Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 171

Date de la décision : 2012-09-28

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION par Gemological Institute of America, Inc. à l’encontre de l’enregistrement n1289031 pour la marque GHI au nom de Gemology Headquarters International, LLC

 

[1]               Le 7 février 2006, Gemology Headquarters International, LLC (la Requérante) a déposé une demande d’enregistrement de la marque de commerce GHI (la Marque).

[2]               La demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les marchandises et services suivants :

marchandises – Certificats d'authenticité de diamants, de pierres précieuses, de perles et de bijoux; certificats de classement de diamants, de pierres précieuses, de perles et de bijoux; instruments de gemmologie, nommément filtres émeraude et colorés, dichroscopes, analyseurs électroniques pour le métal, balances électroniques, lampes fluorescentes, compteurs Geiger, liqueurs denses utilisées pour obtenir la densité (rapport entre le poids d'un objet dans l'air et le poids de ce même objet dans un liquide) de pierres précieuses, réfractomètres à infrarouge, lentilles, diamants et calibres Leveridge, lampes UV de grande longueur d'onde et à ondes courtes, loupes, petites lampes de poche, nécessaires de classification des couleurs de diamant constitués d'un ensemble de pierres (comme différentes qualités d'oxyde de zirconium cubique ou de diamants) utilisé pour la classification exacte des couleurs des pierres précieuses et l'analyse des diamants, y compris évaluation de la couleur, de la fluorescence et d'éventuelles fractures et d'autres défauts dans les pierres précieuses et les diamants, microscopes, lampes à fibres optiques, polariscopes, lampes à vapeur de mercure, réfractomètres, spectroscopes, brucelles, armoires à ultraviolets et appareils de radiographie;. (Marchandises1)

services – Services éducatifs en ce qui a trait à la gemmologie; services de gemmologie, nommément, service d’identification, d’authenticité et de classement des diamants, des pierres précieuses et des perles et délivrance de certificats relatifs au classement, à la gravure sur des diamants et des pierres précieuses; estimation de la valeur des diamants, des pierres précieuses et des bijoux; détermination de la teneur en métaux précieux (Services1)           

[3]               La demande est également fondée sur l’emploi et l’enregistrement aux États-Unis d’Amérique en liaison avec les marchandises et services suivants :

marchandises – Certificats imprimés d’authenticité des diamants, des pierres précieuses et des perles; certificats de classement des diamants, des pierres précieuses et des perles (Marchandises2)

services – Services de gemmologie, nommément, service d’identification, d’authenticité et de classement des diamants, des pierres précieuses et des perles et délivrance de certificats relatifs à ce classement; détermination de la teneur en métaux précieux (Services2)

[4]               En vertu de la Convention, la date de priorité du 26 janvier 2006 a été revendiquée en ce qui concerne les Marchandises2 et les Services2.

[5]               La demande a été publiée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 10 septembre 2008.

[6]               Le 6 novembre 2008, Gemological Institute of America, Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. La Requérante a produit et signifié une contredéclaration niant les allégations de l’Opposante.

[7]               Pour étayer sa déclaration d’opposition, l’Opposante a produit des affidavits de Susan Johnson (directrice de l’administration de l’éducation de l’Opposante), Susan Petrich (directrice des services de marketing de l’Opposante) et Sabra Norris (agente en chef des opérations de laboratoire de l’Opposante). Pour étayer sa demande, la Requérante a produit deux affidavits de Linda Marie Sanchez (une technicienne juridique) en plus de copies certifiées conformes de 17 enregistrements/demandes de marques de commerce au Canada. Aucun contre-interrogatoire n’a été mené.

[8]               Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit.

