Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de J2 Fashion Inc. à la demande no 1262197 produite par Clio Apparel Inc. en vue de l’enregistrement de la marque de commerce KIER + J2 et Dessin      

 

 

 

[1]          Le 22 juin 2005, Clio Apparel Inc. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce KIER + J2 et Dessin (la Marque), basée :

1.                   sur l’emploi de la marque au Canada en liaison avec des chandails et des hauts pour femmes depuis au moins juin 2004;

2.                   sur l’emploi et l’enregistrement de la marque aux États‑Unis en liaison avec des vêtements pour femmes, nommément des pantalons, des chemisiers, des chandails, des hauts, des robes et des jupes;

3.                   sur l’emploi projeté de la marque en liaison avec des vêtements pour femmes, nommément des pantalons, des chemisiers, des robes et des jupes.

 

[2]          La Marque est reproduite ci‑dessous :

KIER + J2 & Design

 

[3]          La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 7 mars 2007.

 

[4]          J2 Fashion Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition le 7 mai 2007. Les motifs d’opposition invoqués sont prévus aux alinéas 38(2)a), b), c) et d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi).

 

[5]          La Requérante a produit et signifié une contre‑déclaration, dans laquelle elle a nié les allégations de l’Opposante.

 

[6]          Au soutien de son opposition, l’Opposante a produit les affidavits de Simon Cheung (le directeur de l’Opposante) et de Carrie A. Schulz (une agente de marques de commerce). 

 

[7]          La Requérante a choisi de ne pas produire de preuve et elle n’a pas contre‑interrogé les souscripteurs des affidavits produits par l’Opposante.

 

[8]          Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit. Une audience n’a pas été demandée.

 

Le fardeau de preuve

[9]          C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante doit toutefois s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant des éléments de preuve admissibles qui permettent de conclure raisonnablement que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la p. 298].

 

La probabilité de confusion 

[10]      Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante soutient que la principale question en litige en l’espèce est de savoir s’il existe une probabilité de confusion entre, d’une part, sa marque de commerce J2 et son nom commercial J2 Fashion Inc. et, d’autre part, la Marque faisant l’objet de la demande. Cette question est fondamentale pour chacun des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)b), c) et d). La date pertinente pour l’examen de chacun de ces motifs diffère. C’est à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)b) – la Marque ne serait pas enregistrable aux termes de l’alinéa 12(1)d) car elle crée de la confusion avec la marque déposée J2 – que la thèse de l’Opposante est la plus solide parce que la date pertinente pour l’examen ce motif est la date d’aujourd’hui.

 

Le test en matière de confusion

[11]     Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du vague souvenir. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce si l’emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de mener à la conclusion que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

[12]     Lorsqu’il applique le test, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment celles qui sont expressément mentionnées au paragraphe 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le même poids ne sera pas nécessairement attribué à chacun de ces critères. [Voir, de façon générale, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.).]

 

[13]     J’examinerai maintenant chacun de ces critères dans la mesure où ils ont trait au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d). L’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial au regard de cette disposition puisque l’enregistrement de la marque J2 – no LMC656371 – existe.

 

Alinéa 6(5)a) – Le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle chacune est devenue connue

[14]           Chacune des marques a un caractère distinctif inhérent puisque ni l’une ni l’autre n’a un lien direct avec les marchandises auxquelles elle est associée.

 

[15]           Une marque peut acquérir son caractère distinctif au moyen de son emploi ou de sa promotion. Or, je ne dispose d’aucune preuve de l’emploi ou de la promotion de la Marque de la Requérante. Par contre, l’Opposante a fait la preuve de l’emploi et de la promotion de sa marque au Canada. En particulier, entre mai 2003 et février 2008, les revenus tirés par l’Opposante des vêtements J2 ont dépassé 236 000 $ et une somme supérieure à 15 740 $ a été dépensée en publicité de la marque J2 à la radio, sur Internet et dans les journaux.

 

Alinéa 6(5)b) – La période pendant laquelle chaque marque a été en usage

[16]           Selon M. Cheung, l’Opposante a commencé à employer sa marque aussi tôt qu’en mai 2003, une date antérieure à la date de premier emploi revendiquée par la Requérante, soit juin 2004.

