposante a fait valoir que la preuve démontrait qu'il était courant dans le commerce que des poupées soient vendues en liaison avec des marques de commerce constituées de prénoms. Étant donné le nombre de marques de commerce repérées par M. Haggerty, j'estime que cette preuve me permet d'inférer que des marques de commerce constituées de prénoms et destinées à un emploi en liaison avec des poupées ont une certaine présence sur le marché au Canada et que les consommateurs sont exposés à ces marques au moins dans une certaine mesure. 

 

Conclusion

[32]           La question que soulève l’article 6(5) de la Loi est celle de savoir si les consommateurs des Produits offerts en liaison avec la marque de commerce CAROLINE croiraient, du fait de l'existence de la marque de commerce CAROLLYNE de l'Opposante, que ces produits ont été fournis ou autorisés par l'Opposante, ou qu'ils font l'objet d'une licence concédée par cette dernière. 

[33]           Compte tenu des facteurs énoncés à l’article 6(5), en particulier le faible caractère distinctif inhérent de la marque de commerce de l'Opposante qui est constituée d'un prénom, du fait que des différences ténues peuvent suffire à distinguer entre elles des marques faibles et qu'il n'y a aucune preuve que la marque de commerce de l'Opposante est devenue connue dans une quelconque mesure significative ou qu'il existe un recoupement dans le genre des produits ou entre leurs voies de commercialisation, j'estime que la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque CAROLLYNE de l'Opposante.

Décision

[34]           Dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition.

        

 

______________________________
Natalie de Paulsen
Membre
Commission des oppositions des marques de commerce
Office de la propriété intellectuelle du Canada


Traduction certifiée conforme
Judith Lemire, trad.

 

 

 


 

Date de l'audience : 2015-12-01

 

Comparutions

 

Aucune comparution                                                               Pour l'Opposante

 

 

Michael O’Neill                                                                       Pour la Requérante

 

 

Agents au dossier

 

Oyen Wiggs Green & Mutala LLP                                          Pour l'Opposante


Gowling Lafleur Henderson LLP                                           Pour la Requérante

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.