[9]               Une audience a été tenue, à laquelle les deux parties ont participé. La Requérante a demandé les services d’un sténographe judiciaire pour faire un enregistrement électronique de l’audience à ses propres fins. L’Opposante s’est prononcée contre l’enregistrement de l’audience. Il n’y a pas d’exigence prévue par la loi, pas plus que ce soit une habitude d’enregistrer les audiences de la procédure d'opposition tenue devant le Registraire, et je n’ai pas autorisé la Requérante à enregistrer électroniquement l’audience. Je souligne que le Registraire est expert des procédures d’opposition, sous réserve du droit des parties à une instruction équitable, et le refus d’autoriser l’enregistrement de l’audience n’a pas eu d’effet sur le droit de la Requérante à une audience équitable.

Motifs d’opposition/dates pertinentes/fardeau de preuve

[10]           L’Opposante a invoqué des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)(b)/12(1)(d), 38(2)(c)/16(2)/16(3) et 38(2)(d)/2 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Chacun des motifs d’opposition repose sur l’allégation qu’il y a une probabilité de confusion entre la Marque et l’une ou plusieurs des marques de commerce de l’Opposante qui comprend les lettres GIA ou GTL ou le nom commercial de l’Opposante, GIA.

[11]           Les dates pertinentes pour l’appréciation de chaque motif d’opposition sont les suivantes : motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)(b) – la date d’aujourd’hui [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)]; motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)(c) – 7 février 2006 (réf. Marchandises1 et Services1) et 26 janvier 2006 (réf. Marchandises2 et Services2); motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)(d)– 6 novembre 2008 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)]. 

[12]           Il incombe à la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la demande d’enregistrement est conforme aux exigences de la Loi. Cependant, l’Opposante a la charge initiale de présenter suffisamment d’éléments de preuve recevables pouvant raisonnablement étayer la conclusion que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.) au paragr. 298].

[13]           L’argument de l’Opposante à l’égard de la confusion est le plus solide en vertu du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)(b)/12(1)(d) puisque sa date pertinente ultérieure permet de prendre en considération toutes les preuves de l’Opposante en ce qui concerne sa réputation. Si l’Opposante n’obtient pas gain de cause en vertu de l’alinéa 38(2)(b), par conséquent elle n’obtiendra pas gain de cause en vertu des alinéas 38(2)(c) ou (d).

Motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)(b)/12(1)(d)

[14]           L’Opposante a fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable suivant l’alinéa 12(1)(d) de la Loi parce qu’elle crée de la confusion avec une ou plusieurs des marques suivantes que l’Opposante a enregistrées :

1.                  GIA – enregistrement no LCM268985

Services : Services éducatifs, nommément, cours de gemmologie.

2.                  GIA – enregistrement no LCM564243

marchandises : (1) Bandes-vidéo, CD-ROM et bandes sonores préenregistrées de matériel éducatif dans le domaine de la gemmologie et des émetteurs téléphoniques et numériques d’information dans le domaine de la gemmologie. (2) Produits en papier, produits en carton et imprimés, nommément, magazines, revues et bulletins dans le domaine de la gemmologie, livres dans le domaine de la gemmologie, matériel didactique et pédagogique dans le domaine de la gemmologie, documents de référence, nommément, manuels, guides, graphiques imprimés et tableaux imprimés, tous dans le domaine de la gemmologie, matériel pour examens, nommément, cahiers d’examen, feuilles de pointage et feuilles de réponses, photographies non montées, articles de papeterie, papier à note, diplômes imprimés, affiches, rapports de classement de gemmologie et carton.

services : Services de catalogue de vente par correspondance et services de commande informatisée en ligne pour l’achat de produits dans le domaine de la gemmologie.

3.                  GIA – enregistrement no LCM561195

services : Services en matière de pierres précieuses, nommément classement de pierres précieuses et enregistrement de pierres précieuses.