 

Alinéas 6(5)c) et d) – Le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

[17]      Les marques des deux parties sont associées à des vêtements. L’Opposante a enregistré la marque J2 en liaison avec des vêtements pour hommes, femmes et jeunes/adolescents, nommément chemises, hauts, chemisiers, pantalons, jeans, capris, jupes, shorts, jupes‑shorts, robes, chandails, cardigans, combinaisons‑pantalons, survêtements, sarongs, capes, gilets, manteaux, vestes, blazers, ponchos, maillots de bain; sous‑vêtements, nommément soutiens‑gorge, bustiers, slips, culottes, tongs, cache‑corsets, gilets de corps, mi‑chaussettes, caleçons, collants, pyjamas; articles chaussants, nommément chaussures, chaussettes, bottes, espadrilles, sandales, pantoufles, sandales de plage; accessoires, nommément chapeaux, casquettes, fedoras, tuques, visières, bandeaux, épingles à cheveux, foulards, bas de réchauffement, sacs à dos, sacs, bourses, sacs banane, sacs à main, fourre‑tout, portefeuilles, parapluies, serviettes, ceintures et gants. La preuve de l’Opposante laisse voir comment la marque J2 figure sur les étiquettes attachées aux divers types de vêtements, ainsi que dans les vitrines des boutiques de vêtements et sur les sacs dans lesquels les marchandises achetées sont placées.

 

[18]      Comme les marchandises des parties sont similaires, il est raisonnable de penser que leurs commerces le sont également.

 

Alinéa 6(5)e) – Le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[19]      Les marques se ressemblent parce que la Marque de la Requérante comprend la marque de l’Opposante. La preuve n’indique pas que J2 est un élément descriptif ou courant dans le domaine des vêtements; au contraire, il ressort du témoignage de Mme Schulz que, le 4 février 2008, la seule marque contenue dans le Registre des marques de commerce qui renfermait à la fois la lettre J et le chiffre 2 dans le domaine des vêtements, outre les marques en cause en l’espèce, est STUDIO J 24, qui appartient à un tiers.

 

[20]      Le premier élément d’une marque est souvent considéré comme étant plus important au regard du caractère distinctif. [Conde Nast Publications Inc. c. Union des Editions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.)] En l’espèce, la caractéristique commune n’est pas le premier élément de la Marque de la Requérante. Celle‑ci a fait précéder l’élément commun de « KIER + ». KIER est un mot distinctif, mais on pourrait considérer que le fait que la Requérante a choisi d’insérer le signe « + » entre KIER et J2 signifie qu’il y a eu fusion ou association entre KIER et J2.

 

[21]      Je n’ai pas oublié que la Marque de la Requérante est un dessin‑marque et que certaines personnes pourraient lire la dernière partie de la marque en disant « J au carré ». J’aimerais mentionner également que l’Opposante emploie parfois une version quelque peu différente de J2, où un chiffre 2 plus petit est placé en surimpression sur la partie inférieure droite du J.

 

[22]      Dans l’ensemble, les marques n’ont qu’un faible degré de ressemblance dans la présentation et dans le son, et un degré de ressemblance encore plus faible dans les idées qu’elles suggèrent.

 

La conclusion concernant la probabilité de confusion

[23]      Même si la ressemblance entre les marques est loin d’être importante, j’ai conclu que la Requérante ne s’était pas acquittée de son fardeau ultime de me convaincre, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y aura probablement pas de confusion quant à la source des marchandises portant les marques. Je m’appuie à cet égard sur le fait que les facteurs prévus aux alinéas 6(5)a) à d) sont nettement favorables à l’Opposante et sur le fait que la Requérante n’a pas produit de preuve ou de prétention au soutien de sa demande et qu’elle a incorporé la marque de l’Opposante à sa Marque d’une manière qui semble indiquer qu’il aurait pu y avoir une fusion avec la source des vêtements portant la marque J2. Par conséquent, le motif fondé sur l’alinéa 12(1)d) est accueilli.

 

[24]      La principale différence entre l’appréciation de chacun des facteurs prévus au paragraphe 6(5) à la date de premier emploi revendiquée par la Requérante et cette appréciation à la date de production de la demande (qui s’applique dans le cas des motifs fondés sur l’alinéa 38(2)c)) résiderait dans le fait qu’il n’y a aucune preuve particulière du caractère distinctif acquis par la marque de l’Opposante à ces dates pertinentes. Je conclus néanmoins que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau de persuasion.

 

Décision

[25]      En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi, pour les motifs exposés ci‑dessus.

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 16 OCTOBRE 2009.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

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