4.                  GIA – enregistrement no LCM583034

marchandises : Instruments et appareils scientifiques, nommément microscopes, instruments de mesure, balances, réfractomètres, lampes, tubes, filtres, équipement d’essai des couleurs, comparateurs de couleur, matériel d’essai ultraviolet et fluorescent, instruments photo-optiques, spectroscopes, équipement de classement, et équipement de gemmologie portable, nommément microscopes, réfractomètres, polariscopes, spectroscopes, dichroscopes, loupes, comparateurs à cadran, lampes; instruments et appareils scientifiques pour l’examen, les essais, l’évaluation, et l’expertise des gemmes, des perles et des bijoux; logiciels pour porteurs de données ayant trait au matériel éducatif; bandes vidéo préenregistrées, CD-ROM et bandes audio ayant trait au matériel éducatif (les CD-ROM ne sont pas des logiciels); émetteurs et dispositifs de reproduction de son, d’images, ou de données, nommément émetteurs téléphoniques et numériques d’information dans le domaine de la gemmologie, des perles et des bijoux; bijoux, coffres à bijoux, coffrets à bijoux, perles, gemmes, reproduction de gemmes, boîtes à gemmes, étuis à gemmes, petites perles, épingles, épingles de revers, bagues, bagues torons; vêtements, nommément vestes, blousons, chandails, pantalons, shorts, jupes, pulls d’entraînement, pantalons de survêtement, chemises, tee-shirts, chaussettes, accessoires, et chapeaux, y compris casquettes en toile et casquettes de baseball.

5.                  GIA GEM TRADE LABORATORY INTEGRITY & Design – enregistrement no LCM580549

GIA GEM TRADE LABORATORY INTEGRITY & design

services : Services de gemmologie, nommément identification, gradation, enregistrement et inscription des gemmes précieuses; identification des perles.

6.                  GIA GEM TRADE LABORATORY & Design – enregistrement no LCM561012

GIA GTL TRIO & Design

services : Services en matière de pierres précieuses, nommément évaluation de gemmes précieuses et enregistrement de gemmes précieuses.

7.                  GIA GEMOLOGICAL INSTITUTE OF AMERICA & Design – enregistrement no LCM596705

GIA TRIO DESIGN

marchandises : (1) Disquettes, bandes magnétiques enregistrées avec des programmes, disques magnétiques enregistrés avec des programmes, disques compacts, disques numériques polyvalents, minidisques enregistrables, logiciels et programmes, tous en lien avec le domaine des pierres précieuses, des bijoux, de la gemmologie, de la formation en gemmologie et des évaluations de pierres précieuses et de bijoux; diapositives, acétates, vidéodisques utilisés pour transmettre ou reproduire de l’information et des données liées au domaine de la gemmologie; disques d’enregistrement sonore, bandes-vidéo préenregistrées, bandes sonores et CD-ROM préenregistrés comprenant des logiciels et de l’information liée au domaine de la gemmologie, des bijoux, de la fabrication de bijoux, de la conception de bijoux; ventes de bijoux, évaluation de bijoux, évaluation d’assurances, montres et horlogerie, cristaux, perles, jade, argenterie, science, gestion et ventes, taille des pierres précieuses, classement des pierres précieuses et gravure sur des pierres précieuses; rapports de classement des diamants et des pierres précieuses, rapports d’identification des perles et des pierres précieuses, manuels, papeterie de bureau, papier de couleur, cartons, papiers pour pierres précieuses, papier artisanal, papier d’emballage, papier ciré, papier dactylo, papier à dessin, papier pour télécopie, papier permanent, papiers minces, essuie-tout, nappe et mouchoirs, autocollants plastifiés, magazines, cartes, nommément cartes à jouer et cartes d’identification, de classement et d’analyse des pierres précieuses et des bijoux, enveloppes, papier à lettre, cartes de souhaits, signets, cartes, catalogues, notes, cartes d’identité, cartes de membre, cartes plastifiées, périodiques, dictionnaires, albums de photos, calendriers, affiches, étiquettes, autocollants, coffret à documents, reliures à feuilles mobiles, étuis à billets, étiquettes autoadhésives, bannières de papier décoratives, bannières de papier, matériel éducatif, nommément manuels, matériel d’étude et notes, matériels visuels, diagrammes, modèles, bandes préenregistrées, acétates, documents de référence dans les domaines de la gemmologie, des bijoux, de la fabrication de bijoux, de l’analyse des pierres précieuses, de la taille des pierres précieuses, de la gravure sur des pierres précieuses, du classement des pierres précieuses, de la conception des bijoux, de la vente et de la promotion des pierres précieuses, des perles et des bijoux, de l’estimation et de l’évaluation des pierres précieuses, des perles et des bijoux et de l’identification des perles et des pierres précieuses; matériel éducatif dans les domaines de la gemmologie, des bijoux, de la fabrication de bijoux, de l’analyse des pierres précieuses, de la taille des pierres précieuses, de la gravure sur des pierres précieuses, du classement des pierres précieuses, de la conception des bijoux, de la vente et de la promotion des pierres précieuses, des perles et des bijoux, de l’estimation et de l’évaluation des pierres précieuses, des perles et des bijoux et de l’identification des perles et des pierres précieuses, feuilles de pointage, photographies non montées, blocs-notes, cartes imprimées, diplômes imprimés, affiches et carton.

Services : Cours en résidence, sur place ou par correspondance de gemmologie, y compris la fabrication de bijoux, la vente et la promotion des pierres précieuses, des perles et des bijoux, examen d’authenticité des pierres précieuses et évaluation des pierres précieuses et des perles.

8.                  GTL – enregistrement no LCM572882

services : Services en matière de pierres précieuses, identification, classement, enregistrement et inscription de gemmes précieuses; identification de perles.

[15]           Les sept premières marques listées ci-dessus seront collectivement désignées comme les Marques GIA. L’emploi des marques figuratives inscrites aux numéros 6 et 7 ci-dessus correspond également à l’emploi de GIA [voir Nightingale Interloc Ltd c. Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 à 538-9].

[16]           Étant donné que chacun des enregistrements susmentionnés est en vigueur, l’Opposante s’est acquittée du fardeau initial en vertu de l’alinéa 12(1)(d).

[17]           Je considère que la marque GIA de l’Opposante ressemble le plus à la Marque et, par conséquent, je concentrerai mon analyse sur la probabilité de confusion entre cette marque et GIA, qui fait l’objet de quatre enregistrements. Si l’Opposante n’obtient pas gain de cause en fonction de GIA, alors elle n’obtiendra pas gain de cause en fonction de toute autre de ces marques puisque GIA a un plus grand degré de ressemblance à la Marque que GTL ou les marques de l’Opposante qui incorporent des éléments graphiques.

[18]           L’alinéa 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. L’alinéa 6(2) ne porte pas sur la confusion entre les marques elles-mêmes, mais sur la confusion menant à conclure que les biens d’une source proviennent d’une autre source.

[19]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir vague. Comme l’Opposante l’a signalé avec raison, le fait qu’un client peut ne pas être confus au moment de faire l’achat n’est pas pertinent [Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc, (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

[20]           Dans l’application du test en matière de confusion, le Registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles précisément énumérées à l’alinéa 6(5) de la Loi, nommément : (a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; (b) la période pendant laquelle chaque marque de commerce a été en usage; (c) le genre de marchandises, services ou entreprises; (d) la nature du commerce; et (e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas forcément le même. [Voir, en général, Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC), Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC) et Masterpiece.]

Le caractère distinctif inhérent des marques

[21]           Les marques de commerce qui comprennent seulement quelques lettres sont dénuées de caractère distinctif inhérent et sont, par conséquent, qualifiées de marques faibles [GSW Ltée c. Great West Steel Industries (1975), 22 CPR (2 d) 154 (CF 1re inst.)]. Donc, les marques des deux parties sont intrinsèquement faibles.

La mesure dans laquelle chaque marque est devenue connue

[22]           Il est possible d’accroître le caractère distinctif d’une marque par l’emploi et la promotion. Il n’y a aucune preuve d’emploi ou de promotion de la Marque au Canada, mais il y a des preuves d’emploi et de promotion de GIA au Canada, ainsi que le tout est expliqué en détail ci‑dessous.

[23]           L’Opposante est une institution sans but lucratif impliquée dans l’éducation, la recherche, les services de laboratoire et les services de développement des instruments, le tout en ce qui concerne le commerce des pierres précieuses et des bijoux. Je résume ci-dessous la preuve-clé en ce qui concerne l’étendue de l’emploi et de la promotion, par l’Opposante, de GIA au Canada :

         Les services de classement des pierres précieuses de l’Opposante impliquent l’établissement de rapports qui présentent GIA en tant qu’élément de GIA GEMOLOGICAL INSTITUTE OF AMERICA & Design [paragraphe 4, pièces 4 et 5, affidavit de Mme Norris]. Entre les années 2003 et 2008, le nombre annuel de rapports facturés au Canada variait annuellement entre 913 et 2 858, pour un total d’environ 10 000 pierres précieuses. Mme Norris a également fourni « le revenu généré par les rapports, par les clients au Canada ». Ce revenu variait annuellement entre 85 720 $ et 275 198 $ US [paragraphe 8, affidavit de Mme Norris].

         Mme Norris atteste au paragraphe 11 que l’Opposante a publié des brochures conçues pour aider le public à comprendre le classement des diamants. La pièce 7 est une brochure représentative, qui affiche GEMOLOGICAL INSTITUTE OF AMERICA & Design; Mme Norris atteste que cette brochure est disponible en ligne pour les résidents du Canada, mais elle ne donne aucune preuve que des Canadiens ont vu ou demandé une telle brochure.

         Mme Petrich atteste que l’Opposante fait de la publicité pour ses marchandises et services sous différentes formes, comme dans des magazines, par la sollicitation par carte postale et par brochure, ainsi que sur son site Web et que pratiquement toutes les publicités affichent une ou plusieurs marques enregistrées de l’Opposante. Notamment, elle discute d’annonces publiées dans des revues spécialisées qui, selon elle, comptent des abonnés au Canada. Elle atteste que l’Opposante a publié des annonces dans les publications canadiennes Jewellery Business (sept fois par année en 2006, 2007 et 2008) et Canadian Jeweller (en 2008 et sept fois par année en 2004, 2005 et 2006), de même que dans deux publications américaines disponibles au Canada en 2006, nommément JCK et Modern Jeweler. Mme Petrich affirme que Jewellery Business est décrite comme ayant plus de 8 000 abonnés et que Canadian Jeweller est réputée avoir plus de 10 000 abonnés. Quoique j’admette, comme l’affirme la Requérante, que ces chiffres sont des ouï-dire, compte tenu du fait que Mme Petrich n’a pas subi de contre-interrogatoire, je leur ai donc accordé une certaine valeur.

         Mme Petrich a produit des copies de matériel promotionnel représentatif, affichant une ou plusieurs des marques enregistrées, qui a été envoyé à des Canadiens [pièce 9]; entre 2003 et 2008, le nombre de ces éléments promotionnels distribués annuellement à des adresses au Canada variait entre 1335 et 5584 (on ignore à quel point les listes de distribution différaient d’une année à l’autre).

         L’Opposante fait la promotion de ses services, publications et instruments éducatifs en participant à des salons professionnels internationaux, y compris un salon professionnel à Vancouver en 2009, mais les chiffres de fréquentation n’ont pas été fournis [paragraphe 14, affidavit de Mme Petrich].

         L’Opposante publie une revue trimestrielle intitulée Gems & Gemology qui affiche les Marques GIA à chaque numéro; pour chacune des années entre 2003 et 2008, la revue comptait plus de 200 abonnés ayant des adresses postales au Canada [paragraphes 16 à 19, affidavit de Mme Petrich].

         L’Opposante publie également une revue trimestrielle intitulée The Loupe qui affiche les Marques GIA; quoique Mme Petrich déclare qu’elle est distribuée dans le monde entier, y compris à des résidents du Canada, seuls les chiffres de distribution à l’échelle mondiale ont été fournis.

         En plus, l’Opposante publie toutes les deux semaines un bulletin électronique intitulé GIA Insider qui affiche les Marques GIA; on affirme qu’il est disponible à l’échelle mondiale, y compris au Canada, mais aucun chiffre de visionnement n’a été fourni [paragraphe 22, affidavit de Mme Petrich].

         Entre les années 2003 et 2008, l’Opposante a vendu annuellement entre 221 et 466 « publications, instruments et autres marchandises » directement à des résidents du Canada [paragraphes 25 et 26, affidavit de Mme Petrich]. Aucun exemple n’a été fourni, mais la pièce 17 de Mme Petrich est un graphique qui donne des détails de ventes, y compris la date de facturation, le type et la quantité d’articles, ainsi que le « logo » affiché sur chacun des articles particuliers. Certains des articles sont identifiés comme présentant la marque de commerce GIA.

         L’Opposante publie des manuels dans le domaine de la gemmologie et Mme Petrich affirme qu’ils sont disponibles aux Canadiens dans les librairies au Canada et en commandant directement auprès de l’Opposante; la pièce 17 de Mme Petrich indique qu’il y a eu un petit nombre de ventes de manuels (par ex. 1 en 2003 et au moins 11 en 2008), mais il n’est pas évident qu’une des marques enregistrées de l’Opposante apparaisse sur les manuels.

         L’Opposante n’a pas de campus au Canada, mais les cours d’enseignement à distance de l’Opposante sont disponibles aux résidents du Canada depuis aussi tôt que 1969; le nombre de résidents du Canada inscrits aux cours d’enseignement à distance offerts en liaison avec les marques de commerce entre 2003 et 2008 variait annuellement entre 307 et 470. Afin de réussir un programme, les personnes doivent assister aux cours en laboratoire obligatoires et les réussir en plus de leurs cours d’enseignement à distance; le nombre de personnes ayant assisté aux cours en laboratoire offerts par l’Opposante au Canada entre 2003 et 2008 variait annuellement entre 91 et 153. Du matériel varié affichant les Marques GIA est envoyé aux résidents du Canada intéressés par ou inscrits aux programmes d’enseignement à distance [paragraphes 6 à 13, affidavit de Mme Johnson].

[24]           Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la marque de commerce GIA de l’Opposante est actuellement plus connue au Canada que la Marque, c’est-à-dire que la marque de l’Opposante a acquis un certain caractère distinctif, tandis que la Marque ne l’a pas fait. Cependant, compte tenu des chiffres présentés, je ne peux conclure que la marque de l’Opposante est bien connue.   

[25]           Avant de commencer, je remarque que Mme Norris atteste au paragraphe 5 que : « [L’Opposante] est considérée par plusieurs comme le plus grand nom de confiance au monde pour le classement des diamants et l’identification des pierres précieuses, et les GIA Diamond Grading Report, Diamond Dossier, et Gemological Identification Report sont considérés comme les plus grandes références mondiales en gemmologie. En pièce 3 de mon affidavit, il y a des copies papier de sites Web de tiers décrivant la réputation de [l’Opposante] ». Cependant, la réputation et l’emploi de l’Opposante dans d’autres pays ne sont pas pertinents dans ce processus. En plus, des copies de sites Web de tiers ne font que prouver l’existence d’une telle page au moment de l’impression – elles n’attestent pas de la véracité de leurs contenus [Candrug Health Solutions Inc c. Thorkelson (2007), 60 CPR (4th) 35 (CF 1re inst)].

La période pendant laquelle chaque marque de commerce a été en usage

[26]           L’Opposante a été fondée en 1931 aux États-Unis, mais ses souscripteurs d’affidavit n’ont fourni des détails en ce qui concerne l’emploi des marques de commerce au Canada qu’à partir de 2003. Puisque la Requérante n’a présenté aucune preuve d’emploi de sa Marque, la période pendant laquelle les marques ont été en usage au Canada est en faveur de l’Opposante.  

Le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

[27]           Pour ce qui est des marchandises, services et commerces des parties, il faut s’en remettre à l’état déclaratif des marchandises ou des services contenu dans la demande d’enregistrement ou dans les enregistrements eux‑mêmes pour trancher la question de la confusion découlant de l’alinéa 12(1)(d) [voir Mr Submarine Ltd c. Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); Miss Universe, Inc c. Dale Bohna (1984), 58 CPR (3d) 381 (CAF)]. 

[28]           Les parties semblent être d’accord sur le fait que leurs marchandises, entreprises et commerces respectifs sont les mêmes ou se chevauchent [paragraphes  51 à 53 du plaidoyer écrit de l’Opposante et paragraphes 50 et 51 du plaidoyer écrit de la Requérante].

[29]           Mme Norris déclare au paragraphe 9 de son affidavit, « [l’Opposante] offre des services au public, de même qu’aux organismes gouvernementaux et d’application de la loi, cependant, la grande majorité de ses affaires et de ses revenus proviennent d’entreprises du secteur manufacturier et du commerce de détail dans le domaine des diamants et des bijoux. Cela représente la même clientèle, ou la même clientèle potentielle, de toute entreprise impliquée dans la fourniture de services de classement des diamants et d’identification des pierres précieuses dans le domaine de la bijouterie ». La Requérante n’a pas contredit cette déclaration, mais a plutôt dit que le client dominant, « des entreprises du secteur manufacturier et du commerce de détail dans le domaine des diamants et des bijoux », est averti et connaisseur.

Le degré de ressemblance entre les marques

[30]           Les acronymes GIA et GHI ne suggèrent rien. Si l’on considère les deux marques dans leur ensemble, en matière de présentation et de son, je considère qu’il y a suffisamment de différences entre elles. Quoiqu’il soit vrai qu’elles partagent deux mêmes lettres, la position différente du « I » a pour résultat une présentation et un son assez différents, et on ne devrait pas accorder un poids exagéré à l’utilisation commune du « G » comme premier élément puisqu’une lettre est intrinsèquement faible.  

[31]           Les mots de J. Cattanach, à la page 163 de GSW, sont applicables en l’espèce :    

En bref, lorsqu’un commerçant s’approprie des lettres de l’alphabet comme dessin-marque sans autre signe distinctif et tente d’empêcher d’autres commerçants de faire de même, la protection à donner à ce commerçant doit être plus réduite que dans le cas d’une marque de commerce unique et des différences relativement minimes suffisent à éviter la confusion. On s’attend normalement, dans ces circonstances, à ce que le public manifeste beaucoup plus de discernement…

Autres circonstances de l’espèce

[32]           Les parties ont soulevé d’autres circonstances pertinentes.

[33]           Mme Sanchez a établi que la Marque et GIA étaient enregistrées comme marques de commerce aux États-Unis d’Amérique. Cependant, la simple coexistence des marques dans des registres étrangers n’est pas pertinente pour la question de la probabilité de confusion au Canada [Vivat Holdings Ltd c. Levi Strauss & Co (2005), 41 CPR (4th) 8 (CF)].

[34]           La Requérante a produit en preuve des copies certifiées conformes de sept enregistrements de marques de commerce de tiers au Canada, et d’une demande d’enregistrement; les marques en question sont : AGS GEMOLOGICAL LABORATORIES & Design, AMERICAN GEM SOCIETY LABORATORIES, CI CANADIAN INSTITUTE OF GEMMOLOGY & Design, GS LABORATORIES & Design, I.G.I., INTERNATIONAL GEMOLOGICAL INSTITUTE, UGS, et UNIVERSAL GEMOLOGICAL SERVICES. Ces marques ne sont pas semblables à celles en question, mais ont vraisemblablement été présentées comme des cas analogues puisqu’elles comprennent des initiales ou les mots que représentent ces initiales.  

[35]           La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où il est possible d’en tirer des conclusions quant à l’état du marché, ce qui est impossible à moins d’avoir relevé un nombre considérable d’enregistrements. Sept marques enregistrées, au nom de quatre sociétés, ne permettent pas de tirer quelque conclusion que ce soit [Ports International Ltd c. Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc c. Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[36]           Mme Sanchez a également fourni des copies papier de 11 sites Web, mais un seul est un site « .ca » et il n’y a aucune preuve que des Canadiens ont visité l’un ou l’autre de ces sites.  

[37]           La Requérante affirme que les copies certifiées conformes et les sites Web présentés par Mme Sanchez montrent que « le public canadien a l’habitude de distinguer différentes marques et différents noms qui comprennent des mots comme GEMOLOGICAL ou GEMOLOGY, INSTITUTE, INTERNATIONAL, LABORATORIES et des acronymes dérivés de marques ou de noms qui comprennent ces mots » [paragraphe 57, plaidoyer écrit de la Requérante]. Cependant, la preuve ne permet pas de tirer cette conclusion.

Conclusion relative au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(d)

[38]           Après examen de l'ensemble des circonstances de l’espèce, j’ai conclu que, selon la prépondérance des probabilités, il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques en question. Quoiqu’il soit vrai que la majorité des circonstances listées en vertu de l’alinéa 6(5) sont favorables à l’Opposante, l’évaluation de la probabilité de confusion n’est pas un processus arithmétique. Dans la plupart des cas, c’est le degré de ressemblance entre les marques qui est le facteur déterminant en matière de confusion [Masterpiece; Beverley Bedding & Upholstery Co c. Regal Bedding & Upholstery Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145 (CF 1re inst.) au paragr. 149, conf. dans 60 CPR (2d) 70]. En présence de lettres de l’alphabet utilisées comme marques de commerce, on peut aisément s’attendre à ce que le client exerce un plus grand degré de discrimination selon la première impression. Ici, les différences entre les marques sont suffisantes pour éviter la confusion.

[39]           L’Opposante semble être plutôt préoccupée par la confusion qui pourrait être créée dans l’esprit d’un client non averti de rapports ou de certificats de classement des pierres précieuses. Il y a eu très peu de preuves en ce qui concerne cette portion de la clientèle/du commerce. Mme Norris a indiqué que ce type de clientèle n’est qu’une infime partie de la clientèle de l’Opposante et que l’Opposante a indiqué, au paragraphe 58 de son plaidoyer écrit, qu’« il est important de comprendre que le client porterait davantage attention aux marques de commerce du manufacturier ou du détaillant et que, bien que conscient de la nécessité d’un rapport de classement, il porterait moins attention à l’entité derrière le rapport de classement ».

[40]           Peu importe si je prends en considération le manufacturier, le détaillant ou l’individu, je suis convaincu que la confusion est peu probable. Ma conclusion concernant le risque de confusion n’était pas fondée sur le fait que le client soit est averti ou connaisseur en la matière, mais sur le fait qu’il y ait des différences importantes entre des marques intrinsèquement faibles. La preuve présentée est insuffisante et ne me permet pas de conclure que je devrais parvenir à une conclusion différente en ce qui concerne un client particulier comparativement à une société cliente.

[41]           Pour les raisons qui précèdent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(d) est repoussé dans son intégralité.

Autres motifs d’opposition

[42]           Comme mentionné précédemment, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(d) représente l’argument le plus solide de l’Opposante. Par conséquent, les autres motifs n’obtiennent pas gain de cause pour des raisons semblables à celles invoquées à l’égard du motif de l’alinéa 12(1)(d).

Conclusion

[43]           En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

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Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay

 

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